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Le poète

135 poésies en cours de vérification
Le poète

Poésies de la collection le poète

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    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Défaite Au vent du soir s’agitent les paroles dans la bouche du silence elles veulent éclore briser leur coquille dans leur conscience soudaine d’être au monde mais quelque chose quelque chose un esprit malin leur susurre : « l’enfer c’est le langage » Les paroles se racornissent et leurs cendres tombent dans la bouche Leur goût rappelle ce peu que nous sommes nous poètes tantôt hommes tantôt mages rêveurs échevelés sorcières et leur chaudron où bouillonnent des mirages

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    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Ecrivain(s) Il a des fruits d’or pour tresser son verbe des lettres entrelacées dans l’alcôve de sa mémoire Il craint le cyprès qui murmure au-dessus des tombes on ne sait quel secret Son jardin est gorgé de lumière Parfois y fulgure l’ombre C’est un être double comme nous tous qui rêvons d’unité androgynes notoires jusqu’au désespoir

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    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Femmes Assoiffées de paroles elles écoutent Et le poète magicien maladroit et blessé les regarde rêver Puis il s’en va dans son monde fragile emportant leurs sourires où l’or à la tendresse se mêle Elles se souviendront de lui longtemps Et lorsque réapparu il se remettra à chanter ces buveuses de verbe vampires de l’instant dissémineront une fois de plus les offrandes de son âme aux quatre vents de leur mystère

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    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Incrédule L’encre du passé scintille de souvenirs Je regarde depuis la terre sa profondeur étoilée Que comprendre à ces lumières aux origines enfouies dans le cosmos d’une vie d’homme ? Chaque heure qui passe épaissit le mystère et nous rend méconnaissables Seul le tapis volant des mots rend possible la légende d’exister

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    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Kamal De l’écume de vivant sur les vagues de la mémoire Un essaim de rêves dans la conversation Un éclat de rire pour éblouir la tristesse L’amant de femmes à peine entrevues L’ivresse d’un poème quand l’encre le veut bien L’angoisse qui étreint La joie d’être père pour conjurer cette mort qui vient

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    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Littérature Écrire avec le sang répandu les maisons qui s’effondrent l’avenir en ruines d’une fillette aux cheveux blancs Écrire comme on sourit aux maîtres avec nos signes de traitres Écrire pour n’être personne glas de papier qui sonne peut-être ce poème qui de tout délivre même de soi-même

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    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Martyrs Vous faites vos adieux à l’humanité en demandant que l’on se souvienne de vous soldats courageux dans Marioupol dévastée sans munitions sans nourriture face à l’étau russe qui se resserre pour vous broyer Est-ce donc cela notre présent des temps en proie aux fous qui avec des corps déchiquetés inaugurent leur sanglante littérature ? Et vous, notre Père, en qui l’on croit n’est-ce pas grande misère que cette interminable ivresse de sang ? Le poète ne peut se taire Il crie au nom des innocents parce qu’il pressent que nous entrons dans l’ère du terrestre enfer

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    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Mots Ce sont nos amis sur le ruban de la route Ce sont nos rubis dans la nuit du doute ce sont nos voix dans le désert du langage C’est l’horizon qui rougeoie et son soleil qui déçoit Ce sont nos ombres qui s’allongent et nos conversations qui se prolongent

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    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Tension La bête ivre de douleur tire sur sa chaîne sa pesanteur à la vue de l’éternel passage des oiseaux, du vent et des nuages Son imagination les suit battements d’ailes, souffle où formes étranges Ainsi naît le poète entre impossible essor et élévation Esclave du sort affranchi de la mort

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    Laetitia Sioen

    @laetitiaSioen

    Cancre Les lettres rondes courent sur le papier. Les lettres mortes s’arrêtent de chanter. Je me perds dans ces mots ces lettres de petits et gros caractères. Ces salles mots, ces gros mots qui voguent la galère et bout-en-train car je te le dis je suis une cancre. Un radeau de fortune, infortuné par tant de discours. On m’a faite la tête de nœud, grognon et boudeuse. La tête en queue de tir bouchon. La manivelle de ma cervelle fonctionne à reculons. J’aime mieux les histoires que les mots à dormir debout Car je te le dis je suis une cancre. Amusée par mes rébellions enfantines Je suis une équilibriste qui griffonne du papier sur le fil. J’aime mieux mes rêves Explorer dans la lune Mes nouvelles aventures Regarder l’étincelle d’une étoile dans la pupille de mon cœur car je te le dis je suis une cancre.

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    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    À Alfred de Musset Un poète est parti ; sur sa tombe fermée Pas un chant, pas un mot dans cette langue aimée Dont la douceur divine ici-bas l’enivrait. Seul, un pauvre arbre triste à la pâle verdure, Le saule qu’il rêvait, au vent du soir, murmure Sur son ombre éplorée un tendre et long regret. Ce n’est pas de l’oubli ; nous répétons encore, Poëte de l’amour, ces chants que fit éclore Dans ton âme éperdue un éternel tourment, Et le Temps sans pitié qui brise de son aile Bien des lauriers, le Temps d’une grâce nouvelle Couronne en s’éloignant ton souvenir charmant. Tu fus l’enfant choyé du siècle. Tes caprices Nous trouvaient indulgents. Nous étions les complices De tes jeunes écarts; tu pouvais tout oser. De la Muse pour toi nous savions les tendresses, Et nos regards charmés ont compté ses caresses. De son premier sourire à son dernier baiser. Parmi nous maint poète à la bouche inspirée Avait déjà rouvert une source sacrée; Oui, d’autres nous avaient de leurs chants abreuvés. Mais le cri qui saisit le cœur et le remue, Mais ces accents profonds qui d’une lèvre émue Vont à l’âme de tous, toi seul les as trouvés. Au concert de nos pleurs ta voix s’était mêlée. Entre nous, fils souffrants d’une époque troublée, Le doute et la douleur formaient comme un lien. Ta lyre en nous touchant nous était douce et chère ; Dans le chantre divin nous sentions tous un frère ; C’est le sang de nos cœurs qui courait dans le tien. Rien n’arrêtait ta plainte, et ton âme blessée La laissait échapper navrante et cadencée. Tandis que vers le ciel qui se voile et se clôt De la foule montait une rumeur confuse, Fier et beau, tu jetais, jeune amant de la Muse, A travers tous ces bruits ton immortel sanglot. Lorsque le rossignol, dans la saison brûlante De l’amour et des fleurs, sur la branche tremblante Se pose pour chanter son mal cher et secret. Rien n’arrête l’essor de sa plainte infinie, Et de son gosier frêle un long jet d’harmonie S’élance et se répand au sein de la forêt. La voix mélodieuse enchante au loin l’espace…. Mais soudain tout se tait ; le voyageur qui passe Sous la feuille des bois sent un frisson courir. De l’oiseau qu’entraînait une ivresse imprudente L’âme s’est envolée avec la note ardente ; Hélas ! chanter ainsi c’était vouloir mourir !

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    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    Adieux a la Poésie Mes pleurs sont à moi, nul au monde Ne les a comptés ni reçus ; Pas un œil étranger qui sonde Les désespoirs que j'ai conçus. L'être qui souffre est un mystère Parmi ses frères ici-bas ; Il faut qu'il aille solitaire S'asseoir aux portes du trépas. J'irai seule et brisant ma lyre, Souffrant mes maux sans les chanter ; Car je sentirais à les dire Plus de douleur qu'à les porter. Paris, 1835.

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    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    La lyre d’Orphée Quand Orphée autrefois, frappé par les Bacchantes, Près de l’Hèbre tomba, sur les vagues sanglantes On vit longtemps encor sa lyre surnager. Le fleuve au loin chantait sous le fardeau léger. Le gai zéphyr s’émut; ses ailes amoureuses Baisaient les cordes d’or, et les vagues heureuses Comme pour l’arréter, d’un effort doux et vain S’empressaient à l’entour de l’instrument divin. Les récifs, les flots, le sable à son passage S’est revêtu de fleurs, et cet âpre rivage Voit soudain, pour toujours délivré des autans. Au toucher de la lyre accourir le Printemps. Ah! que nous sommes loin de ces temps de merveilles ! Les ondes, les rochers, les vents n’ont plus d’oreilles, Les cœurs même, les cœurs refusent de s’ouvrir. Et la lyre en passant ne fait plus rien fleurir.

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    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    Le déluge À Victor Hugo le vieux monde Dieu t’a dit : « Ne va pas plus loin, ô flot amer ! » Mais quoi ! tu m’engloutis ! Au secours, Dieu ! La mer Désobéit ! la mer envahit mon refuge ! LE FLOT Tu me crois la marée, et je suis le déluge. Épilogue de l’Année Terrible. Tu l’as dit : C’en est fait ; ni fuite ni refuge Devant l’assaut prochain et furibond des flots. Ils avancent toujours. C’est sur ce mot, Déluge, Poète de malheur, que ton livre s’est clos. Mais comment osa-t-il échapper à ta bouche ? Ah ! pour le prononcer, même au dernier moment, Il fallait ton audace et ton ardeur farouche, Tant il est plein d’horreur et d’épouvantement. Vous êtes avertis : c’est une fin de monde Que ces flux, ces rumeurs, ces agitations. Nous n’en sommes encor qu’aux menaces de l’onde, A demain les fureurs et les destructions. Déjà depuis longtemps, saisis de terreurs vagues, Nous regardions la mer qui soulevait son sein, Et nous nous demandions : « Que veulent donc ces vagues ? On dirait qu’elles ont quelque horrible dessein. » Tu viens de le trahir ce secret lamentable ; Grâce à toi, nous savons à quoi nous en tenir. Oui, le Déluge est là, terrible, inévitable ; Ce n’est pas l’appeler que de le voir venir. Pourtant, nous l’avouerons, si toutes les colères De ce vaste océan qui s’agite et qui bout, N’allaient qu’à renverser quelques tours séculaires Que nous nous étonnions de voir encor debout, Monuments que le temps désagrège ou corrode, Et qui nous inspiraient une secrète horreur : Obstacles au progrès, missel usé, vieux code, Où se réfugiaient l’injustice et l’erreur, Des autels délabrés, des trônes en décembre Qui nous rétrécissaient à dessein l’horizon, Et dont les débris seuls projetaient assez d’ombre Pour retarder longtemps l’humaine floraison, Nous aurions à la mer déjà crié : « Courage ! Courage ! L’œuvre est bon que ton onde accomplit. » Mais quoi ! ne renverser qu’un môle ou qu’un barrage ? Ce n’est pas pour si peu qu’elle sort de son lit. Ses flots, en s’élançant par-dessus toute cime, N’obéissent, hélas ! qu’à d’aveugles instincts. D’ailleurs, sachez-le bien, ces enfants de l’abîme, Pour venir de plus bas, n’en sont que plus hautains. Rien ne satisfera leur convoitise immense. Dire : « Abattez ceci, mais respectez cela, » N’amènerait en eux qu’un surcroît de démence ; On ne fait point sa part à cet Océan-là. Ce qu’il lui faut, c’est tout. Le même coup de houle Balaiera sous les yeux de l’homme épouvanté Le phare qui s’élève et le temple qui croule, Ce qui voilait le jour ou donnait la clarté, L’obscure sacristie et le laboratoire, Le droit nouveau, le droit divin et ses décrets, Le souterrain profond et le haut promontoire D’où nous avions déjà salué le Progrès. Tout cela ne fera qu’une ruine unique. Avenir et passé s’y vont amonceler. Oui, nous le proclamons, ton Déluge est inique : Il ne renversera qu’afin de niveler. Si nous devons bientôt, des bas-fonds en délire, Le voir s’avancer, fier de tant d’écroulements, Du moins nous n’aurons pas applaudi de la lyre Au triomphe futur d’ignobles éléments. Nous ne trouvons en nous que des accents funèbres, Depuis que nous savons l’affreux secret des flots. Nous voulions la lumière, ils feront les ténèbres ; Nous rêvions l’harmonie, et voici le chaos. Vieux monde, abîme-toi, disparais, noble arène Où jusqu’au bout l’Idée envoya ses lutteurs, Où le penseur lui-même, à sa voix souveraine, Pour combattre au besoin, descendait des hauteurs. Tu ne méritais pas, certe, un tel cataclysme, Toi si fertile encore, ô vieux sol enchanté ! D’où pour faire jaillir des sources d’héroïsme, Il suffisait d’un mot, Patrie ou Liberté ! Un océan fangeux va couvrir de ses lames Tes sillons où germaient de sublimes amours, Terrain cher et sacré, fait d’alluvions d’âmes, Et qui ne demandais qu’a t’exhausser toujours. Que penseront les cieux et que diront les astres, Quand leurs rayons en vain chercheront tes sommets, Et qu’ils assisteront d’en haut à tes désastres, Eux qui croyaient pouvoir te sourire à jamais ? De quel œil verront-ils, du fond des mers sans borne, A la place où jadis s’étalaient tes splendeurs, Émerger brusquement dans leur nudité morne, Des continents nouveaux sans verdure et sans fleurs ? Ah ! si l’attraction à la céleste voûte Par de fermes liens ne las attachait pas, Ils tomberaient du ciel ou changeraient de route, Plutôt que d’éclairer un pareil ici-bas. Nous que rien ne retient, nous, artistes qu’enivre L’Idéal qu’ardemment poursuit notre désir, Du moins nous n’aurons point la douleur de survivre Au monde où nous avions espéré le saisir. Nous serons les premiers que les vents et que l’onde Emporteront brisés en balayant nos bords. Dans les gouffres ouverts d’une mer furibonde, N’ayant pu les sauver, nous suivrons nos trésors. Après tout, quand viendra l’heure horrible et fatale. En plein déchaînement d’aveugles appétits, Sous ces flots gros de haine et de rage brutale, Les moins à plaindre encor seront les engloutis.

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    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    L'abeille Quand l'abeille, au printemps, confiante et charmée, Sort de la ruche et prend son vol au sein des airs, Tout l'invite et lui rit sur sa route embaumée. L'églantier berce au vent ses boutons entr'ouverts ; La clochette des prés incline avec tendresse Sous le regard du jour son front pâle et léger. L'abeille cède émue au désir qui la presse ; Elle aperçoit un lis et descend s'y plonger. Une fleur est pour elle une mer de délices. Dans son enchantement, du fond de cent calices Elle sort trébuchant sous une poudre d'or. Son fardeau l'alourdit, mais elle vole encor. Une rose est là-bas qui s'ouvre et la convie ; Sur ce sein parfumé tandis qu'elle s'oublie, Le soleil s'est voilé. Poussé par l'aquilon, Un orage prochain menace le vallon. Le tonnerre a grondé. Mais dans sa quête ardente L'abeille n'entend rien, ne voit rien, l'imprudente ! Sur les buissons en fleur l'eau fond de toute part ; Pour regagner la ruche il est déjà trop tard. La rose si fragile, et que l'ouragan brise, Referme pour toujours son calice odorant ; La rose est une tombe, et l'abeille surprise Dans un dernier parfum s'enivre en expirant. Qui dira les destins dont sa mort est l'image ? Ah ! combien parmi nous d'artistes inconnus, Partis dans leur espoir par un jour sans nuage, Des champs qu'ils parcouraient ne sont pas revenus ! Une ivresse sacrée aveuglait leur courage ; Au gré de leurs désirs, sans craindre les autans, Ils butinaient au loin sur la foi du printemps. Quel retour glorieux l'avenir leur apprête ! À ces mille trésors épars sur leur chemin L'amour divin de l'art les guide et les arrête : Tout est fleur aujourd'hui, tout sera miel demain. Ils revenaient déjà vers la ruche immortelle ; Un vent du ciel soufflait, prêt à les soulever. Au milieu des parfums la Mort brise leur aile ; Chargés comme l'abeille, ils périssent comme elle Sur le butin doré qu'ils n'ont pas pu sauver.

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    Michel Ménaché

    @michelMenache

    Désobéir comme chanter le monde « On se moque des diseurs de bonne aventure. Il faut sinon se moquer, en tout cas se méfier des bâtisseurs d’avenir. Surtout quand pour bâtir l’avenir des hommes à naître ont besoin de faire mourir les hommes vivants. L’homme n’est la matière première que de sa propre vie. Je refuse d’obéir. » Jean Giono : Refus d’obéissance De l’ordre détourner la clef des bouches d’ombre désintégrer carcans et serrures préceptes retors injonctions amères consignes indignes règles iniques les retourner en désuétude à coups de langue à coups de cœur Liberté seul combat qui vaille objection d’amour et de poésie Arthur aux semelles de vent Vladimir à la flûte de vertèbres Ossip guetteur au goulag Boris déserteur planétaire poètes de l’insurrection vos souffles vifs nous portent à maintenir aujourd’hui l’ardeur du poème Désobéir comme on se désaltère Désobéir comme chanter et enchanter le monde retour sur soi retour sur soif objection d’amour et de poésie…

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    M

    Michelle Grenier

    @michelleGrenier

    Dernier vers pour la route Je voudrais pas partir avant Avant d’avoir goûté le pétillant de la pluie Écrit des graffitis à l’encre de mes nuits. Je voudrais pas passer Avant d’avoir tangué sur des rafiots d’écume Avant d’avoir mouillé à l’ancre de ton corps Danser mille et une nuits comme si c’était un jour. Je voudrais pas mourir sans savoir si Si le bourdon jubile au cœur des pistils Si les écureuils chahutent dans les pins parasols Si Baudelaire miaule À la nuit brune sur les toits de Paris Et si et si et si…. Si la fleur gazouille et si l’oiseau fleurit. Elle viendra, avec son œil borgne Dont la nuit s’épouvante quand Quand mon cœur ne battra que d’une aile J’accueillerai son long baiser glacé Comme un cri sur mes lèvres. Je voudrais pas crever bouffée Par des vers mal rimés Ni avant d’avoir trinqué un dernier vers, Un dernier verre pour la route.

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    Nashmia Noormohamed

    @nashmiaNoormohamed

    L’accent circonflexe Nous voilà bien perplexes, Plus d’accents circonflexes! Adopter d’abrégés réflexes? L’orthographe orthodoxe, Aspire à d’autres paradoxes, Délicate réforme hétérodoxe! Langue vivante bien implexe, Chapeau frivole à l’air convexe, Nouvelle mode, sans complexes. Symbole accusé d’être prolixe, Céleste cil tel un gracile affixe, Le transcrit émeut, se mue et se fixe.

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    Nashmia Noormohamed

    @nashmiaNoormohamed

    Écrire un peu Écrire un peu, Un peu tous les jours, Se rassasier de mots, Ressasser des maux. Écrire encore, Encore et toujours, Pour peindre la réalité, Pour travestir la vérité. Écrire souvent, Souvent sur l’amour, Essayer d’en apprendre, Sans bien y comprendre. Écrire beaucoup, Beaucoup de calembours, De rimes et vers embrochés, Poète aux bords ébréchés. Écrire, écrire sans fin, Laisser s’échapper les jours, Le temps qui s’évade, ce grand sorcier, Sympathique marabout, sordide artificier.

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    Nicolas Boileau

    Nicolas Boileau

    @nicolasBoileau

    Au roy Grand roy, c’est vainement qu’abjurant la satire, Pour toy seul desormais j’avois fait voeu d’écrire. Dès que je prens la plume, Apollon éperdu Semble me dire: arreste, insensé, que fais-tu? Sçais-tu dans quels perils aujourd’ huy tu t’ engages? Cette mer où tu cours est celebre en naufrages. Ce n’ est pas qu’ aisément, comme un autre, à ton char Je ne pûsse attacher Alexandre et César; Qu’aisément je ne pûsse en quelque ode insipide, T’exalter aux dépens et de Mars et d’ Alcide: Te livrer le bosphore, et d’ un vers incivil Proposer au sultan de te ceder le Nil. Mais pour te bien loüer, une raison severe Me dit, qu’ il faut sortir de la route vulgaire: Qu’ après avoir joüé tant d’ auteurs differens, Phébus mesme auroit peur, s’ il entroit sur les rangs; Que par des vers tout neufs, avoüez du Parnasse, Il faut de mes dégousts justifier l’ audace; Et, si ma muse enfin n’ est égale à mon roi, Que je preste aux cotins des armes contre moi. Est-ce là cet auteur, l’effroy de la pucelle; Qui devoit des bons vers nous tracer le modèle; Ce censeur, diront-ils, qui nous reformoit tous? Quoi? Ce critique affreux n’en sçait pas plus que nous. N’ avons-nous pas cent fois, en faveur de la France, Comme lui, dans nos vers, pris Memphis et Byzance; Sur les bords de l’Euphrate abbattu le turban, Et coupé, pour rimer, les cedres du Liban? De quel front aujourd’ hui vient-il sur nos brisées, Se revestir encor de nos phrases usées? Que repondrois-je alors? Honteux et rebuté, J’ aurois beau me complaire en ma propre beauté, Et de mes tristes vers admirateur unique, Plaindre en les relisant l’ignorance publique. Quelque orgeuil en secret dont s’aveugle un auteur, Il est fâcheux, grand roi, de se voir sans lecteur; Et d’aller du recit de ta gloire immortelle, Habiller chez Francoeur le sucre et la canelle. Ainsi, craignant toûjours un funeste accident, J’imite de Conrart le silence prudent: Je laisse aux plus hardis l honneur de la carriere, Et regarde le champ, assis sur la barriere. Malgré moy toutefois, un mouvement secret Vient flatter mon esprit qui se tait à regret. Quoi? Dis-je, tout chagrin, dans ma verve infertile, Des vertus de mon roy spectateur inutile, Faudra-t-il sur sa gloire attendre à m’exercer, Que ma tremblante voix commence à se glacer? Dans un si beau projet, si ma muse rebelle N’ose le suivre aux champs de l’ Isle et de Bruxelle, Sans le chercher aux bords de l’ Escaut et du Rhein, La paix l’offre à mes yeux plus calme et plus serein. Oui, grand roi, laissons là les sieges, les batailles. Qu’un autre aille en rimant renverser des murailles, Et souvent sur tes pas marchant sans ton aveu, S’aille couvrir de sang, de poussiere et de feu. À quoy bon d’ une muse au carnage animée, Échauffer ta valeur, déja trop allumée? Joüissons à loisir du fruit de tes bien-faits, Et ne nous lassons point des douceurs de la paix. Pourquoi ces elephans, ces armes, ce bagage, Et ces vaisseaux tout prests à quitter le rivage? Disoit au roi Phyrrus un sage confident, Conseiller tres sensé d’ un roi tres imprudent. Je vais, lui dit ce prince, à Rome où l’ on m’ ppelle. Quoi faire? -l’ assieger, -l’ entreprise est fort belle, Et digne seulement d’ Alexandre ou de vous; Mais, Rome prise enfin, seigneur, où courons-nous? Du reste des latins la conqueste est facile. Sans doute on les peut vaincre: est-ce tout? -la Sicile De là nous tend les bras, et bien-tost sans effort Syracuse reçoit nos vaisseaux dans son port. Bornés-vous là vos pas? -dès que nous l’ aurons prise, Il ne faut qu’ un bon vent et Carthage est conquise. Les chemins sont ouverts: qui peut nous arrester? -Je vous entens, seigneur, nous allons tout domter. Nous allons traverser les sables de Libye, Asservir en passant l’ égypte, l’ Arabie, Courir delà le Gange en de nouveaux païs, Faire trembler le scythe aux bords du Tanaïs; Et ranger sous nos lois tout ce vaste hemisphere. Mais de retour enfin, que pretendez-vous faire? -Alors, cher Cineas, victorieux, contens, Nous pourons rire à l’ aise, et prendre du bon temps. -Hé, seigneur, dés ce jour, sans sortir de l’ Epire, Du matin jusqu’ au soir qui vous défend de rire? Le conseil estoit sage et facile à gouster. Pyrrhus vivoit heureux, s’ il eust pû l’ écouter: Mais à l’ ambition d’ opposer la prudence, C’ est aux prelats de cour prescher la residence. Ce n’ est pas que mon coeur, du travail ennemi, Approuve un faineant sur le thrône endormi. Mais quelques vains lauriers que promette la guerre, On peut estre heros sans ravager la terre. Il est plus d’ une gloire. Envain aux conquerans L’ erreur parmi les rois donne les premiers rangs. Entre les grands heros ce sont les plus vulgaires. Chaque siecle est fecond en heureux temeraires. Chaque climat produit des favoris de Mars. La Seine a des Bourbons, le Tibre a des Césars. On a veu mille fois des fanges moestides Sortir des conquerans, goths, vandales, gepides. Mais un roi vraiment roi, qui sage en ses projets, Sçache en un calme heureux maintenir ses sujets; Qui du bonheur public ayt cimenté sa gloire, Il faut, pour le trouver, courir toute l’ histoire. La terre conte peu de ces rois bien-faisans. Le ciel à les former se prépare long-temps. Tel fut cet empereur, sous qui Rome adorée Vit renaistre les jours de Saturne et de Rhée: Qui rendit de son joug l’ univers amoureux: Qu’ on n’ alla jamais voir sans revenir heureux: Qui soûpirait le soir, si sa main fortunée N’ avoit par ses bienfaits signalé la journée. Le cours ne fut pas long d’ un empire si doux. Mais, où cherchay-je ailleurs ce qu’ on trouve chez nous? Grand roi, sans recourir aux histoires antiques, Ne t’ avons-nous pas vû dans les plaines belgiques, Quand l’ ennemi vaincu desertant ses remparts, Au-devant de ton joug couroit de toutes parts, Toi-mesme te borner au fort de ta victoire, Et chercher dans la paix une plus juste gloire? Ce sont là les exploits que tu dois avoüer; Et c’ est par là, grand roi, que je te veux loüer. Assez d’ autres, sans moy, d’ un stile moins timide, Suivront aux champs de Mars ton courage rapide; Iront de ta valeur effrayer l’ univers, Et camper devant Dôle au milieu des hyvers. Pour moy, loin des combats, sur un ton moins terrible, Je diray les exploits de ton regne paisible. Je peindray les plaisirs en foule renaissans: Les oppresseurs du peuple à leur tour gemissans. On verra par quels soins ta sage prévoyance Au fort de la famine entretint l’ abondance. On verra les abus par ta main reformez, La licence et l’ orgueil en tous lieux reprimez, Du débris des traitans ton épargne grossie; Des subsides affreux la rigueur adoucie, Le soldat dans la paix sage et laborieux, Nos artisans grossiers rendus industrieux; Et nos voisins frustrez de ces tributs serviles, Que payoit à leur art le luxe de nos villes. Tantost je traceray tes pompeux bâtimens, Du loisir d’ un heros nobles amusemens. J’ entens déjà frémir les deux mers étonnées De voir leurs flots unis au pié des Pyrenées. Déja de tous costez la chicane aux abois S’ enfuit au seul aspect de tes nouvelles lois. Ô que ta main par là va sauver de pupilles! Que de sçavans plaideurs desormais inutiles! Qui ne sent point l’ effet de tes soins genereux? L’ univers sous ton regne a-t-il des malheureux? Est-il quelque vertu dans les glaces de l’ ourse, Ni dans ces lieux brûlez où le jour prend sa source, Dont la triste indigence ose encore approcher, Et qu’ en foule tes dons d’ abord n’ aillent chercher? C’ est par toy qu’ on va voir les muses enrichies, De leur longue disette à jamais affranchies. Grand roi, poursuy toûjours, asseure leur repos. Sans elles un heros n’ est pas long-temps heros. Bien-tost, quoy qu’ il ayt fait, la mort d’ une ombre noire, Enveloppe avec lui son nom et son histoire. Envain pour s’ exemter de l’ oubli du cercueil, Achille mit vingt fois tout Ilion en deuil. Envain malgré les vents aux bords de l’ Hesperie Enée enfin porta ses dieux et sa patrie. Sans le secours des vers, leurs noms tant publiez Seroient depuis mille ans avec eux oubliez. Non à quelques hauts faits que ton destin t’ appelle, Sans le secours soigneux d’ une muse fidelle, Pour t’ immortaliser tu fais de vains efforts. Apollon te la doit: ouvre luy tes tresors. En poëtes fameux rens nos climats fertiles. Un auguste aisément peut faire des virgiles. Que d’ illustres témoins de ta vaste bonté Vont pour toy déposer à la posterité! Pour moy, qui sur ton nom déja brûlant d’ écrire Sens au bout de ma plume expirer la satire, Je n’ ose de mes vers vanter ici le prix. Toutefois, si quelqu’ un de mes foibles écrits Des ans injurieux peut éviter l’ outrage, Peut-estre pour ta gloire aura-t-il son usage: Et comme tes exploits étonnant les lecteurs, Seront à peine creus sur la foy des auteurs; Si quelque esprit malin les veut traiter de fables, On dira quelque jour, pour les rendre croyables Boileau qui dans ses vers pleins de sincerité Jadis à tout son siecle a dit la verité; Qui mit à tout blâmer son étude et sa gloire, A pourtant de ce roy parlé comme l’ histoire. (Epître I)

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    Nicolas Boileau

    Nicolas Boileau

    @nicolasBoileau

    À mon jardinier Laborieux valet du plus commode maître Qui pour te rendre heureux ici-bas pouvait naître, Antoine, gouverneur de mon jardin d’Auteuil, Qui diriges chez moi l’if et le chèvrefeuil, Et sur mes espaliers, industrieux génie, Sais si bien exercer l’art de La Quintinie ; Ô ! que de mon esprit triste et mal ordonné, Ainsi que de ce champ par toi si bien orné. Ne puis-je faire ôter les ronces, les épines, Et des défauts sans nombre arracher les racines ! Mais parle : raisonnons. Quand, du matin au soir, Chez moi poussant la bêche, ou portant l’arrosoir, Tu fais d’un sable aride une terre fertile, Et rends tout mon jardin à tes lois si docile ; Que dis-tu de m’y voir rêveur, capricieux, Tantôt baissant le front, tantôt levant les yeux, De paroles dans l’air par élans envolées, Effrayer les oiseaux perchés dans mes allées ? Ne soupçonnes-tu point qu’agité du démon, Ainsi que ce cousin des quatre fils Aimon, Dont tu lis quelquefois la merveilleuse histoire, Je rumine en marchant quelque endroit du grimoire ? Mais non : tu te souviens qu’au village on t’a dit Que ton maître est nommé pour coucher par écrit Les faits d’un roi plus grand en sagesse, en vaillance, Que Charlemagne aidé des douze pairs de France. Tu crois qu’il y travaille, et qu’au long de ce mur Peut-être en ce moment il prend Mons et Namur. Que penserais-tu donc, si l’on t’allait apprendre Que ce grand chroniqueur des gestes d’Alexandre, Aujourd’hui méditant un projet tout nouveau, S’agite, se démène, et s’use le cerveau, Pour te faire à toi-même en rimes insensées Un bizarre portrait de ses folles pensées ? Mon maître, dirais-tu, passe pour un docteur, Et parle quelquefois mieux qu’un prédicateur. Sous ces arbres pourtant, de si vaines sornettes Il n’irait point troubler la paix de ces fauvettes, S’il lui fallait toujours, comme moi, s’exercer, Labourer, couper, tondre, aplanir, palisser, Et, dans l’eau de ces puits sans relâche tirée, De ce sable étancher la soif démesurée. Antoine, de nous deux, tu crois donc, je le vois Que le plus occupé dans ce jardin, c’est toi ? O ! que tu changerais d’avis et de langage, Si deux jours seulement, libre du jardinage, Tout à coup devenu poète et bel esprit, Tu t’allais engager à polir un écrit Qui dît, sans s’avilir, les plus petites choses ; Fît des plus secs chardons des oeillets et des roses ; Et sût même au discours de la rusticité Donner de l’élégance et de la dignité ; Lin ouvrage, en un mot, qui, juste en tous ses termes, Sût plaire à d’Aguesseau, sût satisfaire Termes, Sût, dis-je, contenter, en paraissant au jour, Ce qu’ont d’esprits plus fins et la ville et la cour ! Bientôt de ce travail revenu sec et pâle, Et le teint plus jauni que de vingt ans de hâle, Tu dirais, reprenant ta pelle et ton râteau : J’aime mieux mettre encor cent arpents au niveau, Que d’aller follement, égaré dans les nues, Me lasser à chercher des visions cornues ; Et, pour lier des mots si mal s’entr’accordants, Prendre dans ce jardin la lune avec les dents. Approche donc, et viens : qu’un paresseux t’apprenne, Antoine, ce que c’est que fatigue et que peine. L’homme ici-bas, toujours inquiet et gêné, Est, dans le repos même, au travail condamné. La fatigue l’y suit. C’est en vain qu’aux poètes Les neuf trompeuses soeurs dans leurs douces retraites Promettent du repos sous leurs ombrages frais : Dans ces tranquilles bois pour eux plantés exprès, La cadence aussitôt, la rime, la césure, La riche expression, la nombreuse mesure, Sorcières dont l’amour sait d’abord les charmer, De fatigues sans fin viennent les consumer. Sans cesse poursuivant ces fugitives fées, On voit sous les lauriers haleter les Orphées. Leur esprit toutefois se plaît dans son tourment, Et se fait de sa peine un noble amusement. Mais je ne trouve point de fatigue si rude Que l’ennuyeux loisir d’un mortel sans étude, Qui, jamais ne sortant de sa stupidité, Soutient, dans les langueurs de son oisiveté, D’une lâche indolence esclave volontaire, Le pénible fardeau de n’avoir rien à faire. Vainement offusqué de ses pensers épais, Loin du trouble et du bruit il croit trouver la paix : Dans le calme odieux de sa sombre paresse, Tous les honteux plaisirs, enfants de la mollesse, Usurpant sur son âme un absolu pouvoir, De monstrueux désirs le viennent émouvoir, Irritent de ses sens la fureur endormie, Et le font le jouet de leur triste infamie. Puis sur leurs pas soudain arrivent les remords, Et bientôt avec eux tous les fléaux du corps, La pierre, la colique et les gouttes cruelles ; Guénaud, Rainssant, Brayer, presque aussi tristes qu’elles, Chez l’indigne mortel courent tous s’assembler, De travaux douloureux le viennent accabler ; Sur le duvet d’un lit, théâtre de ses gênes, Lui font scier des rocs, lui font fendre des chênes, Et le mettent au point d’envier ton emploi. Reconnais donc, Antoine, et conclus avec moi, Que la pauvreté mâle, active et vigilante, Est, parmi les travaux, moins lasse et plus contente Que la richesse oisive au sein des voluptés. Je te vais sur cela prouver deux vérités : L’une, que le travail, aux hommes nécessaire, Fait leur félicité plutôt que leur misère ; Et l’autre, qu’il n’est point de coupable en repos. C’est ce qu’il faut ici montrer en peu de mots. Suis-moi donc. Mais je vois, sur ce début de prône, Que ta bouche déjà s’ouvre large d’une aune, Et que, les yeux fermés, tu baisses le menton. Ma foi, le plus sûr est de finir ce sermon. Aussi bien j’aperçois ces melons qui t’attendent, Et ces fleurs qui là-bas entre elles se demandent, S’il est fête au village, et pour quel saint nouveau, On les laisse aujourd’hui si longtemps manquer d’eau. (Epître XI)

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    Patrice Cosnuau

    @patriceCosnuau

    L’envers de la mitraille Nulle prétention d’ajouter au tumulte, De grimper à cocagne en clamant ma présence, D’assigner le désir à folle résidence, Condamnant l’idéal à finir en volutes. L’âme a-t-elle évité violence et insulte – Des records de focale aux standards de l’outrance ? Ne donnerai-je abri, sur leurs chemins d’errance, Qu’à ceux-là dont le coeur n’entre jamais en lutte ? Je rame en poésie mais la barque tient bon : Vos radeaux d’utopie ont leurs mâts moribonds Et leurs voiles noircies du long souffle des guerres… Je ne suis pas d’ici ni d’ailleurs mais en moi, En cette geôle exquise, optant, au moindre émoi, Pour la fuite en jetant mes clés dans le désert.

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    Paul Éluard

    Paul Éluard

    @paulEluard

    La parole J’ai la beauté facile et c’est heureux. Je glisse sur les toits des vents Je glisse sur le toit des mers Je suis devenue sentimentale Je ne connais plus le conducteur Je ne bouge plus soie sur les glaces Je suis malade fleurs et cailloux J’aime le plus chinois aux nues J’aime la plus nue aux écarts d’oiseau Je suis vieille mais ici je suis belle Et l’ombre qui descend des fenêtres profondes Epargne chaque soir le coeur noir de mes yeux. Paul Eluard, Capitale de la douleur, Répétitions, 1926

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    Paul Verlaine

    Paul Verlaine

    @paulVerlaine

    A Charles Baudelaire Je ne t’ai pas connu, je ne t’ai pas aimé, Je ne te connais point et je t’aime encor moins : Je me chargerais mal de ton nom diffamé, Et si j’ai quelque droit d’être entre tes témoins, C’est que, d’abord, et c’est qu’ailleurs, vers les Pieds joints D’abord par les clous froids, puis par l’élan pâmé Des femmes de péché – desquelles ô tant oints, Tant baisés, chrême fol et baiser affamé ! – Tu tombas, tu prias, comme moi, comme toutes Les âmes que la faim et la soif sur les routes Poussaient belles d’espoir au Calvaire touché ! – Calvaire juste et vrai, Calvaire où, donc, ces doutes, Ci, çà, grimaces, art, pleurent de leurs déroutes. Hein ? mourir simplement, nous, hommes de péché.

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    Paul Verlaine

    Paul Verlaine

    @paulVerlaine

    Art poétique De la musique avant toute chose, Et pour cela préfère l’Impair Plus vague et plus soluble dans l’air, Sans rien en lui qui pèse ou qui pose. Il faut aussi que tu n’ailles point Choisir tes mots sans quelque méprise : Rien de plus cher que la chanson grise Où l’Indécis au Précis se joint. C’est des beaux yeux derrière des voiles, C’est le grand jour tremblant de midi, C’est, par un ciel d’automne attiédi, Le bleu fouillis des claires étoiles ! Car nous voulons la Nuance encor, Pas la Couleur, rien que la nuance ! Oh ! la nuance seule fiance Le rêve au rêve et la flûte au cor ! Fuis du plus loin la Pointe assassine, L’Esprit cruel et le Rire impur, Qui font pleurer les yeux de l’Azur, Et tout cet ail de basse cuisine ! Prends l’éloquence et tords-lui son cou ! Tu feras bien, en train d’énergie, De rendre un peu la Rime assagie. Si l’on n’y veille, elle ira jusqu’où ? Ô qui dira les torts de la Rime ? Quel enfant sourd ou quel nègre fou Nous a forgé ce bijou d’un sou Qui sonne creux et faux sous la lime ? De la musique encore et toujours ! Que ton vers soit la chose envolée Qu’on sent qui fuit d’une âme en allée Vers d’autres cieux à d’autres amours. Que ton vers soit la bonne aventure Éparse au vent crispé du matin Qui va fleurant la menthe et le thym… Et tout le reste est littérature.

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    Paul Verlaine

    Paul Verlaine

    @paulVerlaine

    Mandoline Les donneurs de sérénades Et les belles écouteuses Echangent des propos fades Sous les ramures chanteuses. C’est Tircis et c’est Aminte, Et c’est l’éternel Clitandre, Et c’est Damis qui pour mainte Cruelle fait maint vers tendre. Leurs courtes vestes de soie, Leurs longues robes à queues, Leur élégance, leur joie Et leurs molles ombres bleues Tourbillonnent dans l’extase D’une lune rose et grise, Et la mandoline jase Parmi les frissons de brise.

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    Sully Prudhomme

    Sully Prudhomme

    @sullyPrudhomme

    La jacinthe Dans un antique vase en Grèce découvert, D’une tombe exhumé, fait d’une argile pure Et dont le col est svelte, exquise la courbure, Trempe cette jacinthe, emblème aux yeux offert. Un essor y tressaille, et le bulbe entr’ouvert Déchire le satin de sa fine pelure ; La racine s’épand comme une chevelure, Et la sève a déjà doré le bourgeon vert. L’eau du ciel et la grave élégance du vase L’assistent pour éclore et dresser son extase, Elle leur doit sa fleur et son haut piédestal. Du poète inspiré la fortune est la même : Un deuil sublime, né hors du limon natal, L’exalte, et dans les pleurs germe et croît son poème.

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    Renee Vivien

    @reneeVivien

    Inspiration L’esprit souffle… Et le vent emporte les paroles Qui vacillent ainsi que les musiques folles. Inexplicable autant que l’amour et la foi, Ô l’Inspiration ! reviens bientôt vers moi ! Reviens comme le vent qui chante et se lamente, Reviens comme une haleine implacable ou démente ! Reviens comme le vent qui m’inspira l’amour, Et je t’accueillerai, dans l’instant du retour, Avec l’emportement et l’angoisse démente Qu’inspire le retour d’une infidèle amante !

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    Robert Tirvaudey

    @robertTirvaudey

    Dès la naissance Les poèmes des riens tout juste quelques cœurs Dès la naissance Dispersés dans le souffle du temps Nos menteurs mots Qu’est-ce qu’on écrit à passer sa jeunesse Mais Des yeux à pleins d’ardeurs Place une marque sur la page Lue devant l’auditoire frivole La satisfaction grande possession et heureuse passion Pour cette page comme une lune jour de grand vent N’attendons-nous pas vainement

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    Robert Tirvaudey

    @robertTirvaudey

    Innocente feuille de papier Comme pour éviter la page cornée Ce qui ferait ombrage à cette innocente feuille de papier D’avoir en un coin une corne Or le marque page Qui marque la page sans l’écorner Comme un sceau de présence de l’ouvrage Que tout avance somme il faut Une trace légère à peine perceptible Qui atteste que les lignes se suivent

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