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Dante Alighieri

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Dante Alighieri (Durante degli Alighieri dit « Dante » ; en italien : [ˈdante aliˈɡjɛːri]) est un poète, écrivain, penseur et homme politique italien de la République de Florence, né entre 1265-1267 (selon les études de Carlo Ossola, philologue, critique littéraire, professeur honoraire émérite au Collège de France) à Florence et mort le 14 septembre 1321 à Ravenne. « Père de la langue italienne »,, il est, avec Pétrarque et Boccace, l'une des « trois couronnes » qui imposèrent le toscan comme langue littéraire. Poète majeur (Il sommo poeta ou simplement Il poeta) du Moyen Âge, il est l'auteur de la Divine Comédie, souvent considérée comme la plus grande œuvre écrite dans cet idiome et l'un des chefs-d'œuvre de la littérature mondiale.

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Poésies

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    Dante Alighieri

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    La divine comédie Gloire à Celui qui meut tout, qui pénètre l’univers, et resplendit plus en une partie, et ailleurs moins. Dans le ciel qui le plus reçoit de sa lumière, je fus, et je vis des choses que ne peut redire celui qui descend de là-haut: parce qu’en s’approchant de l’objet de son désir, tant s’y enfonce notre intelligence, que la mémoire ne peut en arrière retourner si loin. Cependant tout ce qu’en moi j’ai pu thésauriser de souvenirs du royaume saint, sera maintenant le sujet de mon chant. O bon Apollon, fais, en ce dernier travail, que de ta vertu je sois rempli, autant que tu le demandes pour donner le laurier aimé de toi. Jusqu’ici ce me fut assez d’un sommet du Parnasse; mais des deux j’ai besoin pour entrer dans la nouvelle carrière. Viens dans ma poitrine, souffle en elle, comme lorsque tu tiras Marsyas de la gaîne de ses membres. O divine vertu, si tant tu te donnes à moi, que je reproduise au dehors l’ombre du bienheureux royaume empreinte en mon esprit, tu me verras alors venir à ton arbre aimé, et me couronner de ces feuilles dont le sujet et toi me rendrez digne. Si rarement, Père, on en cueille, pour le triomphe ou d’un César ou d’un poète (faute et honte des humains désirs), qu’à joie devrait être à la radieuse Déité Delphique, le feuillage de Pénée, lorsqu’il rend de soi quelqu’un avide. Petite étincelle allume une grande flamme: peut-être qu’après moi, d’une voix meilleure, on priera Cirra de répondre. Par des passages divers surgit pour les mortels la lampe du monde; mais par celui qui avec trois croix joint quatre cercles, il sort, d’un cours plus bienfaisant, en conjonction avec une étoile plus propice, et de la manière qui mieux convient, amollit et empreint la cire terrestre. Un tel lever avait fait là le matin, et ici comme le soir, et là était blanc tout cet hémisphère, et l’autre noir, lorsque je vis Béatrice, tournée vers la gauche, regarder le soleil: jamais aigle si fixement ne le regarda. Et comme un second rayon sort du premier, et rejaillit en haut, tel qu’un voyageur qui veut s’en retourner; ainsi son acte, infus par les yeux dans mon imaginative, devint le mien, et sur le Soleil je fixai les yeux plus qu’il n’est de notre usage. Beaucoup de choses peut là, que ne peut ici notre force, grâce au lieu fait pour être la demeure propre de l’humaine espèce. Je ne le supportai pas longtemps, non cependant si peu que je ne le visse étinceler tout autour, comme le fer qui du feu sort bouillant. Et tout à coup un nouveau jour parut être ajouté au jour, comme si Celui qui peut, d’un autre Soleil avait orné le ciel. Béatrice, debout, tenait ses yeux fixés sur les Cercles éternels; et moi, d’en bas éloignant les miens, je les fixai sur elle, et si avant je pénétrai, que dans son aspect je me fis tel que se fit Glaucus [13], qui en goûtant de l’herbe, devint dans la mer le compagnon des autres Dieux. Cette surhumaine transformation par des paroles ne saurait se décrire: que l’exemple donc suffise à celui à qui la grâce en réserve l’expérience. Si là était de moi cela seul que tu avais nouvellement créé [14], Amour qui gouvernes le ciel, tu le sais, toi qui m’élevas par ta lumière. Lorsque la roue [15] qu’éternellement tu meus, ô désiré, à soi m’eut rendu attentif, par l’harmonie que tu règles et que tu distribues, me parut embrasée de la flamme du soleil une telle étendue du ciel, que ni pluie ni fleuve ne firent jamais un si vaste lac. La nouveauté du son et l’éclat de la lumière allumèrent en moi un désir d’en connaître la cause, plus vif qu’aucun autre que j’eusse jamais senti. D’où elle, qui me voyait comme moi-même, afin de calmer mon âme agitée, avant que pour demander j’eusse ouvert la bouche, ouvrit la sienne, et commença: « Tu épaissis toi-même ta vue par une fausse imagination, tellement que tu ne vois pas ce que tu verrais si tu l’avais secouée. Tu n’es point sur la terre, comme tu le crois; mais de son séjour propre la foudre descend moins vite que tu n’y montes. » Si ces brèves paroles, enveloppées d’un sourire, me délivrèrent du premier doute, dans un autre je fus encore plus enlacé; et je dis: — Satisfait désormais suis-je, et soulagé d’un grand étonnement; mais à présent je m’étonne comment je m’élève au-dessus de ces corps légers. — Sur quoi, après un pieux soupir, elle tourna vers moi les yeux, telle de visage qu’une mère qui regarde son fils en délire. Et commença: « Toutes choses sont ordonnées entre elles, et cet ordre est la forme qui rend l’univers semblable à Dieu. Ici les hautes créatures [16] contemplent la trace de l’éternelle Puissance, qui est la fin de ce qu’ainsi elle a réglé. Dans l’ordre dont je parle, toutes les natures ont leur inclination, plus ou moins, selon leurs genres divers, rapprochées de leur principe: d’où vient qu’elles voguent vers divers ports à travers la grande mer de l’Etre, emportées chacune par l’instinct qu’elle a reçu: celui-ci emporte le feu vers la lune; celui-ci meut les cœurs mortels; celui-ci condense et unit en une masse la terre. Et les flèches de cet arc n’atteignent pas seulement les créatures privées d’intelligence, mais celles aussi douées d’intelligence et d’amour. La Providence ordonnatrice de ce vaste tout, par l’effusion de sa lumière maintient perpétuellement en paix le ciel où tourne le Cercle le plus rapide [17]; et là maintenant nous porte, comme au séjour prédestiné, la puissance de cette corde, qui dirige ce qu’elle décoche vers un heureux but. Il est vrai que, comme souvent la forme ne s’accorde point avec l’intention de l’art, parce que la matière refuse de s’y prêter, ainsi de cette direction s’écarte parfois la créature, qui, poussée de la sorte, a le pouvoir de se ployer d’autre part, et (comme on peut voir le feu tomber de la nue) tombe, si vers la terre l’impulsion première est détournée par un faux plaisir. Tu ne dois donc pas, si bien je juge, plus t’étonner de monter, que de ce qu’un ruisseau descend du haut d’un mont. Même merveille serait-ce, si, dégagé de tout empêchement, tu fusses en bas demeuré, que si un feu libre restait en repos à terre. » Puis vers le ciel elle reporta ses regards.

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    Dante Alighieri

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    Le purgatoire 1. Contre un plus fort vouloir, mal combat un autre vouloir; ainsi, contre ce qui me plaisait, pour lui plaire, je retirai de l’eau l’éponge non rassasiée. 2. Je m’avançai, et mon Guide s’avança par l’espace libre, le long de la rampe, comme on va par un étroit mur crénelé, 3. La gent qui, par les yeux, goutte à goutte, verse le mal dont tout le monde est plein, s’approchant trop en dehors. 4. Maudite sois-tu, antique louve, qui, plus que toutes les autres bêtes, abondes de proie pour ta faim sans fond! 5. O ciel, dont on paraît croire que les mouvements changent la condition des choses d’ici-bas, quand viendra celui par lequel s’en ira celle-ci? 6. Nous allions à pas lents et rares, et j’étais attentif aux ombres que j’entendais pitoyablement pleurer et se plaindre, 7. Lorsque, de fortune, j’ouïs : « Douce Marie! » devant nous appeler au milieu de ces pleurs, comme la femme en travail d’enfant, 8. Et ajouter : « Aussi pauvre tu fus qu’on le peut voir par le réduit où tu déposas ton fruit saint. » 9. J’entendis ensuite : « O bon Fabricius, tu aimas mieux la pauvreté avec la vertu, que de grandes richesses avec le vice. » 10. Tant me plurent ces paroles, que je m’avançai pour connaître l’esprit de qui elles paraissaient venir. 11. Il parlait aussi de la largesse que fit Nicolas aux jeunes vierges, pour conserver pur leur honneur. 12. — O âme qui si bien discours, dis-moi qui tu fus, dis-je, et pourquoi seule tu renouvelles ces dignes louanges. 13. Tes paroles ne seront point sans récompense, si je reviens accomplir le court chemin de cette vie qui vole vers son terme. 14. Et lui : « Je te parlerai, non pour confort que j’attende de là, mais à cause de la grâce singulière qui reluit en toi avant que tu sois mort. 15. « Je fus la racine de la mauvaise plante qui tellement de son ombre couvre la terre chrétienne, que rarement s’y cueille un bon fruit. 16. « Si Douai, Gand, Lille et Bruges pouvaient, prompte en serait la vengeance, et je la demande à celui qui juge tout. 17. « Je fus appelé là Hugues Capet : de moi sont nés les Philippe et les Louis, par qui nouvellement est régie la France. 18. « Je fus fils d'un boucher de Paris. Lorsque les anciens rois vinrent à manquer tous, hors un qui avait endossé la robe grise, 19. « Je me trouvai ayant en main le frein du gouvernement du royaume, et si puissant par de nouveaux acquêts, et entouré de tant d’amis, 20. « Qu’à la couronne veuve fut promue la tête de mon fils, par qui de ceux-là commença la race exécrable. 21. « Jusqu’à ce que la grande dot de Provence eût à mon sang ôté toute pudeur, peu il valait, mais du moins il ne faisait pas de mal. 22. « Alors, par la force et le mensonge, commencèrent leurs rapines : ensuite, pour amende, ils prirent le Ponthois, la Normandie et la Gascogne. 23. « Charles vint en Italie, et pour amende, fit de Conradin une victime, et au ciel renvoya Thomas, pour amende. 24. « Peu après, je vois un temps où de France est attiré un nouveau Charles, pour que mieux soient connus et lui et les siens. 25. « Il en sort sans armée, seul avec la lance avec laquelle jouta Judas, et si bien que de Florence elle ouvre le flanc. 26. « Par là point de terre il ne gagnera, mais péché et honte, pour lui d’autant plus pesants, que plus léger lui semblera un pareil dommage. 27. « L’autre qui sortit ensuite, je le vois, pris sur un navire, vendre sa fille, et en trafiquer comme les corsaires des autres esclaves. 28. « O avarice, quoi de plus peux-tu faire des miens, après qu’à toi tellement tu les as attirés, que point ils n’ont souci de leur propre chair? 29. « Pour que moindre paraisse le mal futur et le mal fait, je vois dans Alagna entrer le lis, et dans son vicaire le Christ captif. 30. « Je le vois moqué une autre fois : je le vois derechef abreuvé de vinaigre et de fiel, et mis à mort entre deux voleurs vivants. 31. « Je vois le nouveau Pilate, si cruel que, non assouvi encore, il porte, sans rescrit, ses voiles avides dans le temple. 32. « O mon Seigneur, quand joyeux verrai-je la vengeance cachée dont jouit en secret ta colère! 33. « Ce que je disais de cette unique épouse de l’Esprit saint sur quoi pour t’enquérir tu t’es tourné vers moi, 34. « Nous le redisons dans nos prières, pendant que le jour dure; mais, quand vient la nuit, nos voix prennent un ton contraire. 35. « Alors nous parlons de Pygmalion, que traître et voleur et parricide fit l’insatiable désir de l’or; 36. « Et de la misère de l’avare Midas, suite de l’avide demande qui doit le rendre à jamais un objet de risée. 37. « Puis chacun se rappelle l’insensé Achan, comment il déroba le butin, et il semble qu’ici le châtie encore la colère de Josué. 38. « Ensuite nous accusons Saphira avec son mari; aux ruades que reçut Héliodore nous applaudissons, et tout le mont roule dans l’infamie. 39. « Polymnestor qui tua Polydore. Enfin, ici l’on crie : O Crassus, dis-nous, puisque tu le sais, quel goût a l’or? 40. « L’un parle haut, et l’autre bas, selon le sentiment qui nous excite à parler avec plus ou moins de véhémence. » 41. Cependant à écouter le bien que de jour on rappelle, je n’étais pas seul; mais là auprès était une autre personne qui n’élevait pas la voix. 42. Nous avions quitté cet esprit, et nous tâchions de gagner du chemin autant que nos forces nous le permettaient, 43. Lorsque je sentis trembler le mont comme une chose qui tombe : d’où je fus pris d’un frisson semblable à celui qui saisit l’homme qu’on mène à la mort. 44. Si fortement ne trembla pas Délos, avant que Latone y eût fait le nid ou elle enfanta les deux yeux du ciel. 45. Puis retentit de toutes parts un cri tel, que le Maître se tourna vers moi, disant : — Ne crains rien, pendant que je te guide. 46. « Gloria in excelsis Deo! » tous disaient selon que je le compris, lorsque de plus près je pus entendre le cri. 47. Nous demeurâmes immobiles et en suspens, comme les pasteurs qui les premiers ouïrent ce chant, jusqu’à ce que, le tremblement ayant cessé, le chant aussi cessa. 48. Puis nous reprîmes notre route sainte, regardant les ombres qui gisaient à terre, et qui déjà étaient retournées aux pleurs accoutumés. 49 Contre aucune ignorance qui me rendit désireux de savoir, je n’eus jamais si grand combat, si ma mémoire en cela n’erre pas, 50. Que n’était celui qu’en ma pensée il me semblait alors avoir; et, à cause de la hâte, je n’osais demander, et là par moi-même je ne pouvais rien voir : Ainsi je m’en allais timide et pensif.

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