Plus d'un demi-siècle s'est écoulé depuis la Shoah, la découverte de sa nature et de son ampleur. Cet ouvrage propose une réflexion sur les répercussions de L'extermination chez les descendants des victimes. Il a deux visées. La première est littéraire. Tenter d'appréhender la Shoah est, pour les écrivains nés après Père hitlérienne ou trop jeunes pour comprendre ce qu'ils vivaient, une nécessité vitale : sans mémoire il n'est ni identité ni écriture possible. Mais comment reconstituer ce passé à partir de bribes d'informations, de souvenirs ou d'une connaissance toute extérieure ? Comment trouver une forme susceptible de traduire la présence obsédante de l'absence de mémoire ? A travers l'analyse d'œuvres littéraires, des auteurs ont tenté de mettre en évidence divers procédés afin de la suggérer, la dire et la transmettre. La seconde concerne la question du traumatisme, qui occupe une place importante dans la clinique psychanalytique contemporaine. Le génocide, dont la dimension traumatique est à la fois individuelle et collective, incite à repenser les abords freudiens du " Malaise dans la civilisation " et ses conséquences sur les générations suivantes. Les cures, les interviews, les groupes de parole, chez des descendants de la première génération (survivants des camps ou anciens " enfants cachés ") ou de la génération née après la guerre, en portent témoignage.

Vivre et écrire la mémoire de la Shoah - Littérature et psychanalyse

Freud s'est inspiré des mythes d'Œdipe et de Narcisse pour édifier sa théorie des pulsions, " notre mythologie ". Le mythe de Vampyr éclaire des aspects cliniques et métapsychologiques en deçà des problématiques œdipienne et narcissique. Le vampirisme psychique associe à l'indistinction sujet-objet, l'irreprésentable de l'ombre et des reflets, l'effacement des limites temporo-spatiales subjectives, la circulation d'un flux sanguin de l'un à l'autre des deux partenaires à l'intérieur d'une peau commune. Dans la cure psychanalytique, sans perdre de vue le fils de Laios et de Jocaste, nous suivons Narcisse et Vampyr dans une double perspective, tridimensionnelle et polyphonique. Le vampirisme, déniant naissance et mortalité, met en tension infanticide et matricide/parenticide. Il enchaîne les générations dans une " revenance-encorps " (Dom A. Calmet, 1751) des lignées antérieures, qui entrave la subjectivation. Les répercussions de la "Shoah", entreprise d'extermination des Juifs programmée au vingtième siècle par les nazis, sont encore perceptibles trois générations après. Crimes contre l'humanité et génocides, qui ne cessent de hanter notre univers contemporain, traduisent l'emprise de vampirismes de masse, historiques, au-delà des malaises dans nos civilisations.

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