splash screen icon Lenndi
splash screen name leendi

Le poète

135 poésies en cours de vérification
Le poète

Poésies de la collection le poète

    G

    Grégory Rateau

    @gregoryRateau

    L’autre La nuit je l’entends attablé se consumant à mon bureau les touches craquent il redouble de violence je le sens à la lueur fébrile de l’aube essayer de gagner du temps sur moi ses traits sont presque identiques aux miens l’obscurité allonge un peu plus ses mains mais son âme coule aux bouts de ses doigts tandis que la mienne végète pas un mot qui ne soit éprouvé le manuscrit que je récupère au petit matin est le testament d’un damné

    en cours de vérification

    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Chant de l’honneur Le poète Je me souviens ce soir de ce drame indien Le Chariot d’Enfant un voleur y survient Qui pense avant de faire un trou dans la muraille Quelle forme il convient de donner à l’entaille Afin que la beauté ne perde pas ses droits Même au moment d’un crime Et nous aurions je crois À l’instant de périr nous poètes nous hommes Un souci de même ordre à la guerre où nous sommes Mais ici comme ailleurs je le sais la beauté N’est la plupart du temps que la simplicité Et combien j’en ai vu qui morts dans la tranchée Étaient restés debout et la tête penchée S’appuyant simplement contre le parapet J’en vis quatre une fois qu’un même obus frappait Ils restèrent longtemps ainsi morts et très crânes Avec l’aspect penché de quatre tours pisanes Depuis dix jours au fond d’un couloir trop étroit Dans les éboulements et la boue et le froid Parmi la chair qui souffre et dans la pourriture Anxieux nous gardons la route de Tahure J’ai plus que les trois cœurs des poulpes pour souffrir Vos cœurs sont tous en moi je sens chaque blessure O mes soldats souffrants ô blessés à mourir Cette nuit est si belle où la balle roucoule Tout un fleuve d’obus sur nos têtes s’écoule Parfois une fusée illumine la nuit C’est une fleur qui s’ouvre et puis s’évanouit La terre se lamente et comme une marée Monte le flot chantant dans mon abri de craie Séjour de l’insomnie incertaine maison De l’Alerte la Mort et la Démangeaison LA TRANCHEE O jeunes gens je m’offre à vous comme une épouse Mon amour est puissant j’aime jusqu’à la mort Tapie au fond du sol je vous guette jalouse Et mon corps n’est en tout qu’un long baiser qui mord LES BALLES De nos ruches d’acier sortons à tire-d’aile Abeilles le butin qui sanglant emmielle Les doux rayons d’un jour qui toujours renouvelle Provient de ce jardin exquis l’humanité Aux fleurs d’intelligence à parfum de beauté LE POETE Le Christ n’est donc venu qu’en vain parmi les hommes Si des fleuves de sang limitent les royaumes Et même de l’Amour on sait la cruauté C’est pourquoi faut au moins penser à la Beauté Seule chose ici-bas qui jamais n’est mauvaise Elle porte cent noms dans la langue française Grâce Vertu Courage Honneur et ce n’est là Que la même Beauté LA FRANCE Poète honore-la Souci de la Beauté non souci de la Gloire Mais la Perfection n’est-ce pas la Victoire LE POETE O poètes des temps à venir ô chanteurs Je chante la beauté de toutes nos douleurs J ’en ai saisi des traits mais vous saurez bien mieux Donner un sens sublime aux gestes glorieux Et fixer la grandeur de ces trépas pieux L’un qui détend son corps en jetant des grenades L’ autre ardent à tirer nourrit les fusillades L’autre les bras ballants porte des seaux de vin Et le prêtre-soldat dit le secret divin J’interprète pour tous la douceur des trois notes Que lance un loriot canon quand tu sanglotes Qui donc saura jamais que de fois j’ai pleuré Ma génération sur ton trépas sacré Prends mes vers ô ma France Avenir Multitude Chantez ce que je chante un chant pur le prélude Des chants sacrés que la beauté de notre temps Saura vous inspirer plus purs plus éclatants Que ceux que je m’efforce à moduler ce soir En l’honneur de l’Honneur la beauté du Devoir 17 décembre 1915

    en cours de vérification

    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    La ceinture La muse Depuis longtemps déjà je t’ai laissé tout seul Cependant me voici t’apportant mon mensonge Poète sois joyeux tu sembles un linceul Regarde-moi c’est moi je ne suis pas un songe Le poète Ô muse je tremblais de ne plus te revoir Voici ton doux regard voici ta robe ouverte Et ta ceinture enfin qui me fait concevoir Un exquis dénouement devant cette mer verte L’Amour Va ne t’excite pas ta Muse qui revient Ne t’aime maintenant plus qu’à travers l’espace Mais prends-lui deux baisers comme un suprême bien Et sois content surtout puisque tout lasse et passe Le poète Mais Amour tu sais bien que je suis maladroit Dérobe sa ceinture et m’en fais ma couronne Je me contenterai de penser à l’endroit Où pressait ce ruban sur sa belle personne La muse Poète me voici j’ai deux baisers pour toi Je t’aimerais toujours d’un amour platonique Mais toi tu m’appartiens je suis ta seule loi Et reçois ma ceinture en un don magnifique Le poète J’adore ta ceinture ô Muse mon amour Elle est ronde comme le monde et ta mamelle Elle est ouverte au centre ainsi ta bouche pour Rire et longue comme un vers à rime éternelle Elle est mon art elle est ma vie et ma douleur Elle est l’illusion elle est toute lumière Elle la grande beauté la multiple couleur Et ma muse en second puisque part le première Elle est ta forme aussi car elle a pris ton corps Elle a saisi ton corps comme une belle proie Va-t’en va-t’en là-bas vers les Ests et les Nords Où t’entraînent l’Amour la Bravoure et la Joie Et quand je m’en irai là-bas ou bien ailleurs Ma muse me suivra ta ceinture idéale Irréel arc-en-ciel aux sept belles couleurs Qui décorent ce soir le ciel sur la mer pâle La muse Adieu je pars adieu tu m’attends à jamais L’Amour s’impatiente et la nuit va descendre Le poète Eh ! que m’importe à moi puisque moi je t’aimais Ce soir j’ai dénoué ta ceinture à jamais Et toi tu n’as de moi pas même un brin de cendre L’Amour Espère dans l’Amour Poète il reviendra Te ramener ta Muse avec sa robe ouverte Ce que l’Amour a dit Poète il le fera Adieu la nuit descend et la mer n’est plus verte Le poète Adieu petit Amour petit enfant ingrat Enfin me voici seul dans la nuit incolore Toi qui n’existes pas CEINTURE je t’adore Nîmes, le 29 mars 1915

    en cours de vérification

    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    La tortue Du Thrace magique, ô délire ! Mes doigts sûrs font sonner la lyre. Les animaux passent aux sons De ma tortue, de mes chansons.

    en cours de vérification

    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Le brasier J’ai jeté dans le noble feu Que je transporte et que j’adore De vives mains et même feu Ce Passé ces têtes de morts Flamme je fais ce que tu veux Le galop soudain des étoiles N’étant que ce qui deviendra Se mêle au hennissement mâle Des centaures dans leurs haras Et des grand’plaintes végétales Où sont ces têtes que j’avais Où est le Dieu de ma jeunesse L’amour est devenu mauvais Qu’au brasier les flammes renaissent Mon âme au soleil se dévêt Dans la plaine ont poussé des flammes Nos cœurs pendent aux citronniers Les têtes coupées qui m’acclament Et les astres qui ont saigné Ne sont que des têtes de femmes Le fleuve épinglé sur la ville T’y fixe comme un vêtement Partant à l’amphion docile Tu subis tous les tons charmants Qui rendent les pierres agiles Je flambe dans le brasier à l’ardeur adorable Et les mains des croyants m’y rejettent multiple innombrablement Les membres des intercis flambent auprès de moi Éloignez du brasier les ossements Je suffis pour l’éternité à entretenir le feu de mes délices Et des oiseaux protègent de leurs ailes ma face et le soleil Ô Mémoire Combien de races qui forlignent Des Tyndarides aux vipères ardentes de mon bonheur Et les serpents ne sont-ils que les cous des cygnes Qui étaient immortels et n’étaient pas chanteurs Voici ma vie renouvelée De grands vaisseaux passent et repassent Je trempe une fois encore mes mains dans l’Océan Voici le paquebot et ma vie renouvelée Ses flammes sont immenses Il n’y a plus rien de commun entre moi Et ceux qui craignent les brûlures Descendant des hauteurs où pense la lumière Jardins rouant plus haut que tous les ciels mobiles L’avenir masqué flambé en traversant les cieux Nous attendons ton bon plaisir ô mon amie J’ose à peine regarder la divine mascarade Quand bleuira sur l’horizon la Désirade Au delà de notre atmosphère s’élève un théâtre Que construisit le ver Zamir sans instrument Puis le soleil revint ensoleiller les places D’une ville marine apparue contremont Sur les toits se reposaient les colombes lasses Et le troupeau de sphinx regagne la sphingerie À petits pas Il orra le chant du pâtre toute la vie Là-haut le théâtre est bâti avec le feu solide Comme les astres dont se nourrit le vide Et voici le spectacle Et pour toujours je suis assis dans un fauteuil Ma tête mes genoux mes coudes vain pentacle Les flammes ont poussé sur moi comme des feuilles Des acteurs inhumains claires bêtes nouvelles Donnent des ordres aux hommes apprivoisés Terre Ô Déchirée que les fleuves ont reprisée J’aimerais mieux nuit et jour dans les sphingeries Vouloir savoir pour qu’enfin on m’y dévorât

    en cours de vérification

    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Le cheval Mes durs rêves formels sauront te chevaucher, Mon destin au char d’or sera ton beau cocher Qui pour rênes tiendra tendus à frénésie, Mes vers, les parangons de toute poésie.

    en cours de vérification

    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Le larron Choeur Maraudeur étranger malheureux malhabile Voleur voleur que ne demandais-tu ces fruits Mais puisque tu as faim que tu es en exil Il pleure il est barbare et bon pardonnez-lui LARRON Je confesse le vol des fruits doux des fruits mûrs Mais ce n’est pas l’exil que je viens simuler Et sachez que j’attends de moyennes tortures Injustes si je rends tout ce que j’ai volé VIEILLARD Issu de l’écume des mers comme Aphrodite Sois docile puisque tu es beau Naufragé Vois les sages te font des gestes socratiques Vous parlerez d’amour quand il aura mangé CHŒUR Maraudeur étranger malhabile et malade Ton père fut un sphinx et ta mère une nuit Qui charma de lueurs Zacinthe et les Cyclades As-tu feint d’avoir faim quand tu volas les fruits LARRON Possesseurs de fruits mûrs que dirai-je aux insultes Ouïr ta voix figure en nénie ô maman Puisqu’ils n’eurent enfin la pubère et l’adulte Du prétexte sinon que s’aimer nuitamment Il y avait des fruits tout ronds comme des âmes Et des amandes de pomme de pin jonchaient Votre jardin marin où j’ai laissé mes rames Et mon couteau punique au pied de ce pêcher Les citrons couleur d’huile et à saveur d’eau froide Pendaient parmi les fleurs des citronniers tordus Les oiseaux de leur bec ont blessé vos grenades Et presque toutes les figues étaient fendues L’ACTEUR Il entra dans la salle aux fresques qui figurent L’inceste solaire et nocturne dans les nues Assieds-toi là pour mieux ouïr les voix ligures Au son des cinyres des Lydiennes nues Or les hommes ayant des masques de théâtre Et les femmes ayant des colliers où pendait La pierre prise au foie d’un vieux coq de Tanagre Parlaient entre eux le langage de la Chaldée Les autans langoureux dehors feignaient l’automne Les convives c’étaient tant de couples d’amants Qui dirent tour à tour Voleur je te pardonne. Reçois d’abord le sel puis le pain de froment Le brouet qui froidit sera fade à tes lèvres Mais l’outre en peau de bouc maintient frais le vin blanc Par ironie veux-tu qu’on serve un plat de fèves Ou des beignets de fleurs trempés dans du miel blond Une femme lui dit Tu n’invoques personne Crois-tu donc au hasard qui coule au sablier Voleur connais-tu mieux les lois malgré les hommes Veux-tu le talisman heureux de mon collier Larron des fruits tourne vers moi tes yeux lyriques Emplissez de noix la besace du héros Il est plus noble que le paon pythagorique Le dauphin la vipère mâle ou le taureau Qui donc es-tu toi qui nous vins grâce au vent scythe Il en est tant venu par la route ou la mer Conquérants égarés qui s’éloignaient trop vite Colonnes de clins d’yeux qui fuyaient aux éclairs CHŒUR Un homme bègue ayant au front deux jets de flammes Passa menant un peuple infime pour l’orgueil De manger chaque jour les cailles et la manne Et d’avoir vu la mer ouverte comme un œil Les puiseurs d’eau barbus coiffés de bandelettes Noires et blanches contre les maux et les sorts Revenaient de l’Euphrate et les yeux des chouettes Attiraient quelquefois les chercheurs de trésors Cet insecte jaseur ô poète barbare Regagnait chastement à l’heure d’y mourir La forêt précieuse aux oiseaux gemmipares Aux crapauds que l’azur et les sources mûrirent. Un triomphe passait gémir sous l’arc-en-ciel Avec de blêmes laurés debout dans les chars Les statues suant les scurriles les agnelles Et l’angoisse rauque des paonnes et des jars Les veuves précédaient en égrenant des grappes Les évêques noirs révérant sans le savoir Au triangle isocèle ouvert au mors des chapes Pallas et chantaient l’hymne à la belle mais noire Les chevaucheurs nous jetèrent dans l’avenir Les alcancies pleines de cendre ou bien de fleurs Nous aurons des baisers florentins sans le dire Mais au jardin ce soir tu vins sage et voleur Ceux de ta secte adorent-ils un signe obscène ; Belphégor le soleil le silence ou le chien Cette furtive ardeur des serpents qui s’entr’aiment L’ACTEUR Et le larron des fruits cria Je suis chrétien CHŒUR Ah ! Ah ! les colliers tinteront cherront les masques Va-t’en va-t’en contre le feu l’ombre prévaut Ah ! Ah ! le larron de gauche dans la bourrasque Rira de toi comme hennissent les chevaux FEMME Larron des fruits tourne vers moi tes yeux lyriques Emplissez de noix la besace du héros Il est plus noble que le paon pythagorique Le dauphin la vipère mâle ou le taureau CHŒUR Ah ! Ah ! nous secouerons toute la nuit les sistres La voix ligure était-ce donc un talisman Et si tu n’es pas de droite tu es sinistre Comme une tache grise ou le pressentiment Puisque l’absolu choit la chute est une preuve Qui double devient triple avant d’avoir été Nous avouons que les grossesses nous émeuvent Les ventres pourront seuls nier l’aséité Vois les vases sont pleins d’humides fleurs morales Va-t’en mais dénudé puisque tout est à nous Ouïs du chœur des vents les cadences plagales Et prends l’arc pour tuer l’unicorne ou le gnou L’ombre équivoque et tendre est le deuil de ta chair Et sombre elle est humaine et puis la nôtre aussi Va-t’en le crépuscule a des lueurs légères Et puis aucun de nous ne croirait tes récits Il brillait et attirait comme la pantaure Que n’avait-il la voix et les jupes d’Orphée Et les femmes la nuit feignant d’être des taures L’eussent aimé comme on l’aima puisqu’en effet Il était pâle il était beau comme un roi ladre Que n’avait-il la voix et les jupes d’Orphée La pierre prise au foie d’un vieux coq de Tanagre Au lieu du roseau triste et du funèbre faix Que n’alla-t-il vivre à la cour du roi d’Édesse Maigre et magique il eût scruté le firmament Pâle et magique il eût aimé des poétesses Juste et magique il eût épargné les démons Va-t’en errer crédule et roux avec ton ombre Soit ! la triade est mâle et tu es vierge et froid Le tact est relatif mais la vue est oblongue Tu n’as de signe que le signe de la croix

    en cours de vérification

    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Les fiançailles Le printemps laisse errer les fiancés parjures Et laisse feuilloler longtemps les plumes bleues Que secoue le cyprès où niche l’oiseau bleu Une Madone à l’aube a pris les églantines Elle viendra demain cueillir les giroflées Pour mettre aux nids des colombes qu’elle destine Au pigeon qui ce soir semblait le Paraclet Au petit bois de citronniers s’enamourèrent D’amour que nous aimons les dernières venues Les villages lointains sont comme leurs paupières Et parmi les citrons leurs cœurs sont suspendus Mes amis m’ont enfin avoué leur mépris Je buvais à pleins verres les étoiles Un ange a exterminé pendant que je dormais Les agneaux les pasteurs des tristes bergeries De faux centurions emportaient le vinaigre Et les gueux mal blessés par l’épurge dansaient Étoiles de l’éveil je n’en connais aucune Les becs de gaz pissaient leur flamme au clair de lune Des croque-morts avec des bocks tintaient des glas À la clarté des bougies tombaient vaille que vaille Des faux-cols sur des flots de jupes mal brossées Des accouchées masquées fêtaient leurs relevailles La ville cette nuit semblait un archipel Des femmes demandaient l’amour et la dulie Et sombre sombre fleuve je me rappelle Les ombres qui passaient n’étaient jamais jolies Je n’ai plus même pitié de moi Et ne puis exprimer mon tourment de silence Tous les mots que j’avais à dire se sont changés en étoiles Un Icare tente de s’élever jusqu’à chacun de mes yeux Et porteur de soleils je brûle au centre de deux nébuleuses Qu’ai-je fait aux bêtes théologales de l’intelligence Jadis les morts sont revenus pour m’adorer Et j’espérais la fin du monde Mais la mienne arrive en sifflant comme un ouragan J’ai eu le courage de regarder en arrière Les cadavres de mes jours Marquent ma route et je les pleure Les uns pourrissent dans les églises italiennes Ou bien dans de petits bois de citronniers Qui fleurissent et fructifient En même temps et en toute saison D’autres jours ont pleuré avant de mourir dans des tavernes Où d’ardents bouquets rouaient Aux yeux d’une mulâtresse qui inventait la poésie Et les roses de l’électricité s’ouvrent encore Dans le jardin de ma mémoire Pardonnez-moi mon ignorance Pardonnez-moi de ne plus connaître l’ancien jeu des vers Je ne sais plus rien et j’aime uniquement Les fleurs à mes yeux redeviennent des flammes Je médite divinement Et je souris des êtres que je n’ai pas créés Mais si le temps venait où l’ombre enfin solide Se multipliait en réalisant la diversité formelle de mon amour J’admirerais mon ouvrage J’observe le repos du dimanche Et je loue la paresse Comment comment réduire L’infiniment petite science Que m’imposent mes sens L’un est pareil aux montagnes au ciel Aux villes à mon amour Il ressemble aux saisons Il vit décapité sa tête est le soleil Et la lune son cou tranché Je voudrais éprouver une ardeur infinie Monstre de mon ouïe tu rugis et tu pleures Le tonnerre te sert de chevelure Et tes griffes répètent le chant des oiseaux Le toucher monstrueux m’a pénétré m’empoisonne Mes yeux nagent loin de moi Et les astres intacts sont mes maîtres sans épreuve La bête des fumées a la tête fleurie Et le monstre le plus beau Ayant la saveur du laurier se désole À la fin les mensonges ne me font plus peur C’est la lune qui cuit comme un œuf sur le plat Ce collier de gouttes d’eau va parer la noyée Voici mon bouquet de fleurs de la Passion Qui offrent tendrement deux couronnes d’épines Les rues sont mouillées de la pluie de naguère Des anges diligents travaillent pour moi à la maison La lune et la tristesse disparaîtront pendant Toute la sainte journée Toute la sainte journée j’ai marché en chantant Une dame penchée à sa fenêtre m’a regardé longtemps M’éloigner en chantant Au tournant d’une rue je vis des matelots Qui dansaient le cou nu au son d’un accordéon J’ai tout donné au soleil Tout sauf mon ombre Les dragues les ballots les sirènes mi-mortes À l’horizon brumeux s’enfonçaient les trois-mâts Les vents ont expiré couronnés d’anémones Ô Vierge signe pur du troisième mois Templiers flamboyants je brûle parmi vous Prophétisons ensemble ô grand maître je suis Le désirable feu qui pour vous se dévoue Et la girande tourne ô belle ô belle nuit Liens déliés par une libre flamme Ardeur Que mon souffle éteindra Ô Morts à quarantaine Je mire de ma mort la gloire et le malheur Comme si je visais l’oiseau de la quintaine Incertitude oiseau feint peint quand vous tombiez Le soleil et l’amour dansaient dans le village Et tes enfants galants bien ou mal habillés Ont bâti ce bûcher le nid de mon courage

    en cours de vérification

    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Lul de faltenin Sirènes j’ai rampé vers vos Grottes tiriez aux mers la langue En dansant devant leurs chevaux Puis battiez de vos ailes d’anges Et j’écoutais ces chœurs rivaux Une arme ô ma tête inquiète J’agite un feuillard défleuri Pour écarter l’haleine tiède Qu’exhalent contre mes grands cris Vos terribles bouches muettes Il y a là-bas la merveille Au prix d’elle que valez-vous Le sang jaillit de mes otelles À mon aspect et je l’avoue Le meurtre de mon double orgueil Si les bateliers ont ramé Loin des lèvres à fleur de l’onde Mille et mille animaux charmés Flairant la route à la rencontre De mes blessures bien-aimées Leurs yeux étoiles bestiales Éclairent ma compassion Qu’importe ma sagesse égale Celle des constellations Car c’est moi seul nuit qui t’étoile Sirènes enfin je descends Dans une grotte avide J’aime Vos yeux Les degrés sont glissants Au loin que vous devenez naines N’attirez plus aucun passant Dans l’attentive et bien-apprise J’ai vu feuilloler nos forêts Mer le soleil se gargarise Où les matelots désiraient Que vergues et mâts reverdissent Je descends et le firmament S’est changé très vite en méduse Puisque je flambe atrocement Que mes bras seuls sont les excuses Et les torches de mon tourment Oiseaux tiriez aux mers la langue Le soleil d’hier m’a rejoint Les otelles nous ensanglantent Dans le nid des Sirènes loin Du troupeau d’étoiles oblongues

    en cours de vérification

    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    L’ermite Un ermite déchaux près d’un crâne blanchi Cria Je vous maudis martyres et détresses Trop de tentations malgré moi me caressent Tentations de lune et de logomachies Trop d’étoiles s’enfuient quand je dis mes prières Ô chef de morte Ô vieil ivoire Orbites Trous Des narines rongées J’ai faim Mes cris s’enrouent Voici donc pour mon jeûne un morceau de gruyère Ô Seigneur flagellez les nuées du coucher Qui vous tendent au ciel de si jolis culs roses Et c’est le soir les fleurs de jour déjà se closent Et les souris dans l’ombre incantent le plancher Les humains savent tant de jeux l’amour la mourre L’amour jeu des nombrils ou jeu de la grande oie La mourre jeu du nombre illusoire des doigts Seigneur faites Seigneur qu’un jour je m’enamoure J’attends celle qui me tendra ses doigts menus Combien de signes blancs aux ongles les paresses Les mensonges pourtant j’attends qu’elle les dresse Ses mains enamourées devant moi l’Inconnue Seigneur que t’ai-je fait Vois Je suis unicorne Pourtant malgré son bel effroi concupiscent Comme un poupon chéri mon sexe est innocent D’être anxieux seul et debout comme une borne Seigneur le Christ est nu jetez jetez sur lui La robe sans couture éteignez les ardeurs Au puits vont se noyer tant de tintements d’heures Quand isochrones choient des gouttes d’eau de pluie J’ai veillé trente nuits sous les lauriers-roses As-tu sué du sang Christ dans Gethsémani Crucifié réponds Dis non Moi je le nie Car j’ai trop espéré en vain l’hématidrose J’écoutais à genoux toquer les battements Du cœur le sang roulait toujours en ses artères Qui sont de vieux coraux ou qui sont des clavaires Et mon aorte était avare éperdument Une goutte tomba Sueur Et sa couleur Lueur Le sang si rouge et j’ai ri des damnés Puis enfin j’ai compris que je saignais du nez À cause des parfums violents de mes fleurs Et j’ai ri du vieil ange qui n’est point venu De vol très indolent me tendre un beau calice J’ai ri de l’aile grise et j’ôte mon cilice Tissé de crins soyeux par de cruels canuts Vertuchou Riotant des vulves des papesses De saintes sans tetons j’irai vers les cités Et peut-être y mourir pour ma virginité Parmi les mains les peaux les mots et les promesses Malgré les autans bleus je me dresse divin Comme un rayon de lune adoré par la mer En vain j’ai supplié tous les saints aémères Aucun n’a consacré mes doux pains sans levain Et je marche Je fuis ô nuit Lilith ulule Et clame vainement et je vois de grands yeux S’ouvrir tragiquement Ô nuit je vois tes cieux S’étoiler calmement de splendides pilules Un squelette de reine innocente est pendu À un long fil d’étoile en désespoir sévère La nuit les bois sont noirs et se meurt l’espoir vert Quand meurt le jour avec un râle inattendu Et je marche je fuis ô jour l’émoi de l’aube Ferma le regard fixe et doux de vieux rubis Des hiboux et voici le regard des brebis Et des truies aux tetins roses comme des lobes Des corbeaux éployés comme des tildes font Une ombre vaine aux pauvres champs de seigle mûr Non loin des bourgs où des chaumières sont impures D’avoir des hiboux morts cloués à leur plafond Mes kilomètres longs Mes tristesses plénières Les squelettes de doigts terminant les sapins Ont égaré ma route et mes rêves poupins Souvent et j’ai dormi au sol des sapinières Enfin Ô soir pâmé Au bout de mes chemins La ville m’apparut très grave au son des cloches Et ma luxure meurt à présent que j’approche En entrant j’ai béni les foules des deux mains Cité j’ai ri de tes palais tels que des truffes Blanches au sol fouillé de clairières bleues Or mes désirs s’en vont tous à la queue leu leu Ma migraine pieuse a coiffé sa cucuphe Car toutes sont venues m’avouer leurs péchés Et Seigneur je suis saint par le vœu des amantes Zélotide et Lorie Louise et Diamante On dit Tu peux savoir ô toi l’effarouché Ermite absous nos fautes jamais vénielles Ô toi le pur et le contrit que nous aimons Sache nos cœurs cache les jeux que nous aimons Et nos baisers quintessenciés comme du miel Et j’absous les aveux pourpres comme leur sang Des poétesses nues des fées des fornarines Aucun pauvre désir ne gonfle ma poitrine Lorsque je vois le soir les couples s’enlaçant Car je ne veux plus rien sinon laisser se clore Mes yeux couple lassé au verger pantelant Plein du râle pompeux des groseilliers sanglants Et de la sainte cruauté des passiflores

    en cours de vérification

    Guy de Maupassant

    Guy de Maupassant

    @guyDeMaupassant

    La Saint-Charlemagne Certes, mes bons amis, je ne sais rien de pire Que de faire des vers quand on n’a rien à dire. Depuis bientôt un mois j’attendais tous les jours Une inspiration… Mais je l’attends toujours. Ma verve s’est éteinte, il faut qu’on la rallume. Mon pauvre esprit grelotte et ma Muse a le rhume. Moi je dors… L’autre jour, soudain, Truffey me dit: « Tu sais que nous fêtons notre saint, mercredi. » Mercredi, Dieu puissant! mercredi! mais que faire? Invoquer Charlemagne, ou rester et me taire? « Charlemagne! Ô grand saint! Qui sait combien de fois Tu rendis l’espérance au poète aux abois! Combien de malheureux dont la Muse en détresse De ton nom protecteur a caché la faiblesse! » Et vers le paradis je dirige mes pas. Nous abrégeons la pièce, qui est un peu longue. Le jeune Maupassant arrive au paradis. Saint Pierre le conduit auprès de Charlemagne, qui interrompt son dîner et l’accueille avec bienveillance: Charlemagne pourtant, me prenant à l’écart: « De mes desseins, dit-il, je veux te faire part. France, oh! mon beau pays, mes braves capitaines, Mes vieux soldats durcis dans les guerres lointaines, J’ai voulu que les fils de héros éprouvés Ne soient pas des adolescents dégénérés. J’ai fait de vous, enfants, une brave milice, Et j’ai dans le collège introduit l’exercice. En vos mains j’ai placé le fusil chassepot; De la France aujourd’hui vous portez le drapeau. Que voulez-vous encor? » « Un seul jour de vacance. » « Comment! En mon honneur vous avez fait bombance, Vous avez eu deux jours? » « Oh! non, rien qu’un demi. » « Un demi-jour pour moi? Tu mens, mon bon ami. » « Pardon, grand saint!… » Alors je lui contai l’affaire. Tout le ciel frissonna du bruit de sa colère. « Comment! dans ce collège il n’est point de recteur? » « Il n’aime que l’étude. » « Et pas de proviseur? » « Oui nous en avons un et c’est pour nous un père. Il est bon, nous l’aimons, mais il ne peut rien faire Contre l’ordre d’en haut. On ne se plaindrait pas Si nous allions chez nous au moins le Lundi gras. On le donne à Paris, et nous – on nous en prive. » « Morbleu! dit-il, il faut de suite que j’écrive Pour en demander compte à l’Université! Je veux qu’entre vous tous règne l’égalité. Même peine et travail et même récompense. Vous aurez les jours gras, morbleu! Est-ce qu’on pense Que je vous laisserai maltraiter plus longtemps! Allez, mes bons amis, vous serez tous contents. Je ne suis pas si doux qu’on pourrait bien le croire! Alcuin! mon buvard! vite! mon écritoire! Comment vont le calcul, le grec et le latin? » « Si le grec boite un peu, le latin va très bien, Mais le calcul, hélas!… » Mon Dieu, quelle tempête! Alcuin me jeta son buvard à la tête. Avec ce furieux je me crus en danger, Et partis aussitôt sans demander congé. (28 janvier 1869)

    en cours de vérification

    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    A béranger Ode Des chants, voilà toute sa vie ! Ainsi qu’un brouillard vaporeux, Le souffle animé de l’envie Glissa sur son coeur généreux Toujours sa plus chère espérance Rêva le bonheur de la France ; Toujours il respecta les lois… Mais les haines sont implacables, Et sur le banc des vils coupables La vertu s’assied quelquefois. Qu’a-t-il fait ? pourquoi le proscrire ? Ah ! c’est encor pour des chansons : Courage ! étouffez la satire, Au lieu d’écouter ses leçons. Quand une secte turbulente, Levant sa tête menaçante, Brave les décrets souverains, Vous restez muets, sans vengeance, Et vous n’usez de la puissance Que pour combattre des refrains… Ô Béranger ! muse chérie ! Toi dont la voix unit toujours Le souvenir de la patrie Au souvenir de tes amours, Tendre ami, poète sublime, Du pouvoir jaloux qui t’opprime Tes nobles chants seront vainqueurs ; Car ils parlent de notre gloire, Et, comme un récit de victoire, Ils ont fait palpiter nos coeurs. Un jour viendra, la France émue Rendra justice à tes vertus ; On verra surgir ta statue… Mais alors tu ne seras plus ! Car un poète,sur la terre Doit lutter contre la misère Et des détracteurs odieux, Jusqu’au jour où, brisant ses chaînes, Le droit vient terminer ses peines Et le placer au rang des dieux. Mais nous que charma son délire Quand il chantait la liberté, Accourons, enfants de la lyre, Devançons la postérité. Pour célébrer notre poète, Pour poser des fleurs sur sa tête, N’attendons pas qu’il ait vécu… Si dans la lutte qui s’engage Son sort doit être l’esclavage, Redisons tous : Gloire au vaincu !

    en cours de vérification

    I

    Isaac Lerutan

    @isaacLerutan

    L’âme errante Gloire à celui qui sous le feu de l’existence Donna sens à la vie et à ses plaisirs sains Loin de la brume froide, témoin de ses carences De ses pseudo-pouvoirs, un seul n’en fût le sien Par delà les frontières et leurs sols en souffrance Où d’autr’âmes s’entachent d’innombrables venins De cette fourmilière règne son espérance Si l’ombre d’un soleil le pique un beau matin De ces matins fertiles, la vie donna la chance À ce cher inconnu, ignorant son destin Gloire à la poésie et gloire à l’innocence De ce cri, l’âme errante en trouva le chemin…

    en cours de vérification

    J

    Jacques Viallebesset

    @jacquesViallebesset

    La parole retrouvée Les mots sont feuilles mortes Usés trop usés d’avoir trop mal servi Ils jonchent vos vies devant votre porte A force de ne les avoir pensés ni ressentis Vous ne savez que parler Alors que c’est DIRE qu’il faudrait Comment retrouver l’arbre vivant Sous l’écorce de bois mort Et qui croire désormais En sachant que c’est vrai Comment palper du bout des doigts Les gouttes de résine du sens Derrière les apparences Et retrouver la flamme Dans les fossiles et la cendre Comment dire à une femme En étant sûr qu’elle va vous rendre Comment être compris maintenant Et pouvoir faire autrement En épanchant ses sentiments Que de faire couler son propre sang Et comment écrire ses espoirs et ses rêves Sans tremper sa plume dans la sève Comment dire l’Amour et la Joie En partageant confiance et foi Et plus encore dire  » je t’aime «  Et être entendu de même Faudra-t-il donc me taire Et accepter que l’on m’enterre Sans avoir su sans avoir pu Et que jamais jamais plus La lettre est sédentaire Mais le sens, lui, est nomade Ah ! Crier que mon cœur bat la chamade Une dernière fois à la face de l’univers L’arbre de mes poèmes Saura cacher la forêt de vos paroles Son feuillage vibre et chante sous les archets du vent Il est peuplé de piafs de libellules de tourterelles Qui portent ce message des confins de la terre à leurs pôles Et, en vrai, on s’aime dans l’Agapè Comme des frères, des amis et des amants Mutuellement et réciproquement.

    en cours de vérification

    Jean de La Fontaine

    Jean de La Fontaine

    @jeanDeLaFontaine

    La femme noyée Je ne suis pas de ceux qui disent: « Ce n’est rien, C’est une femme qui se noie. » Je dis que c’est beaucoup ; et ce sexe vaut bien Que nous le regrettions, puisqu’il fait notre joie; Ce que j’avance ici n’est point hors de propos, Puisqu’il s’agit en cette fable, D’une femme qui dans les flots Avait fini ses jours par un sort déplorable. Son époux en cherchait le corps, Pour lui rendre, en cette aventure, Les honneurs de la sépulture. Il arriva que sur les bords Du fleuve auteur de sa disgrâce Des gens se promenaient ignorants l’accident. Ce mari donc leur demandant S’ils n’avaient de sa femme aperçu nulle trace: «Nulle, reprit l’un d’eux; mais cherchez-la plus bas; Suivez le fil de la rivière.» Un autre repartit: » Non, ne le suivez pas; Rebroussez plutôt en arrière: Quelle que soit la pente et l’inclination Dont l’eau par sa course l’emporte, L’esprit de contradiction L’aura fait flotter d’autre sorte.» Cet homme se raillait assez hors de saison.(8) Quant à l’humeur contredisante, Je ne sais s’il avait raison; Mais que cette humeur soit ou non , Le défaut du sexe (9) et sa pente, Quiconque avec elle naîtra Sans faute avec elle mourra, Et jusqu’au bout contredira, Et, s’il peut, encor par delà.

    en cours de vérification

    Jean de La Fontaine

    Jean de La Fontaine

    @jeanDeLaFontaine

    La montagne qui accouche Une Montagne en mal d’enfant Jetait une clameur si haute, Que chacun au bruit accourant Crut qu’elle accoucherait sans faute, D’une Cité plus grosse que Paris : Elle accoucha d’une Souris. Quand je songe à cette Fable Dont le récit est menteur Et le sens est véritable, Je me figure un Auteur Qui dit : Je chanterai la guerre Que firent les Titans au Maître du tonnerre. C’est promettre beaucoup : mais qu’en sort-il souvent ? Du vent. Jean de La Fontaine  

    en cours de vérification

    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Arc en ciel Poème andernosien « et un arbre avec un nom bizarre, un arbre comme tous les arbres, a grandi en moi, n’importe où » Hilde Domin Mit leichtem Gepäck ce soir, ma machine à tisser les songes se dérobe devant la tragédie cosmique de la vie ; à ma toile se prennent les petits, les sans-grade, les humbles ils crient : où est ton arc-en-ciel? et je rêve que dieu existe ce soir me vient l’envie d’écarter d’un revers de la main des poèmes d’espoir que personne ne lira ne lyra mais les humbles me crient: Villebramar! Villebramar! que fais-tu de ton soleil? Alors me relevant je pose le métier sur la table et j’attends, les humbles, toujours m’interpellant : où est ton arc-en ciel? Ce soir, à ma toile se prennent les petits, les sans-grade, les humbles, et je rêve que dieu existe

    en cours de vérification

    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Chant du coq «Attention ! le nègre est devenu de plus en plus fort aussi fort que le grand diable» Gabriel Okoundji La poésie se lit les yeux clos S’écoute dans le silence du sommeil Se vit dans les battements de ton coeur. Elle s’écrit sur les murs de cavernes anciennes, témoignage de l’angoisse des premiers temps. S’enroule sur la crête de très hautes vagues, retombe à l’approche des brisants. La poésie s’écrit. La poésie s’écrit sur le sable. La poésie est le sable même, la poésie est Nous. N’en restera que la plage, en fin. La poésie ne s’écrit pas. Entre les pages de l’herbier, une fleur a perdu le souffle, et les pétales, leur couleur. Ainsi est le poème. Non, la poésie ne s’écrit pas. Tenez sa main si le pouvez, mais n’espérez rien. Ne dites mot. Car les esprits de la poésie et ceux de la forêt sont les mêmes : ils disparaissent au premier chant du coq.

    en cours de vérification

    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Comme toujours dans la vraie vie Certains soirs, en poésie, il y a des poèmes qui ne parlent plus fatigués par une trop longue journée de travail on a envie de leur dire : allez ailleurs raconter vos histoires de désespoir ou d’amour fou ou de n’importe quoi c’est pareil, allez ailleurs je suis fatigué. Certains soirs dans la vie il y a des hommes qui ne parlent plus. Parfois en poésie, on n’a plus envie ni d’amour ni d’espoir juste de fermer les yeux et dormir. Arrive alors, en poésie qu’ouvrant au hasard une page explosent quatre vers comme un volcan, un sourd-muet en pleurerait retrouvant la parole un désespéré sa joie de vivre. Il arrive que dans la vie, parfois, des hommes explosent. Il est vrai que toujours, en poésie rire rêver pleurer : un seul et même mot. Comme toujours. Dans la vraie vie.

    en cours de vérification

    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Croix blanche Comment écrire quand on n’écrit plus exister quand on n’existe plus aimer quand on ne sait plus il y a dans l’air d’automne des couleurs qui me font mal j’ai demandé aux gens heureux aux enfants aux chats aux chiens les étendant à d’autres mammifères (marins compris) les gens heureux n’écrivent pas resté : le chat m’a regardé de ses yeux verts et ironique immobile puis de sa patte, sur le sable a écrit « comment écrire, quand on n’écrit plus ? » dans le pré vert où coule la rivière il y a une croix blanche

    en cours de vérification

    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Estuaires A celle qui m’a dit : « tu mourras seul » « ese pájaro come a grandes picotazos el silencio luego alzará el vuelo cet oiseau mange à grands coups de bec le silence puis il se mettra à voler » Victor Rodriguez Nuñez, Cuba la scène représente un humain présumé poète un public présumé public un monde présumé monde « je me confesse à toi, mon public qui attendais de la poésie apaisement et rêve ma poésie est violence et plongée dans les ténèbres de la vie car la vie est d’abord ténèbres d’abord angoisse d’abord peur de vivre je me confesse à toi, mon public qui aspirais à l’apaisement des mots ma poésie est l’inquiétude de l’aube quand les oiseaux dorment encore, mais disparu l’éclat de la lune et le soleil nous a abandonnés sans au-revoir. À toi mon public, qui croyais à l’amour ma poésie cherchait l’amour ma poésie cherchait le sourire et l’abandon dans la folie d’être deux mais ma compagne a dit : tu mourras seul devant la grande barrière des montagnes et depuis me serre à la gorge l’angoisse de la mort. Je me confesse à toi, mon public, qui attends la joie ma poésie est le contraire de la joie ma poésie est jouissance éphémère soupirs volés dans la pénombre d’une nuit d’été ma poésie est silence. À toi, mon public, qui attendais la Sagesse, ma poésie est folie errance sur les fleuves de la nuit en quête d’insaisissables estuaires » la scène était un humain présumé poète la scène était un public présumé public la scène était un monde présumé monde

    en cours de vérification

    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Improvisation Écrire pour son simple plaisir, écrire sans penser au regard, au regard des autres, écrire comme coule un ruisseau, et comme lui se laisser descendre vers la mer écrire pour moi aussi longtemps qu’il y aura une douleur dans le monde une femme à aimer et maintenant seulement une femme à regarder statue de sel mais ni regrets ni larme écrire sans se demander comment sera demain ni si mes vers font quatre ou six ou douze pieds sur ou sous terre écrire comme une improvisation comme faisait Glen Gould de Jean Sébastien Bach écrire comme sur son piano Yamaha avec ses doigts d’ours, écrire avec mes doigts de vivant, et lui, jouer encore avec ses doigts de musicien mort dire à la page blanche, lui dire quoi ? rien de bien grave, page, page blanche c’est seulement un ruisseau qui coule, une âme en perdition sur les routes de la voie lactée écrire enfin en pensant à toi et comme j’ai aimé combien combien et follement je t’ai aimée avec l’espoir fou de rentrer dans ton corps corps et âme rentrer rentrer pour plus jamais n’en ressortir écrire alors que courent les minutes de la nuit, écrire et ce ruisseau, personne ne le voit couler vers la mer, comme personne ne m’a vu t’aimer dans tous les ports du monde dans les pays où jamais nous ne fûmes sinon en rêve sinon en rêve sinon en rêve vaisseau fantôme port fantôme poème fantôme t’aimer comme coule un ruisseau et comme lui descendre vers la mer la mer comme un poème improvisé improvisé.

    en cours de vérification

    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Lettres d’Aquitaine « la journée sera belle ; je la vois filtrer dans tes yeux où elle a commencé, plus trouble, par être si belle » André Breton Montée de l’aube ; la journée sera belle, dit André Breton plages désertes, luxuriance des mimosas, que dorment les amants dans les dunes le jour se lève, il faut tenter de vivre, disait quelqu’un de mon Occitanie. D’écrire aussi à toi, à ceux qui m’aiment à ceux ; et celles Je demande à un ami très cher de traduire 9 poèmes en espagnol que j’enverrai à Stefano, le priant de faire de même en italien… et si naissaient, dans des langues extra-terrestres un poème, peut-être deux ? Vivre, écrire, Exister… …le temps des vagues ; elles déferlent, puis se brisent I had a dream… la journée fut si belle… me revient l’évidence de l’absurde

    en cours de vérification

    Joachim du Bellay

    Joachim du Bellay

    @joachimDuBellay

    Je ne veux point fouiller au sein de la nature Je ne veux point fouiller au sein de la nature, Je ne veux point chercher l'esprit de l'univers, Je ne veux point sonder les abîmes couverts, Ni dessiner du ciel la belle architecture. Je ne peins mes tableaux de si riche peinture, Et si hauts arguments ne recherche à mes vers : Mais suivant de ce lieu les accidents divers, Soit de bien, soit de mal, j'écris à l'aventure. Je me plains à mes vers, si j'ai quelque regret : Je me ris avec eux, je leur dis mon secret, Comme étant de mon coeur les plus sûrs secrétaires. Aussi ne veux-je tant les peigner et friser, Et de plus braves noms ne les veux déguiser Que de papiers journaux ou bien de commentaires.

    en cours de vérification

    Joachim du Bellay

    Joachim du Bellay

    @joachimDuBellay

    Las où est maintenant ce mépris de Fortune Las où est maintenant ce mépris de Fortune Où est ce coeur vainqueur de toute adversité, Cet honnête désir de l'immortalité, Et cette honnête flamme au peuple non commune ?

    en cours de vérification

    Jules Laforgue

    Jules Laforgue

    @julesLaforgue

    Veillée d'avril Il doit être minuit. Minuit moins cinq. On dort. Chacun cueille sa fleur au vert jardin des rêves, Et moi, las de subir mes vieux remords sans trêves, Je tords mon cœur pour qu'il s'égoutte en rimes d'or. Et voilà qu'à songer me revient un accord, Un air bête d'antan, et sans bruit tu te lèves Ô menuet, toujours plus gai, des heures brèves Où j'étais simple et pur, et doux, croyant encor. Et j'ai posé ma plume. Et je fouille ma vie D'innocence et d'amour pour jamais défleurie, Et je reste longtemps, sur ma page accoudé, Perdu dans le pourquoi des choses de la terre, Ecoutant vaguement dans la nuit solitaire Le roulement impur d'un vieux fiacre attardé.

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    A un poète saturnien Ô bruit doux de la pluie par terre et sur les toits Ce poète-citadin ne connaissait pas l’Afrique aux bêtes et aux enfants faméliques sans demeure sur un sol qui se craquelle et qui meurent qui meurent… Sur cette Terre même l’eau a choisi la couleur blanche Le soleil automnal ou printanier au pays de Verlaine Ici n’est que feu n’est que haine Ici où il pleure dans mon coeur pour ces damnés de la faim et de la soif Mon deuil a une raison : l’indifférence de la nature est une trahison

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Alliés Faites vos bonds étonnants mes mots mes dauphins dans l’indigo de l’inconscient Apprenez-moi le langage mystérieux de votre transparence à nager dans l’origine antidote de mon errance A califourchon sur vos dos métissés permettez qu’au cours de ce beau voyage je trace des signes pour vous dessins familiers sur ma feuille mon métier à tisser Faites la beauté coutumière mes mots mes dauphins avant de repartir au large et laisser le poète à sa marge

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Contre-temps Comme l’enfant fuyant la forteresse des ans Aujourd’hui je fuis l’oublieuse mémoire Aller et venir sur la balançoire de l’éternité des mots toujours verts sur l’arbre de l’espérance sera toujours mon printemps Pour qui a le verbe en poupe et le babil des anges dans le feuillage des pages il n’est pas de mauvais présage ou de mort dans l’exil loin des ports

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Conversation Disséminé dans les lignes mon corps vous parlera encore De soie ou de marbre mes mots d’un revers de main chasseront la poussière des ans Sous la lampe ou au soleil votre sourire ou votre air studieux me donneront la réplique ô vous mes lecteurs complices Ainsi va l’écriture cet élixir de vie ennemie de la mortelle rature

    en cours de vérification