Alors que le retour de la guerre en Europe au XXIe siècle démontre le caractère désormais central de la communication dans le processus de mobilisation des opinions publiques et des moyens de l'affrontement, la guerre coloniale en Indochine au milieu du siècle précédent est le moment d'apprentissage d'une arme alors nouvelle : l'information. En contexte démocratique d'autonomie des journaux, l'armée française apprend non plus à taire les événements mais à saturer l'espace médiatique de son propre point de vue. Pour cela, elle développe des usages de coopération avec les médias et leurs journalistes, afin de les abreuver de faits et de moyens. Elle se fait incontournable sinon indispensable. Elle invente aussi ses propres moyens de production de photographies et de films qu'elle propose gratuitement aux journaux et aux actualités cinématographiques en France et à l'étranger. Ses propres reporters, plus en guerre que de guerre, véritables soldats de l'information, deviennent les yeux de l'opinion, tant leurs images captées au plus proche des combats sont diffusées par les médias, sans que ceux-ci disent à leurs publics l'origine institutionnelle et donc orientée de ces documents souvent remarquables. En Indochine se construit alors une culture partagée par les militaires et les journalistes, une expérience commune de coopération sur les terrains de guerre et à travers les supports médiatiques. Ainsi, mieux que la propagande, l'information journalistique devient une arme.
À PROPOS DES AUTEURS
Denis Ruellan est chercheur en sciences de l'information et de la communication.Josiane Ruellan est chercheure en didactique.

Reporters en guerre

En centre Bretagne, Trémargat et ses 200 habitants sont l'objet d'une attention médiatique sans commune mesure pour une commune rurale d'une telle importance. France-Inter, France-Culture, Rue89, Le Télégramme, etc. se sont tour à tour penchés sur le renversement inattendu de sa courbe démographique, le dynamisme de ses activités culturelles, le modèle économique orienté vers le bio et les circuits courts, son fonctionnement basé sur la participation active d'une majorité des habitants et son vote écologiste. Trémargat en vies entre dans le détail de cette originalité. Il commence par revenir sur la trajectoire d'une exploitation laitière devenue ferme pédagogique, accueillant depuis plus de vingt-cinq ans des enfants et des adultes pour vivre la liaison entre l'utilisation du milieu naturel et sa préservation. Mobilisant des données historiques, sociologiques, politiques, culturelles, agricoles, géologiques à propos de la région de Trémargat, le Kreiz Breizh, le livre étend le regard pour analyser comment l'évolution particulière de la commune tient à un environnement et à une combinaison de facteurs. Dirigé et rédigé à trois (Fanch, Josiane et Denis Ruellan), le livre fait appel à des contributeurs fins connaisseurs de la région : le géographe et historien Jean-Jacques Monnier, le journaliste et sociologue Yvon Rochard, la photographe Isabelle Vaillant, le dessinateur Alain Goutal, le peintre Fanch Vidament. Il associe textes et images, varie les regards et les niveaux d'écriture, dans une présentation originale de type mook, à la croisée du livre et du journal, mise en page par Yann Le Sager.

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