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L'Anti-Justine | Restif De La Bretonne
L'Anti-Justine | Restif De La Bretonne

L'Anti-Justine

Publié par Kinoscript, le 15 novembre 2012

Résumé

Dans l'imaginaire masculin, disons aux confins de ses fantasmes et aux tréfonds de ses pulsions, l'Amour aura toujours une saveur interdite. D'une obscénité sans limite, de sentiments extravagants en tendresse lubrique, L'Anti-Justine nous dévoile toute la passion de Nicolas Edme Restif de La Bretonne pour l'inceste, son fétichisme pour les petits pieds (à voir Le Pied de Fanchette, ou le Soulier couleur de rose) mais avant tout sa soif de luxure, omniprésente tout au long du récit. Chef-d'ouvre de la littérature érotique paru en 1798, L'Anti-Justine, ou les Délices de l'amour est immoral à souhait, tout en charme et volupté. Manipulateur aux passions dévorantes, l'écrivain nous entraîne à sa suite au cour d'un univers débauché, entre gouffres à luxure et cavernes désirées.  « Personne n'a été plus indigné que moi des sales ouvrages de l'infâme de Sade que je lis dans ma prison. Ce scélérat ne présente les délices de l'amour, pour les hommes, qu'accompagnées de tourments, de la mort même, pour les femmes. ». Tels furent les propos houleux de la préface de Restif alors qu'il s'autoproclamait parfait opposé de son contemporain, le Marquis de Sade.  Alors que de Sade, homme de lettres, philosophe, romancier et révolutionnaire, prônait l'érotisme associéà des actes impunis de violence de par Justine, Aline, le Boudoir, la Théorie du Libertinage, Restif, investigateur de projets de réforme sociale et écrivain à la plume libérée et provocatrice, le contredisait via La Famille vertueuse, Lucile, ou le Progrès de la vertu, ou encore Le Pornographe. C'est ainsi que le libertin de la Révolution française remplaça la Justine du Marquis par son Anti-Justine. Le roman se dut dès lors de surpasser l'autre en volupté tout en lui cédant en cruauté, l'idée de Restif restant de présenter le couple et l'amour comme quelque chose de beau, « exempt de scrupules et de préjugés » pour reprendre ses mots. En réponse à cette « attaque » rédigée en toute impunité, de Sade, alors incarcéréà Vincennes, ordonna à son épouse de ne surtout rien acheter de Restif, « auteur de Pont-Neuf et de Bibliothèque bleue ». Personnage phare de l'ouvre du Marquis, Justine l'accompagna en tous les cas tout au long de sa vie. Tout autant que la réputation de « monstre » que son détracteur aimait à lui prêter d'ailleurs. Si bien qu'avec le temps, il laissa étonnamment sous-entendre à son avocat qu'il la reniait, cette Justine trop corrompue pour être lue par la décence même.  Qu'en est-il alors de l'époque actuelle ? Que nous inspirent désormais les écrits sadiens et pensées de Restif ? Sommes-nous plus indulgents face aux bassesses et inconvenances, plus tolérants face à la vulgarité et autres trivialités découlant de la sexualité bestiale, du plaisir charnel « sans les règles de l'art » ? S'intéresser aux deux Justine demeure donc intéressant pour qui désire se faire sa propre opinion sur la question. Mais au-delà de « désirer se faire sa propre opinion », il y a « désirer » tout court. Et l'homme désire. Lasse des femmes trop frigides, dénuées de sensualité ou pudiques à l'extrême, la gente masculine nécessite d'attiser ses attraits inavouables de par la lecture, les films ou encore les bande-dessinées. Si l'on ne peut exprimer ses envies de luxure, son besoin d'intense passion et de féroce débauche, alors qui le fera à notre place si nul ne prend la plume, ne filme l'infilmable, ou ne dessine d'honteuses courbes aphrodisiaques, sources de nos rougissements et palpitations cardiaques ? Personne.  Un conseil alors : lisez Restif et vous verrez la sexualité autrement, entre orgasme retenu et jouissance partagée, entre exaltation des sens et plaisir consommé. Un avant-goût peut- être ? Soit. La naissance d'un sein, les courbes d'une hanche, formes pulpeuses et voluptueuses sublimées par une peau satinée. Une nudité cachée pour autant dévoilée en couverture. Une sexualité suggérée sans être récriée.  L'édition offre à nos regards un bleu nuit onirique, voile des « mille et une nuits » connotant l'envolée spirituelle vers un monde d'étreintes éphémères, entre nuit agitée et éveil amer, où le rêveur ne comptera pas les moutons, seulement ses frustrations. À comprendre par là que frustré sera celui qui aura rejoint pareils rivages luxurieux sans les avoir vraiment atteints, rencontré Justine sans l'avoir vraiment connue. Ou plutôt si, mais pour un temps, seulement celui d'assouvir virtuellement ses désirs.

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