Malgré la difficulté de définir ce que le mot identité recouvre vraiment, entre le champ social et l'intime, le concept a envahi le débat public depuis de longues années. Sa prévalence est devenue un enjeu majeur au sein de nos sociétés et un défi pour les politiques. Kwame Anthony Appiah, quant à lui, procède à un examen systématique de l'identité pensée en fonction de catégories telles que la croyance, le genre, la citoyenneté, la couleur, la classe ou la culture. En questionnant la validité de ces critères, il remet en cause nos partis pris et hypothèses quant à la manière dont l'identité serait une chose évidente ou innée. Il parvient à démontrer au contraire comment elle se fabrique, et son exposé, limpide, est appuyé par une érudition époustouflante. Il n'hésite pas à nourrir cette réflexion de sa propre expérience et de sa biographie pour nous amener à voir que non seulement il existe des identités conflictuelles, mais que ce sont peut-être précisément nos conflits intérieurs qui créent le besoin de définir artificiellement ces identités. Dans une approche radicale, il démontre à quel point ces constructions identitaires à l'oeuvre dans nos sociétés modernes sont le résultat d'approximations plutôt que de données objectives. Qu'il s'agisse du sens du mot «  nation  », de notre perception de la question raciale, des différences sociales ou du mythe de la culture occidentale, Appiah déconstruit point par point nos certitudes et élargit l'horizon vers un dépassement du piège identitaire.

Repenser l'identité : ces mensonges qui unissent

Que peut-on apprendre sur la morale en étudiant les révolutions morales ? Historiens et philosophes ont découvert bien des choses sur la science en examinant avec attention les révolutions scientifiques.
La morale, ainsi que le soutenait Emmanuel Kant, est en fin de compte pratique ; elle concerne ce que nous faisons. Aussi, comme toute révolution est un changement profond en un bref laps de temps, une révolution morale doit impliquer une transformation rapide du comportement moral et non pas simplement des sentiments moraux. Kwame Anthony Appiah, professeur de philosophie à l'Université Princeton, examine quelques révolutions morales, la tombée en désuétude du duel, l'abandon du bandage des pieds en Chine, la fin de la traite négrière dans l'Atlantique, pour cerner ce qu'elles ont en commun.
Le premier trait est qu'il ne s'est passé aucun retournement d'opinion suite à des arguments nouveaux politiques, religieux ou moraux. Ceux-ci, hostiles à chacune de ces pratiques étaient bien connus depuis longtemps ; le duel avait toujours été meurtrier et irrationnel, le bandage des pieds cruellement mutilant, l'asservissement une atteinte à la dignité humaine de l'esclave. L'important est ailleurs ; dans chacune de ces transitions le rôle central est revenu à quelque chose que l'on nommait très naturellement " honneur ".
Ainsi des conceptions de l'honneur national et de l'honneur d'ouvriers très éloignés des plantations du Nouveau Monde ont respectivement occupé une place éminente dans la fin du bandage des pieds et de l'esclavage moderne. Ce qui s'avère essentiel, c'est dans chaque cas le rôle des identités sociales et plus exactement la lutte pour la reconnaissance ; nous avons besoin que d'autres personnes nous reconnaissent en tant qu'êtres conscients et nous témoignent que nous les reconnaissons.
Appiah restaure donc, au coeur de la philosophie politique et morale, la notion aujourd'hui négligée d'honneur, essentielle à notre réflexion sur la question de savoir ce qu'est vivre une vie humaine réussie. Tant le respect et l'amour-propre ou respect de soi sont clairement des biens humains cruciaux.

Le code de l'honneur ; comment surviennent les révolutions morales

J'ai commencé la philosophie à la recherche de réponses. Mais en cours de route, je suis venu pour explorer les questions. Les progrès de la philosophie sont constitués, je pense, dans une délimitation plus claire des options conceptuelles, et non pour parvenir à des conclusions déterminées.

Les cosmopolites commencent, je pense, avec un sentiment d'une chose que nous partageons certainement, qui est notre faillibilité. Personne n'a de raison d'être confiant qu'ils ont raison sur tout. C'est l'une des motivations de la conversation à travers les différences. C'est dans mon intérêt de converser avec des gens qui se trompent sur différentes choses de celles qui me trompent!

À moins que vous n'ayez le pouvoir d'arrêter le gouvernement d'Iran décapaciter les adolescents pour des actes homosexuels, il n'y a pas grand-chose à faire, sauf le déplorer à moins que vous ne soyez prêt à converser avec les raisons pour lesquelles ils pensent que c'est bien.

J'ai depuis longtemps l'idée que les facteurs les plus importants pour déterminer ce que nous croyons, comment nous vivons et ce que nous accomplissons sont des questions d'accident. Autrement dit, nous n'avons pas choisi où être né, qui serait nos parents ou à quoi nous ressemblerions. Pourtant, ces facteurs jouent un rôle énorme dans presque tout ce qui est. Selon les problèmes de cosmopolitisme, le point le plus évident est que la façon dont nous nous identifions en termes de nationalité, de sous-groupes culturels et de religion est à peu près une fonction de notre naissance.

Une valeur c'est comme un fax : ça ne sert pas à grand chose si vous êtes le seul à en avoir un.

Je crois qu'il existe des valeurs morales universelles - dont certaines sont très bien desservies par une attitude cosmopolite. Vous pouvez penser qu'il y a des valeurs universelles sans supposer que tout le monde convient de ce qu'il est et sans supposer que vous les avez bien non plus.

Nous ne pouvons pas parler littéralement avec tout le monde sur la planète ou même avec des représentants de chaque groupe. Mais nous pouvons être en faveur de l'échange respectueux d'idées d'une manière qui ne présupposait pas que toutes les bonnes réponses sont de notre côté. Pourtant, nous devons tous avoir des lignes de fond morales. Une fois que le génocide ou la torture commencent la priorité passant de la compréhension à l'arrêt. Un espoir que j'ai pour la conversation mondiale, comme instancié dans les traités des droits de l'homme, c'est que nous arrivons lentement à un consensus sur certaines lignes de base morales.

L'expression «liberté académique» est souvent utilisée négligemment: voici une œuvre qui permettra une conversation plus minutieuse sur ces nombreux problèmes cruciaux auxquels l'Académie est confrontée, dans laquelle le montrent une compréhension bien travaillée des conceptions de la liberté académique, comme le montrent ses auteurs , un outil essentiel.

Il y a beaucoup de gens de tempérament cosmopolite qui ne sont pas des élites de leurs sociétés ou du monde; Et bien que, pour diverses raisons, je pense qu'un esprit cosmopolite va naturellement avec la vie urbaine, c'est la vie d'une très grande proportion d'êtres humains aujourd'hui. Et je ne pense pas que les ruraux ne puissent pas être cosmopolites, dans mon sens.

Le défi est donc de prendre des esprits et des cœurs formés au cours des longs millénaires de vivre dans des troupes locales et de les équiper d'idées et d'institutions qui nous permettront de vivre ensemble en tant que tribu mondiale que nous sommes devenues.

La version du cosmopolitisme que je préfère consiste exactement à équilibrer l'universalité et la différence. Beaucoup de gens qui croient à peu près à l'universalité, veulent, à tort, je pense, d'imposer leur vision du monde aux autres. Ils pensent non seulement qu'il y a des vérités universelles, mais qu'ils savent déjà ce qu'ils sont. Et ils ne pensent pas avoir quelque chose à apprendre, en conséquence, des autres. Ils ne conversent pas, ils essaient de convertir.

Je préfère une forme de cosmopolitisme qui prend les nations très au sérieux, en particulier en raison du rôle du droit national dans le maintien ou, malheureusement, de saper les droits de l'homme. Certains cosmopolites prennent la métaphore de la citoyenneté mondiale - l'étymologie de la Parole, après tout, vient simplement d'une phrase grecque signifiant citoyen du monde - exclure la prise de citoyenneté nationale au sérieux. Je pense que c'est une grosse erreur. Pourquoi ne puis-je pas être fidèle à l'Amérique et à l'humanité? Après tout, je peux être fidèle à l'Amérique et à New York!

Il existe de nombreux accords à travers les soi-disant «religions mondiales», à un certain niveau d'abstraction. Mais quand il s'agit de les appliquer dans des situations concrètes, ils peuvent conduire à des décisions incompatibles. Par exemple, certaines personnes pensent que les idées chrétiennes de la modestie sexuelle suggèrent que les homosexuels devraient être enfermés, certaines personnes pensent qu'elles signifient que les églises devraient reconstruire les mariages gays. Mais tout le monde croit à la modestie sexuelle. Je pense qu'il y a des vérités morales universelles, que tout le monde les accepte ou non. Voici un niveau très bas mais important: il est très mauvais de torturer les gens.

Beaucoup de gens dans le monde musulman ne sont pas engagés dans un affrontement avec Te West et ne veulent pas le faire; Et aucun des actes terroristes n'était une attaque du monde musulman à l'ouest. Ce sont des attaques par des groupes particuliers de musulmans sur des individus ou des nations occidentaux particuliers. Si nous nous permettons de penser à penser à chaque musulman en tant qu'ennemi ou à chaque occidental en tant qu'ami, d'ailleurs dans ces circonstances, nous n'aurons aucune base pour aller de l'avant.

L'un des défis centraux de la conversation mondiale aujourd'hui est de trouver des moyens de comprendre des points de vue très différents sur le genre et la sexualité. Mais nous devons commencer par reconnaître que ces problèmes sont subjcts à la dispute au sein de chaque société ainsi que dans les sociétés. Nous avons besoin d'une conversation mondiale qui reconnaît que nous avons ces opinions très différentes. Ensuite, essayez de s'entendre sur les droits fondamentaux: des choses auxquelles nous pensons que chaque personne a droit. Enfin, si nous sommes convaincus que ce que fait un gouvernement ou une société ailleurs à certaines personnes, c'est mal et que la conversation ne devient nulle part.

La conversation n'a pas à conduire à un consensus sur quelque chose, surtout, à des valeurs; Il suffit que cela aide les gens à s'habituer les uns aux autres

Lorsque les philosophes parlent de la raison pour laquelle ils ont souvent été dans le domaine de la philosophie plus de la moitié de ma vie, j'ai appris que la raison ne change pas beaucoup d'esprit. Mais il y a un sentiment de résonabilité plus ordinaire, qui implique non seulement une logique mais une sensibilité aux préoccupations réelles des autres, un désir de comprendre, même lorsque vous n'êtes pas d'accord. Beaucoup de gens sont raisonnables de cette manière. Je suis prêt à penser que le monde sera amélioré par les conversations de personnes raisonnables, même s'il y a des gens et des gens déraisonnables qui ne veulent pas converser également.

Si quelqu'un vous déteste, il ne vous demandera pas les choses.

Conversations ... Commencez par le genre d'engagement imaginatif que vous obtenez lorsque vous lisez un roman ou regardez un film ou assistez à une œuvre d'art qui parle d'un endroit autre que le vôtre. J'utilise donc le mot «conversation» non seulement pour les discours littéraux, mais aussi comme métaphore de l'engagement avec l'expérience et les idées des autres. Et je souligne le rôle de l'imagination ici parce que les rencontres, correctement menées, sont précieuses en elles-mêmes. La conversation ne doit pas conduire à un consensus sur quoi que ce soit, surtout pas des valeurs; Il suffit que cela aide les gens à s'habituer les uns aux autres.

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