splash screen icon Lenndi
splash screen name leendi
J

Jean Aicard

Auteurplume

En savoir plus sur l'auteur

...plus

Compte non officiel

Poésies

22

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    À toi qui veux mourir Ôh ! ne t'envole pas, doux être, Ma colombe aux plumes d'argent ! Reste : ici-bas tu fais connaître La joie à mon cœur indigent ! Ne quitte pas, ma tourterelle, L'arbre où nous vivons tous les deux, Car moi je ne pourrais sans aile Suivre ton élan hasardeux. Je sais bien que la mort est douce Quand on a contemplé souvent, Vide, le petit lit de mousse Qu'en vain berce et berce le vent ! Je sais bien qu'il est monotone De chanter la même chanson, De voir l'hiver après l'automne, La saison après la saison ! Je sais bien que ta vie est noire, Que ton fardeau devient trop lourd, Et qu'il est de ton droit de croire Que tout est dur, même l'amour ! Oui, ma charmante petite âme, C'est trop souffrir, et trop longtemps ; C'est trop vivre pour une femme : Les fleurs ne vivent qu'un printemps ! Va, je sais ta souffrance intime, Jeune femme au cœur soucieux... Quand tu pleures, humble et sublime, Tes larmes roulent dans mes yeux. Mais, vois-tu, j'ai ma tâche morne ; J'ai mon sillon dur à tracer Dans cette plaine dont la borne Doit tôt ou tard se dépasser. Moi, vois-tu, j'ai ma gerbe à faire ; J'ai mes souffrances à souffrir ; J'arrive à peine sur la terre : Je dois vivre avant de mourir ! Et, tout seul, j'ai peur et je tremble ; Oh ! va, mêle ton cœur au mien ; Ne meurs pas, et vivons ensemble Si tu veux que je vive bien ! Je le sais, je devrais te dire : « Laisse-moi, mon enfant, adieu ! Assez de pleurs ; il faut sourire, Et ton sourire est fait pour Dieu ! » Mais, enfin ! c'est bien difficile De briser un amour constant, Et seul, misérable, débile, De crier au bonheur : « Va-t'en ! »

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    À Victor Hugo Je ne vous connais pas, ô bien-aimé poète ; Je n'ai pu contempler la fière et noble tête Où les rayons brûlants et doux du divin feu Font germer sans effort la semence de Dieu. Je ne vous connais pas ! cependant j'imagine Si bien votre grand front qu'un éclair illumine ; En votre œuvre, poète, on peut voir si souvent Votre visage auguste, éclatant et vivant, Que si, par un beau jour, perdu dans une foule, Car nous ne savons pas où le hasard nous roule, Par un jour envié vous passiez devant moi, J'irais droit jusqu'à vous pour vous dire : « C'est toi ! »

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Écoute ! si je meurs Écoute ! si je meurs, je veux mourir en homme ! Je veux mourir couché dans ma sérénité, Calme et fier, le regard brillant de plaisir, comme Un travailleur qui cherche un peu d'ombre, l'été. Je parlerai tout haut, proclamant ma pensée ; La liberté sera jusqu'à la fin mon Dieu ! Et je ferai rougir cette foule insensée Qui ne sent pas l'amour épars dans le ciel bleu ! L'homme souvent pâlit devant l'heure suprême ; Moi, faible, en ce moment je veux devenir fort ! Dans un râle je veux chanter les vers que j'aime ; Je veux être de ceux que fait vivre leur mort. Toi, tu me pleureras quelquefois si tu restes ! Mais, pauvre enfant, sans moi s'il te fallait partir, Si tu m'abandonnais pour tes frères célestes, Ah ! je ne saurais plus ni vivre,... ni mourir !

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Amours De tout temps mes amours furent des songes vagues ; Je n'ai causé tout bas qu'aux nymphes, dans les bois, Et, sur le bord des mers, ces sirènes, les vagues, Me font seules vibrer aux accords de leur voix. Mon âme est fiancée à l'humble solitude : Son chaste baiser plaît à mon front sérieux ; Je connais de profonds ombrages où l'étude A des charmes plus doux pour l'esprit et les yeux. Je suis l'amant rêveur des récifs et des grèves, L'insatiable amant du grand ciel inconnu ; Je ne retrouverai la vierge de mes rêves Qu'en l'immortel pays d'où mon cœur est venu. La vertu de l'amour, l'homme en a fait un crime ! Je ne veux pas aimer comme on aime ici-bas, Et ce cœur, façonné pour un élan sublime, Tant qu'il pourra monter ne se posera pas ! J'ai pourtant vu passer dans le vol de mes stances De blanches visions, filles de mon désir, Mais je n'aime d'amour que mes jeunes croyances : Espoir dans le printemps, et foi dans l'avenir !

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Chanson de Beppo Je n'ai pas connu ma mère, Et nul ne m'en a rien dit ; Je n'ai pas connu mon père, Et j'erre comme un maudit. Je n'ai ni toit ni famille, Je suis Beppo le bâtard, Jamais une jeune fille Ne m'a donné son regard ! Pourtant je sens en mon âme Toutes les saintes ferveurs, Et les baisers d'une femme Auraient grandi mes grandeurs. Mais non ! toute porte est close ; Un obstacle est là devant, Et dans l'homme et dans la chose, Dans la mer et dans le vent ! Je n'ai ni père ni mère ! Moi pourtant, sans feu ni lieu, Hommes, je suis votre frère, Comme je suis fils de Dieu !

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Charité Si vous croyez que j'ai l'âme assez abaissée Pour porter vos dédains sans me lever un jour Si vous croyez en moi tuer toute pensée, Et sous la haine froide engloutir mon amour, Détrompez-vous ! Sans fin je m'élève, je monte ! Pour vous voir par-dessus l'épaule, humiliés, Moi, je n'ai pas besoin, comme vous, dans la honte, De me hisser, furtif, sur la pointe des pieds. Je vais à l'Idéal, dans un élan suprême ! Mais vous êtes si bas, je vous en avertis, Qu'on ne peut parmi vous rester, bien qu'on vous aime, Ni, lorsqu'on se fait grand, vous faire moins petits.

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Claire Vous aviez des cheveux légers de soie et d'or. Nos yeux en même temps s'éveillaient sur les choses. Comme le fin parfum dans les boutons de roses, L'amour vague emplissait nos cœurs fermés encore. Vous seriez à présent, Claire, une jeune femme, Vous qu'enfant j'embrassais avec de doux frissons ; Car on aime à cet âge, et tous nous connaissons De ces espoirs d'amour pour une aurore d'âme. Pourquoi nous avez-vous quittés un beau matin ? Aviez-vous deviné les tourments de la vie ? La route vous fit peur et seul je l'ai suivie, Non pas sans envier parfois votre destin. Vous êtes morte au mois qui fait dans les charmilles Un gai frémissement de nids et de chansons, Et qui met tant de fleurs parmi tous les buissons Qu'il en est adoré par les petites filles. A leur jeu de la Maye, au mois de Mai joyeux, Vous étiez toujours Reine étant la plus jolie : Tout en blanc sous les fleurs et comme ensevelie, Vous trôniez immobile en souriant des yeux. Vous êtes morte alors, quand reverdit la branche. Je ne comprenais pas la mort ni le cercueil ; Et puis c'était en blanc qu'on menait votre deuil ; Vous-même vous aviez toujours la robe blanche. Et comme vous étiez sur un lit parfumé, Rose parmi les lis et pâle entre les roses, Sans bouger, souriante avec des lèvres closes, Je pensais : « Elle joue à la Reine de Mai. »

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Gelée blanche Février. Le blé monte aux tiédeurs hivernales. En hiver nos midis sont des matins d'été ; Mais parfois méchamment, aux heures matinales, Un souffle d'hiver glace Avril épouvanté. Il sent alors que tout s'est trop hâté d'éclore, Que tout s'est revêtu de trop claires couleurs, Et, dans les champs déserts, en attendant l'aurore, Avril frileux et blanc frissonne sous les fleurs.

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Il était sans amour Il était sans amour ; il souffrait en son âme ; Il avait travaillé longtemps. C'était pitié ! Son front, sombre, penchait, jamais homme ni femme Ne l'ayant éclairé d'un rayon d'amitié. Tous, rapides, voyant cet air morne et farouche, Fuyaient. Nul ne savait que c'était un martyr, Et pourtant, ô douleur ! ce mot crispait sa bouche : « Puisque je ne vis plus, je voudrais bien mourir ! »

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    L'ange et l'enfant Il lui disait : « Je suis ton frère ; Ne te souvient-il plus des cieux ? Leur doux reflet brille en tes yeux : Tu n'es pas l'enfant de la terre ! » Et l'ange souriait et lui tendait les bras ; L'enfant semblait dormir et ne répondait pas. « Déjà les portes éternelles, Enfant, sont ouvertes pour toi ; Viens ; je te donnerai des ailes : Tu t'envoleras avec moi ! « Bien souvent tu vois dans ton rêve Des rubis, des perles, des fleurs ; Pour ne te laisser que des pleurs, Ce vain songe trop tôt s'achève. » Et l'ange souriait et lui tendait les bras ; L'enfant semblait dormir et ne répondait pas. « Je ne veux pas que tu t'éveilles ; Blond chérubin, remonte aux cieux ; Tu retrouveras ces merveilles Dont le songe éblouit tes yeux. « Viens ; tu courras dans les allées, Sur le sable d'un grand jardin ; Je te conduirai par la main Jusques aux voûtes étoilées. » Et l'ange souriait et lui tendait les bras ; L'enfant semblait dormir et ne répondait pas. « N'entends-tu pas l'appel des anges ? Va jouer dans le firmament ; Sors de la vie et de ses langes Dans les plis de mon vêtement ! « Tu verras des fleurs immortelles, Des diamants dans les ruisseaux, Des fruits d'or, et de blancs oiseaux Qui laissent caresser leurs ailes ! » Et l'ange souriait et lui tendait les bras ; L'enfant semblait dormir et ne répondait pas. « Oh ! que veux-tu que je te donne, Frère, si tu viens avec moi ? Prends les rayons de ma couronne : Ces fleurons divins sont à toi. « Tu ne sais pas que la souffrance Ici-bas pourrait t'accabler ! Viens, suis-moi : je vais m'envoler... Pauvre ami, je suis l'Espérance ! » Et l'ange souriait et lui tendait les bras ; L'enfant semblait dormir et ne répondait pas. « Quoi ? Tu veux rester sur la terre, Tout seul, jouet de la douleur ? Et le ciel t'offrait le bonheur !... Enfant, dans le ciel est ta mère ! » Et deux anges fuyaient, heureux, loin d'ici-bas ; Et l'enfant endormi ne se réveilla pas !

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    La flourette La grappe belle et mûre et virginale encore Que baisent seulement la rosée et l'aurore, Garde sur sa peau rose un voile frais et blanc Aux vapeurs d'un miroir qu'on ternit ressemblant. Pour délicatement qu'on le cueille ou le touche, Dès qu'il est effleuré du doigt ou de la bouche, Le fruit pâle, soudain redevenu vermeil, Réfléchit tout l'éclat magique du soleil. C'est ainsi que l'amour fait la splendeur de l'âme, Et le premier baiser de la vierge une femme.

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    La jeunesse Oui, nous sommes les fiers, nous sommes la jeunesse ! Le siècle nous a faits tristes, vaillants et forts ; Condamnant sans pitié la peur et la faiblesse, Nous plaignons les vivants sans gémir sur les morts. S'il tombe de nos yeux quelques vains pleurs de femme, Nous les laissons couler paisibles ; mais, après, Meilleurs, nous voulons voir plus haut monter notre âme, Des larmes à l'espoir, du progrès au progrès ! Nous aimons la justice et la clémence sainte ; Nous poursuivons le mal plus que le malfaiteur ; Nous embrassons le pauvre en une ferme étreinte, Afin qu'il sente un cœur de frère sur son cœur ! Arraché au repos, lancés dans la bataille Par un pouvoir secret... qui nous importe peu, Nous vivons ! et chacun de nous lutte, et travaille À dresser sur l'autel la Liberté, son dieu ! Loin de l'humilité, la doctrine inféconde Qui fait courber le front à l'auguste Vertu, C'est pour vivre debout et citoyens du monde, Que nos pères, martyrs saignants, ont combattu ! Et nous qu'ils ont grandis, au fond des cieux splendides Nous pouvons, par-dessus les monts de l'horizon Et par-dessus l'amas des préjugés stupides, Entrevoir l'éclatant lever de la Raison. Nos aînés sont tous là, devant nous, sur la route, Mais l'un d'eux quelquefois s'arrête pour mourir ; Parfois l'un d'entre nous, pâle, chancelle et doute, Et la foule en révolte est lasse de souffrir ! Alors, vous le savez, vous, soldat jeune encore, Penseur au chant superbe et mâle travailleur, Vous dont l'âme rayonne en attendant l'aurore Qui doit illuminer notre nuit de malheur ! Alors, serf du devoir, confiant dans son âge, Un volontaire est là qui sort des rangs épais, Et jette un cri vibrant d'amour et de courage, Poète du combat, combattant de la paix !

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    La mer Concert prodigieux des ondes et des pierres ! Long retentissement des flots sur les galets ! Majesté de la mer débordant de lumières ! Fourmillement profond d'ombres et de reflets ! La mer, suprême tombe, est la source suprême ; Plongez dans ce soleil, vous trouverez la nuit, Mais la mort s'y fait vie, et dans cette ombre même Un monde se recueille et travaille sans bruit. Là, les plus petits font l'œuvre la plus sublime ; Unis et patients, ils montent vers le jour, Et bientôt ce labeur qu'emprisonnait l'abîme Le firmament joyeux l'embrasse avec amour ! Parfois l'homme ainsi voit surgir quelque île immense, Puis d'autres s'écrouler dans le gouffre écumant ; Mais la puissante mer, sans repos, recommence Les travaux éternels de son enfantement. La mer, la grande mer est semblable à l'Histoire : Toutes deux ont leurs nuits sans fond et leurs clartés Au-dessous des splendeurs des rois et de la gloire, Les peuples ténébreux forgent leurs libertés. Et quand des ouragans s'apaise l'harmonie, L'horizon vaporeux, lassé de se ternir, Nous montre, dans la mer au firmament unie, L'Humanité mêlée à Dieu, dans l'avenir.

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    La Méditerranée La Méditerranée est couchée au soleil ; Des monts chargés de pins, d'oliviers et de vignes Qui font un éternel murmure au sien pareil, Voient dans ses eaux trembler leurs lignes. Elle est couchée aux pieds des pins aux sueurs d'or, Qui de leurs parfums d'ambre embaument la campagne ; Elle veille en chantant ; en chantant elle dort ; La cigale en chœur l'accompagne. Au bord de cette mer Praxitèle rêvant A pris à la souplesse exquise de ses lames, Pour fixer la Beauté dans le Paros vivant, Des formes fuyantes de femmes. La Méditerranée, ô rêve ! est donc la mer D'où sortit Vénus blonde aux pieds blanchis d'écume, Et comme la Beauté donne un bonheur amer, Les flots bleus sont faits d'amertume. Lorsque Pan dut céder aux dieux nouveaux venus Vénus revint mêler aux flots sa beauté blonde, Et sous leur transparence elle erre encor, seins nus, Lumineuse, éparse dans l'onde. En ses limpides yeux se mirent nos grands bois ; Cigales, nous rythmons ses chants avec nos lyres, Car Pan aime d'amour ses yeux verts et sa voix, Et ses innombrables sourires !

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    La Noël L'hiver resserre autour du foyer la famille. Voici Noël. Voici la bûche qui pétille ; Le « carignié », vieux tronc énorme d'olivier Conservé pour ce jour, flambe au fond du foyer. Ce soir, le « gros souper » sera bon, quoique maigre. On ne servira pas l'anchois rouge au vinaigre, Non, mais on mangera ce soir avec gaîté La morue au vin cuit et le nougat lacté, Oranges, raisins secs, marrons et figues sèches. Dans un coin les enfants se construisent des crèches, Théâtres où l'on met des pierres pour décor Et de la mousse prise aux vieux murs, puis encore Des arbres faits d'un brin de sauge, et sur ces cimes, Le long des fins sentiers côtoyant ces abîmes, Des pâtres et des rois se hâtent vers le lieu Où vagit, entre l'âne et le bœuf, l'enfant-Dieu. Lorsque naquit en lui la Parole nouvelle, Le blé vert égayait la terre maternelle. Or, dès la Sainte-Barbe, on fait (semé dans l'eau) Lever pour la Noël un peu de blé nouveau : Sur des plats blancs on voit, humble, verdir cette herbe, Gage mystérieux de la future gerbe, Qui dit : « Aimez. Croyez. Noël ! Voici Noël ! « Je suis le pain de vie et l'espoir éternel. »

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Le bon travail Songe, ô rêveur lassé de vivre, Que le travail sacré délivre L'homme de tous les maux humains! En vie, en force salutaire, Il rend aux coeurs,- c'est un mystère, -- Plus que ne lui donnent les mains! Laisse le rêve, prends la plume, Lève le marteau sur l'enclume, Prends la truelle des maçons Tu sentiras ta délivrance! Et sur ta lèvre une espérance Voudra s'échapper en chansons. L'homme qui rêve seul ramène Trop souvent sa pensée humaine Sur lui-même qui souffre en lui! La pensée est peu généreuse; C'est pour elle qu'elle se creuse, Et son dégoût fait son ennui! Ah! l'homme, avec tout son génie, Perd, au fond de l'âme infinie, Le fil cassé de sa raison; Puis, cherchant sa raison perdue, Il s'effraie à voir l'étendue, Tout seul devant trop d'horizon! D'où vient donc la vertu secrète Du bon travail ? C'est qu'il arrête Sur un point fixe l’œil content! C'est qu'il limite la pensée... Toute besogne est cadencée, Et s'harmonise au cœur battant ! Tout travailleur fait de la vie, Et c'est l'humanité servie Qui, par un charme intérieur, Paie en gaité le bon ouvrage ! Et tous les cœurs font le courage Mystérieux du travailleur Qui rêve est toujours solitaire L'action, par toute la terre, Pousse la foule aux grands chemins; Le travail n'est jamais la haine.. Tous les travailleurs font la chaîne Et sentent leur cœur dans leurs mains! Laisse donc là ce qui t'attriste ! Sois le dieu qui dans l'homme existe... Homme, travaille et sois joyeux! L’erreur se sent aux tristes fièvres, Le vrai seul met la joie aux lèvres, Au fond du cœur et dans les yeux!

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Le mal du pays « On sait mieux le français au pays de la neige : Éloignons cet enfant de nous, se dirent-ils ; Il faut que les garçons apprennent les exils. » Et l'on m'envoya loin, à Mâcon, au collège. Oh ! comme je pleurais là-bas, pauvre petit ! Mes compagnons de classe en ont gardé mémoire, Et ceux qui m'ont revu m'en ont redit l'histoire : Plus de gaîtés d'enfant, de jeux ni d'appétit. Et mes grands yeux encore agrandis par la fièvre Poursuivaient fixement le songe du retour ; Je mourais d'un regret de soleil et d'amour ; Les lettres du pays ne quittaient plus ma lèvre. Pourtant les bois sont beaux où l'on allait courir, Mais est-ce la beauté que, si petit, l'on aime ? Et je me repliais, frissonnant, sur moi-même Comme un oiseau blessé se blottit pour mourir. Voulant m'ôter du cœur la Provence lointaine, Des mères par pitié m'embrassaient quelquefois ; Leur baiser m'était doux, mais j'entendais leur voix : Quel accent étranger m'eût guéri de ma peine ? Ô seuils hospitaliers, merci !... je me souviens ! Je vis alors Saint-Point (où la Muse en deuil pleure), Et j'écoutai, séchant mes larmes pour une heure, Lamartine indulgent qui me nommait ses chiens. Mais ni le châtelain, dont je savais la gloire, Ni les dames m'offrant les gâteaux et le miel, Ni tant d'amis nouveaux n'effacèrent ton ciel, Provence, de mon cœur tout plein de ta mémoire. Les êtres m'étaient bons ; mais les choses, les lieux Ne me souhaitaient pas la douce bienvenue, Et je voyais, craintif, sur leur face inconnue, Comme une indifférence errante dans des yeux. Oui, je me comprenais indifférent aux choses, Car leur face a des yeux, leur silence a des voix ; Et c'est ce qui fait peur aux enfants dans les bois : Ils devinent dans tout des paupières écloses. Chez nous, je ne craignais ni le roc endormi, Ni l'antre plein d'échos, ni la falaise amère ; La terre, m'accueillant comme une bonne mère, Disait aux bois émus : C'est le petit ami ! La nature m'aimait là-bas, m'ayant vu naître, Car les faibles sont siens des nids jusqu'aux berceaux. Elle me supportait comme un de ses oiseaux ; Mais la nature ici ne pouvait me connaître. Et même à la cité, toits aigus des maisons, Pavé sombre et murs noirs, rien n'avait de tendresse. Je tournais mes regards vers le midi sans cesse, Mais la pluie à longs traits barrait les horizons. Oh ! pensais-je, palmiers, aloès, plantes grasses ! Quand vous verrai-je encor, doux hiver, âpre été, Murs tout blancs de poussière ardente et de clarté, Et vous, toits du pays faits comme des terrasses ? « Ah ! rien ne m'aime ici, je suis comme perdu ! » Si ce cri m'échappait on me fermait la bouche ; Mais, les soirs, grelottant dans mon étroite couche, Je me livrais sans fin au regret défendu. Je voyais tour à tour les départs, l'arrivée, Et toujours mon grand-père était devant mes yeux, Assis près du portail, prolongeant les adieux, Me saluant au loin de sa canne levée. Il fallut m'emporter en Provence, un beau jour, Ce rêve intérieur m'ayant consumé l'âme... Le soleil ralluma ma vie avec sa flamme : Ô souvenir sacré, ce moment du retour ! J'avançais et les pins, les collines natales, Vite me racontaient tout mon petit passé : « J'avais fait une chute au bord de ce fossé ; Là j'avais pris un nid, et plus loin des cigales. » Au fils devenu grand, longtemps abandonné, La mère conte ainsi son enfance première : Un amour maternel était dans la lumière, Quand je revis enfin la terre où je suis né.

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Le printemps donne à tout la vie Le printemps donne à tout la vie et la beauté ; Chaque tige a sa fleur ; chaque fleur est superbe ; L'azur est souriant. La nature en gaîté Met des trésors d'amour et de bonheur dans l'herbe ! Dans les arbres, songeurs profonds, germe le fruit : La joie est par les airs ; tout est gonflé de sève ; Et ce jour trouble plus le penseur que la nuit, Car un plus grand mystère entre dans son grand rêve ! Dieu se laisse entrevoir, et sur des arbrisseaux, Êtres souffrants que nul doux parfum ne console, Une fleur vient d'éclore, un nid de passereaux : Encore de l'amour au sein d'une corolle !

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Le printemps me plaît Le printemps me plaît... J'erre avec délices Dans les champs joyeux, avec les moineaux ; Je contemple tout : les riches calices, Les insectes d'or et les foins nouveaux. Ninetta là-bas relève sa robe, Et, pour passer l'eau, montre son bas blanc : Par le sang du Christ ! l'homme, roi du globe, Devant ce pied-là se sent tout tremblant ! Le printemps me plaît... Je dis des folies ! Je suis sérieux, à la fois, et gai. D'azur et de miel les fleurs sont emplies : Pour suivre Nina j'ai passé le gué. Bonjour, Ninetta ! j'éprouve en mon âme, Dieu me le pardonne ! un trouble connu... Viens, repasse l'onde en mes bras, ô femme, Ou livre au ruisseau ton joli pied nu !

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Les vieux vaisseaux Je regrette les vieux vaisseaux dont la voilure, Large et lourde, pendait du faîte au pied des mâts, Et leurs pesants rouleaux de toile dont l'amas Faisait fléchir l'antenne à l'immense envergure. La marche du meilleur navire était peu sûre : On dépendait du temps, des saisons, des climats ; On restait immobile aux jours des calmes plats Et parfois on errait longtemps à l'aventure. Mais ils étaient si fiers les fins voiliers, si beaux, Quand leurs voiles claquaient comme de grands drapeaux, Puis s'enflaient tout d'un coup, souveraines et rondes ! L'ombre autour d'eux tombait en longs plis sur les eaux, Et les voiles semblaient dans leurs courbes profondes Porter en soupirant l'espoir de nouveaux mondes !

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Ne pourrai-je saisir un espoir Ne pourrai-je saisir un espoir qui m'apaise, Ni voir luire la foi dans la clarté du jour, Dis, ô joyeux soleil dont le rayon me baise ? Réponds, toi que je sens dans la lumière, — Amour ? Je ne sais si je crois en Dieu ! L'azur me pèse. Je voudrais d'un élan crever ce plafond lourd ; Depuis longtemps je marche, et la route est mauvaise ; Ma fatigue en vain jette un appel au ciel sourd. Pourtant je veux donner à quelqu'un ma prière !... Les ailes de mon cœur me soulèvent de terre, Sans trouver aucun but à leurs brûlants efforts ; Mais, aux vagues désirs quand mon être se livre, Je ne puis m'affirmer qu'on puisse ne plus vivre, Et l'Aspiration m'emporte vers les morts !

    en cours de vérification

    J

    Jean Aicard

    @jeanAicard

    Promenade Nous qui croyons souffrir, songeons à la souffrance De ceux qui vivent seuls, sans même une espérance, Et qui mourront tout seuls ; Regardons les méchants et ceux de qui la vie N'a d'autre but que d'être à jamais asservie Aux choses dont la mort fait les vers des linceuls ! Vois les hommes des champs ; vois les hommes des villes : Les combats étrangers ou les guerres civiles Déchirer leurs esprits ; Jette un profond regard sur l'histoire profonde, Et devant les forfaits entrevus sous cette onde, Dis-moi ce que ressent ton pauvre cœur surpris. Après avoir sondé toutes ces noires choses, Regarde, là, tout près, les fleurs blanches ou roses Sourire au grand ciel bleu ; L'arbre étend ses longs bras, lorsqu'avec toi je passe, Pour nous bénir, et Dieu rayonne dans l'espace, Car l'arbre nous connaît et nous connaissons Dieu ! Amie, et délivrés de la ville lointaine Dont le bruit nous arrive ainsi qu'un bruit de chaîne, Essuie enfin tes pleurs ! Vois : la brise s'endort ; l'eau paisible s'écoule ; Est-il bonheur plus grand que d'oublier la foule, D'être aimé des oiseaux, et d'être aimé des fleurs ?

    en cours de vérification

  • 1