On comprendra en lisant ce livre que l'idéologie innéiste de la sociobiologie humaine, aux accents inévitablement inégalitaires et racistes, est interdite par les sciences mêmes que cette « discipline » prétend intégrer. Mais disqualifier scientifiquement l'hypothèse centrale de cette théorie - l'aptitude des gènes à déterminer le jeu complexe des relations sociales, et à en fournir la clé - n'est assurément pas tout ce à quoi des scientifiques peuvent aujourd'hui aspirer. Il faut en outre, dès cette tache accomplie, en vulgariser l'explication, de manière à combattre l'emprise d'un fascisme théorique - celui, notamment, de la « nouvelle droite » - dont l'actuelle « sociobiologie », relayée par un certain journalisme, constitue, en remplacement du vieux « darwinisme social » et suivant la même stratégie, l'idéologie de soutien Première réfutation pluridisciplinaire des fondements de cette idéologie de crise, ce livre dont les enjeux contemporains sont considérables - l'interprétation du darwinisme, sa lecture marxiste hier et aujourd'hui, les rapports de la science et de l'idéologie, les limites de la génétique, les sciences de l'homme dans leurs relations aux sciences de la nature, le couple nature culture ou nature/société -, a choisi d'exister en vue de cette action.

Misère de la sociobiologie

Le présent ouvrage n'est pas un manuel d'éthologie cognitive et ne vise pas à présenter l'état de cette discipline. Il serait facile de citer des recherches éthologiques importantes qui n'ont pas été rapportées et plusieurs contributeurs se sentiraient mal caractérisés à être qualifiés d'éthologistes. Il est né de questions récurrentes surgies lors de colloques de la SFECA (Société Française pour l'Étude du Comportement Animal), dans des groupes d'éthologie théorique, lors de séminaires ou de rencontres personnelles... sur la causalité dans les sciences du comportement. La question n'est pas nouvelle, mais au delà des réponses traditionnelles le développement des sciences cognitives, des réflexions philosophiques nouvelles et l'approfondissement d'une éthologie cognitive tendent à renouveler les termes d'un questionnement qui reste d'actualité. Son enjeu est d'ailleurs de taille : à une période de conception de machines  intelligentes  toujours plus sophistiquées, il est utile de voir comment et par quelles étapes l'Évolution a permis l'apparition de machines pensantes biologiques dont les performances, notamment en matière de fiabilité, pourraient être enviées par bien des concepteurs. Au delà de ce questionnement commun, chaque contributeur a eu pleine liberté pour développer sa thématique et si chaque texte a été soumis à un ou plusieurs collaborateurs de l'ouvrage, son auteur est resté juge de l'usage qu'il souhaitait faire des remarques reçues. Il en résulte peut-être une certaine hétérogénéité, mais celle-ci reflète aussi la diversité des réflexions actuelles et nous n'avons pas voulu la réduire. Par contre l'organisation thématique des contributions et la présentation des diverses parties sont de la responsabilité des éditeurs. Les décisions qui y ont prévalu ne sont pas purement techniques et reflètent aussi des conceptions qui ne sont pas obligatoirement partagées par tous. Elles étaient pourtant nécessaires pour permettre de faire ressortir l'intention générale de l'ouvrage. Nous espérons n'avoir pas déformé la pensée des contributeurs et leur présentons nos excuses pour toute éventuelle mésinterprétation.... en même temps que nous invitons le lecteur à se faire une opinion directe à la lecture de chaque contribution.

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