François Perroux, reconnu comme un acteur majeur des sciences économiques françaises du XXe siècle, est demeuré longtemps marginal dans son positionnement radicalement critique à l'égard des orientations utilitaristes de sa discipline. Mais l'actualité économique, politique et sociale a remis à l'honneur depuis quelques années l'oeuvre d'un penseur, dont beaucoup de notions-clés, telles que développement intégré complexe, don économique, parties prenantes, unité active, pôles de croissance, échange composite, présentent d'étonnantes convergences avec certains courants parmi les plus dynamiques de la réflexion sociale et économique contemporaine. Ainsi, Perroux est un pionnier dans les domaines, si actuels, de la responsabilité sociale des entreprises, du développement durable, de l'économie solidaire. Le lecteur trouvera dans ces études de quoi éclairer plusieurs aspects, importants mais souvent négligés, concernant aussi bien les sources et les références spirituelles et philosophiques, que la filiation et la postérité, dans diverses disciplines des sciences humaines et sociales, de la pensée de cet économiste inventif et visionnaire doublé d'un humaniste que fut François Perroux.

Humanisme et travail chez François Perroux

L'économie sociale et solidaire (ESS) aujourd'hui en pleine croissance promeut des valeurs et un idéal de solidarité qui ne sont pas sans résonance ni analogie avec les propositions du solidarisme républicain français, doctrine qui a inspirée une grande partie de la législation sociale de la IIIe République et qui connaît un regain d'actualité en ce début du XXIe siècle. D'où l'opportunité d'un rapprochement, tant pour éclairer le passé et comprendre certains aspects cruciaux du développement historique de ces mouvements par ailleurs fort différents, que, de façon plus prospective, pour comprendre les enjeux du présent et baliser l'avenir. Qu'il s'agisse d'aider le citoyen à prendre position dans des débats complexes sur l'identité et la spécificité de l'ESS, ou de s'approprier une histoire dont on découvre, à la lecture de cet ouvrage, l'amplitude et la proximité des inspirations éthiques et politiques avec celles qui sont les nôtres aujourd'hui, le défi d'un tel rapprochement méritait d'être relevé. Les contributeurs de ce volume, réunis à l'occasion d'un colloque organisé par la Chaire Humanisme citoyenneté, civilisations et le laboratoire ESDES Recherche de l'Université catholique de Lyon dont les Actes sont ici rassemblés, se sont efforcés, chacun à leur manière, de répondre à cette proposition de mise en résonance.

D'un solidarisme à l'économie solidaire - Fonder et réaliser la solidarité

A l'occasion du cinquantenaire de la mort de Gaston Berger 
(1896-1960), la Chaire Humanisme, Citoyenneté, Civilisations 
de l'université catholique de Lyon a pris l'initiative d'organiser 
deux journées d'études pour commémorer l'oeuvre de ce 
philosophe audacieux et atypique, fondateur d'institutions et 
de revues, chef d'entreprise et homme d'action. Ces journées 
ont permis d'étudier les modalités sous lesquelles Gaston 
Berger a envisagé les liens entre philosophie et sciences 
humaines, qu'il n'a eu de cesse de faire dialoguer. Sa 
trajectoire intellectuelle originale a été interrogée, depuis la 
tradition blondélienne de la philosophie de l'action et la 
phénoménologie, jusqu'au "tournant pragmatique" qu'il opère 
avec l'idée de la prospective. Associant des chercheurs issus 
de différentes institutions, mais héritières à divers titres de 
l'oeuvre de Gaston Berger, elles ont montré comment le 
cheminement intellectuel de Berger a influencé ses 
orientations et ses décisions d'homme d'action, et comment en 
retour son expérience d'homme de terrain a nourri et alimenté 
sa réflexion philosophique, psychologique et sociologique.

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