L’alouette et ses petits avec le maître d’un champ Ne t’attends qu’à toi seul, c’est un commun Proverbe.
Voici comme Esope le mit
En crédit.
Les Alouettes font leur nid
Dans les blés, quand ils sont en herbe,
C’est-à-dire environ le temps
Que tout aime et que tout pullule dans le monde :
Monstres marins au fond de l’onde,
Tigres dans les Forêts, Alouettes aux champs.
Une pourtant de ces dernières
Avait laissé passer la moitié d’un Printemps
Sans goûter le plaisir des amours printanières.
A toute force enfin elle se résolut
D’imiter la Nature, et d’être mère encore.
Elle bâtit un nid, pond, couve, et fait éclore
A la hâte ; le tout alla du mieux qu’il put.
Les blés d’alentour mûrs avant que la nitée
Se trouvât assez forte encor
Pour voler et prendre l’essor,
De mille soins divers l’Alouette agitée
S’en va chercher pâture, avertit ses enfants
D’être toujours au guet et faire sentinelle.
Si le possesseur de ces champs
Vient avecque son fils (comme il viendra), dit-elle,
Ecoutez bien ; selon ce qu’il dira,
Chacun de nous décampera.
Sitôt que l’Alouette eut quitté sa famille,
Le possesseur du champ vient avecque son fils.
Ces blés sont mûrs, dit-il : allez chez nos amis
Les prier que chacun, apportant sa faucille,
Nous vienne aider demain dès la pointe du jour.
Notre Alouette de retour
Trouve en alarme sa couvée.
L’un commence : Il a dit que l’Aurore levée,
L’on fit venir demain ses amis pour l’aider…
– S’il n’a dit que cela, repartit l’Alouette,
Rien ne nous presse encor de changer de retraite ;
Mais c’est demain qu’il faut tout de bon écouter.
Cependant soyez gais ; voilà de quoi manger.
Eux repus, tout s’endort, les petits et la mère.
L’aube du jour arrive ; et d’amis point du tout.
L’Alouette à l’essor, le Maître s’en vient faire
Sa ronde ainsi qu’à l’ordinaire.
Ces blés ne devraient pas, dit-il, être debout.
Nos amis ont grand tort, et tort qui se repose
Sur de tels paresseux à servir ainsi lents.
Mon fils, allez chez nos parents
Les prier de la même chose.
L’épouvante est au nid plus forte que jamais.
Il a dit ses parents, mère, c’est à cette heure…
– Non, mes enfants dormez en paix ;
Ne bougeons de notre demeure.
L’Alouette eut raison, car personne ne vint.
Pour la troisième fois le Maître se souvint
De visiter ses blés. Notre erreur est extrême,
Dit-il, de nous attendre à d’autres gens que nous.
Il n’est meilleur ami ni parent que soi-même.
Retenez bien cela, mon fils ; et savez-vous
Ce qu’il faut faire ? Il faut qu’avec notre famille
Nous prenions dès demain chacun une faucille :
C’est là notre plus court, et nous achèverons
Notre moisson quand nous pourrons.
Dès lors que ce dessein fut su de l’Alouette :
C’est ce coup qu’il est bon de partir, mes enfants.
Et les petits, en même temps,
Voletants, se culebutants,
Délogèrent tous sans trompette.
il y a 8 mois
Jean de La Fontaine
@jeanDeLaFontaine
L’astrologue qui se laisse tomber dans un puits Un Astrologue un jour se laissa choir
Au fond d’un puits. On lui dit : « Pauvre bête,
Tandis qu’à peine à tes pieds tu peux voir,
Penses-tu lire au-dessus de ta tête ? «
Cette aventure en soi, sans aller plus avant,
Peut servir de leçon à la plupart des hommes.
Parmi ce que de gens sur la terre nous sommes,
Il en est peu qui fort souvent
Ne se plaisent d’entendre dire
Qu’au livre du Destin les mortels peuvent lire.
Mais ce livre, qu’Homère et les siens ont chanté,
Qu’est-ce, que le Hasard parmi l’Antiquité,
Et parmi nous la Providence ?
Or du Hasard il n’est point de science :
S’il en était, on aurait tort
De l’appeler hasard, ni fortune, ni sort,
Toutes choses très incertaines.
Quant aux volontés souveraines
De Celui qui fait tout, et rien qu’avec dessein,
Qui les sait, que lui seul ? Comment lire en son sein ?
Aurait-il imprimé sur le front des étoiles
Ce que la nuit des temps enferme dans ses voiles ?
A quelle utilité ? Pour exercer l’esprit
De ceux qui de la Sphère et du Globe ont écrit ?
Pour nous faire éviter des maux inévitables ?
Nous rendre, dans les biens, de plaisir incapables ?
Et causant du dégoût pour ces biens prévenus,
Les convertir en maux devant qu’ils soient venus ?
C’est erreur, ou plutôt c’est crime de le croire.
Le Firmament se meut ; les Astres font leur cours,
Le Soleil nous luit tous les jours,
Tous les jours sa clarté succède à l’ombre noire,
Sans que nous en puissions autre chose inférer
Que la nécessité de luire et d’éclairer,
D’amener les saisons, de mûrir les semences,
De verser sur les corps certaines influences.
Du reste, en quoi répond au sort toujours divers
Ce train toujours égal dont marche l’Univers ?
Charlatans, faiseurs d’horoscope,
Quittez les cours des Princes de l’Europe ;
Emmenez avec vous les souffleurs tout d’un temps :
Vous ne méritez pas plus de foi que ces gens.
Je m’emporte un peu trop : revenons à l’histoire
De ce Spéculateur qui fut contraint de boire.
Outre la vanité de son art mensonger,
C’est l’image de ceux qui bâillent aux chimères,
Cependant qu’ils sont en danger,
Soit pour eux, soit pour leurs affaires.
il y a 8 mois
J
Jean-Pierre Villebramar
@jeanPierreVillebramar
Album Ne prends pas de photos du bonheur
un jour, il te rattrapera, courant
derrière toi, et par la manche te tirant :
hey !
C’est moi, ton bonheur, tu te souviens ?
J’ai existé
je me souviens ; voulant garder de toi ton image,
tu m’as dit :
ne prends pas de photos de l’amour
il suffit
de se souvenir
un jour courant derrière toi, te tirant par la manche :
hey !
Rappelle-toi l’ami, c’est moi l’amour
un jour où je voulais garder l’image de l’amour
tu avais raison
il y a 8 mois
J
Jean-Pierre Villebramar
@jeanPierreVillebramar
Catalunya Dans ma vallée, on entre par une route étroite et dangereuse
ni questionnaire, ni douanier
ceux qui passent savent qu’il y a danger
ils passent
Dans ma vallée, les chemins montent vers des cortals,
en 39, des gens avec des noms pas de chez nous
posaient leur sac
quand ils en avaient un
dans ma vallée, il y a des clandestins et des passeurs,
les gens
ne sont ni saints, ni des héros,
seulement
des paysans têtus, restés
de la dernière guerre ; il se dit qu’un guerrillero
avec un fusil-mitrailleur
a ralenti une colonne de soldats venus de l’étranger
elle a fini par arriver au village, et l’a brûlé
mais il n’y avait personne dans les rues, ni dans les maisons,
pour y brûler avec,
et ils sont revenus
Dans ma vallée, il n’y a pas de savants
en physique des particules,
le temps coule comme bon lui semble,
les humains naissent, aiment et se détestent, puis meurent
sans y faire d’histoires
les vivants savent : « c’est le champ d’Untel », (ou d’une telle),
il avait mauvais caractère et un fusil de chasse
calibre 12, avec du petit plomb
sur le feu, la cuisine du soir
un verre de café sur la table
pour celui qui montait les voir,
et des histoires de voisins, ça faisait rire
des fois, pas gentiment
dans ma vallée, on entre par une gorge étroite et dangereuse
il n’y a pas de panneau « danger »
ceux qui montent savent qu’il y a danger
ils passent
il y a 8 mois
J
Jean-Pierre Villebramar
@jeanPierreVillebramar
L’amour fou « J’entends pleurer les coqs de la nuit »
d’après Gabriel Okoundji
j’entends pleurer les coqs de la nuit
ils disent les espoirs et les parjures ;
j’écoute avec suspicion leurs phrases simples.
L’eau serait l’eau, la rivière, rivière, et les étoiles, étoiles ;
mais l’étoile est soleil
l’amour, fou
je cherche à déchiffrer un regard derrière des paupières closes
l’amour sera-t-il amour ? ou sommeil ?
de sa fourrure brune, j’attends tous les bonheurs du monde :
si l’amour était autre ?
reste à trouver cet autre
je vis avec tristesse le triomphe des mieux-disants ; applaudissez-les, camarades !
comme ils parlent bien, les habiles !
me voyant seul en route vers la route sans retour, je me retourne, et vois le monde
tel qu’on le décrit là-bas, chez les diseurs de hauts de foires : l’eau serait l’eau,
la rivière, rivière, l’étoile, étoile
l’amour, fou
j’entends pleurer les coqs de la nuit ; ils disent :
« ce sont les femmes qu’il a aimées, qui l’ont aimé, celles-ci des années,
celles-là un jour. Comme il fait noir ! »
(André Breton).
Comme il fait noir !
il y a 8 mois
Joachim du Bellay
@joachimDuBellay
Seigneur, je ne saurais regarder d’un bon oeil Seigneur, je ne saurais regarder d’un bon oeil
Ces vieux singes de cour, qui ne savent rien faire,
Sinon en leur marcher les princes contrefaire,
Et se vêtir, comme eux, d’un pompeux appareil.
Si leur maître se moque, ils feront le pareil,
S’il ment, ce ne sont eux qui diront du contraire,
Plutôt auront-ils vu, afin de lui complaire,
La lune en plein midi, à minuit le soleil.
Si quelqu’un devant eux reçoit un bon visage,
Es le vont caresser, bien qu’ils crèvent de rage
S’il le reçoit mauvais, ils le montrent au doigt.
Mais ce qui plus contre eux quelquefois me dépite,
C’est quand devant le roi, d’un visage hypocrite,
Ils se prennent à rire, et ne savent pourquoi
il y a 8 mois
J
Jules Delavigne
@julesDelavigne
Chien errant Il essaie des fois de défaire ce nœud
Essentiel, sa force, sa faiblesse
Une couronne imaginaire posée sur la tête,
Une brioche croquée dans la pénombre,
Loin du regard des autres
Le soleil brille sur lui
Il ne le voit pas
L’estragon de son hémisphère,
Il pourrait laisser ses bagages derrière lui
Et aller dans les roses de son enfance
Embrasser le sable des jours oubliés
Pourquoi se cache-t-il quand le vent se lève ?
Ses poches sont vides de toute façon.
Le chien errant en lui le suit depuis toujours
Mais n’a jamais la force pour le rattraper
Son ciel de l’absolu est entouré d’horizons
Mais il l’écarte, un mensonge démenti
Installé confortablement sur son canapé
Au milieu d’un champ de poussière
Il ne vit que la moitié de son existence
il y a 8 mois
J
Jérôme Matin
@jeromeMatin
L’autre moitié de mon âme Vacarme rouge, cité infâme
Je marchais en elle, silencieux d’avanie
Quand l’univers m’envoya dans sa bonté infinie
L’oeuvre ultime de son écrin d’harmonie
Ainsi m’apparut l’autre moitié de mon âme
Comme souffle le vent entre mornes et ravines
Comme s’offre la pluie aux louanges des racines
Comme dansent les mots dans la bouche du griot
Ainsi m’apparut l’autre moitié de mon âme
La face éclairée de nos corps confondus
L’immuable de nos forces à nos rires suspendu
De nos peaux feuilletées l’esquisse d’un joyau
Nos pensées jumelles
Nos reflets lumineux
Armures de tendresse sous un orage de feu
Chacun refuge et rempart de l’autre
Si l’amour est combat, que martyr soit nôtre
Ainsi m’apparut l’autre moitié de mon âme
Par les signes du temps, ma promise, mon aimée
Ainsi m’apparut l’autre moitié de mon âme
Mes jours s’en furent de grâce parfumés
Ainsi puissions-nous partager nos peines
Comme le pain rassis les jours de disette
Nos rêves insolents les nuits de lunes pleines
Et atteindre enfin l’achèvement de notre être
il y a 8 mois
K
Kamal Zerdoumi
@kamalZerdoumi
Différence Parfois naissent
des androgynes
apparence d’homme
vérité de femme
Certains grandissent
en pleine lumière
La plupart cachent
sous le masque de fer
d’une virilité feinte
leur émouvant secret
Les fanatiques de la suprématie
phallique
font la chasse
à ces sorcières d’un genre nouveau
leurs doubles tout justes bons
pour l’humiliation ou le tombeau
Aimez la différence
C’est encore vous-même
cet homme plus séduisant
qu’une femme
votre frère de sang
chant silencieux
de votre âme
il y a 8 mois
K
Kamal Zerdoumi
@kamalZerdoumi
Ecrivain(s) Il a des fruits d’or
pour tresser son verbe
des lettres entrelacées
dans l’alcôve
de sa mémoire
Il craint le cyprès
qui murmure
au-dessus des tombes
on ne sait quel secret
Son jardin est gorgé
de lumière
Parfois y fulgure l’ombre
C’est un être double
comme nous tous
qui rêvons d’unité
androgynes notoires
jusqu’au désespoir
il y a 8 mois
K
Kamal Zerdoumi
@kamalZerdoumi
En classe Pendant que le maître
aborde un nouveau chapitre
du vieux savoir
l’enfant pousse
les portes de corne
ou d’ivoire
dormeur émerveillé
qui suit du regard
le vol de l’oiseau
derrière la vitre
là-bas dans le ciel bleu
Sa distraction déplaît
au pitre
qui menace de le punir
Cet homme ignore
que dans le rêve
est l’avenir
il y a 8 mois
K
Kamal Zerdoumi
@kamalZerdoumi
Hôte Aussi insignifiant qu’une vie
son poids sur mon épaule
toujours sur le point
de confier un grand secret
à l’oreille du vent
ce visiteur beau
comme l’invisible
me parle dans sa langue
inaudible
dont chaque mot
pur mystère
m’invite à me taire
il y a 8 mois
K
Kamal Zerdoumi
@kamalZerdoumi
Insaisissable Ne me cherchez pas dans vos livres
ni chez les gens ivres de gloire
Ne cherchez pas à me suivre
à placer en moi tous vos espoirs
Je ne suis pas un modèle
de vice ou de vertu
pour ceux et celles
qui tuent ou qui se tuent
Le vent sait mon histoire
de feuillage et de sable
de chute et de vanité
ma joie d’être vivant, mortel
et sans visage
le bonheur
d’être ce souffle qui se lève
et retombe
cette vague infatigable
son eternel refrain
d’écume et d’embruns
il y a 8 mois
L
Laetitia Sioen
@laetitiaSioen
Enivrance Enivre-toi de tes envies
Hurle jusqu’à la délivrance
Ris à en perdre la tête
Pleure de tes émotions
Déchire-toi de tes cicatrices
Vole à travers tes rêves
Regarde l’allégresse du monde
Vibre au-delà des horizons,
Écoute parler la pluie,
Vois ce que disent les nuages,
Goûte la saveur du soleil,
Bois l’eau de la source,
Vole à travers le vent,
Touche l’érosion de la terre,
Marche entre les instants d’un devenir.
Tu peux dormir les yeux ouverts,
Incrédule ou docile.
Tu peux nier ou décider de voir
Irrésistiblement la vie.
il y a 8 mois
M
Michel Ménaché
@michelMenache
Ballade du condamné à Patrice Lumumba
et Che Guevarra
Ils m’ont ouvert le ventre
en sont sortis des oiseaux
cent oiseaux multicolores
qui ont chanté l’amour de vivre
ils m’ont crevé les yeux
en ont jailli deux sources claires
deux sources fortes et vives
qui ont rafraîchi la terre lasse
ils m’ont arraché les ongles
et chaque fois une fleur s’ouvrait
pour qu’un papillon s’y posât
ou une abeille parfumée
alors ils m’ont coupé les bras
mes bras se sont dressés en terre
et ils ont vu deux cerisiers
les cerises rougissaient vite
ils ont aussi cherché mon cœur
l’ont piétiné l’ont saccagé
ils ont senti qu’ils s’enfonçaient
un lac naissait sous leurs pieds sales
ils sont partis fous de colère
terreur de me sentir partout si proche
et les oiseaux au-dessus d’eux
chantaient que je n’étais pas mort
il y a 8 mois
M
Michel Ménaché
@michelMenache
Danser l’absence Dansant sous vide
aux ailes du silence
elle ouvre l’espace
à l’ouïe du mystère
*
Spéléologue de l’être
la danseuse s’insinue
ange égaré
dans les profondeurs de l’absence
*
Danseuse solitaire
Elle repeuple l’espace nu
d’un temple désert
vidé de ses divinités
*
Ouvrir le bal
dans la chambre vide
le corps s’anime
en archipel de signes
*
Danseuse poids plume
elle marche sur des œufs
le doute métaphysique
est en ligne
*
Solitude de funambule
entre naître et mourir
la longueur de la corde
se jauge au pouls de l’arpenteur
*
« La joie est la meilleure solution »
disait-elle
Huit mille œillets dans la Cour d’Honneur
Nelken poème toujours à vif du sang
de Pina
il y a 8 mois
M
Michelle Grenier
@michelleGrenier
Gavroche du crayon A Cabu
Il est mort, le rieur, les doigts pleins d’encre
Gavroche du crayon, espiègle diablotin
Qui croquait la bêtise de sa plume épicée.
Son regard, lampion contre l’obscurantisme
S’est éteint ce matin. Ravivons la lumière
Nulle voix ne va jamais se taire
Face à la barbarie encagoulée.
Debout les vivants !
Aucune peur ne musellera nos paroles :
Sans bâillon ni camisole,
Par un cri accordé à nos gorges éraillées
D’une seule et même voix clamons :
Le rire vole plus haut que les plombs !
Rions, rions de l’ignorance crasse
Des fanatismes de tout poil.
Poètes, affûtons nos crayons
Osons être plus audacieux en créant
Ce rien et ce tout qui se nourrit d’âme
Et qui fait vivre intensément.
il y a 8 mois
N
Nadia Ben Slima
@nadiaBenSlima
Abyssal Quand comprendras-tu?
tu n’es pas ce que tu crains
et les peurs ne revêtent
que les âmes muettes
les peines que tu repeins
d’une angoisse ingénue
ne valent pas le dessein
promis par ta vertu
Les fleurs ont soudain
le parfum de ta peur
et quand tu te souviens
s’agite le chagrin
tu en fais ta demeure
des remparts de riens
Quand comprendras-tu?
tu es bien ce qui te plaît
il y a 8 mois
N
Nashmia Noormohamed
@nashmiaNoormohamed
Apprendre à s’aimer Il le faut, un petit peu,
S’aimer soi-même,
Assez pour se respecter,
Assez pour s’accepter,
Il le faut, un petit peu,
Apprendre à s’aimer,
Pour à son tour aimer,
Pour à son tour donner,
Il le faut, un petit peu,
S’aimer soi-même,
Afin de ne pas se blesser,
Afin de ne pas en chagriner,
Il le faut, un petit peu,
Apprendre à s’aimer,
Dans cet amour, s’abriter,
De ses racines, se relever,
Il le faut, un petit peu,
S’aimer soi-même,
S’estimer et s’en habiller,
Se mouvoir avec dignité,
Il le faut, un petit peu,
Apprendre à s’aimer,
Éducation inachevée,
Celle qui ne l’a enseigné.
Il le faut, un petit peu,
S’aimer soi-même,
Contours clairement tracés,
De cette âme, à toujours respecter.
il y a 8 mois
N
Nashmia Noormohamed
@nashmiaNoormohamed
Dis, dis-moi… Quand l’ami se censure, il se cache?
Quand il se découvre, il se révèle!
Quand il choisit, il parle.
Et ce qu’il ne dit pas, pour lui, parle…
La sincérité d’un propos,
La mascarade d’un dialogue,
Parler ou se taire,
Le silence en dit long…
Dis-moi « patience »,
Parle-moi de « confiance »,
« Frustration » et « Ignorance »,
Dis-moi « connaissance. »
il y a 8 mois
N
Nashmia Noormohamed
@nashmiaNoormohamed
Donner le change Le paraître, le mal-être, tout se mélange,
Sous le masque, le souvenir, la blessure,
Face aux autres, le sourire, la démesure.
Cacher cette fragilité, cacher cet abîme,
Derrière la rancoeur, l’incompréhension,
Derrière la tristesse, la faute, la passion.
Les peut-être, les si, rien n’est clair,
Face au rêve, la lâcheté, l’immaturité,
Sur le coeur, la cicatrice, marqué à jamais.
Marcher dignement, donner le change,
Comme si le coeur s’en était bien remis,
Comme si les souvenirs s’étaient soumis.
Les mots, les choses, qui n’ont été dites,
Face au miroir, essayer de comprendre,
Dans son esprit, meubler les silences…
Se donner (à lui), se livrer complètement,
S’en aller la première, fuir face au rejet,
S’aimer, se blesser, s’éloigner, se perdre…
L’esprit essaie de raisonner le coeur,
La raison essaie d’arraisonner la pensée; L’amour lui, n’en a que faire, il déborde,
En vase clos, de l’un en l’autre, et de
L’autre au plus profond de soi,
Vers cette âme en peine…
il y a 8 mois
N
Nashmia Noormohamed
@nashmiaNoormohamed
Du courage Il faut avoir le courage de se faire face,
De regarder son âme dans cette glace,
Au travers de ses fissures et blessures,
De ses brisures et de toutes ses ratures.
Il faut trouver le courage de se faire face,
Tous les jours oeuvrer, demeurer coriace,
Chercher un moyen de relever le regard,
Se relever et avancer, sans rester hagard.
Il faut avoir le courage de se faire face,
Malgré ses échecs et ses disgrâces,
Essayer d’oblitérer son abjecte lâcheté,
Agir, réagir et ne jamais laisser tomber.
Il faut trouver le courage de se faire face,
De se pardonner ses mauvaises passes,
Ses fautes monumentales et ses erreurs,
Avec bienveillance, patience et sans peur.
Le courage est une bataille quotidienne,
Il n’est jamais acquis, et ainsi se construit,
En nous modelant; à chaque jour sa peine,
À chaque détour, le coeur se révèle et éblouit.
il y a 8 mois
N
Nashmia Noormohamed
@nashmiaNoormohamed
Face à face Assise sur une plage,
Le visage face à la mer,
Le dos aux montagnes,
J’ai pensé:
C’est curieux comment
les gens sont,
C’est étrange comment
les noeuds se font et se défont.
C’est curieux comment
leurs mots heurtent,
C’est étrange comment
leurs actes abusent et désabusent.
C’est curieux comment
nous sommes faits,
C’est étrange comment
nos yeux distraits disent vrai.
Cela demeure pour moi un mystère,
Ces vagues qui partent et qui reviennent,
Ces nuages qui aspirent aux cimes,
Et ces gens,
Ces mêmes gens qui se miment.
il y a 8 mois
N
Nashmia Noormohamed
@nashmiaNoormohamed
La balafre Entaille naissante, au creux des fossettes,
Cicatrice identitaire et rudimentaire,
Blessure marquante, aux fers, marquée,
Sur un visage à jamais estampillé.
La balafre, profonde et muette,
Sceau visible, à dessein, arbitraire,
Cachet culturel rare, personnifié…
Une nouvelle vie future est tatouée.
Mystique et rituelle, de nos jours, désuète,
Coutume ancestrale, aux rites séculaires,
Signe quasi défigurant, éminemment sacré,
Authenticité indigène, qui surgit du passé.
Quand l’être en devenir se fait poète,
La scarification est ancrée dans sa chaire,
Beauté promise à l’intégration convoitée,
Fières tradition et culture engagées…
Suprême distinction honorifique abstraite,
En vue d’identifier et d’embellir ses pairs,
Symbole tribal unique d’un geste esquissé,
Marques de feu et de sang, maintes fois répétées.
il y a 8 mois
N
Nashmia Noormohamed
@nashmiaNoormohamed
La liberté D’une vie de bohèmes à l’indifférence des refuges, d’une vie de simples civils à la tragédie des réfugiés et des immigrés…
Quel est le prix de notre liberté ?
Être traqués, persécutés, chassés, hors de chez soi, être aux abois, aux abris, abrutis par la guerre, la faim, la peur, vivre ainsi ou survivre…
Quel est le prix de notre liberté ?
D’un homme à l’autre, d’une terre à la sui-vante, s’éloigner, se distancer, se projeter, loin du chaos, de la folie, de la barbarie… Quel est le prix de notre liberté ?
Tout quitter, partir, fuir afin de retrouver l’humanité et la fraternité, choisir d’être l’étranger, le voyageur, l’autre, le choix de toute une vie…
Quel est le prix de notre liberté ?
Nous qui sommes libres et qui vivons en paix, que ne ferions-nous pour nos familles, pour nos amis, pour notre patrie ? Que ne ferions-nous pour ce que nous croyons être un acquis ?
il y a 8 mois
N
Nashmia Noormohamed
@nashmiaNoormohamed
L’intention et la volonté L’intention et la volonté,
Mènent sans cesse,
Une bataille acharnée,
En mon for intérieur.
L’intention est ambitieuse (traître),
Rêveuse et optimiste,
Velléitaire et surprenante,
Pareille à un mirage.
La volonté est faible,
Prometteuse et décevante,
Indomptable et réfractaire,
Se dérobant par mille excuses.
Si seulement
L’intention était moins prétentieuse…
Si seulement
La volonté y mettait un peu du sien…
Si seulement
Elles n’étaient point si semblables…
il y a 8 mois
N
Nashmia Noormohamed
@nashmiaNoormohamed
Ma peine Ma peine, ma vieille amie,
Douleur imperceptible,
Au fond d’une abysse infinie,
Ma tristesse, mon véhément reflet,
Que me renvoie cette vile peine,
Inénarrable sentiment désabusé,
Mes sentiments, mes vacillants vassaux,
Fluctuants et insaisissables,
Débordements continus de flots,
Mes larmes, mes vénérables alliées,
Flots promptes à rompre la digue,
Tendres, libres et émancipés,
Mes regrets, mes vénéneux remords,
Plaies ouvertes et blessures inoubliables,
Infâme culpabilité rendue tendre bourreau,
Mes cris, mes virulents ennemis,
Aveux perdus dans l’épaisse obscurité,
Chaotiques regrets et indicibles avis,
Mes sanglots, mes vains sanglots,
Incontrôlables aveux saccadés,
Laide résonance de ces maux,
Mon corps, ma vétuste armure,
Jonchés d’amours et d’amitiés
Maux réels et virtuelles fêlures,
Mes mots, ma vibrante verve,
Écrits voraces, virtuels et excessifs
Interprétations confuses et brèves,
Ma voix, mon velouté timbre,
Tantôt confus tantôt apaisés,
Note éraillée, en mal de sisymbre,
Mon esprit, mon vif serviteur,
Voix raisonnable et insensible à l’envie,
Repaire de percutants franc-tireurs,
Ma mémoire, ma volubile maîtresse,
Esprit inique et insolente compagne,
Bouillonnante et émotive traîtresse,
Mes peurs, mes victorieuses frayeurs,
Crainte de l’échec, mauvaise conseillère
Insolente faiblesse menant droit à l’erreur,
Ma lâcheté, ma véritable faiblesse,
Symbole sans égal de tous mes abandons,
Réussites avortées, réel signal de détresse,
Mes défauts, mes vaseuses défaillances,
Fuyants, embrumés, réels et incorrigibles,
Oeuvrer sur soi sans cesse et à outrance…
Mes choix, mes vertueuses résolutions,
Chemins fuyants impairs, pavés de naïveté,
D’immaturité, d’oublis… tristes tribulations,
Mes défaites, mes vexantes pertes,
Choix irresponsables, chèrement payés,
Certes instructifs, édifiants casse-têtes,
Mon coeur, mon vaillant protecteur,
Forteresse de courage et de cran,
Édifiant d’audace, mémoire de douceur.
Ma vie, ma verdoyante vie,
Au coeur de précieux instants passagers,
Des bonheurs fugaces sitôt ternis,
Mon amour, mon vagabond soupirant,
Mon ami, mon amant, ma vie, mon tout,
Qui m’a effleuré de ce doux sentiment.
il y a 8 mois
Nicolas Boileau
@nicolasBoileau
L’amateur d’horloges Sans cesse autour de six pendules,
De deux montres, de trois cadrans,
Lutin, depuis trente et quatre ans,
Occupe ses soins ridicules.
Mais à ce métier, s’il vous plaît,
A-t-il acquis quelque science?
Sans doute; et c’est l’homme de France
Qui sait le mieux l’heure qu’il est!
il y a 8 mois
N
Nérée Beauchemin
@nereeBeauchemin
Le branle du sanctus Dans l’air religieux des dimanches, ondulent
Ces accords, graves comme un angélus du soir,
Que les cloches de bronze, au rythme d’encensoir,
Au sanctus de la messe, en sourdine, modulent.
Sanctus! Sanctus! Rosaire aux doigts, priant tout bas,
Grand’mère, dans un rêve extatique plongée,
D’un seuil à l’autre seuil, par la chambre imagée,
Promène le marmot qui fait ses premiers pas.
Le pied rose, à demi, sur le plancher se pose,
Et le petit genou fléchit à tout moment.
La pavanne pieuse est un encensement;
Le couple oscille, à chaque escousse, à chaque pause.
Sonnerie et lumière animent le tableau,
Et, dans un harmonique unisson, font cortège
Aux cheveux blancs qu’argente une mousse de neige,
Aux blonds cheveux que berce un roulis de berceau.
Ils vont, tant que le branle épand ses larges ondes,
Très révérencieux, comme en procession.
On croit ouïr des voix de bénédiction.
Et l’humble vieille songe à des choses profondes.
La cloche, semble-t-il, rythme l’envolement
Du bonnet de baptême aux blancheurs irréelles,
Et le balancement du clocher de dentelles
Qui pointe, comme flèche, au chef de grand’maman.
Sanctus! Dans l’or léger que la vitre tamise.
Dans l’or que dissémine un soleil de juillet,
Les deux fronts inégaux se nimbent d’un reflet,
Et la chambre éblouit comme une nef d’église.
Sanctus! Heureux l’enfant qui commence à marcher
En ces murs imagés que le cierge illumine,
Et qui, de Chandeleur en Chandeleur, chemine
Dans l’orbe de musique et d’encens du clocher.
il y a 8 mois
O
Ondine Valmore
@ondineValmore
La rose A Monsieur Sainte-Beuve
Quand nous respirons cette rose
Au front pâle, au souffle embaumé,
Tu nous dis qu’en son sein repose
Un vers enfermé.
Tu la saisis et tu la cueilles,
Fouillant dans son calice vert
Qui, tout dépouillé de ses feuilles, reste à découvert.
Puis tu fais voir l’insecte avide
Se tordant, roulé tout au fond
De la pauvre fleur au coeur vide
Que tes mains défont.
Eh! Quoi! savant inexorable,
Tuant la rose avant l’hiver,
Tu détruis une fleur aimable,
Pour trouver un vers!
En admirant les belles choses
Avions-nous donc trop de candeur?
Va, grâce à toi, toutes les roses
Vont nous faire peur.
Ah ! plutôt dans les fleurs mortelles
Montre-nous le miel précieux.
Apprends-nous à trouver en elles
Ce qui vient des cieux.
Apprends-nous à laisser la lie
Qui se cache au fond de notre eau.
Et que l’âme immortelle oublie
Le ver du tombeau !