"J'ai entrepris ce livre parce que je savais que les affirmations courantes sur la laïcité — l'idée selon laquelle elle est nécessairement synonyme d'émancipation des femmes — n'étaient tout simplement pas vraies. Ayant étudié l'histoire du genre et des femmes en France, j'étais stupéfaite d'entendre des politiques prétendre que l'égalité de genre est une valeur primordiale de la démocratie au moins depuis la Révolution française. En réalité, l'égalité de genre est absente des documents fondateurs des démocraties occidentales, même lorsque celles-ci invoquent les principes universels des Droits de l'homme. Elle n'est devenue une valeur centrale pour les politiques français que depuis le début de ce siècle, et seulement pour marquer une opposition à l'islam. C'est ce qui m'est apparu clairement en faisant des recherches sur la loi de 1905 de séparation de l'Eglise et de l'Etat en France".

La religion de la laïcité

« Ce livre ne traite pas des musulmans de France : il porte sur la perception dominante des musulmans dans le paysage français. Je m’intéresse à la manière dont le voile est devenu un écran sur lequel sont projetés des images d’étrangeté et des fantasmes de dangerosité – dangerosité pour le tissu social français et pour l’avenir de la nation républicaine. Je m’intéresse, en outre, à la manière dont la représentation d’un « autre » homogène et dangereux est venue conforter une vision mythique de la République française une et indivisible. J’explore les multiples facteurs qui alimentent ces représentations fantasmatiques : racisme, culpabilité et peur postcoloniales, idéologies nationalistes, notamment le républicanisme, le sécularisme, l’individualisme abstrait et, tout particulièrement, les normes françaises en matière de conduite sexuelle, considérées comme étant à la fois naturelles et universelles. »Joan W. Scott est historienne, professeure à l’Institute for Advanced Study de Princeton. Son travail, principalement consacré à la France, interroge la catégorie de genre et la différence des sexes. Elle a notamment publié en français Théorie critique de l’histoire (2009) et De l’utilité du genre (2012).

La politique du voile

Qu'est-ce que le genre ? Comment les identités sexuelles et les rapports entre hommes et femmes sont-ils construits, et comment se transforment-ils ? Quel rôle jouent, dans ces processus, la politique et les mobilisations collectives, l'économique et le social, mais aussi le langage et l'inconscient ? Historienne mondialement reconnue, Joan W. Scott a imposé l'idée selon laquelle le genre ne constitue pas seulement un domaine d'investigation : c'est un instrument critique destiné à transformer la réflexion dans tous les secteurs. Pour elle, il se situe au cour de toute relation de pouvoir et traverse l'ensemble des dynamiques à l'ouvre dans la société. Ce volume réunit les grands essais de Joan W. Scott sur le genre publiés entre 1986 et 2011. Des textes qui renouvellent l'analyse de questions aussi diverses que la laïcité, la démocratie, la représentation de l'État et de l'identité nationale, ou encore celle du marxisme et des classes sociales. À l'heure où les études sur le genre se multiplient, Joan W. Scott s'interroge sur l'avenir du féminisme. Elle s'inquiète de la manière dont cette catégorie est si souvent vidée de ses implications radicales. Et montre comment elle peut continuer à nous inciter à penser autrement.Joan W. Scott est professeure à l'Institute for Advanced Study de Princeton (États-Unis). Elle est l'auteure notamment de La Citoyenne paradoxale (Albin Michel, 1998) et de Théorie critique de l'histoire (Fayard, 2009).Traduit de l'anglais (États-Unis) par Claude Servan-Schreiber.

De l'utilité du genre

Qu'est-ce que le genre ? Comment les identites sexuelles et les rapports entre hommes et femmes sont-ils construits, et comment se transforment-ils ? Quel role jouent, dans ces processus, la politique et les mobilisations collectives, l'economique et le social, mais aussi le langage et l'inconscient ? Historienne mondialement reconnue, Joan W. Scott a impose l'idee selon laquelle le genre ne constitue pas seulement un domaine d'investigation: c'est un instrument critique destine a transformer la reflexion dans tous les secteurs. Pour elle, il se situe au c ur de toute relation de pouvoir et traverse l'ensemble des dynamiques a l' uvre dans la societe. Ce volume reunit les grands essais de Joan W. Scott sur le genre publies entre 1986 et 2011. Ces textes renouvellent ainsi l'analyse de questions aussi diverses que le secularisme, la laicite, la democratie, la representation de l'Etat et de l'identite nationale, ou encore celle du marxisme et des classes sociales. A l'heure ou les etudes sur le genre se multiplient, Joan W. Scott s'interroge sur l'avenir du feminisme. Elle s'inquiete de la maniere dont cette categorie est si souvent videe de ses implications radicales. Et montre comment elle peut continuer a nous inciter a penser autrement."

Dans la continuité de son précédent livre, La Citoyenne paradoxale, Joan W Scott étudie la manière dont la question de la différence des sexes a été récemment rouverte, analysée et traitée dans un cadre politique et philosophique propre à la théorie républicaine française. L'émergence, dans les années 1992-1993 d'un Mouvement pour la parité, dont le but a été d'assurer aux femmes l'égal accès à la représentation politique, lui permet de montrer les derniers avatars d'une tension biséculaire qui s'est instaurée entre les exigences de groupes ou de catégories exclues en droit d'abord, en fait ensuite, de la représentation nationale comme de la réalité du pouvoir politique, et la nécessaire adaptation des institutions publiques aux idéaux démocratiques. A travers une exploration érudite des inclusions/exclusions propres à l'histoire des institutions politiques françaises, à travers également l'étude minutieuse des textes et des actions qui ont jalonné les discussions sur la parité, le livre de Joan W Scott propose une réflexion novatrice et passionnante sur la crise périodiquement recommencée de l'universalité " à la française ", et sur les solutions tant bien que mal adoptées par un système politique confronté aux contraintes de son historicité.

Parité ! - L'universel et la différence des sexes

Je pense qu'il y a un manque de respect pour l'esprit que Trump, par exemple, illustre. C'est une sorte de pensée stratégique qui est plus sur la vigne que sur l'intellect. Son attaque contre les "élites" est censée rallier sa base pour se rebeller contre les pouvoirs en place - à Washington en particulier. Je ne pense pas qu'il se soucie beaucoup de l'enseignement supérieur en soi; Il veut juste démontrer que l'apprentissage n'est pas nécessaire pour les affaires ou le gouvernement. Il veut élever la médiocrité à une vertu héroïque.

Je pense que ce qui est souligné par les Afro-Américains, c'est que, de l'esclavage, ils ont vécu dans une supposée démocratie qui les traite comme moins que les autres citoyens, moins que les blancs de la société. Et je pense que souligner qu'il existe des structures de discrimination dans la société, des structures racistes profondément enracinées, qui séparent le logement, qui envoient des enfants noirs à des écoles mal équipées, qui discriminent sur le lieu de travail - ce sont des vérités sur notre société qui doivent être face.

Il y a des étudiants dont l'éducation religieuse va les mettre mal à l'aise dans une classe où certains types d'idées laïques sont présentés. Il y a des étudiants dont les idées sur l'histoire ou la sexualité vont être mis au défi de remettre en question, pour affirmer ou changer ces idées. Cela ne signifie pas qu'ils ne devraient pas leur être exposés; C'est pourquoi ils sont à l'école. C'est pourquoi ils viennent à l'université: apprendre à bien penser et à bien penser au matériel avec lequel ils sont présentés. Mais c'est l'enseignant qui est certifié pour leur apprendre à le faire.

La liberté d'expression consiste à exprimer votre opinion, aussi mauvaise ou bonne, aussi bonne ou mal, et de pouvoir la défendre et de le discuter et de se disputer avec elle dans les forums publics. Mais ce n'est pas de cela que parle la liberté académique. Ce n'est pas de cela qu'il s'agit de la classe.

L'écart croissant entre riche et pauvre, le manque de préoccupation apparente pour la santé et le bien-être des gens ordinaires, les salaires obscènes réalisés par les PDG qui augmentent les bénéfices en déplaçant leurs plantes dans des endroits où le travail est bon marché - c'est là que le problème est , pas dans les écoles, les collèges et les universités.

Il y a en fait une merveilleuse citation de Stanley Fish, qui est parfois très polémique et avec qui je ne suis pas toujours d'accord. Il écrit: «La liberté d'expression n'est pas une valeur académique. La précision de la parole est une valeur académique; l'exhaustivité de la parole est une valeur académique; la pertinence de la parole est une valeur académique. Chacun d'eux est directement lié à l'objectif de l'enquête académique: Obtenir une question de fait. "

Les élections de Trump l'ont mis au premier plan et ont permis à un certain nombre de groupes différents dont le but est d'empêcher l'enseignement de la pensée critique pour lancer des attaques directes.

La liberté d'expression est ce que nous avons tous et est garanti par le premier amendement de la Constitution américaine. La liberté académique fait référence à ce qui se passe à l'université, en particulier en classe, et à l'importance que l'enseignant ait le droit d'enseigner et de partager ce qu'il a appris, a prouvé sa compétence pour enseigner, après avoir passé une série de tests et des certifications, notamment la recherche et l'écriture pour démontrer ses capacités et ses connaissances.

La chose à propos de l'éducation - et pourquoi je suis si passionné par la position et le statut de l'université - c'est qu'il est censé enseigner aux citoyens comment mieux penser, comment penser de manière critique, comment dire la vérité à partir du mensonge, comment faire un jugement sur le moment où ils sont mentis et dupés et quand ils ne le sont pas, comment évaluer l'enseignement scientifique. Perdre cette formation des citoyens est une route extrêmement dangereuse à suivre.

Nous avons de plus en plus perdu ce sens de la communauté, de l'idée qu'il y a quelque chose que nous contribuons et que nous bénéficions est appelé le bien commun.

Tout mon travail d'une manière ou d'une autre parle de problèmes politiques selon l'éducation que j'avais, qui était profondément enracinée dans les principes.

La raison pour laquelle vous allez à l'université est d'être enseigné, est d'apprendre à réfléchir plus clairement, de remettre en question les idées avec lesquelles vous êtes venu et de réfléchir à ce que ce soient les idées que vous voudrez toujours tenir. Une éducation universitaire à son meilleur est une période de confusion et de questionnement, un moment pour apprendre à réfléchir clairement aux valeurs et aux principes qui guident la vie. Bien sûr, c'est aussi le moment d'acquérir les compétences nécessaires aux emplois dans le «monde réel», mais la partie de devenir adulte avec des idéaux et une intégrité est également importante.

Je ne pense pas que les collèges soient des espaces sûrs. C'est une chose d'avoir une maison de fraternité ou un centre communautaire où les étudiants peuvent aller parler de leurs expériences partagées. Mais c'est une autre chose d'avoir des espaces sûrs dans le sens où l'université leur offre une protection contre ce qu'ils ont à vivre et à trouver des moyens de protester et de résister.

Nous avons de plus en plus perdu ce sens de la communauté, de l'idée qu'il y a quelque chose que nous contribuons et que nous bénéficions est appelé le bien commun. Je pense que je daterais avec les débuts de cette perte à l'administration Reagan et à l'idée que nous étions tous des individus séparés qui ne devaient que nous intéresser à nous-mêmes.

Le bien commun est la notion de responsabilité collective partagée et de réciprocité. C'est que nous avons perdu.

Ceux qui s'attendent à ce que des moments de changement soient à l'aise et sans conflit n'ont pas appris leur histoire.

Internet a rendu possible une pratique effrayante des menaces et de l'intimidation - menaces de violence et de mort indicibles.

Si les étudiants ne veulent pas en savoir plus sur l'évolution, ils ne devraient pas être dans le cours. Un cours de biologie qui enseigne le créationnisme n'est pas un cours de science, c'est un cours de religion. Ainsi, les étudiants exigeant que le créationnisme soit accordé dans ce cours est hors ligne et nie la liberté académique du professeur. Ils remettent en question la base scientifique du matériel présenté. Et les étudiants ne sont pas en mesure de le faire.

Richard Hofstadter, dans son célèbre livre qui a été écrit à l'époque de la période McCarthy dans les années 1950 et 1960, l'anti-intellectualisme dans la vie américaine, parle de la haine profonde que certains Américains avaient pour ce qu'ils considèrent comme une activité intellectuelle élitiste. Je pense que c'est ce qui se passe maintenant.

Je pense que la colère qui s'adresse aux universités et aux soi-disant élites dans les universités est en fait une colère qui est déplacée des politiciens (qui promettent d'améliorer les choses et de ne jamais faire), des employeurs, c'est une colère contre le système économique qui a mis Beaucoup de ces personnes parmi le type de travail qui leur étaient si satisfaisantes.

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