Marsyas
Anastylose ; rome, XIII avant j-c, IX avant j-c, 1942 farce archéologique en deux actes et un aparté
Publié par Fage, le 28 septembre 2006
Résumé
On a voulu construire un lieu. On, c'est-à-dire Auguste, qui alla jusqu'à mettre son corps (cadavre) dans l'affaire. Un lieu qui aura été un symbole (un objet coupé en deux dit l'étymologie du mot grec, et dont le rassemblement seul fera signe). Le symbole ajointait la course du Soleil dans le ciel romain et la paix de l'Empire (indexée au corps mort d'Auguste gisant dans son mausolée et au trône vide de l'Ara Pacis que l'ombre pointait à midi le jour de l'équinoxe d'automne), cet ajointement démesuré, le lieu en question, était un cadran solaire dont le tracé en hyperbole couvrait une partie du Champs de Mars et dont le style était un obélisque de granit rose de vingt-deux mètres de hauteur. Mais ce lieu était aussi un morceau de la Rome réelle et celle-ci le dispersa en à peine plus de temps qu'il n'en avait fallu pour en joindre les parties Les crues du Tibre le recouvrirent, le détruisirent, le démembrèrent. Il eut, de tous les lieux de la Rome antique, la vie la plus courte qui fût. Nous faisons l'inventaire d'un morceau d'espace. Nous dénombrons, nommons, classifions, datons son mobilier. Une église, des immeubles d'habitation, des magasins de vêtement, une place, quelques cafés -dont un affiche une reproduction à l'échelle 1 du fragment mis à jour par Büchner -, un kiosque à journaux, et tout ce qu'on ne voit plus, qui fut et qui n'est plus, ou bien qui est encore mais trente pieds sous le sol asphalté; inventaire du réel, du possible, du passé, de l'avenir, du fictif. Ce morceau d'espace comprend la via in Lucina, une portion de la via di Campo Marzio, une partie de l'église San Lorenzo in Lucina et quelques mètres des deux rues adjacentes à la via di Campo Marzio avant quelle ne débouche sur la piazza San Lorenzo in Lucina. Nous faisons l'inventaire des mots qu'on a écrit sur ce morceau d'espace, très peu (exactement 154) par celui qui, ayant vu le lieu, le décrivit - Pline l'Ancien, mort d'avoir voulu voir de trop près le Vésuve crachant ses cendres- et beaucoup par ceux qui, ne l'ayant pas vu, commentèrent ses mots, reconstruisirent le lieu d'après ces mots, produisirent ainsi à peu près autant de lieux qu'il y a de mots dans le texte de Pline.
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