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Jean de Bosschère

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Poésies

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    Jean de Bosschère

    @jeanDeBosschere

    Joie grondante Cent années dans le bloc opaque je fus le voisin d'un œil de cheval. L'univers suspendu abolissait nos temps, la parole avait été réduite sur l'enclume de la mort, et n'était plus qu'une spirale de vaste mollusque ; le froid incrustait aux nuages les passages d'oies, la multiplication des soupirs s'était vulcanisée. L'immobilité arrêtait le muscle et ses poulies, essaims d'abeilles pétrifiées en constellations. Immobilité ! Des chargements de musiques écartelées dans l'espace barré aveuglaient les soleils. Et cet œil immortel ouvert, poli comme un cachalot, l'épaule d'un ange ou la rotule d'un monstre. Nous étions cette grande bête traquée, cette poix de grenouilles que vous connaissez. Traquée sur la vague des myriades d'années pendant que pendant les temps que duraient les croissances d'archétypes, pendant les temps que le diamant, l'aîné des cosmogonies s'investissait d'une âme, se confondait au germe de l'unité. C'était en face de l'œil de cheval, c'était aux dégels des univers. Ce fut le péristyle de la mort où cesse la pensée d'homme articulée dans l'expérience de la chair où l'abstrait éclate dans la ceinture des sens comme un fruit ignorant ses ancêtres, une fleur surgie des cieux absolus et qui ne sera plus fécondée. Nous savions que la bête n'était pas arrivée qu'elle était encore dans le ferment des limbes et qu'elle s'éveillerait comme une éruption de sagesse, et l'œil, voisin par les myriades stratifiées, le voisin intègre au doux regard de fer, l'œil verrait enfin l'homme éternel. La bête couvait des éclosions et des débâcles dans les glaciers de sang que nous étions. Et les chargements de musiques, araignées accrochées aux visages des vieux astres, se délieraient enfin des serments de silence, s'ébroueraient comme des combats de cristal, comme des coupes alors se briseraient sur l'or du nouveau soleil. Et dans le remous de la vraie naissance j'abandonne les années et l'œil ouvert car m'accueille comme un parfum d'enfance la joie grondante de la mort.

    en cours de vérification

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    Jean de Bosschère

    @jeanDeBosschere

    L'école de l'ivresse Sous le géant soleil de mes jeunes ans de gloire de paons fastueux et encore de soleil aventure d'or d'école buissonnière brûlant crime adorable de pintades et de greniers temples solitaires complices enfant de candides dupes royales je cueillais avec nausée l'odeur de lange sur la manche de laine du cuistre et le réthoricien accompagnait ses œuvres sept simiesques générés dans l'ennui quand le dimanche, raide tatillon il escortait la bouffonne mappemonde rejeton fille d'un large pédant quinteux vingt chevrons et tout étoiles Je te connaissais mon Dieu que louaient les corolles et les ailes tu n'étais pas procréateur de maîtres ni de leurs travaux d'éleveurs responsables tu étais l'ineffable, le misanthrope comme moi l'ennemi des hommes prolifères comme j'étais le contempteur des matricules des identiques aux relents quotidiens de pupitre d'encre rouge, de lessives napolitaines Tu étais l'ineffable où chantaient pour toi seul le merle et la grive et tout ce que j'aimais avait été créé pour toi pour ta joie d'exilé que je comprenais dans mon cœur naissant tu ne portais ni chaîne ni férule c'est ta noble tendresse pour moi seul pour moi seul qui me guidait dans les sentiers, les plaines sans pistes mystères dévoilés à l'ouïe de l'âme confidences comme le vol diurne de l'oiseau muet, chouette de la nuit et c'est aussi ta vénération qui tendrement portait l'oiseau de sagesse sur la soie des ailes silencieuses de l'école d'ivresse, l'école buissonnière Je savais que c'était toi qui m'enseignais de repousser la main du pion qui me bénissais quand dans d'autres ans je quittais, bondissant équestre, la ville n'y revenait que toute bourse tarie Tu haïssais le binocle et la bave oratoire et tous ces traîtres qui m'enfermaient avec des singes, des poux, un Christ en croix qu'ils proposaient impudemment à mon supplice d'écolier Et maintenant mon Esprit d'oraison je sais que c'était toi qui infiniment d'un remède innommable gonflait mon cœur de sérénité et moi debout j'étais le prototype de l'espoir dans les taillis enchantés de mon idéal accessible, de mes rêves de victoire de ma rébellion, enfant des dieux du combat de mon immortelle école buissonnière Je mettais en ta beauté la représentation de mon univers concevable les lis d'enfance dont nul jamais n'illustra tes images impérieuses adorables et j'ignorais vos cathèdres d'architecture ô gentils oints des douces superstitions et cette eau lustrale qui vous sépare des maux je mettais en ta beauté les lis d'enfance Sous terre je creusais une tanière je l'ai dit, c'était un enfant de dupes candides je prévoyais les souterrains où se cache la lumière l'humus tonique, les larves et les feux qui bâtissent l'esprit dressé vivant Il est vrai l'armure était de bronze encore à volutes et ciselures il est vrai dans mes ans de primevères triomphales Je connaissais peut-être alors les âmes dans mes jeunes ans défiant falaises, précipices déjà peut-être je connaissais les roses rouges de l'hallucination l'aigle et la vipère des promesses les âmes qui éclosent dans l'enfer jettent l'huile et le fagot sur l'incendie Le pur vaste espoir avait les dimensions des deux et des planètes qui du front se touchaient dans mon cœur Et pourtant, certainement pourtant une arène de hautes flammes protégeait mes lis d'enfance Je sais maintenant que c'était toi qui t'avançais à ma rencontre , compagnon, présence indéfectible Février 1949

    en cours de vérification

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