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Le Vieillard et L'enfant | François Augiéras
Le Vieillard et L'enfant | François Augiéras

Le Vieillard et L'enfant

Publié par Minuit

88 pages

Résumé

Au nord de l'oasis d'El-Goléa, parmi des palmeraies, dans une sorte de musée fortifié, j'avais habité chez un colonel en retraite dont j'étais l'esclave à peu près.Ce colonel, pourtant, n'était pas si cruel qu'il ne me fit l'honneur, parfois, de s'entretenir avec moi des opinions qu'il avait, particulièrement de son mépris de toute survie dans la mémoire des hommes, et plus encore dans la mémoire d'un Dieu. Par une sorte de bonté il m'apprenait le français, tandis que grondait sourdement le début de la révolte algérienne ; un soir, je vis dans son regard comme une lueur de peur, et il arrêta là mes études.Alors naquit dans mon esprit l'invincible croyance en la force des mots ; il y eut découverte d'un pouvoir et de ses conséquences dans le moment où j'étais humilié. Je devinai quelle victoire pouvait être la mienne ; je décidai de prendre l'univers à témoin d'une étrange affaire dans un musée du désert, d'en faire le récit, de crier ma détresse, et de me venger de la sorte d'un colonel en retraite parfaitement inhumain.Art d'appel à l'origine ; illisibles, des pages entières écrites sous le ciel étoilé dans quelque coin de roche, plus qu'aux hommes, plus qu'au monde, ne s'adressant qu'à mon âme éternelle et qu'à Dieu. J'écrivis pour écrire, pour m'expliquer devant mon Créateur et mon Juge, l'affreuse humilité de ma condition, mon peu de confiance en mes talents d'écrivain, ma solitude ne me donnant pas trop l'espoir de retrouver jamais les autres hommes. Ma demi-délinquance achevait de me couper de tout ; j'écrivais pour Dieu, pour moi. J'avouais tout, ne m'adressant à personne.Jusqu'au jour où une sorte d'orgueil me vint d'être aussi malheureux. Mes abominables carnets tirés de la plus sombre Afrique me parurent n'être pas sans valeur, une écriture hantée par le ciel étoilé pouvait plaire. Dieu demeurait silencieux, restaient les autres hommes.

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