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Stéphane Mallarmé

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Étienne Mallarmé, dit Stéphane Mallarmé, né le 18 mars 1842 à Paris et mort le 9 septembre 1898 à Valvins (commune de Vulaines-sur-Seine, Seine-et-Marne), est un poète français, également enseignant, traducteur et critique d'art. Admirateur de Théophile Gautier, de Charles Baudelaire et de Théodore de Banville, Stéphane Mallarmé fait paraître en revue quelques poèmes en 1862. Professeur d'anglais par nécessité, il est nommé en septembre 1863 au lycée de Tournon-sur-Rhône en Ardèche et séjourne à Besançon et Avignon, avant d'arriver à Paris en 1871. Il fréquente alors des auteurs littéraires comme Paul Verlaine, Émile Zola ou Auguste de Villiers de l'Isle-Adam et des artistes comme Édouard Manet, qui a peint son portrait en 1876. S'il rencontre des difficultés dans son métier de professeur (il est chahuté par ses élèves), il mène une vie familiale paisible, ponctuée de difficultés financières et de deuils, en particulier la mort de son fils Anatole en 1879 à l'âge de 8 ans. Il écrit des poèmes très élaborés et reçoit ses amis créateurs lors des Mardis de la rue de Rome ou dans sa maison de campagne, à Valvins, près de Fontainebleau, où il meurt le 9 septembre 1898 à 56 ans. Attiré par l'esthétique de L'art pour l'art, il collabore au Parnasse contemporain dès 1866, cherchant à dépasser son sentiment d'impuissance lié à un état dépressif, il est dès lors en quête d'une beauté pure que seul peut créer l'art : « le monde est fait pour aboutir à un beau livre », affirme-t-il. Il entreprend des œuvres ambitieuses, sur lesquelles il travaillera longtemps, comme Hérodiade (1864-1887) ou L'Après-midi d'un faune (1865-1876, dont Claude Debussy tirera une de ses œuvres symphoniques les plus célèbres en 1892-1894). Admirateur d'Edgar Poe, il publie en 1875 une traduction du Corbeau (1845), accompagnée d'illustrations d'Édouard Manet, et écrit le Tombeau d'Edgar Poe en 1876 (« Tel qu’en Lui-même enfin l’éternité le change… »). Toujours en prose, il traduit d'autres poèmes de Poe. En 1887, il fait paraître une édition de ses Poésies qui montrent sa recherche stylistique, comme dans le Sonnet en X, « Ses purs ongles très haut dédiant leur onyx », ou le sonnet en octosyllabes Une dentelle s'abolit (« Une dentelle s'abolit / Dans le doute du Jeu suprême / À n'entrouvrir comme un blasphème / Qu'absence éternelle de lit »). Son ambition d'écrire un poème absolu trouve son aboutissement dans un poème graphique de 1897, Un coup de dés jamais n'abolira le hasard, qui est jugé hermétique dès sa parution. Le reproche d'hermétisme restera attaché à l'art mallarméen. La renommée de Stéphane Mallarmé se consolide encore à partir de 1884, quand Paul Verlaine l'inscrit dans sa série des Poètes maudits. Porteur de modernité et proche des avant-gardes en art comme en littérature, il est reconnu comme un maître par les poètes de la jeune génération, qui va d'Henri de Régnier et des symbolistes à Paul Valéry. Mallarmé se révèle avoir été l'instigateur, dans la seconde moitié du XIXe siècle, d'un renouveau de la poésie dont l'influence se mesure encore sur des poètes d'aujourd'hui comme Yves Bonnefoy. Ayant joué un rôle prépondérant dans l'éclosion de la modernité poétique, il est considéré comme l'un des plus grands poètes de langue française.

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Poésies

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    Stéphane Mallarmé

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    Mon cher Papa J'avais appris un compliment, Et j'accourais pour célébrer ta fête, On y parlait de sentiment De tendre amour, d'ardeur parfaite ; Mais j'ai tout oublié, Lorsque je suis venu, Je t'aime est le seul mot que j'ai bien retenu.

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    Les fenêtres Las du triste hôpital et de l’encens fétide Qui monte en la blancheur banale des rideaux Vers le grand crucifix ennuyé du mur vide, Le moribond, parfois, redresse son vieux dos, Se traîne et va, moins pour chauffer sa pourriture Que pour voir du soleil sur les pierres, coller Les poils blancs et les os de sa maigre figure Aux fenêtres qu’un beau rayon clair veut hâler, Et sa bouche, fiévreuse et d’azur bleu vorace, Telle, jeune, elle alla respirer son trésor, Une peau virginale et de jadis ! encrasse D’un long baiser amer les tièdes carreaux d’or. Ivre, il vit, oubliant l’horreur des saintes huiles, Les tisanes, l’horloge et le lit infligé, La toux ; et quand le soir saigne parmi les tuiles, Son œil, à l’horizon de lumière gorgé, Voit des galères d’or, belles comme des cygnes, Sur un fleuve de pourpre et de parfums dormir En berçant l’éclair fauve et riche de leurs lignes Dans un grand nonchaloir chargé de souvenir ! Ainsi, pris du dégoût de l’homme à l’âme dure Vautré dans le bonheur, où ses seuls appétits Mangent, et qui s’entête à chercher cette ordure Pour l’offrir à la femme allaitant ses petits, Je fuis et je m’accroche à toutes les croisées D’où l’on tourne le dos à la vie, et, béni, Dans leur verre, lavé d’éternelles rosées, Que dore la main chaste de l’Infini Je me mire et me vois ange ! et je meurs, et j’aime — Que la vitre soit l’art, soit la mysticité — À renaître, portant mon rêve en diadème, Au ciel antérieur où fleurit la Beauté ! Mais, hélas ! Ici-bas est maître : sa hantise Vient m’écœurer parfois jusqu’en cet abri sûr, Et le vomissement impur de la Bêtise Me force à me boucher le nez devant l’azur. Est-il moyen, ô Moi qui connais l’amertume, D’enfoncer le cristal par le monstre insulté, Et de m’enfuir, avec mes deux ailes sans plume — Au risque de tomber pendant l’éternité ?

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    Angoisse Je ne viens pas ce soir vaincre ton corps, ô bête En qui vont les péchés d'un peuple, ni creuser Dans tes cheveux impurs une triste tempête Sous l'incurable ennui que verse mon baiser : Je demande à ton lit le lourd sommeil sans songes Planant sous les rideaux inconnus du remords, Et que tu peux goûter après tes noirs mensonges, Toi qui sur le néant en sais plus que les morts : Car le Vice, rongeant ma native noblesse, M'a comme toi marqué de sa stérilité, Mais tandis que ton sein de pierre est habité Par un cœur que la dent d'aucun crime ne blesse, Je fuis, pâle, défait, hanté par mon linceul, Ayant peur de mourir lorsque je couche seul.

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    Apparition La lune s’attristait. Des séraphins en pleurs Rêvant, l’archet aux doigts, dans le calme des fleurs Vaporeuses, tiraient de mourantes violes De blancs sanglots glissant sur l’azur des corolles. C’était le jour béni de ton premier baiser. Ma songerie aimant à me martyriser S’énivrait savamment du parfum de tristesse Que même sans regret et sans déboire laisse La cueillaison d’un rêve au coeur qui l’a cueilli. J’errais donc, l’oeil rivé sur le pavé vieilli Quand avec du soleil aux cheveux, dans la rue Et dans le soir, tu m’es en riant apparue Et j’ai cru voir la fée au chapeau de clarté Qui jadis sur mes beaux sommeils d’enfant gâté Passait, laissant toujours de ses mains mal fermées Neiger de blancs bouquets d’étoiles parfumées.

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    Au seul souci de voyager Au seul souci de voyager Outre une Inde splendide et trouble — Ce salut soit le messager Du temps, cap que ta poupe double Comme sur quelque vergue bas Plongeante avec la caravelle Ecumait toujours en ébats Un oiseau d'annonce nouvelle Qui criait monotonement Sans que la barre ne varie Un inutile gisement Nuit, désespoir et pierrerie Par son chant reflété jusqu'au Sourire du pâle Vasco.

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    Aumône Prends ce sac, Mendiant ! tu ne le cajolas Sénile nourrisson d'une tétine avare Afin de pièce à pièce en égoutter ton glas. Tire du métal cher quelque péché bizarre Et vaste comme nous, les poings pleins, le baisons Souffles-y qu'il se torde ! une ardente fanfare. Église avec l'encens que toutes ces maisons Sur les murs quand berceur d'une bleue éclaircie Le tabac sans parler roule les oraisons, Et l'opium puissant brise la pharmacie ! Robes et peau, veux-tu lacérer le satin Et boire en la salive heureuse l'inertie, Par les cafés princiers attendre le matin ? Les plafonds enrichis de nymphes et de voiles, On jette, au mendiant de la vitre, un festin. Et quand tu sors, vieux dieu, grelottant sous tes toiles D'emballage, l'aurore est un lac de vin d'or Et tu jures avoir au gosier les étoiles ! Faute de supputer l'éclat de ton trésor, Tu peux du moins t'orner d'une plume, à complies Servir un cierge au saint en qui tu crois encore. Ne t'imagine pas que je dis des folies. La terre s'ouvre vieille à qui crève la faim. Je hais une autre aumône et veux que tu m'oublies Et surtout ne va pas, frère, acheter du pain.

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    Autre éventail de mademoiselle Mallarmé O rêveuse, pour que je plonge Au pur délice sans chemin, Sache, par un subtil mensonge, Garder mon aile dans ta main. Une fraîcheur de crépuscule Te vient à chaque battement Dont le coup prisonnier recule L’horizon délicatement. Vertige ! voici que frissonne L’espace comme un grand baiser Qui, fou de naître pour personne, Ne peut jaillir ni s’apaiser. Sens-tu le paradis farouche Ainsi qu’un rire enseveli Se couler du coin de ta bouche Au fond de l’unanime pli ! Le sceptre des rivages roses Stagnants sur les soirs d’or, ce l’est, Ce blanc vol fermé que tu poses Contre le feu d’un bracelet.

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    Autres poèmes et sonnets I Tout Orgueil fume-t-il du soir, Torche dans un branle étouffée Sans que l'immortelle bouffée Ne puisse à l'abandon surseoir ! La chambre ancienne de l'hoir De maint riche mais chu trophée Ne serait pas même chauffée S'il survenait par le couloir. Affres du passé nécessaires Agrippant comme avec des serres Le sépulcre de désaveu, Sous un marbre lourd qu'elle isole Ne s'allume pas d'autre feu Que la fulgurante console. II Surgi de la croupe et du bond D'une verrerie éphémère Sans fleurir la veillée amère Le col ignoré s'interrompt. Je crois bien que deux bouches n'ont Bu, ni son amant ni ma mère, Jamais à la même Chimère, Moi, sylphe de ce froid plafond ! Le pur vase d'aucun breuvage Que l'inexhaustible veuvage Agonise mais ne consent, Naïf baiser des plus funèbres ! À rien expirer annonçant Une rose dans les ténèbres. III Une dentelle s'abolit Dans le doute du Jeu suprême À n'entr'ouvrir comme un blasphème Qu'absence éternelle de lit. Cet unanime blanc conflit D'une guirlande avec la même, Enfui contre la vitre blême Flotte plus qu'il n'ensevelit. Mais, chez qui du rêve se dore Tristement dort une mandore Au creux néant musicien Telle que vers quelque fenêtre Selon nul ventre que le sien, Filial on aurait pu naître. Quelle soie aux baumes de temps Où la Chimère s'exténue Vaut la torse et native nue Que, hors de ton miroir, tu tends ! Les trous de drapeaux méditants S'exaltent dans notre avenue : Moi, j'ai ta chevelure nue Pour enfouir mes yeux contents. Non ! La bouche ne sera sûre De rien goûter à sa morsure, S'il ne fait, ton princier amant, Dans la considérable touffe Expirer, comme un diamant Le cri des Gloires qu'il étouffe. M'introduire dans ton histoire C'est en héros effarouché S'il a du talon nu touché Quelque gazon de territoire À des glaciers attentatoire Je ne sais le naïf péché Que tu n'auras pas empêché De rire très haut sa victoire Avec des royaumes épars Comme mourir pourpre la roue Du seul vespéral de mes chars. À la nue accablante tu Basse de basalte et de laves À même les échos esclaves Par une trompe sans vertu Quel sépulcral naufrage (tu Le sais, écume, mais y baves) Suprême une entre les épaves Abolit le mât dévêtu Ou cela que furibond faute De quelque perdition haute Tout l'abîme vain éployé Dans le si blanc cheveu qui traîne Avarement aura noyé Le flanc enfant d'une sirène. Mes bouquins refermés sur le nom de Paphos, Il m'amuse d'élire avec le seul génie Une ruine, par mille écumes bénie Sous l'hyacinthe, au loin, de ses jours triomphaux. Coure le froid avec ses silences de faux, Je n'y hululerai pas de vide nénie Si ce très blanc ébat au ras du sol dénie À tout site l'honneur du paysage faux. Ma faim qui d'aucuns fruits ici ne se régale Trouve en leur docte manque une saveur égale : Qu'un éclate de chair humain et parfumant ! Le pied sur quelque guivre où notre amour tisonne, Je pense plus longtemps peut-être éperdument À l'autre, au sein brûlé d'une antique amazone.

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    Billet Pas les rafales à propos De rien comme occuper la rue Sujette au noir vol de chapeaux ; Mais une danseuse apparue Tourbillon de mousseline ou Fureur éparses en écumes Que soulève par son genou Celle même dont nous vécûmes Pour tout, hormis lui, rebattu Spirituelle, ivre, immobile Foudroyer avec le tutu, Sans se faire autrement de bile Sinon rieur que puisse l’air De sa jupe éventer Whistler.

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    Brise marine La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres. Fuir ! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres D’être parmi l’écume inconnue et les cieux ! Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe Ô nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe Sur le vide papier que la blancheur défend Et ni la jeune femme allaitant son enfant. Je partirai ! Steamer balançant ta mâture, Lève l’ancre pour une exotique nature ! Un Ennui, désolé par les cruels espoirs, Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs ! Et, peut-être, les mâts, invitant les orages, Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots … Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots !

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    Contre un poète parisien À Emmanuel des Essarts. Souvent la vision du Poète me frappe : Ange à cuirasse fauve, il a pour volupté L'éclair du glaive, ou, blanc songeur, il a la chape, La mitre byzantine et le bâton sculpté. Dante, au laurier amer, dans un linceul se drape, Un linceul fait de nuit et de sérénité : Anacréon, tout nu, rit et baise une grappe Sans songer que la vigne a des feuilles, l'été. Pailletés d'astres, fous d'azur, les grands bohèmes, Dans les éclairs vermeils de leur gai tambourin, Passent, fantasquement coiffés de romarin. Mais j'aime peu voir, Muse, ô reine des poèmes, Dont la toison nimbée a l'air d'un ostensoir, Un poète qui polke avec un habit noir.

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    Dans le jardin La jeune dame qui marche sur la pelouse Devant l’été paré de pommes et d’appas, Quand des heures Midi comblé jette les douze, Dans cette plénitude arrêtant ses beaux pas, A dit un jour, tragique abandonnée – épouse – A la Mort séduisant son Poëte : « Trépas ! Tu mens. Ô vain climat nul ! je me sais jalouse Du faux Éden que, triste, il n’habitera pas. » Voilà pourquoi les fleurs profondes de la terre L’aiment avec silence et savoir et mystère, Tandis que dans leur coeur songe le pur pollen : Et lui, lorsque la brise, ivre de ces délices, Suspend encore un nom qui ravit les calices, A voix faible, parfois, appelle bas : Ellen !

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    Don du poème Je t’apporte l’enfant d’une nuit d’Idumée ! Noire, à l’aile saignante et pâle, déplumée, Par le verre brûlé d’aromates et d’or, Par les carreaux glacés, hélas ! mornes encor L’aurore se jeta sur la lampe angélique, Palmes ! et quand elle a montré cette relique À ce père essayant un sourire ennemi, La solitude bleue et stérile a frémi. Ô la berceuse avec ta fille et l’innocence De vos pieds froids, accueille une horrible naissance Et, ta voix rappelant viole et clavecin, Avec le doigt fané presseras-tu le sein Par qui coule en blancheur sybilline la femme Pour des lèvres que l’air du vierge azur affame ?

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    Eventail de Mademoiselle Mallarmé Ô rêveuse, pour que je plonge Au pur délice sans chemin, Sache, par un subtil mensonge, Garder mon aile dans ta main. Une fraîcheur de crépuscule Te vient à chaque battement Dont le coup prisonnier recule L’horizon délicatement. Vertige ! voici que frissonne L’espace comme un grand baiser Qui, fou de naître pour personne, Ne peut jaillir ni s’apaiser. Sens-tu le paradis farouche Ainsi qu’un rire enseveli Se couler du coin de ta bouche Au fond de l’unanime pli ! Le sceptre des rivages roses Stagnants sur les soirs d’or, ce l’est, Ce blanc vol fermé que tu poses Contre le feu d’un bracelet.

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    Haine du pauvre Ta guenille nocturne étalant par ses trous Les rousseurs de tes poils et de ta peau, je l'aime Vieux spectre, et c'est pourquoi je te jette vingt sous. Ton front servile et bas n'a pas la fierté blême : Tu comprends que le pauvre est le frère du chien Et ne vas pas drapant ta lésine en poème. Comme un chacal sortant de sa pierre, ô chrétien Tu rampes à plat ventre après qui te bafoue. Vieux, combien par grimace ? et par larme, combien ? Mets à nu ta vieillesse et que la gueuse joue, Lèche, et de mes vingt sous chatouille la vertu. À bas !… — les deux genoux !… — la barbe dans la boue ! Que veut cette médaille idiote, ris-tu ? L'argent brille, le cuivre un jour se vert-de-grise, Et je suis peu dévot et je suis fort têtu, Choisis. — Jetée ? alors, voici ma pièce prise. Serre-la dans tes doigts et pense que tu l'as Parce que j'en tiens trop, ou par simple méprise. — C'est le prix, si tu n'as pas peur, d'un coutelas.

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    Hérodiade Le soleil que sa halte Surnaturelle exalte Aussitôt redescend Incandescent Je sens comme aux vertèbres S'éployer des ténèbres Toutes dans un frisson A l'unisson Et ma tête surgie Solitaire vigie Dans les vols triomphaux De cette faux Comme rupture franche Plutôt refoule ou tranche Les anciens désaccords Avec le corps Qu'elle de jeûnes ivre S'opiniâtre à suivre En quelque bond hagard Son pur regard

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    L'après-midi d'un faune Le Faune: Ces nymphes, je les veux perpétuer. Si clair, Leur incarnat léger, qu'il voltige dans l'air Assoupi de sommeils touffus. Aimai-je un rêve? Mon doute, amas de nuit ancienne, s'achève En maint rameau subtil, qui, demeuré les vrais Bois même, prouve, hélas! que bien seul je m'offrais Pour triomphe la faute idéale de roses. Réfléchissons… ou si les femmes dont tu gloses Figurent un souhait de tes sens fabuleux! Faune, l'illusion s'échappe des yeux bleus Et froids, comme une source en pleurs, de la plus chaste: Mais, l'autre tout soupirs, dis-tu qu'elle contraste Comme brise du jour chaude dans ta toison? Que non! par l'immobile et lasse pâmoison Suffoquant de chaleurs le matin frais s'il lutte, Ne murmure point d'eau que ne verse ma flûte Au bosquet arrosé d'accords; et le seul vent Hors des deux tuyaux prompt à s'exhaler avant Qu'il disperse le son dans une pluie aride, C'est, à l'horizon pas remué d'une ride Le visible et serein souffle artificiel De l'inspiration, qui regagne le ciel. O bords siciliens d'un calme marécage Qu'à l'envi de soleils ma vanité saccage Tacite sous les fleurs d'étincelles, CONTEZ Que je coupais ici les creux roseaux domptés Par le talent; quand, sur l'or glauque de lointaines Verdures dédiant leur vigne à des fontaines, Ondoie une blancheur animale au repos: Et qu'au prélude lent où naissent les pipeaux Ce vol de cygnes, non! de naïades se sauve Ou plonge…

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    L'azur De l'éternel Azur la sereine ironie Accable, belle indolemment comme les fleurs, Le poète impuissant qui maudit son génie À travers un désert stérile de Douleurs. Fuyant, les yeux fermés, je le sens qui regarde Avec l'intensité d'un remords atterrant, Mon âme vide. Où fuir ? Et quelle nuit hagarde Jeter, lambeaux, jeter sur ce mépris navrant ? Brouillards, montez ! versez vos cendres monotones Avec de longs haillons de brume dans les cieux Que noiera le marais livide des automnes, Et bâtissez un grand plafond silencieux ! Et toi, sors des étangs léthéens et ramasse En t'en venant la vase et les pâles roseaux, Cher Ennui, pour boucher d'une main jamais lasse Les grands trous bleus que font méchamment les oiseaux.

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    La prière d'une Mère Au temple, un frais parfum des fleurs saintes s'exhale. Harpe, ton chant est mort : Enfants, vos hymnes doux, Doux comme l'innocence, au ciel fuient ! Sur la dalle Seule, une femme est à genoux. Est-ce l'ange pieux qu'auprès du sanctuaire Le Seigneur a placé pour porter la prière De l'orphelin au ciel parmi les flots d'encens ? Non : fils, c'est une mère : écoutez ses accents ; « C'est moi qui, lui parlant de nos douleurs amères, » Quand le soir amenait la prière au foyer, » Fis ses yeux se mouiller de larmes, — les premières ! » Et devant Votre croix ses deux genoux ployer ! Comme un jeune lys croît à l'ombre d'un grand chêne, » Votre main au berceau se pare de candeur » Et nous vous bénissons ! Est-il vrai que Dieu vienne » Aujourd'hui visiter son cœur, » Qu'il l'appelle à briller en sa sainte phalange ? » Vous le dites... j'espère. — Oh ! qu'en ce jour, Seigneur, » Un chant de joie au ciel sur les ailes d'un ange » S'élève jusqu'à vous, faible écho de mon cœur ! » S'il trahissait la foi que sa bouche a jurée, » Vous savez, ô Jésus, quel serait son tourment ! » Qu'il soit digne toujours de la table sacrée » Où l'archange enviera le bonheur de l'enfant ! » Toi, qui sous ton haleine as fleuri son enfance, » Frère sacré, qu'à l'ange exilé l'Éternel » A donné pour guider ses pas dans l'espérance » Et pour lui rappeler le ciel, » Que ce jour soit pour toi comme au ciel une fête ! » Ta joie est de sourire au bonheur fraternel, » D'attacher à son front l'étoile qu'à ta tête » Au matin de ta vie, attacha l'Eternel ! » Oh ! demande au Seigneur que cet astre fidèle » Luise pur à son front comme il brillait au tien ! » Quand le baigna l'eau sainte il dormait sous ton aile, » Que sous ton aile encore il aille au Dieu qui vient !... » Et son œil souriait mouillé de douces larmes ! Dieu parlait à son cœur, ô prélude du ciel ! Elle vit s'envoler ses pieuses alarmes, Puis un ange effleura l'autel ! « Gloire à Dieu dans les cieux ! Gloire à Dieu sur la terre ! » Harpes d'or, résonnez ! Celui dont le tonnerre » Fut la voix, quand aux cieux il dicta leur destin, » Qui lança le soleil en la voûte éternelle, » De son regard faible étincelle, » A dit : Laissez venir les enfants sur mon sein ! » Au premier jour, votre ombre immense » Daigna, Jehova, trois fois saint, » Parmi les foudres de vengeance » D'astres et d'éclairs le front ceint, » Ouvrir le ciel au premier ange » Étonné de voir, rêve étrange, » Lui, si petit, et vous, si grand ! » Les astres naissants se voilèrent, » Les flots troublés se retirèrent... » L'immortel s'envola tremblant ! » Gloire à Dieu dans les deux ! Gloire à Dieu sur la terre ! » Pour qu'un enfant renaisse, il endort son tonnerre ! » Loin d'étonner son âme au bruit de sa grandeur, » Il vient, le front paré d'une douce auréole : » De son exil il le console ! » Mystérieux hymen ! il repose en son cœur !... » Aux pieds d'Adonaï, purs reflets de sa gloire, Les Chœurs mélodieux ont jeté cet accord Dans l'azur, sous leurs doigts frémit le luth d'ivoire, L'encens vole en flots blancs dans mille tresses d'or ! Un séraphin voilé s'élance vers Marie... À la mère d'un Dieu, mère d'un fils sacré, Il apporte tes vœux : bénis-la ! qui la prie Lui rend grâces avant que d'avoir espéré ! Mais quel est cet écho de prière lointaine Que la brise en passant murmure au Dieu du ciel ? Chœurs, sont-ce vos chants ? Non : de la terrestre cène Pur, un ange d'un jour, parle à l'hôte éternel !

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    Las de l'amer repos Las de l'amer repos où ma paresse offense Une gloire pour qui jadis j'ai fui l'enfance Adorable des bois de roses sous l'azur Naturel, et plus las sept fois du pacte dur De creuser par veillée une fosse nouvelle Dans le terrain avare et froid de ma cervelle, Fossoyeur sans pitié pour la stérilité, — Que dire à cette Aurore, ô Rêves, visité Par les roses, quand, peur de ses roses livides, Le vaste cimetière unira les trous vides ? — Je veux délaisser l'Art vorace d'un pays Cruel, et, souriant aux reproches vieillis Que me font mes amis, le passé, le génie, Et ma lampe qui sait pourtant mon agonie, Imiter le Chinois au cœur limpide et fin De qui l'extase pure est de peindre la fin Sur ses tasses de neige à la lune ravie D'une bizarre fleur qui parfume sa vie Transparente, la fleur qu'il a sentie, enfant, Au filigrane bleu de l'âme se greffant. Et, la mort telle avec le seul rêve du sage, Serein, je vais choisir un jeune paysage Que je peindrais encor sur les tasses, distrait. Une ligne d'azur mince et pâle serait Un lac, parmi le ciel de porcelaine nue, Un clair croissant perdu par une blanche nue Trempe sa corne calme en la glace des eaux, Non loin de trois grands cils d'émeraude, roseaux.

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    Le château de l’espérance Ta pâle chevelure ondoie Parmi les parfums de ta peau Comme folâtre un blanc drapeau Dont la soie au soleil blondoie. Las de battre dans les sanglots L’air d’un tambour que l’eau défonce, Mon coeur à son passé renonce Et, déroulant ta tresse en flots, Marche à l’assaut, monte, – ou roule ivre Par des marais de sang, afin De planter ce drapeau d’or fin Sur ce sombre château de cuivre – Où, larmoyant de nonchaloir, L’Espérance rebrousse et lisse Sans qu’un astre pâle jaillisse La Nuit noire comme un chat noir.

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    Le vierge, le vivace et le bel aujourd'hui Le vierge, le vivace et le bel aujourd'hui Va-t-il nous déchirer avec un coup d'aile ivre Ce lac dur oublié que hante sous le givre Le transparent glacier des vols qui n'ont pas fui ! Un cygne d'autrefois se souvient que c'est lui Magnifique mais qui sans espoir se délivre Pour n'avoir pas chanté la région où vivre Quand du stérile hiver a resplendi l'ennui. Tout son col secouera cette blanche agonie Par l'espace infligée à l'oiseau qui le nie, Mais non l'horreur du sol où le plumage est pris. Fantôme qu'à ce lieu son pur éclat assigne, Il s'immobilise au songe froid de mépris Que vêt parmi l'exil inutile le Cygne.

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    Stéphane Mallarmé

    Stéphane Mallarmé

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    Les fleurs Des avalanches d’or du vieil azur, au jour Premier et de la neige éternelle des astres Jadis tu détachas les grands calices pour La terre jeune encore et vierge de désastres, Le glaïeul fauve, avec les cygnes au col fin, Et ce divin laurier des âmes exilées Vermeil comme le pur orteil du séraphin Que rougit la pudeur des aurores foulées, L’hyacinthe, le myrte à l’adorable éclair Et, pareille à la chair de la femme, la rose Cruelle, Hérodiade en fleur du jardin clair, Celle qu’un sang farouche et radieux arrose ! Et tu fis la blancheur sanglotante des lys Qui roulant sur des mers de soupirs qu’elle effleure A travers l’encens bleu des horizons pâlis Monte rêveusement vers la lune qui pleure ! Hosannah sur le cistre et dans les encensoirs, Notre Dame, hosannah du jardin de nos limbes ! Et finisse l’écho par les célestes soirs, Extase des regards, scintillement des nimbes ! Ô Mère qui créas en ton sein juste et fort, Calices balançant la future fiole, De grandes fleurs avec la balsamique Mort Pour le poète las que la vie étiole.

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    Stéphane Mallarmé

    Stéphane Mallarmé

    @stephaneMallarme

    Mes bouquins refermés sur le nom de Paphos Mes bouquins refermés sur le nom de Paphos, Il m’amuse d’élire avec le seul génie Une ruine, par mille écumes bénie Sous l’hyacinthe, au loin, de ses jours triomphaux.

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    Stéphane Mallarmé

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    @stephaneMallarme

    Mignonne Mignonne, sais-tu qu’on me blâme De t’aimer comme je le fais ? On dit que cela, sur mon âme ! Aura de singuliers effets ; Que tu n’es pas une duchesse, Et que ton cul fait ta richesse, Qu’en ce monde, ou rien n’est certain, On peut affirmer une chose : C’est que ton con vivant et rose N’est que le con d’une putain ! Qu’est-ce que cela peut foutre ? Lorsqu’on tient ces vains propos, Je les méprise, et je passe outre, Alerte, gaillard et dispo ! Je sais que près de toi je bande Vertement, et je n’appréhende Aucun malheur, sinon de voir, Entre mes cuisses engourdies, Ma pine flasque et molle choir ! …

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    Stéphane Mallarmé

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    @stephaneMallarme

    Prose Hyperbole ! de ma mémoire Triomphalement ne sais-tu Te lever, aujourd’hui grimoire Dans un livre de fer vêtu : Car j’installe, par la science, L’hymne des cœurs spirituels En l’œuvre de ma patience, Atlas, herbiers et rituels. Nous promenions notre visage (Nous fûmes deux, je le maintiens) Sur maints charmes de paysage, Ô sœur, y comparant les tiens. L’ère d’autorité se trouble Lorsque, sans nul motif, on dit De ce midi que notre double Inconscience approfondit Que, sol des cent iris, son site, Ils savent s’il a bien été, Ne porte pas de nom que cite L’or de la trompette d’Été. Oui, dans une île que l’air charge De vue et non de visions Toute fleur s’étalait plus large Sans que nous en devisions. Telles, immenses, que chacune Ordinairement se para D’un lucide contour, lacune Qui des jardins la sépara.

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    Stéphane Mallarmé

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    @stephaneMallarme

    Quelconque une solitude Petit air. I. Quelconque une solitude Sans le cygne ni le quai Mire sa désuétude Au regard que j'abdiquai Ici de la gloriole Haute à ne la pas toucher Dont maint ciel se bariole Avec les ors de coucher Mais langoureusement longe Comme de blanc linge ôté Tel fugace oiseau si plonge Exultatrice à côté Dans l'onde toi devenue Ta jubilation nue II. Indomptablement a dû Comme mon espoir s'y lance Éclater là-haut perdu Avec furie et silence, Voix étrangère au bosquet Ou par nul écho suivie, L'oiseau qu'on n'ouït jamais Une autre fois en la vie. Le hagard musicien, Cela dans le doute expire Si de mon sein pas du sien A jailli le sanglot pire Déchiré va-t-il entier Rester sur quelque sentier !

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    Stéphane Mallarmé

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    @stephaneMallarme

    Remémoration d'amis belges À des heures et sans que tel souffle l'émeuve Toute la vétusté presque couleur encens Comme furtive d'elle et visible je sens Que se dévêt pli selon pli la pierre veuve Flotte ou semble par soi n'apporter une preuve Sinon d'épandre pour baume antique le temps Nous immémoriaux quelques-uns si contents Sur la soudaineté de notre amitié neuve Ô très chers rencontrés en le jamais banal Bruges multipliant l'aube au défunt canal Avec la promenade éparse de maint cygne Quand solennellement cette cité m'apprit Lesquels entre ses fils un autre vol désigne A prompte irradier ainsi qu'aile l'esprit.

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    Stéphane Mallarmé

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    Renouveau Le printemps maladif a chassé tristement L'hiver, saison de l'art serein, l'hiver lucide, Et, dans mon être à qui le sang morne préside L'impuissance s'étire en un long bâillement. Des crépuscules blancs tiédissent sous mon crâne Qu'un cercle de fer serre ainsi qu'un vieux tombeau Et triste, j'erre après un rêve vague et beau, Par les champs où la sève immense se pavane

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    Stéphane Mallarmé

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    @stephaneMallarme

    Salut Rien, cette écume, vierge vers À ne désigner que la coupe; Telle loin se noie une troupe De sirènes mainte à l’envers. Nous naviguons, ô mes divers Amis, moi déjà sur la poupe Vous l’avant fastueux qui coupe Le flot de foudres et d’hivers; Une ivresse belle m’engage Sans craindre même son tangage De porter debout ce salut Solitude, récif, étoile À n’importe ce qui valut Le blanc souci de notre toile.

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