Destin des héros et dessein de Zeus dans l'intrigue de l'Iliade - 2 volumes

Philippe Rousseau

Publié par ANRT, le 01 janvier 1995

906 pages

Résumé

Le premier mot de l'Iliade — le plus ancien poème, sans doute, dont la Grèce nous ait conservé la trace écrite — en annonce le sujet, la colère d'Achille, une émotion donc et la suite d'événements catastrophiques qui en sont la conséquence : souffrances sans nombre pour les Achéens, extermination brutale d'une foule de héros. Le substantif choisi pour nommer cette colère, mènis, n'est pas le mot usuel dans la langue épique pour désigner cette passion, mais un terme marqué, spécialisé, qui attire d'emblée l'attention sur le caractère surhumain du drame que l'aède demande à la Muse de chanter par sa voix. Concluant l'énoncé du thème, avant que ne soit désigné l'événement choisi pour être le point de départ du récit, une incise énigmatique signale à l'auditoire que "s'accomplissait le dessein de Zeus". Dessein ? Mais quel dessein ? Ce que chante la déesse répond bien en un sens au programme tracé par le rhapsode, mais avec des digressions, des détours et des retournements qui ont longtemps fait, et font encore douter de l'unité de composition de l'oeuvre que nous lisons. Ce livre s'applique à montrer que la complexité recherchée du dessin de l'intrigue ne s'explique ni par la sédimentation supposée des réfections au fil du temps, ni par les choix esthétiques d'une composition organique. Dans les vingt-quatre (ou plutôt, peut-être, les vingt-trois) chants de cette épopée monumentale la colère d'Achille n'est pas seulement traitée pour elle-même, mais comme l'épisode décisif de la guerre de Troie. Un jeu complexe de rappels, d'anticipations et de recompositions charge les événements de ces quelques journées dramatiques d'une signification plus large. Le destin de la guerre entière se noue et se dénoue dans les cinquante et un jours qui séparent l'arrivée du prêtre d'Apollon dans le camp des Achéens et le banquet funèbre qui clôt les funérailles d'Hector à Troie. Une crise dont les acteurs, humains, mais aussi divins, à l'exception de Zeus qui en gouverne le déroulement, éprouvent que le sens et les conséquences de leurs actes leur échappent. Au-delà du sort de Troie et de l'armée achéenne c'est tout un âge de l'humanité, l'âge des héros, qui s'abîme figurativement à l'horizon de cette guerre d'extermination dont l'Iliade recueille et résume la signification mythique dans sa mise en intrigue. Le cinquième vers du poème ne dicte pas d'emblée le sens de cette histoire, comme on l'a cru depuis l'Antiquité en cherchant un contenu déterminé dans "le dessein de Zeus". Il invite l'auditoire à réfléchir sur la signification des événements dont il lui offre le récit.