splash screen icon Lenndi
splash screen name leendi

Mer

157 poésies en cours de vérification
Mer

Poésies de la collection mer

    J

    Joseph Autran

    @josephAutran

    Mer calme Il est nuit : la mer dans son lit repose, Assoupie au loin si tranquillement Que pas une brise à cette heure n'ose Troubler d'un baiser son recueillement. Sans murmure aucun, sans aucune ride, Qu'elle est belle à voir cette mer qui dort, Laissant admirer dans le flot limpide A la claire nuit ses étoiles d'or ! Pour jouir ainsi de ce calme immense, Quel est ton secret, ô mer ? Dis-le-moi ! Car je sais un cœur, un cœur en démence, Qui voudrait enfin dormir comme toi !

    en cours de vérification

    J

    Joseph Autran

    @josephAutran

    Sur une plage du latium La nuit descend ; la mer, dont je longe la plage, Blanchit sur les galets à grand bruit charriés. Sifflant une chanson de farouche présage, Le vent froisse ma tempe, et me lance au visage La poussière des flots qui brisent à mes pieds. L'ombre submerge au loin les collines éteintes ; Pas un reste d'azur dans le ciel ni sur l'eau. Du soir envahissant tout subit les atteintes ; L'occident seul, rougi d'incendiaires teintes, Comme un ruban de feu luit au fond du tableau. Ces grèves, qui dormaient hier silencieuses, D'un terrible fracas partout grondent ce soir : Bruit des forêts de pins, craquement des yeuses, Hurlement sur l'écueil des ondes furieuses, Cris d'oiseaux effarés tournant sous un ciel noir. Hâtons le pas : en vain cent débris historiques Appelleraient encore un hommage, un coup d'œil. Assez je vous ai vus, vieux temples, vieux portiques, Monuments si peuplés, si beaux, aux jours antiques, Si remplis désormais de néant et de deuil ! Sans avoir vu passer une figure humaine, J'ai suivi, tout le jour, le rivage latin ; Seul et n'obéissant qu'au hasard qui me mène, Tout le jour, j'ai foulé le bord de ce domaine Où chaque pas évoque un fantôme lointain. Maintenant que le soir précipite sa chute, Que la nuit me saisit de son âpre fraîcheur, Pour abriter mon front à la tempête en butte, D'un pâtre hospitalier trouverai-je la hutte, Ou le toit de roseaux de quelque brun pêcheur ? Verrai-je, à l'horizon de ma route inconnue, Surgir une lumière, apparaître un rayon ? Ou faudra-t-il enfin prendre la roche nue Pour chevet, et dormir, seul ici, sous la nue, Comme autrefois Énée arrivant d'ilion ? Ah ! dût le flux grondant me rouler sur la plage Comme un débris de barque empreint de sel amer ; Dût la libre cavale ou le buffle sauvage Me fouler au galop, en venant au rivage Aspirer la tempête et répondre à la mer ; Je n'en bénis pas moins l'heureuse destinée Qui, si loin de Paris, sur ces bords m'a conduit, Vous offrant, vous livrant mon âme fascinée, Ô liberté première, ô terre abandonnée, Ô mer tempétueuse et mugissante nuit !

    en cours de vérification

    J

    Joseph Autran

    @josephAutran

    Tempête Tout regard se perd, tant la brume est noire ; Il ne fut jamais plus aveugle nuit : Au sein du néant je pourrais me croire, Si je n'entendais un immense bruit. Cette voix, ô mer ! C'est ta voix qui tonne Sur l'écueil voisin chargé de galets, Tandis que le vent, le grand vent d'automne, Fait craquer mon' toit et bat mes volets. Aquilon lugubre, incessante lame, Oh ! Je vous sais gré de hurler ainsi ! Vous traduisez bien ce que j'ai dans l'âme. Merci, vent d'automne ! Océan, merci !

    en cours de vérification

    J

    José Maria de Heredia

    @joseMariaDeHeredia

    Le récif de corail Le soleil sous la mer, mystérieuse aurore, Éclaire la forêt des coraux abyssins Qui mêle, aux profondeurs de ses tièdes bassins, La bête épanouie et la vivante flore. Et tout ce que le sel ou l'iode colore, Mousse, algue chevelue, anémones, oursins, Couvre de pourpre sombre, en somptueux dessins, Le fond vermiculé du pâle madrépore. De sa splendide écaille éteignant les émaux, Un grand poisson navigue à travers les rameaux ; Dans l'ombre transparente indolemment il rôde ; Et, brusquement, d'un coup de sa nageoire en feu, Il fait, par le cristal morne, immobile et bleu, Courir un frisson d'or, de nacre et d'émeraude.

    en cours de vérification

    J

    José Maria de Heredia

    @joseMariaDeHeredia

    Les conquérants Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal, Fatigués de porter leurs misères hautaines, De Palos de Moguer, routiers et capitaines Partaient, ivres d’un rêve héroïque et brutal. Ils allaient conquérir le fabuleux métal Que Cipango mûrit dans ses mines lointaines, Et les vents alizés inclinaient leurs antennes Aux bords mystérieux du monde Occidental. Chaque soir, espérant des lendemains épiques, L’azur phosphorescent de la mer des Tropiques Enchantait leur sommeil d’un mirage doré ; Ou penchés à l’avant des blanches caravelles, Ils regardaient monter en un ciel ignoré Du fond de l’Océan des étoiles nouvelles.

    en cours de vérification

    J

    Jules Delavigne

    @julesDelavigne

    Equilibre fuyant J’avance lentement Sous un soleil écrasant Mes pieds, plus lourds à chaque pas, S’enfoncent inlassablement Dans le sable liquide. Et je ne vois que des champs couverts de neige Que des dimanches matins heureux Dans mes montagnes fraiches et splendides. La vielle dame m’avait dit un jour Que le bonheur est dans le mouvement Dans la fluidité entre deux étapes, deux états Et nulle part ailleurs. Devant moi, toujours, mon enfance L’air chargé de sel, porté par le vent Ces milliers d’étincelles dans l’eau Ces milliers de pensées insaisissables Et le son des galets brassés par les vagues Qui me bercera jusqu’à l’infini.

    en cours de vérification

    J

    Jules Delavigne

    @julesDelavigne

    Pétales bleus de la rose de l’aube Pétales bleus de la rose de l’aube acceptez les agissements de ma plume. Si je cours si tôt, ce n’est pas pour vous remuer. Apollon me tire de vos cotés, mais ne me donne guère de leçons. Quand j’aurai fini, nous irons ensemble sur les collines, au-dessus de la mer où le vent d’automne caressera nos visages baignés de lumière. C’est là-bas, pièce par pièce que nous regarderons ce puzzle. Et quand les bateaux quitteront le port, nous partirons, nous aussi, par le chemin de la falaise que nous connaissons si bien. Mais maintenant, ma fleur, patience, dormez…

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Alliés Faites vos bonds étonnants mes mots mes dauphins dans l’indigo de l’inconscient Apprenez-moi le langage mystérieux de votre transparence à nager dans l’origine antidote de mon errance A califourchon sur vos dos métissés permettez qu’au cours de ce beau voyage je trace des signes pour vous dessins familiers sur ma feuille mon métier à tisser Faites la beauté coutumière mes mots mes dauphins avant de repartir au large et laisser le poète à sa marge

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Couple J’ai pris ta main d’écume dans ma main de poussière et ton œil jaune où l’éternité s’allume a caressé mes hivers Le clair-obscur de mes pensées a goûté à ta fougue verte Me voilà ivre j’en suis sûr devant ton livre aux vagues retournées ces rêves insensés par le vent ce vieux faune qui les mène à leur perte Dans ta main d’écume devenue poussière dans le sable assoiffé un vivant sur la plage…

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Eté La mer à la robe bruissante de bleu pose l’émeraude de son regard sur le carrosse d’or éphémère qui nous attend passants lumineux pour un voyage insouciant dans la saison où la royauté privilège du mystère est maintenant une couronne solaire posée sur nos vies humbles

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Fous La nuit marée haute recouvre son épave l’esprit Bien lointaine est la lumière Ne demeure que sa fable pour les témoins de la tragédie Shakespeare l’avait bien compris La solitude de son roi Lear parmi les éléments dechaînes… Notre fragilité toujours recommencée dans quel but ? L’heure du naufrage du sens peut a tout moment sonner La nuit marée haute noie le cri des possédés

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Hospitalité Ne soyez pas trop sévères avec vos frères Ils arrivent sur des bateaux de fortune quelque part sur notre Terre ne demandent pas la lune juste le gîte et le couvert Nous sommes tous issus du même père et devons rendre des comptes à la même messagère qui nous rappelle que nous sommes éphémères Alors ce mépris et cette colère de la part de ceux qui seront la proie du feu ou des vers demeurent un mystère Ne soyez pas trop sévères Demain peut-être la misère et la mer à la langue amère vous parleront

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Jour d’été Gravir la dune les bronches emplies d’air marin puis découvrir là-bas le miroir bleu aux rides crêtées d’écume et son argent éblouissant Descendre vers la plage s’asseoir sur le sable être cet infime témoin de l’harmonie des couleurs et de la matière Regarder l’horizon et rêver de partir seulement rêver Rien ne vaut le voyage immobile déchiré du cri soudain de la mouette

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Naufragé Il a froid il a faim il a peur Dans sa solitude il étreint son épave son crucifix Il n’a pas la foi toutefois l’obscur en lui peu à peu devient lueur Sous le fouet du vent s’abattent des vagues sous ses pieds l’abîme qui s’impatiente avide de proies Il n’a pas la foi mais une Présence étrangement de chaleur l’inonde malgré cette mer et son dessein barbare Repenser au monde Trop tard entre les « muscles errants » du reptile sans aucun espoir d’île ou de navire ami Drôle de destin de la terre ferme au furieux désert mouvant avec le feu-follet du divin paix dans l’anarchie des éléments

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Rocker La mer des Caraïbes berce de sa voix bleue ton absence irréelle Là-bas les larmes des êtres que ton départ a brisés sont ici essuyées par la rumeur des vagues grandes sœurs éternelles gardiennes de ton sommeil Johnny tes chansons te regrettent Elles émanaient de toi comme le parfum d’une fleur cette incommensurable fleur de la douleur qui pousse dans le labyrinthe du chagrin de tes semblables Quelque chose de toi inextinguible en nous demeure Et le bleu de ton regard irradie nos mémoires

    en cours de vérification

    L

    Louisa Siefert

    @louisaSiefert

    Au Large Lest de l’âme, pesant bagage, Trésors misérables et chers, Sombrez. …… - Théophile Gautier Aux pays des autres étoiles, Aux lointains pays fabuleux, Le vaisseau sous ses blanches voiles Nage au gré des flots onduleux. Le ciel et l’Océan s’unissent Au bord de l’horizon enfui ; Les lourdes vagues s’aplanissent Avec un long soupir d’ennui. Dans cette immensité sans terme Où se perd, tombe et meurt le vent, Le sillage qui se referme Marque seul la marche en avant. Ô tristesse indéfinissable ! Accablement toujours nouveau ! Ne pas voir même un grain de sable, Ne pas même entendre un écho ! Ici, rien que la mer sans grèves, Là, rien que l’ombre des agrès, Rien à l’avenir que des rêves, Rien au passé que des regrets ! La semaine suit la semaine, Le flot que le flot submergea Au gouffre, dans sa chute, emmène Chaque heure qui sonne, et déjà L’aube a d’éclatantes nuances, Le soir des couchants orangés, Flamboîments et phosphorescences A nos ciels d’Europe étrangers. Des formes d’astres inconnues, Vaisseaux par Dieu même conduits, Îles, perles ou fleurs des nues, Brodent le bleu manteau des nuits. Mais cette splendeur qui décore Le vaste infini déroulé Est d’un aspect plus triste encore Aux yeux tristes de l’exilé. Et la petite maison basse, Frère, où sont ta mère et tes sœurs, Pour ton cœur avait plus d’espace, Pour ton regard plus de douceurs.

    en cours de vérification

    L

    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    Bel astre voyageur À La Comète de 1861 Bel astre voyageur, hôte qui nous arrives Des profondeurs du ciel et qu’on n’attendait pas, Où vas-tu ? Quel dessein pousse vers nous tes pas ? Toi qui vogues au large en cette mer sans rives, Sur ta route, aussi loin que ton regard atteint, N’as-tu vu comme ici que douleurs et misères ? Dans ces mondes épars, dis ! avons-nous des frères ? T’ont-ils chargé pour nous de leur salut lointain ? Ah ! quand tu reviendras, peut-être de la terre L’homme aura disparu. Du fond de ce séjour Si son œil ne doit pas contempler ton retour, Si ce globe épuisé s’est éteint solitaire, Dans l’espace infini poursuivant ton chemin, Du moins jette au passage, astre errant et rapide, Un regard de pitié sur le théâtre vide De tant de maux soufferts et du labeur humain.

    en cours de vérification

    L

    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    La lampe d’Héro De son bonheur furtif lorsque malgré l’orage L’amant d’Héro courait s’enivrer loin du jour, Et dans la nuit tentait de gagner à la nage Le bord où l’attendait l’Amour, Une lampe envoyait, vigilante et fidèle , En ce péril vers lui son rayon vacillant; On eût dit dans les deux quelque étoile immortelle Qui dévoilait son front tremblant. La mer a beau mugir et heurter ses rivages. Les vents au sein des airs déchaîner leur effort, Lés oiseaux effrayés pousser des cris sauvages . En voyant approcher la Mort , Tant que du haut sommet de la tour solitaire Brille le signe aimé sur l’abîme en fureur, Il ne sentira point, le nageur téméraire, Défaillir son bras ni son cœur. Comme à l’heure sinistre où la mer en sa rage Menaçait d’engloutir cet enfant d’Abydos, Autour de nous dans l’ombre un éternel orage Fait gronder et bondir les flots. Remplissant l’air au loin de ses clameurs funèbres, Chaque vague en passant nous entr’ouvre un tombeau ; Dans les mêmes dangers et les mêmes ténèbres Nous avons le même flambeau. Le pâle et doux rayon tremble encor dans la brume. Le vent l’assaille en vain, vainement les flots sourds La dérobent parfois sous un voile d’écume, La clarté reparaît toujours. Et nous, les yeux levés vers la lueur lointaine. Nous fendons pleins d’espoir les vagues en courroux ; Au bord du gouffre ouvert la lumière incertaine Semble d’en haut veiller sur nous. O phare de l’Amour ! qui dans la nuit profonde Nous guides à travers les écueils d’ici-bas, Toi que nous voyons luire entre le ciel et l’onde. Lampe d’Héro, ne t’éteins pas !

    en cours de vérification

    L

    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    Le cri Lorsque le passager, sur un vaisseau qui sombre, Entend autour de lui les vagues retentir, Qu’a perte de regard la mer immense et sombre Se soulève pour l’engloutir, Sans espoir de salut et quand le pont s’entr’ouvre, Parmi les mâts brisés, terrifié, meurtri, Il redresse son front hors du flot qui le couvre, Et pousse au large un dernier cri. Cri vain ! cri déchirant ! L’oiseau qui plane ou passe Au delà du nuage a frissonné d’horreur, Et les vents déchaînés hésitent dans l’espace A l’étouffer sous leur clameur. Comme ce voyager, en des mers inconnues, J’erre et vais disparaître au sein des flots hurlants ; Le gouffre est à mes pieds, sur ma tête les nues S’amoncellent, la foudre aux flancs. Les ondes et les cieux autour de leur victime Luttent d’acharnement, de bruit, d’obscurité ; En proie à ces conflits, mon vaisseau sur l’abîme Court sans boussole et démâté. Mais ce sont d’autres flots, c’est un bien autre orage Qui livre des combats dans les airs ténébreux ; La mer est plus profonde et surtout le naufrage Plus complet et plus désastreux. Jouet de l’ouragan qui l’emporte et le mène, Encombré de trésors et d’agrès submergés, Ce navire perdu, mais c’est la nef humaine, Et nous sommes les naufragés. L’équipage affolé manœuvre en vain dans l’ombre ; L’Épouvante est à bord, le Désespoir, le Deuil ; Assise au gouvernail, la Fatalité sombre Le dirige vers un écueil. Moi, que sans mon aveu l’aveugle Destinée Embarqua sur l’étrange et frêle bâtiment, Je ne veux pas non plus, muette et résignée, Subir mon engloutissement. Puisque, dans la stupeur des détresses suprêmes, Mes pâles compagnons restent silencieux, A ma voix d’enlever ces monceaux d’anathèmes Qui s’amassent contre les cieux. Afin qu’elle éclatât d’un jet plus énergique, J’ai, dans ma résistance à l’assaut des flots noirs, De tous les cœurs en moi, comme en un centre unique, Rassemblé tous les désespoirs. Qu’ils vibrant donc si fort, mes accents intrépides, Que ces mêmes cieux sourds en tressaillent surpris ; Les airs n’ont pas besoin, ni les vagues stupides, Pour frissonner d’avoir compris. Ah ! c’est un cri sacré que tout cri d’agonie ; Il proteste, il accuse au moment d’expirer. Eh bien ! ce cri d’angoisse et d’horreur infinie, Je l’ai jeté ; je puis sombrer !

    en cours de vérification

    L

    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    Le déluge À Victor Hugo le vieux monde Dieu t’a dit : « Ne va pas plus loin, ô flot amer ! » Mais quoi ! tu m’engloutis ! Au secours, Dieu ! La mer Désobéit ! la mer envahit mon refuge ! LE FLOT Tu me crois la marée, et je suis le déluge. Épilogue de l’Année Terrible. Tu l’as dit : C’en est fait ; ni fuite ni refuge Devant l’assaut prochain et furibond des flots. Ils avancent toujours. C’est sur ce mot, Déluge, Poète de malheur, que ton livre s’est clos. Mais comment osa-t-il échapper à ta bouche ? Ah ! pour le prononcer, même au dernier moment, Il fallait ton audace et ton ardeur farouche, Tant il est plein d’horreur et d’épouvantement. Vous êtes avertis : c’est une fin de monde Que ces flux, ces rumeurs, ces agitations. Nous n’en sommes encor qu’aux menaces de l’onde, A demain les fureurs et les destructions. Déjà depuis longtemps, saisis de terreurs vagues, Nous regardions la mer qui soulevait son sein, Et nous nous demandions : « Que veulent donc ces vagues ? On dirait qu’elles ont quelque horrible dessein. » Tu viens de le trahir ce secret lamentable ; Grâce à toi, nous savons à quoi nous en tenir. Oui, le Déluge est là, terrible, inévitable ; Ce n’est pas l’appeler que de le voir venir. Pourtant, nous l’avouerons, si toutes les colères De ce vaste océan qui s’agite et qui bout, N’allaient qu’à renverser quelques tours séculaires Que nous nous étonnions de voir encor debout, Monuments que le temps désagrège ou corrode, Et qui nous inspiraient une secrète horreur : Obstacles au progrès, missel usé, vieux code, Où se réfugiaient l’injustice et l’erreur, Des autels délabrés, des trônes en décembre Qui nous rétrécissaient à dessein l’horizon, Et dont les débris seuls projetaient assez d’ombre Pour retarder longtemps l’humaine floraison, Nous aurions à la mer déjà crié : « Courage ! Courage ! L’œuvre est bon que ton onde accomplit. » Mais quoi ! ne renverser qu’un môle ou qu’un barrage ? Ce n’est pas pour si peu qu’elle sort de son lit. Ses flots, en s’élançant par-dessus toute cime, N’obéissent, hélas ! qu’à d’aveugles instincts. D’ailleurs, sachez-le bien, ces enfants de l’abîme, Pour venir de plus bas, n’en sont que plus hautains. Rien ne satisfera leur convoitise immense. Dire : « Abattez ceci, mais respectez cela, » N’amènerait en eux qu’un surcroît de démence ; On ne fait point sa part à cet Océan-là. Ce qu’il lui faut, c’est tout. Le même coup de houle Balaiera sous les yeux de l’homme épouvanté Le phare qui s’élève et le temple qui croule, Ce qui voilait le jour ou donnait la clarté, L’obscure sacristie et le laboratoire, Le droit nouveau, le droit divin et ses décrets, Le souterrain profond et le haut promontoire D’où nous avions déjà salué le Progrès. Tout cela ne fera qu’une ruine unique. Avenir et passé s’y vont amonceler. Oui, nous le proclamons, ton Déluge est inique : Il ne renversera qu’afin de niveler. Si nous devons bientôt, des bas-fonds en délire, Le voir s’avancer, fier de tant d’écroulements, Du moins nous n’aurons pas applaudi de la lyre Au triomphe futur d’ignobles éléments. Nous ne trouvons en nous que des accents funèbres, Depuis que nous savons l’affreux secret des flots. Nous voulions la lumière, ils feront les ténèbres ; Nous rêvions l’harmonie, et voici le chaos. Vieux monde, abîme-toi, disparais, noble arène Où jusqu’au bout l’Idée envoya ses lutteurs, Où le penseur lui-même, à sa voix souveraine, Pour combattre au besoin, descendait des hauteurs. Tu ne méritais pas, certe, un tel cataclysme, Toi si fertile encore, ô vieux sol enchanté ! D’où pour faire jaillir des sources d’héroïsme, Il suffisait d’un mot, Patrie ou Liberté ! Un océan fangeux va couvrir de ses lames Tes sillons où germaient de sublimes amours, Terrain cher et sacré, fait d’alluvions d’âmes, Et qui ne demandais qu’a t’exhausser toujours. Que penseront les cieux et que diront les astres, Quand leurs rayons en vain chercheront tes sommets, Et qu’ils assisteront d’en haut à tes désastres, Eux qui croyaient pouvoir te sourire à jamais ? De quel œil verront-ils, du fond des mers sans borne, A la place où jadis s’étalaient tes splendeurs, Émerger brusquement dans leur nudité morne, Des continents nouveaux sans verdure et sans fleurs ? Ah ! si l’attraction à la céleste voûte Par de fermes liens ne las attachait pas, Ils tomberaient du ciel ou changeraient de route, Plutôt que d’éclairer un pareil ici-bas. Nous que rien ne retient, nous, artistes qu’enivre L’Idéal qu’ardemment poursuit notre désir, Du moins nous n’aurons point la douleur de survivre Au monde où nous avions espéré le saisir. Nous serons les premiers que les vents et que l’onde Emporteront brisés en balayant nos bords. Dans les gouffres ouverts d’une mer furibonde, N’ayant pu les sauver, nous suivrons nos trésors. Après tout, quand viendra l’heure horrible et fatale. En plein déchaînement d’aveugles appétits, Sous ces flots gros de haine et de rage brutale, Les moins à plaindre encor seront les engloutis.

    en cours de vérification

    L

    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    L’homme Jeté par le hasard sur un vieux globe infime, A l’abandon, perdu comme en un océan, Je surnage un moment et flotte à fleur d’abîme, Épave du néant. Et pourtant, c’est à moi, quand sur des mers sans rive Un naufrage éternel semblait me menacer, Qu’une voix a crié du fond de l’Être : « Arrive ! Je t’attends pour penser. » L’Inconscience encor sur la nature entière Étendait tristement son voile épais et lourd. J’apparus ; aussitôt à travers la matière L’Esprit se faisait jour. Secouant ma torpeur et tout étonné d’être, J’ai surmonté mon trouble et mon premier émoi. Plongé dans le grand Tout, j’ai su m’y reconnaître ; Je m’affirme et dis : « Moi ! » Bien que la chair impure encor m’assujettisse, Des aveugles instincts j’ai rompu le réseau ; J’ai créé la Pudeur, j’ai conçu la Justice : Mon cœur fut leur berceau. Seul je m’enquiers des fins et je remonte aux causes. A mes yeux l’univers n’est qu’un spectacle vain. Dussé-je m’abuser, au mirage des choses Je prête un sens divin. Je défie à mon gré la mort et la souffrance. Nature impitoyable, en vain tu me démens, Je n’en crois que mes vœux et fais de l’espérance Même avec mes tourments. Pour combler le néant, ce gouffre vide et morne, S’il suffit d’aspirer un instant, me voilà ! Fi de cet ici-bas ! Tout m’y cerne et m’y borne ; Il me faut l’au-delà ! Je veux de l’éternel, moi qui suis l’éphémère. Quand le réel me presse, impérieux, brutal, Pour refuge au besoin n’ai-je pas la chimère Qui s’appelle Idéal ? Je puis avec orgueil, au sein des nuits profondes, De l’éther étoilé contempler la splendeur. Gardez votre infini, cieux lointains, vastes mondes. J’ai le mien dans mon cœur !

    en cours de vérification

    L

    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    Mon livre Je ne vous offre plus pour toutes mélodies Que des cris de révolte et des rimes hardies. Oui ! Mais en m’écoutant si vous alliez pâlir ? Si, surpris des éclats de ma verve imprudente, Vous maudissez la voix énergique et stridente Qui vous aura fait tressaillir ? Pourtant, quand je m’élève à des notes pareilles, Je ne prétends blesser les cœurs ni les oreilles. Même les plus craintifs n’ont point à s’alarmer ; L’accent désespéré sans doute ici domine, Mais je n’ai pas tiré ces sons de ma poitrine Pour le plaisir de blasphémer. Comment ? la Liberté déchaîne ses colères ; Partout, contre l’effort des erreurs séculaires ; La Vérité combat pour s’ouvrir un chemin ; Et je ne prendrais pas parti de ce grand drame ? Quoi ! ce cœur qui bat là, pour être un cœur de femme, En est-il moins un cœur humain ? Est-ce ma faute à moi si dans ces jours de fièvre D’ardentes questions se pressent sur ma lèvre ? Si votre Dieu surtout m’inspire des soupçons ? Si la Nature aussi prend des teintes funèbres, Et si j’ai de mon temps, le long de mes vertèbres, Senti courir tous les frissons ? Jouet depuis longtemps des vents et de la houle, Mon bâtiment fait eau de toutes parts ; il coule. La foudre seule encore à ses signaux répond. Le voyant en péril et loin de toute escale, Au lieu de m’enfermer tremblante à fond de cale, J’ai voulu monter sur le pont. À l’écart, mais debout, là, dans leur lit immense J’ai contemplé le jeu des vagues en démence. Puis, prévoyant bientôt le naufrage et la mort, Au risque d’encourir l’anathème ou le blâme, À deux mains j’ai saisi ce livre de mon âme, Et j’ai lancé par-dessus bord. C’est mon trésor unique, amassé page à page. À le laisser au fond d’une mer sans rivage Disparaître avec moi je n’ai pu consentir. En dépit du courant qui l’emporte ou l’entrave, Qu’il se soutienne donc et surnage en épave Sur ces flots qui vont m’engloutir ! Paris, 7 janvier 1874

    en cours de vérification

    M

    Marc-Antoine Girard de Saint-Amant

    @marcAntoineGirardDeSaintAmant

    La solitude (1) O ! que j'aime la solitude ! Que ces lieux sacrés à la nuit, Éloignés du monde et du bruit, Plaisent à mon inquiétude ! Mon Dieu ! Que mes yeux sont contents De voir ces bois qui se trouvèrent A la nativité du temps, Et que tous les Siècles révèrent, Être encore aussi beaux et verts, Qu'aux premiers jours de l'Univers !

    en cours de vérification

    Marcel Proust

    Marcel Proust

    @marcelProust

    Je contemple souvent le ciel de ma mémoire Le temps efface tout comme effacent les vagues Les travaux des enfants sur le sable aplani Nous oublierons ces mots si précis et si vagues Derrière qui chacun nous sentions l’infini. Le temps efface tout il n’éteint pas les yeux Qu’ils soient d’opale ou d’étoile ou d’eau claire Beaux comme dans le ciel ou chez un lapidaire Ils brûleront pour nous d’un feu triste ou joyeux. Les uns joyaux volés de leur écrin vivant Jetteront dans mon coeur leurs durs reflets de pierre Comme au jour où sertis, scellés dans la paupière Ils luisaient d’un éclat précieux et décevant. D’autres doux feux ravis encor par Prométhée Étincelle d’amour qui brillait dans leurs yeux Pour notre cher tourment nous l’avons emportée Clartés trop pures ou bijoux trop précieux. Constellez à jamais le ciel de ma mémoire Inextinguibles yeux de celles que j’aimai Rêvez comme des morts, luisez comme des gloires Mon coeur sera brillant comme une nuit de Mai. L’oubli comme une brume efface les visages Les gestes adorés au divin autrefois, Par qui nous fûmes fous, par qui nous fûmes sages Charmes d’égarement et symboles de foi. Le temps efface tout l’intimité des soirs Mes deux mains dans son cou vierge comme la neige Ses regards caressants mes nerfs comme un arpège Le printemps secouant sur nous ses encensoirs. D’autres, les yeux pourtant d’une joyeuse femme, Ainsi que des chagrins étaient vastes et noirs Épouvante des nuits et mystère des soirs Entre ces cils charmants tenait toute son âme Et son coeur était vain comme un regard joyeux. D’autres comme la mer si changeante et si douce Nous égaraient vers l’âme enfouie en ses yeux Comme en ces soirs marins où l’inconnu nous pousse. Mer des yeux sur tes eaux claires nous naviguâmes Le désir gonflait nos voiles si rapiécées Nous partions oublieux des tempêtes passées Sur les regards à la découverte des âmes. Tant de regards divers, les âmes si pareilles Vieux prisonniers des yeux nous sommes bien déçus Nous aurions dû rester à dormir sous la treille Mais vous seriez parti même eussiez-vous tout su Pour avoir dans le coeur ces yeux pleins de promesses Comme une mer le soir rêveuse de soleil Vous avez accompli d’inutiles prouesses Pour atteindre au pays de rêve qui, vermeil, Se lamentait d’extase au-delà des eaux vraies Sous l’arche sainte d’un nuage cru prophète Mais il est doux d’avoir pour un rêve ces plaies Et votre souvenir brille comme une fête.

    en cours de vérification

    M

    Marie Krysinska

    @marieKrysinska

    Midi À Georges d’Esparbés Le firmament luit comme un cimeterre Et les routes sont pâles comme des mortes. Les Vents – allègres paladins – Sont partis devers Les mers ; Montés sur les éthéréens chevaux Au fier galop de leurs sonnants sabots Ils sont partis devers Les mers. Une paix maléfique plane comme un oiseau Faisant rêver de mort le plaintif olivier Et de forfaits le figuier tenace Dont le fruit mûr se déchire et saigne. Les sources – comme elles sont loin ! Et les Naïades – Où sont-elles ? Mais voici – joie des yeux – Près de la roche courroucée Le petit âne gris Mangeur de chardons.

    en cours de vérification

    M

    Max Elskamp

    @maxElskamp

    Le navire La troisième, elle, est d’un navire Avec tous ses drapeaux au ciel, La troisième, elle, est d’un navire Ainsi qu’ils vont sous le soleil, Avec leurs mâts avec leurs ancres, Et leur proue peinte en rouge ou vert, Avec leurs mâts, avec leurs ancres, Et tout en haut leur guidon clair. Or, la troisième, elle, est dans l’air, Et puis aussi, elle, est dans l’eau, Or, la troisième sur la mer Est comme y sont les blancs bateaux, Et les rochers, et les accores, Et terre dure ou sable mol, Et les rochers, et les accores, Et les îles et les atolls ; Et la troisième est seule au monde En large, en long, en vert, en bleu, Et la troisième est seule au monde Avec le soleil au milieu.

    en cours de vérification

    M

    Max Elskamp

    @maxElskamp

    Étoile de la mer Et de vaisseaux, et de vaisseaux, Et de voiles, et tant de voiles, Mes pauvres yeux allez en eaux, Il en est plus qu’il n’est d’étoiles ; Et cependant je sais, j’en sais Tant d’étoiles et que j’ai vues Au-dessus des toits de mes rues, Et que j’ai sues et que je sais ; Mais des vaisseaux il en est plus, – Et j’en sais tant qui sont partis – Mais c’est mon testament ici, Que de vaisseaux il en est plus ; Et des vaisseaux voici les beaux Sur la mer, en robes de femmes, Allés suivant les oriflammes Au bout du ciel sombré dans l’eau, Et de vaisseaux tant sur les eaux La mer semble un pays en toile, Mes pauvres yeux allez en eaux, Il en est plus qu’il n’est d’étoiles.

    en cours de vérification

    Max Jacob

    Max Jacob

    @maxJacob

    Devant la Mer Les années sont des villes dont on a fait le tour les jours sont des palais dont les heures sont des tours De l'autre côté de mes heures quand, écartant les météores et votre chevelure, ô vagues, soulevée le Christ enchantera mon âme nouvelle-née je tâtonnerai, ébloui à la porte de ton enceinte Vierge Sainte. ô vallée, ô portes, ô palais, allées... Plus de vent qui secoue les soupirs de ma robe L'on a ratissé le chemin de la mort Plus de beuglement du bétail la volière est ignifugée ; l'alcool et l'ail éteints rimée ta racine d'aigle, ô mandragore Les siècles sont des villes résonnantes et l'éternité même est Jérusalem. Les années sont des lacs dont la rive est l'amour et cette neige : la pensée A l'horizon il y a un cratère solennel : c'est l'enfer.

    en cours de vérification

    Max Jacob

    Max Jacob

    @maxJacob

    Douarnenez a la plage Regardez-la avec son maillot de bain ! Sa grand'mère avait deux jupes de dessous Ma fille est en maillot de bain ; son dos par chacun est vu à volonté : chacun connaît sa peau. Montrez-vous donc, ma fille. Vous trouverez vite un mari ! un enfant, je ne dis pas, mais un mari ?... je ne crois pas. Allez ! rentrez à la maison ! Fille sans honte et sans raison. Des sous pour avoir un bonnet de bain ? ni pour les chaussons américains, ni l'apéritif chez Martin ni pour la crème qui rend pâle ! Plus d'usine, alors ! à la plage ! quand j'aurai dit tout à votre père Les Parisiens verront sa lanière sur votre peau en rouge. A votre âge ! Et vous, messieurs, si ma fille vous tente attention à l'eau bouillante.

    en cours de vérification

    M

    Maëlle Ranoux

    @maelleRanoux

    Arbre de nuit Sous la lune absente Je converse avec les géants de la nuit, Ces arbres qui remuent le noir de leur langage mystérieux Ou bien Habitent le silence nocturne. Je devine au loin Mon capitaine Habité par le vent A la proue de son navire couleur de crème Blanc Cassé Fendu par l’écume du trait du jour naissant.

    en cours de vérification