René Bichet
@reneBichet
Il pleut. Le soir s’en va Il pleut. Le soir s’en va dans le penchant des plaines. Il pleut. L’ondée est lourde aux vieux manteaux de laine Abrités sous les haies, dans la chute des faines — Les bœufs qui labouraient dans les pentes jaunies Sont rentrés. Les chevaux se gonflent sous la pluie Tandis que l’Homme, en attendant une éclaircie, Tourné le dos au vent pour allumer sa pipe, Écrase, dans la boue vague où elles crépitent, Des flaques d’eau comme une motte qui s’effrite. C’est le soir des retours muets dans les charrettes, Des mains lassées qui vont, lorsque l’âne s’arrête, Cogner contre le bois comme un fardeau qu’on jette. Il pleut. Tous les sentiers vont aux champs. C’est le soir Des crucifix surgis au bord des chemins noirs Et allongés parmi les remous de l’ornière ; L’angoisse de la pluie traîne au fond du soir mou, Dans les abois des chiens qui s’accrochent à vous, Un long miserere venu on ne sait d’où.