splash screen icon Lenndi
splash screen name leendi
Y

Yannis Ritsos

Auteurplume

En savoir plus sur l'auteur

...plus

Compte non officiel

Poésies

4

    Y

    Yannis Ritsos

    @yannisRitsos

    Comme tu es belle Comme tu es belle. Ta beauté me fait peur. J’ai faim de toi. J’ai soif de toi. Je t’en supplie : cache-toi; rends-toi invisible aux yeux de tous; visible seulement pour moi; recouverte des cheveux jusqu’à la pointe des pieds d’un voile noir transparent que ponctuent les soupirs argentés des lunes de printemps. Tous les pores de ta peau émettent des voyelles, des consonnes ardentes; des mots, des confidences s’articulent; les explosions roses de l’acte d’amour. Ton voile se gonfle, scintille au-dessus de la ville plongée dans l’obscurité avec ses bars louches, ses tavernes de marins; des projecteurs verts éclairent la pharmacie de nuit; une boule de verre tourne rapidement sur elle-même, montrant des paysages du globe terrestre. Un homme ivre titube, emporté dans la tempête de ta respiration. Ne t’en va pas. Ne t’en va pas. Si matérielle, si insaisissable. Un taureau de pierre saute du fronton dans l’herbe sèche. Une femme nue monte l’escalier de bois avec une bassine d’eau chaude. La vapeur empêche de voir son visage. A haute altitude un hélicoptère de reconnaissance bourdonne en des points indéfinis. Prends garde à toi. C’est toi qu’ils recherchent. Cache-toi plus profondément dans mes bras. Le poil de la couverture rouge qui nous abrite n’en finit pas de pousser, maintenant la couverture est une ourse enceinte. Sous l’ourse rouge nous nous aimons infiniment, au-delà du temps et au-delà de la mort même, dans une unique union universelle. Comme tu es belle. Ta beauté me fait peur. Et j’ai faim de toi. Et j’ai soif de toi. Et je t’en supplie : cache-toi.

    en cours de vérification

    Y

    Yannis Ritsos

    @yannisRitsos

    Dépendance de l'indépendance A quoi bon parler? A quoi bon trop d’explications? Quand tu marches d’un pas pressé pour rejoindre tes amis qui t’attendent pour une affaire très importante et qui te concerne, toi, quelques-uns et d’autres encore, voici que tu t’arrêtes subitement au milieu du chemin pour observer l’oiseau qui trottine paisiblement sur l’asphalte, sa tête redressée, extatique, mieux instruite de ce qui l’entoure, tenant un ticket d’autobus dans son long bec.

    en cours de vérification

    Y

    Yannis Ritsos

    @yannisRitsos

    Il est des instants étranges, uniques Il est des instants étranges, uniques, presque cocasses. Un homme marche à midi en portant un panier sur sa tête; le panier lui cache entièrement le visage comme s’il était sans tête ou déguisé, portant une tête monstrueuse et sans yeux, aux yeux innombrables. Tel autre,qui flâne rêveusement dans le crépuscule, trébuche quelque part, pousse un juron, revient sur ses pas, cherche; — un caillou minuscule; il le soulève; il l’embrasse; puis il s’inquiète soudain : quelqu’un d’autre a pu le surprendre; il s’éloigne d’un air coupable. Une femme met sa main dans sa poche; elle n’y trouve rien; elle ressort sa main, l’élève, l’observe attentivement : une main imprégnée de la poussière du vide. Un garçon de café a refermé sa paume sur une mouche — il ne la serre pas; un client l’appelle; il a oublié la mouche; il desserre sa paume; la mouche s’envole, se pose sur le verre. Un papier roule dans la rue avec hésitation, en marquant des temps d’arrêt, sans attirer l’attention de qui que ce soit, — cela lui plaît. Pourtant, à chaque instant, il émet un craquement particulier qui est un démenti; comme s’il cherchait maintenant quelque témoin incorruptible de sa marche modeste, mystérieuse. Et toutes ces choses ont une beauté solitaire, inexplicable, une peine très profonde venue de nos propres gestes, étrangers et inconnus — n’est-ce pas?

    en cours de vérification

    Y

    Yannis Ritsos

    @yannisRitsos

    Je n’aime pas le goût de la menthe dans ta salive Je dors encore. Je t’entends te laver les dents dans la salle de bains. Dans ce bruit il y a des rivières, des arbres, une petite montagne avec une chapelle blanche, un troupeau de moutons dans la verdure (j’entends leurs clochettes), deux chevaux rouges, le drapeau tout en haut de la tour, un oiseau sur la cheminée; une abeille bourdonne dans une rose — la rose tressaille — Ah, que tu mets du temps. Et tu ne vas pas maintenant commencer à te peigner; puisque je te dis que je dors en attendant ta bouche. Je n’aime pas le goût de la menthe dans ta salive. Quand je serai réveillé, je jetterai peignes, démêloirs et brosses à dents par la lucarne.

    en cours de vérification

  • 1