La situation du monde au début du vingt et unième siècle se caractérise par des transformations éthiques et politiques significatives, difficiles pourtant à penser selon les catégories conceptuelles habituelles. Par exemple, ce que l'on comprend sous le terme traditionnel de " politique " connaît un glissement dans le contexte mondial : l'espace politique dépend moins du territoire national, l'assise du pouvoir ne semble plus être forcément liée à la souveraineté, et les Etats rencontrent d'autres acteurs non étatiques sur la scène internationale. De même, il est plus difficile de penser l'éthique dans les sociétés pluralistes : l'articulation de l'éthique et du politique se fait plus complexe, on assiste à une recomposition des relations entre l'individuel et le collectif quand celui-ci se conjugue aussi à l'échelle du monde. Il y a donc nécessité, nous semble-t-il, de mener une réflexion sur ces catégories normatives dans l'optique d'un travail d'analyse, d'interprétation et de refonte. Le présent ouvrage a pour objectif d'entamer ce travail selon les ressources conjuguées de la philosophie morale et de la science politique.

Ethique et politique en contexte global

Bernard Williams (1929-2003), un des plus importants philosophes britanniques du XXe siècle, est surtout connu pour sa critique de l'utilitarisme et du kantisme. Cet ouvrage examine les tenants et les aboutissants de son rejet du " système de la moralité " moderne et offre une première présentation d'ensemble de sa pensée éthique. Son " éthique sans point de vue moral " scrute les phénomènes moraux en privilégiant le point de vue interne ou personnel de l'individu sur ses actes, son identité et sa propre vie ; elle s'inspire en cela largement des Grecs et de Nietzsche. Williams demeure pourtant attaché aux idéaux du libéralisme et à la visée du vrai en philosophie. La tentative de concilier ces positions avec l'échec annoncé de la morale marque toute son entreprise.

Une éthique sans point de vue moral

L'enseignement de l'éthique possède une spécificité qui est reflétée dans le présent ouvrage.
D'une part, il s'agit de transmettre des connaissances de base en philosophie morale. D'autre part, l'enseignement doit contribuer à la formation des sujets moraux, c'est-à-dire à l'acquisition de compétences en raisonnement pratique pour analyser des situations problématiques dans leurs dimensions personnelle, sociale et politique. La démarche intègre ainsi la double dimension théorique et pratique qui forme le ressort même de l'éthique aujourd'hui.
Éthique : Histoire, politique, application est divisé en trois parties. D'abord, une partie historique permet à l'étudiant de se familiariser avec les grandes traditions éthiques de la philosophie occidentale fondées par Aristote, le christianisme, Kant, Mill et Nietzsche. Ces grandes traditions sont ensuite actualisées et discutées dans la deuxième partie à l'intérieur de quatre grands débats politiques contemporains alimentés par Rawls (le libéralisme), Nozick (le néo-libéralisme), Nielsen (l'égalitarisme radical) et Habermas (le consensualisme).
Enfin, la troisième partie est consacrée au raisonnement moral en éthique de la science et de la technique, en éthique des affaires, en bioéthique et en éthique de l'environnement. Le manuel contient également : un chapitre sur les principales conceptions politiques ; un chapitre sur la démarche éthique, qui fournit à l'étudiant des moyens de mettre en pratique le raisonnement éthique ; des extraits de texte, des activités d'apprentissage et des lectures suggérées en fin de chapitre ; au fil des pages, un glossaire qui comprend les principales notions éthiques ainsi qu'une notice bibliographique sur les philosophes cités.

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