"Les enfants du pays" est une ouvre hors du commun. C'est un roman d'aventures, riche en westerns intérieurs. C'est surtout une étude de caractères, les caractères d'une terre et d'une race, à travers les vies et les ouvres des héros qu'elle a enfantés et qui l'ont illustrée », écrit Thierry Maulnier de l'Académie française dans sa préface de l'ouvrage. Il y a deux sortes d'historiens, les compilateurs et les aèdes. Ceux qui donnent les dates à l'Histoire, et ceux qui lui donnent des ailes. Gilbert Prouteau et Hervé Louboutin appartiennent à cette deuxième phalange. Ils ont troqué le grattoir des logographes contre la bâtée des orpailleurs. Il ne s'agit plus de faire bailler l'Histoire, il s'agit de la faire rêver. "Les enfants du pays", c'est à la fois la chanson de gestes et les lettres de noblesse des terres où souffle le vent de Galerne. Le « Pays » se situe (si on doit lui attribuer des limites géographiques) à l'intérieur d'un quadrilatère Nantes-Angers-Niort-La Rochelle, soit les frontières et les marches de la province de l'Histoire baptisée « Vendée militaire » par les historiens de la République. Les enfants, ce sont les figures de proue qui jalonnent les siècles : Abélard, Gilles de Rais, Agrippa d'Aubigné, Grignion de Montfort, Charette, La Rochejaquelein, Victor Hugo, Jules Verne, Clemenceau, De Lattre... Et d'autres moins illustres, comme ce Nau l'Olonnois qui fut le plus redoutable pirate de l'Archipel Caraïbe, ou de ce René de Laudonnière, qui inventa l'Amérique cinquante ans avant l'arrivée du Mayflower et les puritains de l'archevêque de Cantorbéry. Tous se reconnaissent à deux communs dénominateurs : la passion de l'aventure et le bouillonnement de la révolte. Les auteurs ont souhaité enrichir leur fresque de deux géants - qui ne sont pas issus de cette terre - mais qui y sont demeurés si longtemps, que leur caractère, leur action et leur message, ont été remodelés par l'imprégnation : Rabelais et Richelieu. L'ouvrage s'achève sur les grands écrivains de la province : de Michel Ragon à Julien Gracq. Ou sur les femmes dont le nom a acquis une résonance internationale : de Jacqueline Auriol à Ménie Grégoire. Avant d'ouvrir les fenêtres de l'avenir à travers la pensée et la « prospective » de contemporains illustres : de Michel Albert à Michel Crépeau.

Les enfants du pays

On a parlé d'événement : c'est, en fait, beaucoup mieux : un avènement. Au cour de la province Vendée, non loin de la jonction des provinces tutélaires : le Poitou, l'Anjou et la Bretagne, un haut lieu vient de naître. Les premières foules qui se pressaient durant l'été 1978 vers la colline embrasée du Puy du Fou, celles qui se préparent, plus nombreuses encore, à célébrer « Ce soir, la Vendée », croyaient et croiront peut-être vibrer à un spectacle inoubliable. Ils sont, en vérité, les témoins acteurs d'une aventure dont les multiples significations - historiques, sociologiques, ethnologiques, culturelles, spirituelles même - méritaient d'être analysées : le château du Puy du Fou étant devenu l'axe d'une dynamique par laquelle onze communes vendéennes ont retrouvé le goût et le sens unitaires du Pays. Autour du spectacle, miracle d'enthousiasme et d'ingéniosité, ayant brusquement pris conscience de racines profondes à nouveau parcourues par la sève des initiatives communautaires, le Pays du Puy du Fou s'est constitué. Hervé Louboutin, journaliste en Vendée, a suivi pas à pas le cheminement de l'idée, les étapes de sa réalisation, les péripéties de son triomphe. Son témoignage a la précision et la hauteur qu'exigeait cet exemple, probablement unique en France, de Renaissance régionale. Ici le phénomène est total : aux talents venus de Paris, mais soucieux de servir avant tout la province évoquée, se sont mêlés l'imagination, le tour de main, le courage et la ferveur d'une population gagnée peu à peu par la fièvre des grands commencements. Louis Chevalier, professeur au Collège de France, qui a parrainé cet ouvrage en le préfaçant, parle d'une vérité qui a « éclaté en gerbe d'étincelles dans le ciel du Bocage ». Pour pleinement vivre les « gestes » du Puy du Fou on aimera prolonger et ordonner, dans ce livre qui eût passionné Jean Yole, l'émotion du spectacle : à ce niveau l'acte et le témoignage ne sont pas seulement complémentaires, ils sont indissociables.

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