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Alfred Jarry

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Alfred Jarry, né à Laval, en France, le 8 septembre 1873 et mort à Paris 6e le 1er novembre 1907, est un poète, romancier, écrivain et dramaturge français. Il fut aussi dessinateur et graveur sur bois, usant parfois du pseudonyme d’Alain Jans.

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Poésies

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    Alfred Jarry

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    @alfredJarry

    Bardes et cordes Le roi mort, les vingt et un coups de la bombarde Tonnent, signal de deuil, place de la Concorde. Silence, joyeux luth, et viole et guimbarde : Tendons sur le cercueil la plus macabre corde Pour accompagner l’hymne éructé par le barde : Le ciel veut l’oraison funèbre pour exorde. L’encens vainc le fumet des ortolans que barde La maritorne, enfant butorde non moins qu’orde. Aux barrières du Louvre elle dormait, la garde : Les palais sont de grands ports où la nuit aborde ; Corse, kamoulcke, kurde, iroquoise et lombarde Le catafalque est ceint de la jobarde horde. Sa veille n’eût point fait camuse la camarde : Il faut qu’un rictus torde et qu’une bouche morde. La lame ou la dent tranche autant que le plomb arde : Poudre aux moineaux, canons place de la Concorde. Arme blême, le dail ne craint point l’espingarde : Tonne, signal de deuil ; vibre, macabre corde. Les Suisses du pavé heurtent la hallebarde : Seigneur, prends le défunt en ta miséricorde.

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    Alfred Jarry

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    @alfredJarry

    La chanson du décervelage Je fus pendant longtemps ouvrier ébéniste Dans la ru’ du Champs d’ Mars, d’ la paroiss’ de Toussaints ; Mon épouse exerçait la profession d’ modiste Et nous n’avions jamais manqué de rien. Quand le dimanch’ s’annonçait sans nuage, Nous exhibions nos beaux accoutrements Et nous allions voir le décervelage Ru’ d’ l’Echaudé, passer un bon moment. Voyez, voyez la machin’ tourner, Voyez, voyez la cervell’ sauter, Voyez, voyez les Rentiers trembler; (Choeur): Hourra, cornes-au-cul, vive le Père Ubu ! Nos deux marmots chéris, barbouillés d’ confitures, Brandissant avec joi’ des poupins en papier Avec nous s’installaient sur le haut d’ la voiture Et nous roulions gaîment vers l’Echaudé. On s’ précipite en foule à la barrière, On s’ flanque des coups pour être au premier rang ; Moi j’me mettais toujours sur un tas d’pierres Pour pas salir mes godillots dans l’sang. Voyez, voyez la machin’ tourner, Voyez, voyez la cervell’ sauter, Voyez, voyez les Rentiers trembler; (Choeur): Hourra, cornes-au-cul, vive le Père Ubu ! Bientôt ma femme et moi nous somm’s tout blancs d’ cervelle, Les marmots en boulott’nt et tous nous trépignons En voyant l’Palotin qui brandit sa lumelle, Et les blessur’s et les numéros d’ plomb. Soudain j’ perçois dans l’ coin, près d’ la machine, La gueul’ d’un bonz’ qui n’ m’ revient qu’à moitié. Mon vieux, que j’ dis, je r’connais ta bobine : Tu m’as volé, c’est pas moi qui t’ plaindrai. Voyez, voyez la machin’ tourner, Voyez, voyez la cervell’ sauter, Voyez, voyez les Rentiers trembler; (Choeur) : Hourra, cornes-au-cul, vive le Père Ubu ! Soudain j’ me sens tirer la manche’par mon épouse ; Espèc’ d’andouill’, qu’elle m’ dit, v’là l’ moment d’te montrer : Flanque-lui par la gueule un bon gros paquet d’ bouse. V’là l’ Palotin qu’a juste’ le dos tourné. En entendant ce raisonn’ment superbe, J’attrap’ sus l’ coup mon courage à deux mains : J’ flanque au Rentier une gigantesque merdre Qui s’aplatit sur l’ nez du Palotin. Voyez, voyez la machin’ tourner, Voyez, voyez la cervell’ sauter, Voyez, voyez les Rentiers trembler; (Choeur): Hourra, cornes-au-cul, vive le Père Ubu ! Aussitôt j’ suis lancé par dessus la barrière, Par la foule en fureur je me vois bousculé Et j’ suis précipité la tête la première Dans l’ grand trou noir d’ousse qu’on n’ revient jamais. Voila c’ que c’est qu’d’aller s’ prome’ner l’ dimanche Ru’ d’ l’Echaudé pour voir décerveler, Marcher l’ Pinc’-Porc ou bien l’Démanch’- Comanche : On part vivant et l’on revient tudé ! Voyez, voyez la machin’ tourner, Voyez, voyez la cervell’ sauter, Voyez, voyez les Rentiers trembler; (Choeur): Hourra, cornes-au-cul, vive le Père Ubu!

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    Alfred Jarry

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    @alfredJarry

    La peur Roses de feu, blanches d’effroi, Les trois Filles sur le mur froid Regardent luire les grimoires ; Et les spectres de leurs mémoires Sont évoqués sur les parquets, Avec l’ombre de doigts marqués Aux murs de leurs chemises blanches, Et de griffes comme des branches. Le poêle noir frémit et mord Des dents de sa tête de mort Le silence qui rampe autour. Le poêle noir, comme une tour Prêtant secours à trois guerrières. Ouvre ses yeux de meurtrières ! Roses de feu, blanches d’effroi, En longues chemises de cygnes, Les trois Filles, sur le mur froid Regardant grimacer les signes, Ouvrent, les bras d’effroi liés, Leurs yeux comme des boucliers.

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    Alfred Jarry

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    @alfredJarry

    Madrigal Ma fille — ma, car vous êtes à tous, Donc aucun d’eux ne fut valable maître, Dormez enfin, et fermons la fenêtre : La vie est close, et nous sommes chez nous. C’est un peu haut, le monde s’y termine Et l’absolu ne se peut plus nier ; Il est si grand de venir le dernier Puisque ce jour a lassé Messaline. Vous voici seule et d’oreilles et d’yeux, Tomber souvent désapprend de descendre. Le bruit terrestre est loin, comme la cendre Gît inconnue à l’encens bleu des dieux. Tel le clapotis des carpes nourries A Fontainebleau A des voix meurtries De baisers dans l’eau. Comment s’unit la double destinée? Tant que je n’eus point pris votre trottoir Vous étiez vierge et vous n’étiez point née, Comme un passé se noie en un miroir. La boue à peine a baisé la chaussure De votre pied infinitésimal Et c’est d’avoir mordu dans tout le mal Qui vous a fait une bouche si pure.

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    Alfred Jarry

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    @alfredJarry

    Misère de l’homme L’homme est seul, l’homme est faible. Il doit, pour se nourrir, Asservissant le sol aux moissons réfractaire, Diriger la charrue et cultiver la terre, Sinon, le pain lui manque, et l’homme doit mourir. Il ensemence un champ, et le blé salutaire Germe dans les sillons qu’il commence à couvrir. Mais le soleil ardent fane et fait se flétrir Chaque épi mûrissant, qui se courbe et s’altère. Ou la grêle s’abat et fauche la moisson ; Ou la gelée arrive, et suspend un glaçon A chaque grain de blé qui tremble au bout du chaume. Tout est perdu, tout est anéanti. Mais l’homme, S’il ne meurt de la faim, trouve la mort auprès Des fauves monstrueux qui hantent les forêts.

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