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Ferrements

De tous les écrivains antillais, Césaire est, en Afrique noire, le plus connu et surtout le plus aimé, celui dont le génie a marqué le plus profondément et marquera le plus durablement les consciences. Dans le Cahier d'un retour au pays natal comme dans toute l'oeuvre poétique de Césaire, l'Africain retrouve en effet son histoire d'horreur et de sang, son angoisse et son espoir, son puissant rêve de liberté. Il en va de même pour le théâtre où, de La tragédie du roi Christophe en passant par Une saison au Congo, l'Afrique apparaît soit comme le cadre réel soit comme l'arrière-plan psychologique de l'action. Quant aux textes politiques, à commencer par le Discours sur le colonialisme qui donna une impulsion décisive au courant nationaliste et anticolonialiste de la littérature africaine, ils traduisent eux aussi le fort sentiment d'une communauté de destin entre l'Afrique et les Antilles. Les textes rassemblés par Guy Ossito Midiohouan, professeur de littérature à l'Université Nationale du Bénin, à Cotonou, et destinés à accompagner l'exposition "La force de regarder demain", constituent la quintessence de l'oeuvre de l'écrivain martiniquais. Même si la vocation pédagogique d'un tel ouvrage est manifeste, son principal objectif est de donner l'envie de lire Césaire.

Aimé Césaire - Pour aujourd'hui et pour demain

Une saison au congo

Une tempete

Petit cheval hors du temps enfui

Si l'oeuvre poétique d'Aimé Césaire a fait l'objet de nombreuses publications, son oeuvre politique a été négligée. Pourtant l'homme a été maire de Fort-de-France pendant cinquante-six ans, député pendant quarante-huit ans, trois fois élu au Conseil général et deux fois président du Conseil régional de la Martinique. Il n'a jamais connu de défaite électorale. Après les Discours à l'Assemblée nationale (2013), ce deuxième volume des Ecrits politiques comprend l'essentiel de ses articles, essais, discours, entretiens, de 1935 à 1956, comme président de l'Association des étudiants martiniquais, puis comme élu du Parti communiste français, et surtout comme intellectuel et militant nègre engagé dans le combat anticolonialiste. Sa rupture avec les communistes en octobre 1956, marque un tournant important dans son engagement politique. Au coeur de ce volume, "L'Impossible contact", publié en 1948 par la revue Chemins du monde, manifeste l'intransigeance bienveillante d'Aimé Césaire. Cet article méconnu, et pourtant première version du célèbre "Discours sur le colonialisme", est l'emblème de la fluidité d'une écriture et de la fulgurance d'une pensée qui traversent ses Ecrits politiques. Une écriture agissante.

Ecrits politiques - Tome 2, 1935-1956

Les armes miraculeuses Le grand coup de machete du plaisir rouge en plein front il y avait du sang et cet arbre qui s'appelle flamboyant et qui ne mérite jamais mieux ce nom-là que les veilles de cyclone et de villes mises à sac le nouveau sang la raison rouge tous les mots de toutes les langues qui signifient mourir de soif et seul quand mourir avait le goût du pain et la terre et la mer un goût d'ancêtre et cet oiseau qui me crie de ne pas me rendre et la patience des hurlements à chaque détour de ma langue la plus belle arche et qui est un jet de sang la plus belle arche et qui est un cerne lilas la plus belle arche et qui s'appelle la nuit et la beauté anarchiste de tes bras mis en croix et la beauté eucharistique et qui flambe de ton sexe au nom duquel je saluais le barrage de mes lèvres violentes [...]

Les armes miraculeuses

Les poèmes de "Ferrements" ont été écrits au cours des années 50, période particulièrement fertile en événements qui ont affecté - lourdement parfois - le poète, dans son corps, sa vie familiale, sa vie sociale, sa vie politique. Césaire cependant ne modifiera pas sensiblement sa conception de la poésie ; il conservera sa pratique poétique personnelle, avec ses accès de fureur, de douleur ou de douceur, enrobés de métaphores fulgurantes, qui en masquent l'huis ténu, quasi invisible. Culminant sur les sommets d'une langue qui n'est qu'à lui, abrupte et splendide, Césaire demeure ce poète « difficile », mais irremplaçable et d'une richesse inégalée par tous ceux qui lui ont succédé dans la littérature négro-africaine et antillaise.

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