Étranges prisonniers réunis par Genet dans la cellule d'un quartier de haute sécurité ! Loin de souhaiter échapper à leur condition, ils constituent à eux trois un petit monde clos dont ils exagèrent l'enfermement. Yeux-Verts, le seul assassin du groupe, est un pôle attractif pour les deux autres : ils n'aspirent qu'à l'honneur de l'imiter, sinon de le rejoindre dans le ciel héroïque du crime et de la mort pour lequel la prison se révèle le meilleur tremplin. 

Prison et enfermement métaphysiques donc. Yeux-Verts, le plus avancé sur la voie du détachement, fuit dans une sorte de rêve de gloire ; les deux autres s'entre-déchirent pour avoir les meilleures chances d'accéder à une existence vraie en captant à leur profit le reflet de celui qui appartient déjà à l'autre monde. Ce désir luciférien de néantisation salvatrice ne peut aboutir qu'à l'échec. Qui s'en étonnerait ?

Haute surveillance - Dernière version publiée (1988) suivie de la première version publiée (1947)

Scritto in carcere nel 1943-44 sui fogli forniti ai detenuti per la confezione di sacchetti di carta e ambientato nel penitenziario di Fontevrault durante l'inverno 1940-41, Miracolo della rosa è un'opera di scandalo e malizia. In parte è un resoconto immaginario della vita di prigionia del protagonista « Jean Genet », in parte è una rievocazione realistica della permanenza dello scrittore nella colonia penale di Mettray, dove a sedici anni era stato incarcerato per furto. A Fontevrault Genet ritrova altri reduci di Mettray: il giovane Bulkaen, oggetto di una passione febbrile; Divers, lo « sposo » della giovinezza; ma soprattutto Harcamone, il « ?danzato mistico », bellissimo giovane condannato alla pena capitale per omicidio. Fontevrault, ex abbazia, poi carcere, diventa infine epicentro del desiderio e degli intrecci erotici fra i compagni di detenzione, in un susseguirsi di episodi che costituiscono una sorta di romanzo a puntate in cui i personaggi si ritrovano immersi in un clima di torride e incontenibili pulsioni virili. Su tutti domina proprio Harcamone, che dalla sua cella d'isolamento si manifesta come un'epifania libidinosa e trasmuta agli occhi di Genet le catene che gli serrano i polsi in miracolose ghirlande di rose bianche. Miracolo della rosa - qui presentato con prefazione e traduzione rivista di Dario Gibelli - è un'autobiogra?fia visionaria che trasfigura la materia sordida da cui trae origine, fatta di verghe e violenza, e la sublima in poesia. È un'apologia di esistenze marginali sottratte all'ignominia e trasformate in emblemi eroici dalle mistiche alchimie del canto. È una celebrazione della potenza della scrittura, strumento di salvezza e di reinvenzione delle vittime sociali, e una meditazione sulle virtù evasive della fantasticheria - il lusso specifico di chi si trova in un carcere, fisico o simbolico che sia. È l'opera più eccessiva di Jean Genet.

Miracolo della rosa

Aux personnages de Genet on pourrait dire : « Arrête de faire le Nègre ! », comme on dit à d'autres : « Arrête de faire le clown ! ». En fait, ici, c'est la même chose : Nègre et clown c'est tout un, dans la dérision,le double jeu et la provocation. Ces Nègres-là n'ont pas un nez rouge qui les métamorphose mais un nez noir qui les dissimule d'autant plus qu'il ne se voit pas. Ils jouent à paraître ce qu'ils sont déjà et à être ce qu'ils ne sont pas, dans une confusion plaisante mais bien faite pour dérouter qui voudrait en finir une bonne fois avec les faux-semblants. Il est toutefois inutile d'attendre de Genet qu'il révèle tout à trac sa position personnelle quant au statut politique et social du Noir. Comme en se jouant, il laisse affleurer ses angoisses et ses désirs, sa violence et ses espoirs de revanche. Le rire des Nègres est désarmant sans doute mais, désarmés, les Blancs - présents sur le plateau à titre d'oppresseurs autant qu'à titre de public - ne sauront plus se défendre : c'est bien autour de la cérémonie funèbre de leur anéantissement que la pièce est construite.

Les nègres

François Sentein raconte dans les Nouvelles minutes d'un libertin sa rencontre avec un improbable voleur de livres, en particulier d'éditions originales des classiques, surnommé Corneille.Avec Jean Genet, alias Corneille, se noue très vite une relation amicale, et Sentein discerne immédiatement les capacités littéraires d'un jeune malfrat qui n'a jusqu'alors rien publié.Il lira tout le premier théâtre, détruit depuis, de Genet, et assistera à la composition de Notre-Dame-des-Fleurs qu'il corrigera et ponctuera.Dans les quelques années qui précèdent sa gloire littéraire, Genet est comme l'on sait menacé de relégation, et c'est de prison qu'il s'adresse surtout à Sentein, seul à l'aider ou presque, prenant soin des moindres demandes d'un ami plutôt exigeant.Annotées par Claire Degans avec l'aide de François Sentein, ces lettres offrent pour la première fois une vision directe, et extrêmement émouvante, des débuts d'un des plus grands écrivains de notre siècle.

Lettres au petit Franz

Le Bagne est la queue de comète carcérale de Genet : de 1942, où il ébaucha Haute Surveillance, à 1964, où il abandonna la rédaction du Bagne, Gent n'a cessé d'ériger l'enfermement en idéal d'une vie essentialisée, car proche de la mort.
Cayenne est pour lui le nouvel Eden, paradis perdu auquel seul le crime permet d'ajouter un éclair de totale réalisation de soi avant que le couteau de la guillotine n'en vienne sanctifier la perte. A ce jeu de qui perd gagne jouent les forçats Rocky, Ferrand et Fornalo : d'abord rivaux, ils finiront par reconnaître qu'ils sont à égalité de haine et de pouvoir pour tromper et ridiculiser les maîtres du bagne.
Dans ce lieu clos s'anime, traitée avec humour et sarcasme, une société d'exclus -bagnards aussi bien que gardiens- malfaisants et retors, tout ensemble lucides et aliénés par leurs rêves. Le Bagne met un point d'orgue en même temps que de suspension à l'oeuvre théâtrale de Genet.

Le bagne - theatre et scenario

Articles, entretiens, déclarations, préfaces, manifestes ou discours, les textes des interventions de Genet, ici rassemblés, témoignent d'un paradoxe : celui qui fut l'écrivain le plus solitaire, le plus retranché de son temps fut aussi, durant les vingt dernières années de sa vie, l'un des plus présents sur la scène publique. De Chartres à Chicago, de la Goutte-d'Or au camp de Chatila, des rives du Jourdain aux ghettos noirs d'Amérique, ce livre retrace l'aventure littéraire et politique, menée aux frontières de l'Occident, aux côtés des exclus du monde et des peuples en révolte, par un poète qui n'a jamais revendiqué d'autre titre que celui de vagabond.

L'Ennemi déclaré : Textes et entretiens

Décor: une cellule de prison. Personnages: le surveillant et trois détenus: Yeux-Verts, vingt deux ans, condamné à mort; Maurice, dix-sept ans, qui lui voue une admiration sans bornes; Lefranc, voleur de vingt-trois ans dévoré par la jalousie. Dans ce huis clos, tout est drame: un lit défait, un mot de trop. Mais la tragédie naît d'une femme absente, celle que Yeux-Verts va laisser en mourant sur l'échafaud. Maurice et Lefranc la convoitent, se la disputent sous le regard de Yeux-Verts. Jusqu'au meurtre: Lefranc étrangle Maurice "J'ai fait ce que j'ai pu pour l'amour du malheur", dit-il. "Je suis vraiment tout seul". Cette pièce en un acte a été créée au Théâtre des Mathurins le 26 février 1949. Jean Genet en a remanié le texte en août 1985. Cette nouvelle version est publiée ici pour la première fois.

Haute surveillance

«Mon casier judiciaire est vierge et je n'ai pas de goût pour les jeunes garçons : or les écrits de Genet m'ont touché. S'ils me touchent, c'est qu'ils me concernent ; s'ils me concernent, c'est que j'en peux tirer profit.» Jean-Paul Sartre Saint Genet, comédien et martyr

Pompes funèbres

Jean Genet, né le 19 décembre 1910 à Paris VIe arrondissement et mort le 14 avril 1986 à Paris XIIIe arrondissement, est un écrivain, poète et auteur dramatique français. Genet aborde notamment dans ses ouvrages l'homosexualité et l'érotisme, à travers la célébration de personnages ambivalents évoluant au sein de mondes interlopes.

Le condamné à mort

Créer, c'est toujours parler de l'enfance.

Ce dont nous avons besoin, c'est de la haine. De là, nos idées naissent.

Je voulais m'avaler en ouvrant ma bouche très large et en le retournant sur ma tête pour qu'il prenne tout mon corps, puis l'univers, jusqu'à ce que tout ce qui resterait de moi serait une boule de mange serait anéanti: c'est ainsi que je vois la fin du monde.

Ah ces fluides corporels assommants : le sang, le sperme, les larmes !

C'est l'heure où la nuit se casse de la journée, ma colombe, laissez-moi partir.

Lentement mais sournois, je veux la dépouiller de tout type de bonheur pour faire un saint d'elle.

Si nous nous comportons comme ceux de l'autre côté, alors nous sommes de l'autre côté. Au lieu de changer le monde, tout ce que nous allons réaliser est le reflet de celui que nous voulons détruire.

Les crimes dont un peuple a honte constitue sa véritable histoire. Il en va de même pour l'homme.

Chaque meurtre prémédité est toujours régi par un cérémonial préparatoire et est toujours suivi d'une cérémonie propitiatrice. Le sens des deux échappe à l'esprit des meurtriers.

A la solitude morale du meurtrier s'ajoute la solitude de l'artiste, qui ne peut reconnaître d'autorité que celle d'un autre artiste.

...les personnages de mes livres se ressemblent tous. Ils vivent, avec de légères variations, les mêmes moments, les mêmes périls, et quand je parle d'eux, ma langue, qui s'en inspire, répète les mêmes poèmes sur le même ton.

Pour atteindre l'harmonie au mauvais goût, c'est la hauteur de l'élégance.

L'amour utilise les pires pièges. Le moins noble. Le plus rare. Il exploite la coïncidence.

Ils ont passé leur temps à ne rien faire ... ils ont laissé l'intimité les fusionner.

Je donne le nom de violence à une audacieuse qui se trouvait inactive et épuisée de danger.

La beauté n'a pas d'autre origine que la blessure singulière, différente dans tous les cas, cachée ou visible, que chaque homme porte en lui-même, qu'il préserve, et dans lequel il se retire quand il quittait le monde pour une solitude temporaire mais authentique

...la beauté est la projection de la laideur et en développant certaines monstruosités on obtient les ornements les plus purs.

La violence est un calme qui vous dérange.

La renommée des héros doit peu à la mesure de leurs conquêtes et à tout le succès des hommages qui leur ont été versés.

De la beauté de son expression dépend la beauté d'un acte moral. Dire qu'il est beau décide déjà qu'il le sera. Reste à le prouver.

Quiconque n'a pas connu l'extase de la trahison ne sait rien du tout sur l'extase.

Tout d'abord, ne mélangez pas vos épingles à cheveux avec la mienne! Toi ... oh! Très bien, mélangez votre boue avec la mienne. Mélange le! Mélangez vos chiffons avec mes lambeaux! Mélangez le tout.

Sur lui, sous lui,, la bouche pressée vers la sienne, il chantait à ses chansons grossières qui se déplaçaient à travers son corps.

Exclué par ma naissance et mes goûts de l'ordre social, je n'étais pas au courant de sa diversité. Rien au monde n'était hors de propos: les étoiles sur la manche d'un général, les citations du marché boursier, la récolte d'olivier, le style du pouvoir judiciaire, l'échange de blé, les lits de fleurs. Rien. Cet ordre, craintif et craint, dont les détails étaient tous interdépendants, avait un sens: mon exil.

Un mâle qui en baise un autre est un double mâle.

Un homme doit rêver longtemps pour agir avec grandeur, et le rêve se nourrit de l'obscurité.

Quiconque connaît un fait étrange partage sa singularité.

Le pouvoir peut être à la fin d'un pistolet, mais parfois c'est aussi au bout de l'ombre ou de l'image d'un pistolet.

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