Manuel Alvarez Bravo in color

Initié très tôt aux arts plastiques par son père et son grand-père, Alvarez Bravo interrompt ses études à l’âge de treize ans, époque où il reçoit en cadeau son premier appareil photographique. Il exerce différents métiers, en ne cessant d’approfondir sa technique photographique avec du matériel rudimentaire et en s’initiant aux courants et tendances artistiques de son temps. Dès 1927, il ouvre une modeste galerie dans son appartement de México où il expose notamment Frida Kahlo et Diego Rivera. Il est très vite remarqué par la critique internationale et se lie d’amitié avec de nombreux photographes dont Edward Weston, Paul Strand, Henri Cartier-Bresson. Car Manuel Alvarez Bravo incarne, à plus d’un titre, une forme exceptionnelle de cosmopolitisme artistique : son œuvre, bien que tout à fait personnelle, se nourrit parallèlement des grands courants et mouvements artistiques européens dont il suit attentivement les réflexions et avancées. Sa célèbre photographie La bonne renommée endormie fut d’ailleurs initialement choisie par André Breton pour illustrer la couver-ture de la revue surréaliste Minotaure… Partisan de la modernité, il passe d’une recherche à l’autre quand il lui semble avoir épuisé les voies d’une exploration. Formaliste, moderniste, réaliste, documentaire, sa photographie évolue en permanence, tandis que se construit une forme unique de poétique visuelle qui signe la puissance indémodable de son œuvre. A bien des égards, une grande part de cette œuvre se lit comme l’exact miroir d’un pays et, plus encore, d’une civilisation. Du Mexique, il a tout exploré, tout montré, tout interprété sans jamais céder au pittoresque : des sites mythiques de la civilisation maya aux fresques muralistes, en passant par les drames de la révolution zapatiste (cf. L’ouvrier assassiné), il a passionnément interrogé l’essence, la texture, la subtile alchimie d’un pays et d’une nation dont il dresse le portrait philosophique définitif. Manuel Alvarez Bravo incarne sans doute à lui seul la complexité envoûtante d’un Mexique qui n’a cessé de fasciner intellectuels et artistes depuis de nombreuses décennies.A son propos, le grand écrivain Carlos Fuentes a écrit : “Le génie d’Alvarez Bravo consiste précisément à donner un instant de repos à l’écoulement du monde, pour que ce soit nous, les spectateurs, qui lui restituions son mouvement.”

Manuel Alvarez Bravo

Je pense que la philosophie d'un artiste visuel se développe beaucoup plus librement que la philosophie d'un écrivain ou d'un penseur. Ce n'est pas si discipliné. Le photographe travaille avec ses yeux et son esprit.

Avant la conquête, tout l'art était du peuple, et l'art populaire n'a jamais cessé d'exister au Mexique. L'art appelé populaire est de caractère fugitif, avec moins de caractéristiques impersonnelles et intellectuelles des écoles. C'est le travail de talent nourri par l'expérience personnelle et celle de la communauté - plutôt que d'être tiré des expériences des peintres à d'autres moments et autres cultures.

Le mot «art» est très glissant. Cela n'a vraiment aucune importance par rapport à son travail. Je travaille pour le plaisir, pour le plaisir du travail, et tout le reste est une question pour les critiques.

Il n'y a pas d'autre art avec une aussi grande capacité démocratique que la photographie.

On pourrait penser à une personne qui semble avoir deux côtés opposés et contradictoires à sa personnalité; Mais il s'avère qu'à la fin, les deux parties sont complémentaires. La même chose se produit avec l'œuvre d'un artiste: profondément, ce qui apparaît comme des côtés contradictoires ne sont que des registres différents, différents aspects de la réalité que l'artiste habite

Je pense que la lumière et l'ombre ont exactement la même dualité qui existe entre la vie et la mort.

J'ai juste la volonté de le faire. Je ne prévois pas de photo à l'avance… Je travaille par impulsion. Pas de philosophie. Pas d'idées. Pas par la tête mais par les yeux. Finalement, l'inspiration arrive à intervenir est la même que l'inspiration, et finalement elle vient.

L'instrument principal d'un photographe est ses yeux. Aussi étrange que cela puisse paraître, de nombreux photographes choisissent d'utiliser les yeux d'un autre photographe, passé ou présent, au lieu des leurs. Ces photographes sont aveugles.

Ses oeuvres

Ses derniers livres