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Xavier Grall

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Poésies

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    Xavier Grall

    @xavierGrall

    Ballade de la mort lente Et c’est seulement au chevet des mères mourantes Que les fils des hommes accèdent à la connaissance Car il faut les ténèbres à l’illumination du cierge. O mort si lente à venir sur les lèvres exsangues Quand le goutte-à-goutte du sérum scande les heures Dans les veines vitreuses et transparentes Quand Octobre sur la clinique lève un pâle soleil Quand l’infirmier cynique tâte la paupière bleuie Où l’œil maternel aveugle fixe la mort insolente Alors que les fils entourent le corps flétri. O mort si lente à venir, trois jours et trois nuits Dans le blême bousculement des temps Si lente dans les poumons où sifflent Les oiseaux noirs des tombes impatientes Quand l’écume des verts crachats étouffe Le corps maternel râlant luttant souffrant O mort si lente à venir sur la face sainte Qui tend ses joues aux mains filiales effrayées Face sainte brûlante pitoyable et maternelle Fixant déjà le brasier de l’éternelle tendresse Où se consument les âmes selon la promesse de l’Esprit O mort si lente à venir parmi les vieilles Dames Asthmatiques apoplectiques cachexiques Dans l’odeur odieuse de l’éther et des soupes Tandis que sonnent les carillons vulgaires Des batteries de cuisine et que les coqs fiers Annoncent le reniement de la chair Sur les fumiers campagnards Et le corps des mères crie de s’arracher Aux enfants de la terre Marguerite David ma mère royalement nommée Fût en la paroisse de Ploudiry Sur le chemin des grandes fermes parentales Joyeusement couronnée de genêts et de lilas Et les agapes au Kerhuella avaient goût de chevreuil Sous le tiède vent rural des hautes cheminées Et l’homme du Bréou son père lui avait donné rêve et bonté Et telle est ma genèse au pays des collines Et telle est mon ascendance parmi les troncs et les feuilles O mort si lente à venir sur les lèvres exsangues Alors que de la jeune fille d’antan avait surgi dix fois la vie De sa bouche humiliée ne sort nulle parole O mort si lente à venir, trois jours et trois nuits Mort à pas de louve aux gencives malades Marchant dans les allées des reines et des châtelaines C’est que les bois Mesdames cèlent les chiens meurtriers Et la mort à gueule d’hiver va tuer tous vos printemps Et la douleur atroce cogne dans les bronches déchirées Mère aveugle voici vos fils enfin lucides et voyants A l’heure même où votre trépas dans l’absence les plonge Mère enfin aimée exactement au temps exact de la rupture Alors que le fossoyeur inspecte le caveau abject Sous la torche lancinante du buis O sépultures, mangeuses des corps des clans et des siècles Et le cœur de Marguerite David craque et cède à la mort lente Son âme déjà voyage en quête des grands pays Et les fils sédentaires, la peine pressant leurs dents Regardent le souffle doucement s’éteindre sur les lèvres blanches Et la dernière larme sur la ride maternelle Lentement glisse et crucifie la chair de sa chair Dix fois multipliée et la paix lisse déjà pâlit ses traits Et les fils embrassent le front bien-aimé Et l’infirmier cynique débranchant le sérum cruellement Annonce comme un guetteur que la bataille est finie O mort si lente si lente à venir.

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