" II racontait le dîner Chez Marcel, il parlait du silence pesant au cours du repas, du regard constamment désapprobateur qu'elle posait sur lui, depuis si longtemps, à cause de sa façon de manger, ou de boire du vin en trop grande quantité, et enfin de l'invraisemblable proposition d'un voyage ou de retrouvailles.
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Une meprise

«Alors que j'entends sonner la demie à l'église du Saint-Esprit de l'avenue Daumesnil, nullement inquiet à présent de n'avoir rien à manger pour mon déjeuner que je prends à midi très précisément, je suis heureux d'avoir mis au clair ma défense contre la cabale des copropriétaires et d'avoir déjoué, une fois de plus, les odieux stratagèmes de la concierge Trappenier. Avec mes puzzles bien en place dans les tiroirs du meuble prévu à cet effet, mes pièces de monnaie rangées dans leurs boîtes au fond de la penderie de la chambre d'amis, et les sacs en plastique soigneusement entreposés, je suis heureux, me dis-je, assis dans le salon de l'appartement de la place Daumesnil, je suis heureux d'être parfaitement installé.»Alain Spiess.

Installation

«Lillets Rougets à la niçoise Gigot aux quatre épices douces Fromages Café liqueur Au cours de cet interminable repas, excédé et impuissant, j'assiste, au milieu des conversations des autres convives, ponctuées par la présence à intervalles réguliers de l'entêtant parfum de muguet de la serveuse en noir, à l'incroyable débandade de Sebain, l'ancien propriétaire des Eaux de Clarbec, et il me faudra pour finir écouter cette insupportable confession dans la salle vide du restaurant de l'Auberge de la Côte, où à moitié défait, au bord de la suffocation, le corps secoué de hoquets provoqués par l'absorption imprudente de calvados de la maison Dupont à Victot-Pontfol, il parlera dans la confusion, pendant que, gêné par son visage ruisselant de sueur et ses hoquets, je ferai mine d'être absorbé par la photographie de la baleine échouée sur la plage de Luc-sur-Mer.»

Ruine

«Je me dis que je savais déjà, au moment où ma soeur m'avait dit tu seras bien ici, qu'il allait me falloir vivre sans compagnie, caché à la vue des autres et, de fait, depuis la dernière visite de Vanessa, depuis la mort du docteur Sernin, j'ai passé toutes ces années sans voir personne, enfermé dans cette chambre du premier étage, comme j'avais été enfermé autrefois dans ma chambre de l'appartement de Paris, pour ne pas déranger Vanessa, pour ne pas effrayer les invités, incapable alors de parler, comme je l'étais déjà quand Anna, notre bonne anglaise, nous emmenait au parc Monceau et que, regardant Vanessa jouer avec les autres enfants, je ne cessais de me dire, transpirant sous mon bonnet de coton blanc, demande-lui de jouer avec toi, incapable de parler, comme je le suis aujourd'hui, où, tout en regardant les pierres des murs s'empourprer, remontent à présent en moi le visage gêné de mon père et de ma mère, le sourire indulgent de Vanessa, le mouchoir de lin blanc avec lequel Anna m'essuyait le visage, tandis que résonne dans ma tête, de plus en plus douloureusement, ce mot que j'ai toujours gardé en moi, et que je voudrais à présent crier de toutes mes forces : pourquoi ?»

Pourquoi ?

Trois nouvelles, trois univers singuliers. Un jeune homme rêveur s'occupe le temps d'un hiver d'une fillette blonde aux yeux gris, la petite Bijou, dont la mère, artiste bohème, n'a que faire. Une étudiante mal dans sa vie se pique de rencontrer le président Chirac au Havre. Problème : elle ne se souvient plus du prénom du grand homme, tant elle s'est placée hors du monde ! Un homme, abandonné à sa solitude, s'adonne aux puzzles en tentant de reconstituer l'histoire de son existence. Le puzzle, d'ailleurs, comme point commun des nouvelles, c'est bien cela.  L'accompagnement critique s'attache à la nouvelle comme genre, aux choix narratifs qu'elle permet et aux thèmes qu'elle explore. Il met en perspective ces textes courts avec les oeuvres romanesques des trois écrivains choisis. La petite Bijou fait une première apparition dans La Seine de Patrick Modiano avant de donner son titre à un roman publié en 2001 ; l'étrangeté comme indice stylistique de Marie NDiaye est déjà présente dans Le Jour du président ; la réclusion subie par le héros de Pourquoi ? connaît de multiples échos dans l'oeuvre d'Alain Spiess.  3 nouvelles (XX? siècle) recommandées à partir de la classe de troisième. Textes intégraux.

3 nouvelles contemporaines

Le narrateur est écrivain. Il se retrouve à Biarritz, à quelques jours de l'ouverture du procès de son ami Bergaud, où il est cité comme témoin. Bergaud, qui tenait un cercle de jeux servant en réalité à couvrir un réseau de prostitution, est accusé de meurtre. En fait, Bergaud faisait profiter le narrateur des prestations de ses " filles ", qu'il rencontrait dans un appartement de la porte Dorée destiné à ces agapes sexuelles. Un jour, une certaine Zelda Bergmann décède dans ses bras d'un arrêt cardiaque, et il va maquiller cette mort naturelle en meurtre, lui vidant un chargeur de pistolet dans le corps. Au fil de l'enquête, Bergaud est devenu le suspect idéal...
Cité comme témoin, le narrateur s'attend à la bataille d'experts que lui promet le juge qui l'a interrogé. Heureusement, la mort de Bergaud à l'hôpital de la prison débouchera sur le classement de l'affaire.
Au cours de ces quelques heures passées à la terrasse du casino de Biarritz, le narrateur revoit les évènements principaux de sa vie : son mariage avec Emma, fille unique de riches bourgeois niçois pour qui ce mariage est une mésalliance, et qui en sera une, puisque le narrateur, écrivain à la recherche de sa voie, comprendra qu'Emma voulait simplement un enfant ; d'où ses liaisons adultérines et une brûlure que seules les filles de Bergaud, l'étrange ami d'enfance, apaiseront. D'autres personnages passent, riches et singuliers. Ils contribuent à la complexité d'un récit qui procède par cercles concentriques, où l'intrigue naît d'une remarquable complexité narrative.

Une meprise

Résumé

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