La collection « L'Imaginaire » / Gallimard met à l'honneur les réalisatrices dans ce coffret réunissant trois destins hors du commun : Chantal Akerman, Alice Guy et Agnès Varda.
Trois cinéastes pionnières qui se sont battues pour la liberté de créer, et s'affranchir des codes, trois voix qui ont marqué à jamais l'histoire du cinéma. Avec les préfaces de Sabine Lancelin, Inès Tabarin, Céline Sciamma, Nathalie Masduraud, Valérie Urrea, Audrey Diwan et Véronique Le Bris.

Moteur ! Elles tournent : Coffret trois titres

Par la fenêtre d'un appartement à Bruxelles, une femme apparaît, souvent vêtue d'un peignoir et drapée dans ses souvenirs. Elle vient de perdre son mari. Alors elle passe beaucoup de temps au téléphone, pour parler à ses filles, l'une à Ménilmontant, l'autre en Amérique, à sa famille dispersée à travers le monde. Dans ce dédale de voix entrelacées, elle évoque ce vide qui l'enserre, avec la délicatesse d'une fugue musicale, comme un bruissement de mémoires. Au-delà de l'imprononçable nom de la Shoah et du mutisme des survivants, elle raconte une solitude indicible et les petits arrangements avec la vie. Des souvenirs qui "font du bien aux os", au milieu des banalités et des rires du quotidien. Récit de deuil sublimé par la parole, Une famille à Bruxelles est une conversation intime avec une mémoire familiale à livre ouvert.

Une famille à Bruxelles

«L'enfant était né vieil enfant et du coup, l'enfant n'était jamais devenu adulte. Il évoluait dans le monde des adultes comme un vieil enfant, et y arrivait mal. Le vieil enfant se disait que si sa mère disparaissait, il n'aurait plus nulle part où revenir. L'enfant à l'adolescence avait fait les quatre cents coups, puis à l'âge adulte n'importe quoi mais savait qu'il pouvait toujours revenir. L'enfant, c'est elle, c'est moi. Et maintenant je suis vieille, je vais avoir soixante ans. Et même plus. Et j'en suis toujours là. Je n'ai pas d'enfant. Un vieil enfant ne fait pas d'enfant. Qu'est-ce qui va me retenir à la vie après.» Dans cet autoportrait écrit à vif, dans la brûlure, l'intensité et l'âpreté du quotidien, Chantal Akerman nous confie la matière même de toute son oeuvre. Les mots sont autant d'images accolées entre elles, scotchées, coupées ; c'est l'écriture comme un montage en cours, le cinéma n'est jamais loin. C'est le même langage que la vie. L'autrice dévoile avec pudeur et douleur la relation avec sa mère, avec sa compagne, avec sa propre folie, qui la guette. Ma mère rit est une magnifique plongée dans les joies, les blessures ; dans le coeur de la réalisatrice.

Ma mère rit

'Au début c'était un cataclysme avec de la brûlure et de l'exaltation. Des mots, toujours les mêmes sans cesse répétés, j'ait fait connaissance avec les mots d'amour d'une langue ancienne. J'ai tant parlé. J'aurais pas dû. Oui, je revivais. J'arrêtais de voir ma mère mourir. J'arrêtais de ne pas vivre. Il y avait de la vie en moi. Toute une vie. Une pleine vie.' Dans cet autoportrait écrit à vif, dans la brûlure, l'intensité et la crudité du quotidien, Chantal Akerman nous confie pour la première fois la matière même de toute son œuvre, de toute sa vie. Depuis son premier court-métrage à dix-huit ans, Saute ma ville, en 1968, et ses premiers films, Je, tu, il, elle en 1974 ou le film culte Jeanne Dielman, en 1975, avec Delphine Seyrig, jusqu'à son dernier film librement réalisé à partir du roman de Conrad en 2012, La folie Almayer, en passant par ses installations et ses carnets de voyages, films documentaires en Russie, à New York ou dans les pays de l'Est, elle n'a jamais cessé de décrire l'enfermement, la répétition avec l'autre, le désir d'un ailleurs, le vertige de la folie. Ma mère rit est une magnifique plongée dans le cœur, le rire, les joies et les blessures de Chantal Akerman.

Ma mère rit (Traits et portraits)

Un divan à New York

Hall de nuit

"Cela se passerait dans le hall d'un grand hôtel. Entre la fin de la nuit et l'aube. Moment où entre les gens toujours debout ou éveillés les rapports se subvertissent". Moment d'une brève rencontre entre Teufik, le jeune portier algérien qui économise son argent pour son futur mariage, et Sophie, qui vient d'apprendre l'amour dans une chambre d'hôtel. Surgit déjà le conflit de deux cultures, celle de l'Islam et celle de l'Occident.

HALL DE NUIT

Chantal Akerman est une cinéaste belge, née le 6 juin 1950 à Etterbeek en Belgique et morte le 5 octobre 2015 à Paris 20e.
Elle est considérée comme une des figures de proue du cinéma moderne.
Elle a été une influence importante notamment pour Gus Van Sant, Todd Haynes et Michael Haneke,.

Delphine Seyrig est une femme très appropriée, de la haute société. Elle est de la famille Ferdinand de Saussure, le structuraliste. Vieil argent. Suisse. Protestant. Ils étaient ce type de personnes bien éduquées qui pouvaient reconnaître un bon artiste avant les autres, et elle était comme ça. Même si c'était contre quelque chose en elle. Dites-moi une actrice en 1972 en France, à l'exception de Delphine, à son niveau, qui aimerait Hôtel Monterey. Personne.

Je n'ai jamais senti que j'appartenais. Quand j'étais à l'école ... Je suis d'abord allé dans une école juive, quand j'étais très peu. Mais quand j'avais 12 ans, ils m'ont mis dans une école avec beaucoup de traditions, et ils étaient des gens éduqués et ils parlaient de la Grèce et du Parthénon et je ne sais pas quoi.

Ma mère est arrivée à Bruxelles en 1938 dans une petite ville près de Krakow. Mais étrangement, en 1942 ou 1943, elle a été ramenée à Auschwitz, qui était à seulement 30 miles de l'endroit où elle a grandi. Ses parents y sont morts et beaucoup de sa famille.

J'ai grandi en lisant Proust toute ma vie, et il m'est très cher.

Ce que je pense est terrible dans l'art, c'est la façon dont il est lié à l'argent par la suite. Pas quand vous le faites ... mais après cela, c'est comme si 5 000 personnes riches y ont accès. Un film, même si cela peut être un mauvais film ou un bon film, il est plus démocratique. Les gens qui achètent mes films, les gens qui achètent mes installations, c'est parfois une fondation ou un musée. Quand c'est une base, c'est lié à des gens très, très, très riches - qui sont vos ennemis! Vos ennemis vous nourrissent. Mais vous ne les rencontrez pas. C'est donc une chose très étrange.

Je suis juif. C'est tout. Je suis donc en exil tout le temps. Où que nous allions, nous sommes en exil. Même en Israël, nous sommes en exil.

J'ai eu une horrible blague sur Auschwitz, j'ai rendu tout le monde fou avec cette blague. Mais cette blague me fait du bien. Vous savez ce que signifie "cuit"? Quand quelque chose est cuit. C'est une blague comme ça: "Que font les oiseaux quand ils survolent Auschwitz?" Cuit! Cuit! "" C'est horrible, mais c'est désacralisant. Pour moi, c'est bien.

Je viens de la famille d'une femme. Mon arrière-grand-mère avait trois filles et un fils. Ma grand-mère avait deux filles et ma mère a eu deux filles. Ma sœur avait une fille puis enfin un fils. Tu aurais dû voir mon père avec le fils. Il ne pouvait pas croire qu'il y avait finalement un garçon dans la famille.

Lars von Trier est très, très, très intelligent envers les femmes. Il donne à la femme un espace que je ne connais aucun cinéaste. Parce qu'en brisant les vagues, la protagoniste Emily Watson est le Christ. Quel homme fait ça? Je ne connais aucun homme qui donne cet espace à une femme. Personne.

Je n'étais pas intéressé par le cinéma quand j'étais jeune.

Je suis d'abord allé dans une école juive, quand j'étais très peu. Mais quand j'avais 12 ans, ils m'ont mis dans une école avec beaucoup de traditions, et ils étaient des gens éduqués et ils parlaient de la Grèce et du Parthénon et je ne sais pas quoi. Tous les enfants, toutes les filles qu'ils avaient déjà vues et savaient cela de leur famille, et je dirais: "De quoi parlez-vous, qu'est-ce que c'est?" Ce n'est pas mon monde. Mes grands-parents étaient des gens très éduqués, mais dans la tradition juive. Ils savaient tout sur la Bible.

Quand je suis dans mon quartier, je ne vois plus rien, parce que j'y suis tellement habitué. Quand je vais ailleurs, soudain, je suis en vie. Je suis en alerte et je peux être frais.

J'ai réalisé que ma mère était au centre de mon travail, car maintenant que ma mère n'est plus là, il n'y a plus personne.

Avez-vous vu le film Histoire d'Amérique? C'est aussi un mélange d'humour et de monologue, et cela montre comment l'humour juif vient du drame et de la tragédie.

Même si j'ai une maison à Paris et parfois à New York, chaque fois que je disais que je devais rentrer chez moi, ça allait à ma mère.

Ma mère était totalement différente des mères de mes amis. Elle ne se séparerait jamais de moi. D'une certaine manière, ma vie lui appartient. Quand j'étais enfant, elle s'est plainte que j'étais anorexique, alors ils m'ont envoyé dans des endroits pour me faire manger. Quand je regarde des photos de moi-même, j'étais juste un enfant d'apparence normale. C'était son fantasme.

Mon père a dit: "D'accord, assez avec l'école juive." Il m'a mis dans une école publique et il a dit: "Si vous êtes le premier de votre classe, cela signifie que l'école est mauvaise." C'était son humour.

Je voulais écrire et ensuite j'ai vu Pierrot et je comprends que je pourrais m'exprimer dans un plus ... aussi probablement, j'avais une intuition que si je n'allais écrire que, je resterai dans une pièce tout le temps et jamais sortir. Je sentais que si j'allais faire des films, je devrais communiquer avec les gens et ce serait bien pour moi.

Paris n'est pas si carré. Je ne suis pas doué pour la géographie de la ville à Paris, donc je suis toujours perdu. Ici, à New York, vous ne pouvez jamais être perdu. À Paris, même lorsque je me rends à ma galerie ou autre chose, je prends toujours un autre itinéraire, car Paris n'est pas construit de cette façon.

Mes grands-parents étaient des gens très éduqués, mais dans la tradition juive. Ils savaient tout sur la Bible. Et puis ils ont dû venir à Bruxelles, pour fuir la Pologne, car il y avait trop d'antisémitisme. Ils ont perdu tout ce qu'ils avaient.

Regardez Charlotte Gainsbourg, dans le film de Lars von Trier Antichrist. Elle est incroyable. Elle n'agit pas; Elle est là. Elle est géniale. Et vous l'aimez pour ça, parce que c'est tellement audacieux, ce qu'elle doit faire. Et elle le fait comme si ce n'était rien. Je pense qu'elle est courageuse. Je suis tombée amoureuse d'elle quand j'ai vu ce film. C'est une révélation. Révélation totale.

Celui qui cherche à trouver, trouvera tout à bien et finira par obscurcir sa vision avec ses propres idées préconçues.

Vous devez comprendre que je suis un enfant de la deuxième génération, ce qui signifie que ma mère était à Auschwitz, et la tante de ma mère était à Auschwitz avec elle; Ma grand-mère et mon grand-père y sont morts. Donc oui. Tous ces gestes qu'ils travaillent pour vous, ou pour eux, pour remplir leur temps ou ne pas ressentir leur anxiété. Mais l'enfant ressent tout. Cela ne rend pas l'enfant en sécurité. Vous mettez l'enfant en prison.

Quand les gens me demandent si je suis un cinéaste féministe, je réponds que je suis une femme et je fais aussi des films.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Chantal_Akerman

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