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Louise Colet

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Louise Colet, née Louise Révoil le 15 septembre 1810 à Aix-en-Provence et morte le 8 mars 1876 à Paris 5e, est une poétesse et femme de lettres française.

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Poésies

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    Boutade à la raison Froide raison, pompeuse idole, Divinité, chère à l'orgueil, Tu n'as pas un mot qui console Les souffrances d'un cœur en deuil : Jamais, dans ton œil inflexible, On ne vit des pleurs de pitié ; Ta voix rend l'amour insensible, Et glace même l'amitié. Comme l'onde de la mer Morte Que le vent ne peut soulever, D'une âme indifférente et forte, Voir l'infortune, et la braver : Sans que leurs douleurs nous effleurent, Puiser une utile leçon Dans les larmes de ceux qui pleurent, Voilà ce qu'on nomme raison. Quand le bonheur nous abandonne, S'immoler à la vanité ; Rendre au monde ce qu'il nous donne, Dédain, impassibilité !... Être, en commençant l'existence ; Insensible à la trahison ; S'endurcir contre l'inconstance, Voilà ce qu'on nomme raison. Vieillir l'âme avant que les rides Viennent sillonner notre front ; Tarir, par des pensers arides, Tout sentiment tendre et profond ; Fuir l'amitié qui nous convie ; Dans l'amour prévoir l'abandon Arracher les fleurs de la vie ; Voilà, ce qu'on nomme raison ! Si le cœur, comme Prométhée, Saigne, rongé par un vautour ; Si la vie est désenchantée, Si l'espoir a fui sans retour ; Si le souvenir nous déchire, Savoir feindre la guérison ; Etouffer nos pleurs et sourire, Voilà ce qu'on nomme raison ! Sitôt que sa paupière s'ouvre, Dessiller l'enfant ingénu ; Lever le voile qui le couvre, Et lui montrer le monde à nu : Dans son âme qui vient d'éclore, Mêler la crainte et le soupçon A l'espérance qu'on déflore : Voilà ce qu'on nomme raison ! Au flambeau que la gloire allume Préférer un obscur destin : Sans que la lèvre s'y parfume, Briser la coupe du festin ; Toujours au fond de l'ambroisie, Soupçonner un amer poison : Vivre sans foi, sans poésie ; Voilà ce qu'on nomme raison ! Raison dont je suis obsédée, Déité des esprits rampants, Tu soumets toute noble idée, Aux préjugés dont tu dépends ! Sous ton joug l'âme est avilie ; La foule abuse de ton nom : Pour une sublime folie, Je t'abandonne ; adieu, raison !

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    Heureux qui voit la mort Heureux qui voit la mort et qui peut l'oublier ! Heureux qui n'a jamais senti son cœur plier, En voulant pénétrer le déchirant mystère, Que le cercueil dérobe aux enfants de la terre ! Moi, je cherchai longtemps l'énigme du tombeau, Elle fit de mes jours vaciller le flambeau ! Mais pour me consoler, j'avais encore ma mère, Sa tendresse adoucit cette douleur amère, Puis, dans mon sein ému, je sentais chaque jour, S'amasser tant de vie et d'éléments d'amour, Qu'à la destruction je ne pouvais pas croire, Le fiel restait au fond du vase où j'allais boire, J'implorais, étreignant le monde d'un désir, Une heure du bonheur que je voudrais saisir ! Une heure sans mélange, une heure enchanteresse, Où de l'éternité se résumât l'ivresse ! Lorsque, pour éloigner l'image du trépas, Tous mes songes lointains ne me suffisaient pas, J'avais auprès de moi d'intimes poésies, Caprices passagers, subtiles fantaisies, Qu'un instant fait éclore et qu'un instant détruit, Comme ces feux follets qui brillent dans la nuit ! Oh ! ces impressions des choses éphémères, Qui changent tour à tour nos pensers, nos chimères, Qui captivent nos sens et qui nous font rêver. Pour pouvoir les comprendre, il faut les éprouver ; Produites au hasard, c'est un rien qui les cause, C'est une bulle d'air, un insecte, une rose, Le nid de la fourmi, la trace d'un ciron, Une feuille tombant dans l'eau, qui forme un rond ; C'est un nuage errant, tout peuplé de fantômes, Un rayon de soleil, où dansent les atomes : C'est le feu qui pétille à l'âtre du foyer, Où l'on voit à son gré mille objets flamboyer ; C'est la pâle lueur d'une lampe lointaine, Le jet aérien d'une claire fontaine, C'est, dans l'azur du ciel, l'oiseau qui prend son vol, L'ombre d'un peuplier qui se dessine au sol, C'est la nuit, reflétant ses millions d'étoiles Sur les monts que la neige a couvert de ses voiles ; C'est le souffle odorant du zéphyr matinal, C'est, des fleurs et des fruits le duvet virginal, C'est le lichen qui flotte à la pierre gothique, C'est... oh ! c'est l'infini d'un monde fantastique, Dont le charme, la grâce, et la suavité Fascinent le regard du poète enchanté ! Lorsque la Muse antique, altière et grandiose, Daigne quitter l'Olympe, où son esprit repose, Dans le palais des rois, abaissant son essor, Elle chante ses vers sur une lyre d'or. Il faut pour l'inspirer une foule choisie, Des banquets somptueux, des coupes d'ambroisie : Mais sa modeste sœur, Follet, Sylphe, ou Lutin, Se plaît à ramasser les miettes du festin ; Elle voit sans envie, au front de son aînée, Les immortels lauriers dont elle est couronnée ; Elle cueille des fleurs qui changent tous les jours, Elle ne peut souffrir ce qui dure toujours ! Dévouée au malheur, elle est pourtant frivole. Elle aime à composer sa légère auréole D'un bluet, d'un brin d'herbe, ou d'un de ces rayons Qui glissent dans les airs sans que nous les voyons ! Elle berce les cœurs soumis à son empire ; Elle n'immole pas le barde qu'elle inspire, Bonne et douce, elle accourt à son premier salut ; Elle n'a point d'emphase, elle chante sans luth ; La pauvreté lui plaît ; d'un coup de sa baguette ; Elle revêt d'éclat les haillons du poète ; Elle n'exige pas un ciel brillant et chaud, La mansarde noircie et l'humide cachot L'attirent... et souvent, bienfaisante, on l'a vue Porter aux malheureux une joie imprévue. Mais cette poésie impalpable est dans l'air, Dans l'espace, partout, c'est le feu de l'éclair, On ne peut la saisir, on ne peut la décrire ; Pour langage, elle emprunte un regard, un sourire ; Je plains l'être incomplet qui ne la connaît pas, Qui foule, insouciant, l'insecte sous ses pas, Et, dans l'aridité de son âme inféconde, Ne voit que le néant où Pascal vit un monde. Pour oublier la vie, ainsi je m'enivrais De ces mille plaisirs, chimériques ou vrais ; Quand, dans l'isolement, l'heure fuyait trop lente, Que de fois sur les prés je m'assis, indolente, Endormant mes douleurs, vivant pour admirer, Sur un jour de printemps laissant mon œil errer, Alors que chaque épi, chaque fleur, chaque feuille, Jette une rêverie au cœur qui se recueille, Et que, voilant l'éclat d'un soleil radieux, Une tiède vapeur unit la terre aux cieux ! Voyant, autour de moi, la plaine diaprée D'arbres, où bourgeonnait une neige empourprée, J'aimais à comparer cette virginité, Au suave incarnat d'une jeune beauté, Et, dans cet amandier si frais, si blanc, si rose, Je croyais voir son front où la candeur repose. Alors, restant pensive, enivrée, et sans voix, L'hymne fuyait mon cœur, le luth quittait mes doigts, Par la réalité, lorsque l'âme est saisie. Trop faibles sont les mots, vide est la poésie ; Qu'est le chant de la lyre à côté d'un beau jour ? La gloire et l'avenir, qu'est-ce, auprès de l'amour ? Ainsi, l'âme plongée en une molle ivresse, Des peuples d'Orient j'ai compris la paresse ; Jouissant par la vue, admirant par les sens, Ils prennent en pitié tous nos arts impuissants ; Ils ne contraignent pas une langue rebelle A peindre froidement la nature si belle ! Ils nous laissent les champs de l'idéalité, Et nos rêves, pour eux, sont la réalité.

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    Isola-Bella Vierges, lorsqu'à vos cœurs l'amour se révéla, Par votre fiancé quand vous fûtes aimées, Le jour où son destin au vôtre se mêla. Ne rêvâtes-vous pas aux îles Borromées ? Et parmi les trois sœurs, corbeilles parfumées, Au rivage enchanteur de l'Isola-Bella Où l'on voit des palais sous de fraîches ramées, N'avez-vous pas choisi quelque blanche villa ? Là, le grand lac qu'entoure un cercle de collines Reflète dans l'azur de ses eaux cristallines L'Italie au ciel bleu, la Suisse aux sombres monts. N'est-il pas, ici-bas, deux âmes exilées Qui coulent sur ces bords, l'une à l'autre mêlées, Une vie enfermée en ce seul mot : AIMONS !

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    Jalousie Jeunes femmes, parfois, quand je vais me mêler A vos jeux... si je sens mon âme se troubler, Si soudain sur mon front une ride se creuse, Si ma pensée empreint sa trace douloureuse Sur mes traits, que l'on voit se couvrir de pâleur, Ce n'est point jalousie, ô femmes ! c'est douleur ! Du bonheur passager de la nouvelle épouse, De ses illusions je ne suis pas jalouse. Quand elle apparaît, j'aime à l'entendre applaudir, A voir sous l'oranger son front pur resplendir, Sa parure éblouir la foule qui l'entoure, J'aime à la croire heureuse alors qu'elle savoure Cet encens que le monde aux femmes jette un jour, Encens de vanité parfumé par l'amour !... Mais ce qui me torture et fait fléchir mon âme, C'est de voir auprès d'elle assise une autre femme, Jeune de son bonheur dont elle prend sa part, Fière de ses succès, l'adorant du regard, Et la nommant tout haut sa fille, ô peine amère ! Je suis jalouse alors, car je n'ai plus de mère !

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    Je désire toujours Avoir toujours gardé la candeur pour symbole, Croire à tout sentiment noble et pur, et souffrir ; Mendier un espoir comme un pauvre une obole, Le recevoir parfois, et longtemps s'en nourrir ! Puis, lorsqu'on y croyait, dans ce monde frivole Ne pas trouver un cœur qui se laisse attendrir ! Sans fixer le bonheur voir le temps qui s'envole ; Voir la vie épuisée, et n'oser pas mourir ! Car mourir sans goûter une joie ineffable, Sans que la vérité réalise la fable De mes rêves d'amour, de mes vœux superflus, Non ! je ne le puis pas ! non, mon cœur s'y refuse Pourtant ne croyez pas, hélas ! que je m'abuse : Je désire toujours... mais je n'espère plus !

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    L'hymen Ne rêves-tu jamais à ces heures d'extase Qui précèdent l'hymen de deux jeunes époux ? Quand l'amour, de leur cœur, comme ronde d'un vase, Déborde en sentiments mystérieux et doux ! Dis, n'est-ce rien pour toi qu'une vierge qui pleure En recevant l'aveu d'un amour désiré ? Qu'un front pur qui rougit, si ta lèvre l'effleure ; Qu'un céleste regard vers toi seul attiré ? N'est-ce rien, quand tu lis dans sa chaste pensée, D'y découvrir empreinte en sentiments de feu Cette foi que le monde encore n'a pas glacée, Et qui croit au bonheur, comme elle croit à Dieu ! Les pudiques secrets de son âme candide De leur voile à tes yeux sont alors dépouillés ; De ses jours sans amour elle te peint le vide, Puis ses désirs naissants par toi seul éveillés. Après ces doux accents viennent de longs silences ; Sa tête sur ton sein semble s'abandonner : Mais soudain elle fuit ; vers elle tu t'élances. Et tu prends un baiser qu'elle n'osait donner ; A ce larcin d'amour un jeu naïf succède : Ce sont ses longs cheveux que tu veux détacher ; Elle retient ta main ; tu souris, elle cède, Et sous leur blond tissu ton front va se cacher. Ce sont sur tes yeux noirs ses petites mains blanches, Dont folâtre et rieuse elle aime à te couvrir ; C'est, lorsque sans parler vers elle tu le penches, Un maintien languissant à te faire mourir ! Puis l'air manque à son cœur dévoré par la fièvre ; Elle échappe à tes bras : tu la suis dans les champs, Et cette volupté dont sa pudeur te sèvre Tu la trouves encore dans ses regards touchants. Elle revient à toi plus douce, plus aimante ; S'accuse d'avoir fui ; met sa main dans ta main ; Courbe sur ton épaule une tête charmante, Et vous marchez tous deux sans suivre de chemin... Quand tu la vois si belle à ton bras suspendue Répondre aux mots d'amour qu'en tremblant tu lui dis, Alors, qu'est l'univers pour ton âme éperdue, Et la gloire et l'éclat qui t'enivraient jadis ? La terre disparait, mais le ciel se révèle ; A votre immense amour il faut l'immensité ; Il faut à votre espoir une sphère nouvelle Où vous aimiez ainsi durant l'éternité ! Le doute qui luttait dans votre âme orgueilleuse Dans la félicité deviendrait un remords : La foi naît du bonheur : Quand la vie est heureuse. On voudrait l'assurer au-delà de la mort. Et tous les deux alors mêlant votre prière Vous unissez vos cœurs ; et dans un même vœu, Le regard vers le ciel, à genoux sur la pierre, De vous avoir créés vous remerciez Dieu !

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    Plus de vers Non, plus de vers, jamais ; ce monde où tout s'altère, Ma muse, a fait pâlir ton front pudique et saint, Ton aile s'est brisée en touchant à la terre : Comme un oiseau blessé cache-toi dans mon sein. Non, plus de vers, jamais, car les vers sont des larmes Qui brûlent en tombant le cœur qui les forma, Et les indifférents ne trouvent pas de charmes A savoir de ce cœur qu'il souffrit, qu'il aima. Vous qui venez sourire et pleurer dans mon livre, Illusions d'un jour, beaux rêves que j'aimais, A ce monde étranger en tremblant je vous livre, Et je vous dis adieu ! Non, plus de vers, jamais !

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    La mort de mon père Je crois revoir encore la couche d'agonie, Où mon père mourut vieillard aux cheveux blancs, Au front large et ridé, symbole de génie, Aux yeux étincelants. Comme un bûcher fumant, dont on éteint la flamme, Jette, avant d'expirer, tous ses rayons épars, Ainsi, près de mourir, tous les feux de son âme Brillaient dans ses regards. Il avait trop compté sur sa frêle existence ; De la fortune adverse il vainquit la constance Par de trop grands efforts : Et quand il s'asseyait, fatigué du voyage, Qu'il demandait à Dieu le calme après l'orage, Il mourut ! La pensée avait usé son corps, Comme l'onde qui bout brise un vase d'argile, Ou comme dans nos mains éclate un luth fragile Sous de trop vifs accords ! Mourir près du bonheur ! Mourir, quand on arrive, A la réalité dont on croyait jouir ! Voir, lorsque notre esquif allait toucher la rive, Le port s'évanouir !... Entendre les sanglots de ses enfants qu'on aime, En leur tendant les bras, dire un dernier adieu ; C'est à faire douter de l'espérance même Qui nous parle de Dieu ! Oh ! Qui ne saura jamais la lutte intérieure, Qui se livre dans l'homme à cette dernière heure, Alors qu'il voit passer, sous son regard mourant, Tout ce qu'il chérissait, tout ce qu'il croyait grand ; Et que de tous ces biens, dont l'éclat s'évapore, Il voudrait vainement se ressaisir encore !... Dans cette heure d'angoisse, oh ! Qui sait si la foi, De l'horreur du trépas peut adoucir l'effroi ! Et si l'âme, arrivée à la fin de sa route, Ne défaillira pas en combattant le doute ? Ce choc, de senti mens qui déchirent le cœur. Mon père le subit, mais il en fut vainqueur. Quand un prêtre pieux eut sur sa vie entière, Prononcé le pardon qu'accordait l'Éternel. On eût dit que l'esprit, dépouillant la matière, Entrevoyait le ciel. Ses yeux avec amour contemplaient le ciboire, Sur le saint crucifix ses deux mains se croisaient ; Il était pâle alors comme le Christ d'ivoire, Que ses lèvres baisaient. Mais quand il eut reçu le Dieu qui désaltère, A la vie un instant son corps se ranima : Il bénit ses enfants, qu'il laissait sur la terre, Et tous ceux qu'il aima. Puis au moment suprême où la parole expire, Où l'âme se recueille en sa sainte ferveur, Exprimant son espoir par un divin sourire, Il sembla s'endormir dans les bras du Sauveur !

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    Le fruit de la pensée Le fruit de la pensée est amer pour ma bouche, Et la cendre en jaillit aussitôt que j'y touche ; Et cependant ma lèvre, alors qu'elle le fuit, Sent une ardente soif qui la brûle et l'altère, Et je reviens encore demander à la terre L'arbre de la science, et j'en cueille le fruit. Fruits stériles et morts qui n'avez point de germe, Œuvres vivant un jour, et que la tombe enferme, Créations de l'homme où Dieu n'a point de part, Rêves de vanité, de gloire et de folie, Sources d'énervement où mon âme s'oublie, La fortifierez-vous à l'heure du départ ? Ainsi que le mineur sous la terre inféconde S'épuise et cherche en vain de l'or ; ainsi le monde Voit s'épuiser notre âme en efforts de géant ; L'espérance l'entraîne au sentier qu'elle creuse ; Elle marche toujours, ardente et courageuse. Puis se sent défaillir en face du néant. Du néant des grandeurs et des gloires humaines. Des sciences, des arts, dont les vastes domaines Ne lui verseront pas d'ondes pour s'étancher ; Du néant qui, railleur, l'accable et l'humilie. En jetant le dégoût comme une amère lie Au fond de tous les biens que l'orgueil fait chercher. Que ne puis-je, fuyant le monde qui m'entoure, Ne plus boire à la coupe où ma lèvre savoure L'enivrement de l'âme et l'oubli des douleurs ; Et, portant le fardeau d'une immense tristesse, Dire à l'humanité, comme la prophétesse. Des secrets qu'ont ravis la prière et les pleurs.

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    Le malheur Le malheur m'a jeté son souffle desséchant : De mes doux sentiments la source s'est tarie, Et mon âme incomprise avant l'heure flétrie, En perdant tout espoir perd tout penser touchant, Mes yeux n'ont plus de pleurs, ma voix n'a plus de chant, Mon cœur désenchanté n'a plus de rêverie ; Pour tout ce que j'aimais avec idolâtrie, Il ne me reste plus d'amour ni de penchant. Une aride douleur ronge et brûle mon âme, Il n'est rien que j'envie et rien que je réclame, Mon avenir est mort, le vide est dans mon coeur. J'offre un corps sans pensée à l'œil qui me contemple ; Tel sans divinité reste quelque vieux temple, Telle après le banquet la coupe est sans liqueur.

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    Les fleurs que j'aime Fleurs arrosées Par les rosées Du mois de mai, Que je vous aime ! Vous que parsème L'air embaumé ! Par vos guirlandes, Les champs, les landes Sont diaprés : La marguerite Modeste habite Au bord des prés. Le bluet jette Sa frêle aigrette Dans la moisson ; Et sur les roches Pendent les cloches Du liseron. Le chèvrefeuille Mêle sa feuille Au blanc jasmin, Et l'églantine Plie et s'incline Sur le chemin. Coupe d'opale, Sur l'eau s'étale Le nénufar ; La nonpareille Offre à l'abeille Son doux nectar. Sur la verveine Le noir phalène Vient reposer ; La sensitive Se meurt, craintive, Sous un baiser. De la pervenche La fleur se penche Sur le cyprès ; L'onde qui glisse Voit le narcisse Fleurir tout près. Fleurs virginales, A vos rivales, Roses et lis, Je vous préfère, Quand je vais faire Dans les taillis Une couronne Dont j'environne Mes blonds cheveux, Ou que je donne A la Madone Avec mes vœux.

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    Ma poésie Il est dans le Midi des fleurs d'un rose pâle Dont le soleil d'hiver couronne l'amandier ; On dirait des flocons de neige virginale Rougis par les rayons d'un soleil printanier. Mais pour flétrir les fleurs qui forment ce beau voile, Si la rosée est froide, il suffit d'une nuit ; L'arbre alors de son front voit tomber chaque étoile, Et quand vient le printemps il n'a pas un seul fruit. Ainsi mourront les chants qu'abandonne ma lyre Au monde indifférent qui va les oublier ; Heureuse, si parfois une âme triste aspire Le parfum passager de ces fleurs d'amandier.

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    Louise Colet

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    Souviens-toi de moi Pars, puisque la gloire t'appelle ! Mais lorsque tu t'enivres d'elle, Oh ! du moins, souviens-toi de moi ! Quand la louange autour de toi Se répand douce à ton oreille, Ah ! que mon image s'éveille Dans ton cœur, souviens-toi de moi ! D'autres femmes te seront chères. D'autres bras pourront t'enlacer, Et tous les biens que tu préfères Sur tes pas viendront se presser ; Mais si celles que ton cœur aime Sont heureuses auprès de toi, En goûtant le bonheur suprême, Oh ! toujours souviens-toi de moi ! La nuit, quand ta vue est charmée Par ton étoile bien-aimée, Alors, oh ! souviens-toi de moi. Pense qu'elle brilla sur toi Un soir où nous étions ensemble ; Et quand sur ton front elle tremble, Oh ! toujours souviens-toi de moi. Lorsque dans l'été tu reposes Tes yeux sur les mourantes roses Que nous aimions tant autrefois, Lorsque leur parfum t'environne, Songe à cette heure où sous mes doigts Je t'en formais une couronne Puis les effeuillais avec toi ; Et toujours souviens-toi de moi. Puis, quand le vent du nord résonne, Et que les feuilles de l'automne Glissent éparses près de toi, Alors, oh ! souviens-toi de moi. Lorsque tu contemples dans l'âtre La flamme ondoyante et bleuâtre, Oh ! toujours souviens-toi de moi ! Si des chants de mélancolie Tout à coup viennent te frapper, Si tu sens ton âme amollie Dans une larme s'échapper ; Si ton souvenir te murmure L'harmonie enivrante et pure Que j'entendais auprès de toi, Oh ! pleure, et souviens-toi de moi !

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    Louise Colet

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    Un cœur brisé « Ô souvenir de pleurs et de mélancolie ! Ceux que j'aurais aimés ne m'ont point accueillie, Ou bien, insoucieux, Ils vantaient ma beauté sans comprendre mon âme, Et ne soupçonnaient pas sous ces dehors de femme L'ange tombé des deux ! Comme un lac, dont la brise effleure la surface Sans agiter le fond, Ces êtres aux cœurs froids, où tout amour s'efface, Pour moi n'eurent jamais un sentiment profond. Innocence, candeur, tendresse virginale, Ils vous abandonnaient sans larmes, sans regret ; Et toujours triomphait dans leur âme vénale Un vulgaire intérêt. Ils passaient tous ainsi comme des ombres vaines : Le fantôme adoré, l'idéal que j'aimais, Celui qui de ma vie eut adouci les peines N'apparaissait jamais ! Jamais l'aveu chéri qui captive une femme, Qui mêle pour toujours son âme vierge à l'âme D'un jeune fiancé Ne porta dans mes sens une ivresse suprême ; Non, jamais par l'amour, jamais ce mot, je t'aime, Ne me fut prononcé ! Jamais, en s'élançant au seuil de ma demeure Un mortel adoré ne me dit : Voici l'heure Promise à ton ami ! Et triomphant malgré la pudeur qui résiste N'effleura d'un baiser mon front rêveur et triste ! Non, jamais dans ma main une main n'a frémi. Nul rayon de bonheur sur mes jours ne se lève ; L'amour que j'appelais ne m'a pas répondu ! Déjà mon front pâlit et mon printemps s'achève. Et pour moi l'avenir est à jamais perdu. L'homme peut à son gré recommencer sa vie, Par un jour radieux son aurore est suivie ; De jeunesse et de gloire il est beau tour-à-tour ; Il règne en cheveux blancs : mais nous, on nous dénie Les palmes des combats, les lauriers du génie ; Nous n'avons que l'amour. Et s'il ne sourit pas à nos fraîches années ; Si, jeunes, nous vivons, hélas ! abandonnées, N'espérons pas plus tard un fortuné destin : Des mères qu'on bénit, et des chastes épouses Contemplons le bonheur sans en être jalouses ; Le soir ne peut donner les roses du matin. » Elle parlait ainsi, la femme délaissée, Et dans son sein brûlant fermentait sa pensée ; Fuis, jetant un regard de merci vers les cieux, Pour ne plus les rouvrir elle ferma les yeux.

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    Une amie Si vous l'aviez connue à sa quinzième année, Elle était belle alors, belle à vous rendre fou ! En voyant les attraits dont elle était ornée, Vous auriez devant elle incliné le genou ! Pour caresser sa main frêle, blanche et veinée, Poète, vous eussiez été je ne sais où ; Et votre part du ciel, oh ! vous l'auriez donnée Pour un baiser d'amour posé sur son beau cou ! Mais, avec la douleur, toute beauté se fane ; Elle a souffert longtemps, et le regard profane Ne voit plus sur ses traits de magiques trésors : Ses yeux se sont ternis et son front n'est plus rose. Eh bien ! moi, j'applaudis à sa métamorphose, Car son âme a gagné ce qu'a perdu son corps.

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