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Joachim du Bellay

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Joachim du Bellay /ʒɔaʃɛ̃ dy bɛlɛ/, ou Joachim Du Bellay est un poète français né vers 1522 à Liré en Anjou et mort le 1er janvier 1560 à Paris. Sa rencontre avec Pierre de Ronsard fut à l'origine de la formation de la Pléiade, groupe de poètes pour lequel du Bellay rédigea un manifeste, la Défense et illustration de la langue française. Son œuvre la plus célèbre, Les Regrets, est un recueil de sonnets d'inspiration élégiaque puis satirique et finalement encomiastique écrit à l'occasion de son voyage à Rome de 1553 à 1557.

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Poésies

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    Bérécynthienne Telle que dans son char la Bérécynthienne Couronnée de tours, et joyeuse d'avoir Enfanté tant de dieux, telle se faisait voir En ses jours plus heureux cette ville ancienne : Cette ville, qui fut plus que la Phrygienne Foisonnante en enfants, et de qui le pouvoir Fut le pouvoir du monde, et ne se peut revoir Pareille à sa grandeur, grandeur sinon la sienne.

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    Qui a vu quelquefois un grand chêne asséché Qui a vu quelquefois un grand chêne asséché, Qui pour son ornement quelque trophée porte, Lever encore au ciel sa vieille tête morte, Dont le pied fermement n'est en terre fiché,

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    A son livre Mon livre (et je ne suis sur ton aise envieux), Tu t’en iras sans moi voir la Cour de mon Prince. Hé, chétif que je suis, combien en gré je prinsse Qu’un heur pareil au tien fût permis à mes yeux ? Là si quelqu’un vers toi se montre gracieux, Souhaite-lui qu’il vive heureux en sa province : Mais si quelque malin obliquement te pince, Souhaite-lui tes pleurs et mon mal ennuyeux. Souhaite-lui encor qu’il fasse un long voyage, Et bien qu’il ait de vue éloigné son ménage, Que son coeur, où qu’il voise, y soit toujours présent : Souhaite qu’il vieillisse en longue servitude, Qu’il n’éprouve à la fin que toute ingratitude, Et qu’on mange son bien pendant qu’il est absent.

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    Au fleuve de Loire Ô de qui la vive course Prend sa bienheureuse source, D'une argentine fontaine, Qui d'une fuite lointaine, Te rends au sein fluctueux De l'Océan monstrueux, Loire, hausse ton chef ores Bien haut, et bien haut encores, Et jette ton œil divin Sur ce pays Angevin, Le plus heureux et fertile, Qu'autre où ton onde distille. Bien d'autres Dieux que toi, Père, Daignent aimer ce repaire, A qui le Ciel fut donneur De toute grâce et bonheur. Cérès, lorsque vagabonde Allait quérant par le monde Sa fille, dont possesseur Fut l'infernal ravisseur, De ses pas sacrés toucha Cette terre, et se coucha Lasse sur ton vert rivage, Qui lui donna doux breuvage. Et celui-là, qui pour mère Eut la cuisse de son père, Le Dieu des Indes vainqueur Arrosa de sa liqueur Les monts, les vaux et campaignes De ce terroir que tu baignes. Regarde, mon Fleuve, aussi Dedans ces forêts ici, Qui leurs chevelures vives Haussent autour de tes rives, Les faunes aux pieds soudains, Qui après biches et daims, Et cerfs aux têtes ramées Ont leurs forces animées. Regarde tes Nymphes belles A ces Demi-dieux rebelles, Qui à grand'course les suivent, Et si près d'elles arrivent, Qu'elles sentent bien souvent De leurs haleines le vent. Je vois déjà hors d'haleine Les pauvrettes, qui à peine Pourront atteindre ton cours, Si tu ne leur fais secours. Combien (pour les secourir) De fois t'a-t-on vu courir Tout furieux en la plaine ? Trompant l'espoir et la peine De l'avare laboureur, Hélas ! qui n'eut point d'horreur Blesser du soc sacrilège De tes Nymphes le collège, Collège qui se récrée Dessus ta rive sacrée. Qui voudra donc loue et chante Tout ce dont l'Inde se vante, Sicile la fabuleuse, Ou bien l'Arabie Heureuse. Quant à moi, tant que ma Lyre Voudra les chansons élire Que je lui commanderai, Mon Anjou je chanterai. Ô mon Fleuve paternel, Quand le dormir éternel Fera tomber à l'envers Celui qui chante ces vers, Et que par les bras amis Mon corps bien près sera mis De quelque fontaine vive, Non guère loin de ta rive, Au moins sur ma froide cendre Fais quelques larmes descendre, Et sonne mon bruit fameux A ton rivage écumeux. N'oublie le nom de celle Qui toutes beautés excelle, Et ce qu'ai pour elle aussi Chanté sur ce bord ici.

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    Au roi Ne vous pouvant donner ces ouvrages antiques Pour votre Saint-Germain ou pour Fontainebleau, Je vous les donne, Sire, en ce petit tableau Peint, le mieux que j’ai pu, de couleurs poétiques : Qui mis sous votre nom devant les yeux publiques, Si vous le daignez voir en son jour le plus beau, Se pourra bien vanter d’avoir hors du tombeau Tiré des vieux Romains les poudreuses reliques. Que vous puissent les dieux un jour donner tant d’heur, De rebâtir en France une telle grandeur Que je la voudrais bien peindre en votre langage : Et peut-être qu’alors votre grand Majesté, Repensant à mes vers, dirait qu’ils ont été De votre monarchie un bienheureux présage.

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    Baiser Quand ton col de couleur rose Se donne à mon embrassement Et ton oeil languit doucement D’une paupière à demi close, Mon âme se fond du désir Dont elle est ardemment pleine Et ne peut souffrir à grand’peine La force d’un si grand plaisir. Puis, quand s’approche de la tienne Ma lèvre, et que si près je suis Que la fleur recueillir je puis De ton haleine ambroisienne, Quand le soupir de ces odeurs Où nos deux langues qui se jouent Moitement folâtrent et nouent, Eventent mes douces ardeurs, Il me semble être assis à table Avec les dieux, tant je suis heureux, Et boire à longs traits savoureux Leur doux breuvage délectable. Si le bien qui au plus grand bien Est plus prochain, prendre on me laisse, Pourquoi me permets-tu, maîtresse, Qu’encore le plus grand soit mien? As-tu peur que la jouissance D’un si grand heur me fasse dieu? Et que sans toi je vole au lieu D’éternelle réjouissance? Belle, n’aie peur de cela, Partout où sera ta demeure, Mon ciel, jusqu’à tant que je meure, Et mon paradis sera là.

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    Bien qu'aux arts d'apollon le vulgaire n'aspire Bien qu'aux arts d'Apollon le vulgaire n'aspire, Bien que de tels trésors l'avarice n'ait soin, Bien que de tels harnais le soldat n'ait besoin, Bien que l'ambition tels honneurs ne désire : Bien que ce soit aux grands un argument de rire, Bien que les plus rusés s'en tiennent le plus loin, Et bien que Du Bellay soit suffisant témoin Combien est peu prisé le métier de la lyre : Bien qu'un art sans profit ne plaise au courtisan, Bien qu'on ne paye en vers l'œuvre d'un artisan, Bien que la Muse soit de pauvreté suivie, Si ne veux-je pourtant délaisser de chanter, Puisque le seul chant peut mes ennuis enchanter, Et qu'aux Muses je dois bien six ans de ma vie.

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    C'etait ores, c'etait qu'a moi je devais vivre C'était ores, c'était qu'à moi je devais vivre, Sans vouloir être plus que cela que je suis, Et qu'heureux je devais de ce peu que je puis Vivre content du bien de la plume et du livre. Mais il n'a plu aux dieux me permettre de suivre Ma jeune liberté, ni faire que depuis Je vécusse aussi franc de travaux et d'ennuis, Comme d'ambition j'étais franc et délivre. Il ne leur a pas plu qu'en ma vieille saison Je susse quel bien c'est de vivre en sa maison, De vivre entre les siens sans crainte et sans envie : Il leur a plu (hélas) qu'à ce bord étranger Je visse ma franchise en prison se changer, Et la fleur de mes ans en l'hiver de ma vie.

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    Ceux qui sont amoureux, leurs amours chanteront Ceux qui sont amoureux, leurs amours chanteront, Ceux qui aiment l’honneur, chanteront de la gloire, Ceux qui sont près du roi, publieront sa victoire, Ceux qui sont courtisans, leurs faveurs vanteront, Ceux qui aiment les arts, les sciences diront, Ceux qui sont vertueux, pour tels se feront croire, Ceux qui aiment le vin, deviseront de boire, Ceux qui sont de loisir, de fables écriront, Ceux qui sont médisants, se plairont à médire, Ceux qui sont moins fâcheux, diront des mots pour rire, Ceux qui sont plus vaillants, vanteront leur valeur, Ceux qui se plaisent trop, chanteront leur louange, Ceux qui veulent flatter, feront d’un diable un ange : Moi, qui suis malheureux, je plaindrai mon malheur.

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    Chant du désespéré La Parque si terrible A tous les animaux, Plus ne me semble horrible, Car le moindre des maux, Qui m’ont fait si dolent, Est bien plus violent. Comme d’une fontaine Mes yeux sont dégouttants, Ma face est d’eau si pleine Que bientôt je m’attends Mon coeur tant soucieux Distiller par les yeux. De mortelles ténèbres Lis sont déjà noircis, Mes plaintes sont funèbres, Et mes membres transis Mais je ne puis mourir, Et si ne puis guérir. La fortune amiable Est ce pas moins que rien ? O que tout est muable En ce val terrien ! Hélas, je le connais Que rien tel ne craignais. Langueur me tient en laisse, Douleur me fuit de près, Regret point ne me laisse, Et crainte vient après Bref, de jour, et de nuit, Toute chose me nuit. La verdoyant’ campagne, Le fleuri arbrisseau, Tombant de la montagne, Le murmurant ruisseau, De ces plaisirs jouir Ne me peut réjouir. La musique sauvage Du rossignol au bois Contriste mon courage, Et me déplaît la voix De tous joyeux oiseaux, Qui sont au bord des eaux. Le cygne poétique Lors qu’il est mieux chantant, Sur la rive aquatique Va sa mort lamentant. Las ! tel chant me plaît bien, Comme semblable au mien. La voix répercussive En m’oyant lamenter De ma plainte excessive Semble se tourmenter, Car cela que j’ai dit Toujours elle redit. Ainsi la joie et l’aise Me vient de deuil saisir, Et n’est qui tant me plaise Comme le déplaisir. De la mort en effet L’espoir vivre me fait. Dieu tonnant, de ta foudre Viens ma mort avancer, Afin que soie en poudre Premier que de penser Au plaisir que j’aurai Quand ma mort je saurai.

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    Comme le champ semé Comme le champ semé en verdure foisonne, De verdure se hausse en tuyau verdissant, Du tuyau se hérisse en épi florissant, D'épi jaunit en grain, que le chaud assaisonne ; Et comme en la saison le rustique moissonne Les ondoyants cheveux du sillon blondissant, Les met d'ordre en javelle, et du blé jaunissant Sur le champ dépouillé mille gerbes façonne ; Ainsi de peu à peu crût l'empire romain, Tant qu'il fut dépouillé par la barbare main Qui ne laissa de lui que ces marques antiques Que chacun va pillant : comme on voit le glaneur, Cheminant pas à pas recueillir les reliques De ce qui va tombant après le moissonneur.

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    Comme le marinier, que le cruel orage Comme le marinier, que le cruel orage A longtemps agité dessus la haute mer, Ayant finalement à force de ramer Garanti son vaisseau du danger du naufrage, Regarde sur le port, sans plus craindre la rage Des vagues ni des vents, les ondes écumer ; Et quelqu’autre bien loin, au danger d’abîmer, En vain tendre les mains vers le front du rivage : Ainsi, mon cher Morel, sur le port arrêté, Tu regardes la mer, et vois en sûreté De mille tourbillons son onde renversée : Tu la vois jusqu’au ciel s’élever bien souvent, Et vois ton Du Bellay à la merci du vent Assis au gouvernail dans une nef percée,

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    Comme on passe en été le torrent sans danger Comme on passe en été le torrent sans danger, Qui soulait en hiver être roi de la plaine, Et ravir par les champs d'une fuite hautaine L'espoir du laboureur et l'espoir du berger : Comme on voit les couards animaux outrager Le courageux lion gisant dessus l'arène, Ensanglanter leurs dents, et d'une audace vaine Provoquer l'ennemi qui ne se peut venger : Et comme devant Troie on vit des Grecs encor Braver les moins vaillants autour du corps d'Hector : Ainsi ceux qui jadis soulaient, à tête basse, Du triomphe romain la gloire accompagner, Sur ces poudreux tombeaux exercent leur audace, Et osent les vaincus les vainqueurs dédaigner.

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    Depuis que j'ai laisse mon naturel séjour Depuis que j'ai laissé mon naturel séjour Pour venir où le Tibre aux flots tortus ondoie, Le ciel a vu trois fois par son oblique voie Recommencer son cours la grand lampe du jour. Mais j'ai si grand désir de me voir de retour Que ces trois ans me sont plus qu'un siège de Troie, Tant me tarde, Morel, que Paris je revoie, Et tant le ciel pour moi fait lentement son tour. Il fait son tour si lent, et me semble si morne, Si morne et si pesant, que le froid Capricorne Ne m'accourcit les jours, ni le Cancre les nuits. Voilà, mon cher Morel, combien le temps me dure Loin de France et de toi, et comment la nature Fait toute chose longue avecques mes ennuis.

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    Douce Mère d'amour, gaillarde Cyprienne Douce mère d'amour, gaillarde Cyprienne, Qui fais sous ton pouvoir tout pouvoir se ranger, Et qui des bords de Xanthe à ce bord étranger Guidas avec ton fils ta gente dardanienne, Si je retourne en France, ô mère idalienne, Comme je vins ci, sans tomber au danger De voir ma vieille peau en autre peau changer, Et ma barbe française en barbe italienne, Dès ici je fais vœu d'apprendre à ton autel, Non le lys, ou la fleur d'amarante immortel, Non cette fleur encore de ton sang colorée : Mais bien de mon menton la plus blonde toison Me vantant d'avoir fait plus que ne fit Jason Emportant le butin de la toison dorée.

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    Déjà la nuit en son parc amassait Déjà la nuit en son parc amassait Un grand troupeau d'étoiles vagabondes, Et, pour entrer aux cavernes profondes, Fuyant le jour, ses noirs chevaux chassait ;

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    Encore que l'on eût heureusement compris Encore que l'on eût heureusement compris Et la doctrine grecque et la romaine ensemble, Si est-ce, Gohory, qu'ici, comme il me semble, On peut apprendre encore, tant soit-on bien appris. Non pour trouver ici de plus doctes écrits Que ceux que le français soigneusement assemble, Mais pour l'air plus subtil, qui doucement nous amble Ce qui est plus terrestre et lourd en nos esprits. Je ne sais quel démon de sa flamme divine Le moins parfait de nous purge, éprouve et affine, Lime le jugement et le rend plus subtil : Mais qui trop y demeure, il envoie en fumée De l'esprit trop purgé la force consumée, Et pour l'émoudre trop lui fait perdre le fil.

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    France, Mère des arts, des armes et des lois France, mère des arts, des armes et des lois, Tu m'as nourri longtemps du lait de ta mamelle : Ores, comme un agneau qui sa nourrice appelle, Je remplis de ton nom les antres et les bois. Si tu m'as pour enfant avoué quelquefois, Que ne me réponds-tu maintenant, ô cruelle ? France, France, réponds à ma triste querelle. Mais nul, sinon Écho, ne répond à ma voix. Entre les loups cruels j'erre parmi la plaine, Je sens venir l'hiver, de qui la froide haleine D'une tremblante horreur fait hérisser ma peau. Las, tes autres agneaux n'ont faute de pâture, Ils ne craignent le loup, le vent ni la froidure : Si ne suis-je pourtant le pire du troupeau.

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    Gordes, que du Bellay aime plus que ses yeux Gordes, que Du Bellay aime plus que ses yeux, Vois comme la nature, ainsi que du visage, Nous a faits différents de mœurs et de courage, Et ce qui plaît à l'un, à l'autre est odieux. Tu dis : Je ne puis voir un sot audacieux Qui un moindre que lui brave à son avantage, Qui s'écoute parler, qui farde son langage, Et fait croire de lui qu'il est mignon des dieux. Je suis tout au contraire, et ma raison est telle : Celui dont la douleur courtoisement m'appelle, Me fait outre mon gré courtisan devenir : Mais de tel entretien le brave me dispense : Car n'étant obligé vers lui de récompense, Je le laisse tout seul lui-même entretenir.

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    Heureux celui qui peut longtemps suivre la guerre Heureux celui qui peut longtemps suivre la guerre Sans mort, ou sans blessure, ou sans longue prison ! Heureux qui longuement vit hors de sa maison Sans dépendre son bien ou sans vendre sa terre ! Heureux qui peut en cour quelque faveur acquerre Sans crainte de l'envie ou de quelque trahison ! Heureux qui peut longtemps sans danger de poison Jouir d'un chapeau rouge ou des clefs de saint Pierre ! Heureux qui sans péril peut la mer fréquenter ! Heureux qui sans procès le palais peut hanter ! Heureux qui peut sans mal vivre l'âge d'un homme ! Heureux qui sans souci peut garder son trésor, Sa femme sans soupçon, et plus heureux encore Qui a pu sans peler vivre trois ans à Rome !

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    Heureux qui comme Ulysse Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage, Ou comme cestuy-là qui conquit la toison, Et puis est retourné, plein d'usage et raison, Vivre entre ses parents le reste de son âge! Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village Fumer la cheminée, et en quelle saison Reverrai-je le clos de ma pauvre maison, Qui m'est une province, et beaucoup davantage? Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux, Que des palais Romains le front audacieux, Plus que le marbre dur me plaît l'ardoise fine: Plus mon Loir gaulois, que le Tibre latin, Plus mon petit Liré, que le mont Palatin, Et plus que l'air marin la doulceur angevine.

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    Heureux, de qui la mort de sa gloire est suivie Heureux, de qui la mort de sa gloire est suivie, Et plus heureux celui dont l'immortalité Ne prend commencement de la postérité, Mais devant que la mort ait son âme ravie. Tu jouis (mon Ronsard), même durant ta vie, De l'immortel honneur que tu as mérité : Et devant que mourir (rare félicité) Ton heureuse vertu triomphe de l'envie. Courage donc, Ronsard, la victoire est à toi, Puisque de ton côté est la faveur du Roi : Là du laurier vainqueur tes tempes se couronnent, Et là la tourbe épaisse à l'entour de ton flanc Ressemble ces esprits, qui là-bas environnent Le grand prêtre de Thrace au long sourpelis blanc.

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    Ici de mille fards la trahison se déguise Ici de mille fards la trahison se déguise, Ici mille forfaits pullulent à foison, Ici ne se punit l'homicide ou poison, Et la richesse ici par usure est acquise : Ici les grandes maisons viennent de bâtardise, Ici ne se croit rien sans humaine raison, Ici la volupté est toujours de saison, Et d'autant plus y plaît que moins elle est permise. Pense le demeurant. Si est-ce toutefois Qu'on garde encore ici quelque forme de lois, Et n'en est point du tout la justice bannie. Ici le grand seigneur n'achète l'action, Et pour priver autrui de sa possession N'arme son mauvais droit de force et tyrannie.

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    J'aime la liberté, et languis en service J'aime la liberté, et languis en service, Je n'aime point la cour, et me faut courtiser, Je n'aime la feintise, et me faut déguiser, J'aime simplicité, et n'apprends que malice ; Je n'adore les biens, et sers à l'avarice, Je n'aime les honneurs, et me les faut priser, Je veux garder ma foi, et me la faut briser, Je cherche la vertu, et ne trouve que vice ! Je cherche le repos, et trouver ne le puis, J'embrasse le plaisir, et n'éprouve qu'ennuis, Je n'aime à discourir, en raison je me fonde : J'ai le corps maladif, et me faut voyager, Je suis né pour la Muse, on me fait ménager ; Ne suis-je pas, Morel, le plus chétif du monde ?

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    Je hais du florentin l'Usurière avarice Je hais du Florentin l'usurière avarice, Je hais du fol Siennois le sens mal arrêté, Je hais du Genevois la rare vérité, Et du Vénitien la trop haute malice : Je hais le Ferrarais pour je ne sais quel vice, Je hais tous les Lombards pour l'infidélité, Le fier Napolitain pour sa grande vanité, Et le poltron romain pour son peu d'exercice : Je hais l'Anglais mutin et le brave Ecossais, Le traître Bourguignon et l'indiscret Français, Le superbe Espagnol et l'ivrogne Tudesque : Bref, je hais quelque vice en chaque nation, Je hais moi-même encore mon imperfection, Mais je hais par surtout un savoir pédantesque.

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    Je hais plus que la mort un jeune casanier Je hais plus que la mort un jeune casanier, Qui ne sort jamais hors, sinon aux jours de fête, Et craignant plus le jour qu'une sauvage bête, Se fait en sa maison lui-même prisonnier. Mais je ne puis aimer un vieillard voyager, Qui court deçà delà, et jamais ne s'arrête, Ainsi des pieds moins léger que léger de la tête, Ne séjourne jamais non plus qu'un messager, L'un sans se travailler en sûreté demeure, L'autre, qui n'a repos jusques à tant qu'il meurt, Traverse nuit et jour mille lieux dangereux : L'un passe riche et sot heureusement sa vie, L'autre, plus souffreteux qu'un pauvre qui mendie, S'acquiert en voyageant un savoir malheureux.

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    Joachim du Bellay

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    Je ne veux point fouiller au sein de la nature Je ne veux point fouiller au sein de la nature, Je ne veux point chercher l'esprit de l'univers, Je ne veux point sonder les abîmes couverts, Ni dessiner du ciel la belle architecture. Je ne peins mes tableaux de si riche peinture, Et si hauts arguments ne recherche à mes vers : Mais suivant de ce lieu les accidents divers, Soit de bien, soit de mal, j'écris à l'aventure. Je me plains à mes vers, si j'ai quelque regret : Je me ris avec eux, je leur dis mon secret, Comme étant de mon coeur les plus sûrs secrétaires. Aussi ne veux-je tant les peigner et friser, Et de plus braves noms ne les veux déguiser Que de papiers journaux ou bien de commentaires.

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    Joachim du Bellay

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    Je vis l’oiseau qui le soleil contemple Je vis l’oiseau qui le soleil contemple D’un faible vol au ciel s’aventurer, Et peu à peu ses ailes assurer, Suivant encor le maternel exemple. Je le vis croître, et d’un voler plus ample Des plus hauts monts la hauteur mesurer, Percer la nue, et ses ailes tirer Jusqu’au lieu où des dieux est le temple. Là se perdit : puis soudain je l’ai vu Rouant par l’air en tourbillon de feu, Tout enflammé sur la plaine descendre. Je vis son corps en poudre tout réduit, Et vis l’oiseau, qui la lumière fuit, Comme un vermet renaître de sa cendre.

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    Joachim du Bellay

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    La complainte du désespéré Qui prêtera la parole A la douleur qui m'affole? Qui donnera les accents A la plainte qui me guide : Et qui lâchera la bride A la fureur que je sens? Qui baillera double force A mon âme, qui s'efforce De soupirer mes douleurs? Et qui fera sur ma face D'une larmoyante trace Couler deux ruisseaux de pleurs?... Et vous mes vers, dont la course A de sa première source Les sentiers abandonnés, Fuyez à bride avalée. Et la prochaine vallée De votre bruit étonnez. Votre eau, qui fut claire et lente, Ores trouble et violente, Semblable à ma douleur soit, Et plus ne mêlez votre onde A l'or de l'arène blonde, Dont votre fond jaunissoit... Chacune chose décline Au heu de son origine : Et l'an, qui est coutumier De faire mourir et naître, Ce qui fut rien, avant qu'être, Réduit à son rien premier. Mais la tristesse profonde, Qui d'un pied ferme se fonde Au plus secret de mon cœur, Seule immuable demeure, Et contre moi d'heure en heure Acquiert nouvelle vigueur... Quelque part que je me tourne, Le long silence y séjourne Comme en ces temples dévots, Et comme si toutes choses Pêle-mêle étaient r'encloses Dedans leur premier Chaos... Maudite donc la lumière Qui m'éclaira la première, Puisque le ciel rigoureux Assujettit ma naissance A l'indomptable puissance D'un astre si malheureux... Heureuse la créature Qui a fait sa sépulture Dans le ventre maternel ! Heureux celui dont la vie En sortant s'est vue ravie Par un sommeil éternel!... Sus, mon âme, tourne arrière, Et borne ici la carrière De tes ingrates douleurs. Il est temps de faire épreuve, Si après la mort on treuve La fin de tant de malheurs.

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    Joachim du Bellay

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    La nef qui longuement a voyagé, Dillier La nef qui longuement a voyagé, Dillier, Dedans le sein du port à la fin on la serre : Et le boeuf, qui longtemps a renversé la terre, Le bouvier à la fin lui ôte le collier : Le vieux cheval se voit à la fin délier, Pour ne perdre l'haleine ou quelque honte acquerre : Et pour se reposer du travail de la guerre, Se retire à la fin le vieillard chevalier : Mais moi, qui jusqu'ici n'ai prouvé que la peine, La peine et le malheur d'une espérance vaine, La douleur, le souci, les regrets, les ennuis, Je vieillis peu à peu sur l'onde ausonienne, Et si n'espère point, quelque bien qui m'advienne, De sortir jamais hors des travaux où je suis.

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