La parole dite par un oeil

Noël Dolla est né à Nice en 1945 et c'est là dans le quartier du port, qu'il vit et travaille encore aujourd'hui. Si, depuis 1967, son appartenance à Support(s)/Surface(s) a consacré son statut d'artiste "historique", il a su par la suite casser le cadre formaliste d'une déconstruction par trop idéologique du tableau. Son oeuvre est une reconquête obstinée, passionnée autant que libérée de ce qu'il continue d'appeler d'un nom énigmatique : la peinture. Ce mélange de textes, tour à tour provocateurs, méditatifs, désespérés, analytiques, constitue un document irremplaçable pour comprendre la manière dont aujourd'hui la peinture s'invente de nouveau : à quelles expériences, affects, décisions, à quels savoirs ou à quels doutes aussi bien elle en appelle. Textes "Chinois" (il y est beaucoup question de la Chine), ils nous expliquent à leur manière aussi déroutante que lyrique, pourquoi l'épreuve de la peinture signifie nécessairement le retour de tout le refoulé occidental, pourquoi elle fait nécessairement choc.

Quand un poète belge écrit une fiction sur un artiste niçois, cela donne d'admirables frottements de langues et du jeu de mots à tire-larigot. Derrière l'énorme éclat de rire que produit le texte de Jean-Pierre Verheggen, se donne à lire une appréhension extrêmement raffinée de l'oeuvre de Noël Dolla qui, elle-même, s'adonne au raffinement et à l'humour. Quand les anchois monarchisés rencontrent les ablettes tout aussi aristocratiques, quand les serpillières s'énoncent en loques ou en wassingues, quand la Belgique rencontre la Côte d'Azur, il en découle une fraternité d'esprit, un air de famille qui fabrique de l'étonnement dans une joie confinant aux délices d'une rigueur déguisée en plaisanterie. Merci Messieurs ! La collection " fiction ", en rassemblant des textes commandés à des écrivains, offre un autre regard sur les artistes exposés au MAC / VAL.

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