splash screen icon Lenndi
splash screen name leendi
@augusteBrizeux profile image

Auguste Brizeux

Auteurplume

Julien Pélage Auguste Brizeux né le 12 septembre 1803 à Lorient (Morbihan) et mort le 3 mai 1858 à Montpellier (Hérault) est un poète romantique français.

...plus

Compte non officiel

Poésies

4

    Auguste Brizeux

    Auguste Brizeux

    @augusteBrizeux

    Le chant des pêcheurs Un petit port breton devant la Mer-Sauvage S’éveillait ; les bateaux amarrés au rivage, Mais comme impatiens de bondir sur les flots, De sentir sur leurs bancs ramer les matelots, Et les voiles s’enfler, et d’aller à la pêche, Légers, se balançaient devant la brise fraîche ; Tout était bleu, le ciel et la mer ; les courlis, Tournoyant par milliers, de l’eau rasaient les plis ; Des marsouins se jouaient en rade, et sur les plages, Mollement au soleil s’ouvraient les coquillages, Qu’il vienne au bord des flots, à ton miroir vermeil, Celui-là qui veut voir ton lever, ô soleil ! Bientôt les bons pêcheurs de ce havre de Vannes, À l’heure du reflux, quittèrent leurs cabanes. Sur leurs habits pesants, tout noircis de goudron, L’un portait un filet et l’autre un aviron ; Leurs femmes les suivaient, embarquant une cruche D’eau fraîche, un large pain qui sortait de la huche, Du porc salé, du vin, — et durant les adieux Leurs regards consultaient les vagues et les cieux. Les chaloupes enfin, se défiant entre elles, Comme de grands oiseaux déployèrent leurs ailes. Celle qui la première ouvrit sa voile au vent Portait un homme mûr, un jeune homme, un enfant, Et leur aïeul à tous, dont les mains sillonnées Marquaient de longs labeurs et de longues années : Ses cheveux tout crépus semblaient un goémon, Mais quel jeune tiendrait plus ferme le timon ? Nul, excepté son fils, au front rude, aux yeux glauques, Homme doux dont la voix a toujours des sons rauques. Leur pays, c’est Enn-Tell, et leur nom Colomban, Un des saints que Dieu fit maîtres de l’Océan. Tandis qu’ils s’éloignaient, laissant traîner leurs dragues, Ils virent les enfants jouer au bord des vagues, Et ceux qui tout le jour le long des murs assis, Inutiles vieillards, n’ont plus que des récits. Sur les quais, leurs maisons reluisaient toutes blanches, Et par-dessus les toits, au loin, de vertes branches Leur laissaient entrevoir de tranquilles hameaux ; Les grands bœufs lentement paissaient sous les rameaux, Et le vent apportait le gai refrain des pâtres, Qui, sur l’herbe couchés devant les flots saumâtres, Savourent leur jeunesse, au reste indifférens. Alors, pour éclaircir le front de leurs parents, Au bruit des avirons le novice et le mousse Se mirent à chanter d’une voix lente et douce. I Ah ! quel bonheur d’aller en mer ! Par un ciel chaud, par un ciel clair, La mer vaut la campagne ; Si le ciel bleu devient tout noir, Dans nos cœurs brille encor l’espoir, Car Dieu nous accompagne. Le bon Jésus marchait sur l’eau, Va sans peur, mon petit bateau. II Saint Pierre, André, Jacque et saint Jean, Fêtés tous quatre une fois l’an, Étaient ce que nous sommes, Et ces grands pêcheurs de poissons À leurs filets, leurs hameçons, Prirent aussi les hommes. Le bon Jésus marchait sur l’eau, Va sans peur, mon petit bateau. III Sur les flots ils l’ont vu, léger, Vers eux tous venir sans danger, Aussi léger qu’une ombre ; Mais Pierre à le suivre eut grand’peur, Il cria : « Sauvez-moi, Seigneur ! Sauvez-moi, car je sombre ! » Le bon Jésus marchait sur l’eau, Va sans peur, mon petit bateau. IV Sur ton bateau, Pierre-Simon, Que Jésus fit un beau sermon À la foule pieuse ! Puis dans tes filets tout cassés, Combien de poissons amassés !… Pêche miraculeuse ! Le bon Jésus marchait sur l’eau, Va sans peur, mon petit bateau. V Dans ta barque il dormait un jour, Te souvient-il comme à l’entour S’élevait la tempête ? Lui, réveillé par ton effroi, Dit à la vague : « Apaise-toi ! » Elle baissa la tête. Le bon Jésus marchait sur l’eau, Va sans peur, mon petit bateau. VI Aussi la barque du pêcheur Où s’est assis notre Sauveur À toujours vent arrière ; Sans craindre la mer et le vent, Elle va toujours en avant, La barque de saint Pierre. Le bon Jésus marchait sur l’eau, Va sans peur, mon petit bateau. VII O Jésus, des pêcheurs l’ami, Avec nous venez aujourd’hui Dans cette humble coquille ; Allons ! prenez le gouvernail, Et bénissez notre travail ; Il nourrit la famille. Jésus nous conduira sur l’eau, Va sans peur, mon petit bateau. Tel fut des apprentis le chant joyeux et tendre, Que leurs graves parents étaient joyeux d’entendre. La barque cependant au large s’en allait ; On jeta les paniers, les nasses, le filet, Les hameçons crochus, et toute la journée La famille resta vers la proie inclinée. Mais au soleil couchant l’horizon devint noir : Nul pêcheur dans le port n’était rentré le soir.

    en cours de vérification

    Auguste Brizeux

    Auguste Brizeux

    @augusteBrizeux

    Le départ d'un fils Je crois l'entendre encor, quand, sa main, sur mon bras, Autour des verts remparts nous allions pas à pas: ' Oui, quand tu pars, mon fils, oui, c'est un vide immense, Un morne et froid désert, où la nuit recommence; Ma fidèle maison, le jardin, mes amours, Tout cela n'est plus rien; et j'en ai pour huit jours, J'en ai pour tous ces mois d'octobre et de novembre, Mon fils, à te chercher partout de chambre en chambre: Songe à mes longs ennuis! et, lasse enfin d'errer, Je tombe sur ma chaise et me mets à pleurer. Ah! souvent je l'ai dit: dans une humble cabane, Plutôt filer son chanvre, obscure paysanne! Du moins on est ensemble, et le jour, dans les champs, Quand on lève la tête, on peut voir ses enfants. Mais le savoir, l'orgueil, mille folles chimères Vous rendent tous ingrats, et vous quittez vos mères. Que nous sert, ô mon Dieu! notre fécondité, Si le toit paternel est par eux déserté ; Si, quand nous viendra l'âge (et bientôt j'en vois l'heure), Parents abandonnés, veufs dans notre demeure, Tournant languissamment les yeux autour de nous, Seuls nous nous retrouvons, tristes et vieux époux?' Alors elle se tut. Sentant mon coeur se fondre, J'essuyais à l'écart mes pleurs pour lui répondre Muets, nous poursuivions ainsi notre chemin, Quand cette pauvre mère, en me serrant la main: 'Je t'afflige, mon fils, je t'afflige! Pardonne! C'est qu'avec toi, vois-tu, l'avenir m'abandonne: En toi j'ai plus qu'un fils, oui, je retrouve en toi Un frère, un autre époux, un coeur fait comme moi, A qui l'on peut s'ouvrir, ouvrir toute son âme; Pensif, tu comprends bien les chagrins d'une femme: Tous m'aiment tendrement; mais ta bouche et tes yeux, Mon fils, au fond du coeur vont chercher les aveux. Pour notre sort commun, demande à ton aïeule, J'avais fait bien des plans, - mais il faut rester seule; Nous avions toutes deux bien rêvé, - mais tu pars; Pour la dernière fois, le long de ces remparts, L'un sur l'autre appuyés, nous causons, - ô misère! C'est bien, ne gronde pas... Chez la bonne grand'mère Rentrons. Tu sais son âge: en faisant tes adieux, Embrasse-la longtemps... Ah! nous espérions mieux.'

    en cours de vérification

    Auguste Brizeux

    Auguste Brizeux

    @augusteBrizeux

    Le mois d'août Ô mes frères, voici le beau temps des vacances ! Le mois d'août, appelé par dix mois d'espérances ! De bien loin votre aîné ; je ne puis oublier Août et ses jeux riants ; alors, pauvre écolier, Je veux voir mon pays, notre petit domaine ; Et toujours le mois d'août au logis nous ramène, Tant un cœur qui nourrit un regret insensé, Un cœur tendre s'abuse et vit dans le passé ! Voici le beau mois d'août : en courses, camarades ! La chasse le matin, et le soir les baignades ! Vraiment, pour une année, à peine nos parents Nous ont-ils reconnus : vous si forts et si grands, Moi courbé, moi pensif - Ô changements contraires ! La jeunesse vous cherche, elle me fuit, mes frères ; Gaîment vous dépensez vos jours sans les compter, Économe du temps je voudrais l'arrêter. - Mais aux pierres du quai déjà la mer est haute : Toi, mon plus jeune frère, allons ! gagnons la côte ; En chemin par les blés tu liras tes leçons, Ou bien tu cueilleras des mûres aux buissons. Hâtons-nous ! le soleil nous brûle sur ces roches ! - Ne sens-tu pas d'ici les vagues toutes proches ? Et la mer ! l'entends-tu ? Vois-tu tous ces pêcheurs ? N'entends-tu pas les cris et les bras des nageurs ? Ah ! rendez-moi la mer et les bruits du rivage : C'est là que s'éveilla mon enfance sauvage ; Dans ces flots, orageux comme mon avenir, Se reflètent ma vie et tout mon souvenir ! La mer ! J'aime la mer mugissante et houleuse, Ou, comme en un bassin une liqueur huileuse, La mer calme et d'argent ! Sur ses flancs écumeux Quel plaisir de descendre et de bondir comme eux, Ou, mollement bercé, retenant son haleine, De céder comme une algue au flux qui vous entraîne ! Alors on ne voit plus que l'onde et que les cieux, Les nuages dorés passant silencieux, Et les oiseaux de mer, tous allongeant la tête Et jetant un cri sourd en signe de tempête... Ô mer, dans ton repos, dans tes bruits, dans ton air, Comme un amant, je t'aime ! et te salue, ô mer !

    en cours de vérification

    Auguste Brizeux

    Auguste Brizeux

    @augusteBrizeux

    Lina I — «Lorsque l’étang est calme et la lune sereine, Quelle est, gens du pays, cette blanche sirène Qui peigne ses cheveux, debout sur ce rocher, Tandis qu’à l’autre bord chante un jeune nocher Dont la barque magique, à peine effleurant l’onde, Rapide comme un trait, vole à la nymphe blonde? Et jusqu’au point du jour, par la vague bercés, Ils errent, mollement l’un à l’autre enlacés! — Oh! c’est là, voyageur, une touchante histoire! Mon père me l’a dite, et vous pouvez y croire». II Fille d’un sang royal, espoir de sa maison, Blanche comme l’hermine à la blanche toison, Lina, qui n’avait vu que sa quinzième année, Amèrement pleurait déjà sa destinée: — «Plutôt que de tomber sous ta serre, ô vautour, «Dans ce lac qui m’attend trouver mon dernier jour; «Oui, dans ses froides eaux éteindre ma jeune ame, «Dur ravisseur, plutôt que me nommer ta femme! «Peut-être de ma mort naîtra ton désespoir, «Et tu vieilliras triste et seul dans ton manoir». Près de l’Étang-au-Duc (le duc, son noble père, Sous qui notre Armorique alors vivait prospère), Lina, la blanche, ainsi parlait dans son effroi, Car du château voisin, sur un noir palefroi, Vers la vierge tremblante accourait hors d’haleine Un poursuivant d’amour qui n’avait que sa haine. Acharné sur sa trace, à toute heure, en tout lieu, Au temple il se plaçait sans peur entre elle et Dieu; Il la suivait aux champs, hideux spectre, à la ville, Et jusqu’en ce désert, près de ce lac tranquille. Ses pieds nus sur le sable et les cheveux au vent, Là, depuis le matin, jouait la belle enfant, Et les cailloux dorés sous les eaux transparentes, Les insectes errants, les mouches murmurantes, Les poissons familiers venant mordre le pain, Le pain de chaque jour émietté par sa main, Ou le vol d’un oiseau, la senteur des eaux douces, Les saules frissonnants, les herbages, les mousses, Tout dans ce cœur mobile allait se reflétant… Puis, Lina n’était pas seule au bord de l’étang; Le long du pré passait, repassait la nacelle De son frère de lait, jeune et riant comme elle. Dès que, de son jardin descendant l’escalier, De loin apparaissait Lina, le batelier, Pareil à l’alcyon qui chante sur les lames, Loïs, chantant aussi, voguait à toutes rames; Et lorsque, les bras nus, le col tout en sueur, Vers sa sœur bien-aimée abordait le rameur, C’étaient pour elle, après maintes tendres paroles, Des fleurs roses du lac aux humides corolles, Des touffes de glaïeuls sur l’onde s’allongeant, Et, comme un beau calice, un nénuphar d’argent; Puis, de tous ces présents déposés sur la berge, Le jeune batelier parait la jeune vierge, Et, leur front entouré d’algues et de roseaux, On les eût pris tous deux pour les Esprits des eaux. — « Jetez cette couronne immonde, ô ma duchesse, « Offrande d’un vilain, digne de sa largesse! « Moi, pour vos blonds cheveux j’ai des couronnes d’or, « Des perles que Merlin cachait dans son trésor; « J’ai pour vous un anneau de fine pierreries, « Où votre nom au mien avec art se marie « Un mot de vous, madame, et mes mains poseront « La bague à votre doigt, la perle à votre front; « Et, s’il faut plus encor, dites comment vous plaire: « Il n’est labeur trop grand pour un si grand salaire. — « Sire (et les yeux troublés de l’enfant, ses grands yeux « Brillèrent, de malice et d’espoir radieux), « J’obéis: donc, seigneur, que votre complaisance « Joigne à l’Étang-au-Duc votre Étang-de-Plaisance. « Le jour où les deux lacs s’uniront, je prendrai, « Unie à vous, l’anneau nuptial et sacré. — « Par les saints! c’est trop peu demander, ô princesse! « Pourtant, à moi mon œuvre; à vous votre promesse!» Et, d’un air de vainqueur regagnant son manoir, Le noir baron pressait aux flancs son coursier noir. III O sort! ô changements des choses et des âges! Un double étang couvrait jadis ces marécages, Sur leur bord un manoir s’élevait crénelé: Le haut manoir n’est plus, un étang s’est comblé; Et le profond canal dont l’habile structure Vint unir ce qu’avait séparé la nature, A peine le chasseur, dans ces joncs égaré, En distingue sous l’herbe un vestige ignoré; Grande œuvre par l’orgueil péniblement construite, Mais que maudit l’amour et par le temps détruite IV Dames et chevaliers, artisans et vassaux, Du manoir de Plaisance inondent les préaux: L’évêque est sous un dais avec tous ses chanoines; Dans la foule reluit le front chauve des moines; Les sonneurs sont aussi venus et les jongleurs. Pour le maître du lieu, sous un arceau de fleurs, Debout et rayonnant, il contemple en silence Une barque dorée et que l’étang balance. C’est qu’un puissant travail, et des maîtres vanté, Aujourd’hui s’inaugure avec solennité: Tous sont priés, et noble, et bourgeois, et manœuvre; Et monseigneur de Vanne a voulu bénir l’œuvre. Çà donc! joyeux sonneurs, cornemuses, haut-bois, Harpes des anciens jours, éclatez à la fois! De sa cour entouré, le bon duc de Bretagne Vous arrive, et Lina, sa fille, l’accompagne; Et, par ce jeune bras soutenu, le vieux duc, Sous l’or de son manteau chancelant et caduc, Se traîne en saluant la multitude avide, Oublieux de son rang, mais tout fier de son guide. Or, pourquoi si dolente et ce front sérieux, Elle vers qui s’en vont tous les cœurs et les yeux, Depuis un an cloîtrée avec de saintes vierges, Pâlit-elle si vite à la lueur des cierges? Ou si son cœur redoute en secret quelque mal? Cependant la voici près de l’arc triomphal, Et, la main dans la main, le seigneur du domaine Vers la barque dorée en souriant la mène. Là, parmi les rameurs du léger batelet, Moins triste, elle sourit à son frère de lait. Elle ne pâlit plus, la timide recluse, Quand, le lac traversé, les portes d’une écluse, Aux voix des instrumens qui donnaient le signal. S’ouvrant, l’esquif vainqueur entra dans le canal Qui, par de grands travaux franchissant la distance. Joignait l’Étang-au-Duc à l’Étang-de-Plaisance; Mais, tel un condamné que l’on traîne à la mort. Ses regards lentement erraient sur chaque bord, Comme dans un adieu saluant la prairie Et l’étang paternel où s’éveilla sa vie… Alors le fier seigneur, penché courtoisement: — «Voici mon œuvre. Et vous, dame, votre serment — «Je m’en souviens!…» dit-elle. Et sa main virginale Sans trembler accepta la bague nuptiale; Puis, s’enlaçant au cou du jeune batelier, Tous deux tombaient au fond du lac hospitalier. V — «Lorsque l’étang est calme et la lune sereine, Vous savez, voyageur, quelle est cette sirène Qui peigne ses cheveux, debout sur ce rocher, Tandis qu’à l’autre bord chante un jeune nocher Dont la barque magique, à peine effleurant l’onde, Rapide comme un trait, vole à la nymphe blonde; Et jusqu’au point du jour, par la vague bercés, Ils errent mollement l’un à l’autre enlacés. — O merveilleux conteur, merci pour ton histoire! Elle est triste, mais douce, et mon cœur y veut croire».

    en cours de vérification

  • 1