Connu comme l'un des plus grands sociologues du siècle, Norbert Elias est étudié, utilisé et discuté par les historiens, les anthropologues, les politistes, les sociologues... Ces dernières années, plusieurs ouvrages et n° de revue lui ont été consacrés en France, et des traductions ont permis au public français de découvrir son oeuvre. Sa sociologie s'organise autour de l'idée que l'individu a une identité propre, mais qu'il s'inscrit dans un milieu de relations qui va lui transmettre des valeurs, un schéma de comportements, un habitus social. Les deux textes de ce livre, mettant en oeuvre cette conception de l'individualité, présentent, en peu de pages, une trajectoire de vie et de pensée qui traverse tout le XXe siècle. Dans le premier texte, Elias retrace avec simplicité son parcours : son enfance de jeune juif allemand dans l'empire prussien ; l'expérience traumatisante et fondatrice de la guerre de 1914-1918 ; sa formation intellectuelle dans l'Allemagne de Weimar ; la montée du nazisme ; l'exil et le lent mûrissement de sa théorie, forgée à l'épreuve de l'histoire ; la reconnaissance tardive, les voyages ; son goût pour l'art ou la poésie. A plusieurs reprises, Elias ponctue son récit d'aperçus théoriques essentiels à la compréhension de son oeuvre. Le second texte est le discours de réception du prix Adorno, prononcé par Elias en 1977. Pour le sociologue, qui a du fuir l'Allemagne 40 ans plus tôt, c'est une consécration. Elias y évoque la figure d'Adorno, mais il saisit l'occasion pour jeter un regard rétrospectif sur son propre itinéraire. Il parle de son rapport au marxisme, de sa conception de l'humanisme, des processus de dé-civilisation et de violence qui traversent l'histoire contemporaine, singulièrement en Allemagne. Il défend surtout sa propre conception du travail sociologique, et de la recherche intellectuelle en général.

J'ai suivi mon propre chemin - Un parcours dans le siècle : propros autobiographiques

" Jamais la mort n'a été aussi discrète, aussi hygiénique qu'elle l'est aujourd'hui, et jamais aussi solitaire. "  Si la dissimulation et le secret qui entouraient jadis le domaine sexuel se sont heureusement relâchés, les tabous sociaux se sont déplacés et singulièrement renforcés en ce qui concerne la mort. L'attitude pusillanime de refus et de gêne qui entoure aujourd'hui la fin d'un être humain est tout à fait comparable à celle qui prévalait dans le domaine sexuel à l'époque victorienne. Telle est la thèse que développe Norbert Elias dans ce livre.

La solitude des mourants

Norbert Elias analyse l'évolution de la civilisation occidentale en mettant en parallèle la logique des pulsions individuelles de chacun, et celle de la formation d'un pouvoir étatique et centralisé. Il y voit la clé du développement politique de notre société, qu'il analyse dans une première partie historique (du Moyen âge à nos jours), qui conduit les acteurs sociaux à se montrer de plus en plus rationnels au fur et à mesure d'une évolution qui fait de la violence un monopole de l'Etat.Conclusion de la réflexion engagée dans "La civilisation des moeurs", ce texte fondamental donne la pleine mesure du talent de Norbert Elias.

La dynamique de l'Occident

Norbert Elias analyse l'évolution de la civilisation occidentale en mettant en parallèle la logique des pulsions individuelles de chacun, et celle de la formation d'un pouvoir étatique et centralisé. Il y voit la clé du développement politique de notre société, qu'il analyse, dans une première partie historique (du Moyen Âge à nos jours), avant de proposer la théorie de ce mouvement, qui conduit les acteurs sociaux à se montrer de plus en plus rationnels au fur et à mesure d'une évolution qui fait de la violence un monopole de l'État.
 Conclusion de la réflexion engagée dans La Civilisation des moeurs, ce texte fondamental donne la pleine mesure du talent de Norbert Elias.

La dynamique de l'occident

À l'heure où les tabous sexuels sont battus en brèche par une société qui veut assumer son humanité, la mort se retire paradoxalement du champ de nos représentations collectives. Abordée au Moyen-Âge comme un événement social, auquel proches et moins proches se devaient de participer, l'agonie apparaît aujourd'hui comme un ultime égarement de solitude. Progrès de la médecine contre recul du sentiment religieux, accroissement de l'espérance de vie contre négation de son dénouement inéluctable, c'est cette contradiction entre une existence à la fois mieux maîtrisée dans son déroulement et de plus en plus insaisissable dans son issue que Norbert Elias nous détaille. Mêlant les approches historiques, psychologiques et philosophiques du dernier voyage, La Solitude des mourants nous invite à regarder en face ces angoisses profondes que l'on peut éluder un moment, mais pas refouler éternellement.

La Solitude des mourants

En 1962, l'Université d'Accra, capitale du Ghana, invite le professeur Norbert Elias.
Il dirigera le département de sociologie durant deux années. Il a 65 ans. Il s'y rend en partie par curiosité et en partie espérant y trouver le temps de poursuivre ses recherches. L'Université est une copie réduite d'Oxford et de Cambridge, dit-il. 
" L'histoire de ce volume commence par la lecture de l'ouvrage Elias par lui-même dans lequel il explique en détail son expérience africaine et les conséquences que ce séjour aura par la suite sur son travail de sociologue.
C'est à cette époque que je pris la décision de retrouver les traces écrites de ce passage. Après de nombreuses recherches infructueuses pour retrouver ces textes, un nombre impressionnant de tapuscrits de Norbert Elias sur l'Afrique fut enfin retrouvé. Le lecteur attentif à l'oeuvre de Norbert Elias reconnaîtra dans ce livre ce retour constant vers les sociétés anciennes. Mais l'abondance de la production indique qu'autour de ces questions liées à l'évolution des sociétés africaines, Elias y retrouve un écho puissant et un renouvellement décisif des travaux qu'il consacra aux sociétés européennes.
" Jean-Bernard Ouédraogo.

Ecrits sur l'art africain

L'oeuvre de Norbert Elias apparaît peu à peu comme essentielle pour comprendre la trajectoire de longue durée de la civilisation occidentale. Elias rédigea les trois essais qui composent cet ouvrage entre l'avant-guerre et 1986, un demi-siècle au cours duquel, toujours attentif aux transformations du monde contemporain, il ne cessa de réfléchir aux rapports de la société et de l'individu.L'idée centrale qu'Elias développe ici est que les individus sont liés les uns aux autres par des liens de dépendance réciproque et que ceux-ci sont comme la matrice constitutive de la société. C'est sous l'effet de cette imbrication que les comportements se sont modifiés au fil des siècles. L'idée moderne de l'individu _ cet idéal du moi qui veut exister par lui-même _ n'est apparue en Occident qu'au terme d'un long processus, qui est indissociable de la domination des forces de la nature par les hommes et de la différenciation progressive des fonctions sociales.L'individu et la société ne sont donc pas deux entités distinctes, et leur rapport ne se pose pas aujourd'hui comme avant la guerre. La dépendance croissante des Etats les uns à l'égard des autres place les hommes dans un processus d'intégration au niveau planétaire. La création des Nations Unies et de la Banque mondiale en a été l'une des premières expressions. Le développement d'une nouvelle éthique universelle et, surtout, les progrès d'une conscience d'appartenance à l'humanité tout entière en sont des signes évidents. Mais nous ne sommes qu'au tout premier stade de ce processus d'intégration. Une chose est certaine: Il ne peut que renforcer l'impuissance de l'individu face à ce qui se déroule au niveau supérieur de l'humanité. ""

La société des individus

Norbert Elias est un écrivain et sociologue britannico-allemand, né le 22 juin 1897 à Breslau et mort le 1er août 1990 à Amsterdam. Il est l'auteur d'un ouvrage majeur de sociologie historique, Sur le processus de civilisation, paru, en France, en deux volumes, La Civilisation des mœurs et La Dynamique de l'Occident.

Je devrais peut-être dire qu'en général, il existe trois solutions à une telle situation. Je veux dire non seulement en Hollande, mais partout où il y a des groupes minoritaires: en Amérique, au Vietnam avec les Chinois. Partout, il y a le même problème. Mais il y a fondamentalement trois, en fait seulement deux solutions possibles. Une solution possible est que la minorité méprisée est en mesure d'établir son propre état ailleurs. L'autre solution est un degré d'assimilation plus élevé ou moindre. Et la troisième possibilité, qui n'est pas du tout une solution, est la permanence de la tension et du conflit au fil du temps.

Les indigènes de l'Angleterre ferment leurs portes aux relations avec les Asiatiques et les Africains ou, d'ailleurs, les Turcs et les Espagnols. Tandis que les Africains et les Asiatiques de leur côté ferment de plus en plus leurs portes et que le ressentiment des deux côtés augmente. Cette tendance peut être dangereuse. Il peut conduire, tôt ou tard, à la violence - même dans ce pays, qui est traditionnellement un adversaire de la violence.

Débattre du concept de race ne signifie pas que je considère en aucune façon cela comme une querelle entre les voisins d'où ils viennent. J'en ai peut-être assez dit quand j'ai dit que l'alternative à l'assimilation est que les groupes d'immigrants forment leur propre État ou disparaissent par manque d'acceptation. Pourquoi devrait-il être moins grave si les querelles et les dissensions sont socialement liées? Après tout, les querelles et les dissensions entre la Russie et l'Amérique ne sont pas non plus raciales. Et pourtant, ils me semblent extrêmement dangereux.

La façon dont on se comporte et se sent en Néerlandais et hollandaise est le résultat d'un long développement. Ce n'est en aucun cas «la manière naturelle» ou «la manière humaine» de se comporter, c'est un code de comportement particulier qui s'est développé au fil des ans. Et ces personnes, les immigrants, proviennent d'un groupe où différentes normes de conduite et de comportement se sont développées. Quels affrontements sont ces deux normes de conduite et de comportement.

Il faut donner aux groupes minoritaires une sorte de récompense, une récompense émotionnelle, qu'il vaut la peine d'assimiler à ce groupe majoritaire particulier. Et si ce groupe majoritaire se tourne vers les yeux ... si un groupe minoritaire n'est pas fier d'assimiler la culture d'un autre groupe, le processus est très difficile.

Bien sûr, vous pouvez reconnaître plus facilement les étrangers car ils ont une couleur de peau différente. Mais prenons par exemple la relation entre la majorité protestante anglo-saxonne blanche en Amérique et les Noirs. Ce qui est important ici, c'est que les Noirs étaient les descendants des esclaves et étaient exclus du pouvoir, tandis que la majorité blanche les maintenait à distance, les a gardés, les a gardés là où ils se trouvent. Si les nègres à l'avenir devenaient assimilés et acquièrent un accès égal au pouvoir, s'il y avait un président noir, beaucoup de ces choses changeraient.

Très souvent, les personnes qui vivent dans un ghetto acceptent une partie de la stigmatisation contre eux. Je mentionne le cas d'une minorité japonaise The Burakumin, qui était un pur japonais en descente, mais qui concernait le sale boulot: travail de cuir, cadavres et d'autres choses. Il y avait une histoire célèbre d'un vieil homme qui a demandé: `` Faites Vous croyez vous-même que vous êtes le même que les Japonais? Et l'étranger a dit: "Je ne sais pas, nous sommes sales." Ce genre de conscience n'a jamais été là dans les environs dans lesquels j'ai vécu. On se sentait toujours comme quelqu'un qui pouvait être fier, étant à la fois allemand et juif.

Les modes de pensée scientifiques ne peuvent pas être développés et deviennent généralement acceptés à moins que les gens ne renoncent à leur tentative primaire, non réflexion et spontanée de comprendre toute leur expérience en termes de but et de signification pour eux-mêmes. Le développement qui a conduit à des connaissances plus adéquates et à un contrôle croissant de la nature a donc été pris en compte à partir d'un aspect, également un développement vers une plus grande maîtrise de soi par les hommes.

Je voudrais vous rappeler que l'assimilation et l'intégration s'appliquent aux classes ouvrières au XIXe siècle, du moins en Grande-Bretagne et en Allemagne. Comme la plupart des groupes étrangers par rapport à l'établissement, les classes ouvrières ont été traitées plus ou moins avec le même type de stigmatisation que les groupes d'immigrants sont traités aujourd'hui.

J'ai touché ici un problème qui est masqué si l'on parle de racisme. Et c'est le fait que les principales différences entre le groupe établi et des étrangers, qui créent la tension et l'irritation, n'est pas la forme du visage ou de la couleur de la peau mais la forme de comportement: quelque chose d'apprentissage. La forme de comportement et de sentiment, de sentiment, est différente dans les groupes d'immigrants de celui des groupes établis, et cela peut donner naissance à une énorme irritation.

L'intégration en Allemagne a été facilitée par le fait que je suis probablement de la troisième génération. J'ai donc subi un processus d'assimilation, des Juifs dans la société allemande. J'ai vécu comme un enfant en Allemagne, le sentiment d'être entouré de personnes dont la majorité avait des sentiments antisémites très forts. Mais il y avait une chose très étrange dans tout le milieu dans lequel je vivais: personne n'a accepté la stigmatisation. C'est assez difficile. Personne, mon père, par exemple, ne le prendrait jamais au sérieux. Il considérerait les antisémites comme des personnes sans éducation.

Le cœur du processus d'assimilation d'absorber les minorités réside dans l'image de soi d'une nation. Il y a, comme vous le savez, de grandes différences par exemple entre l'image de soi des Français et les Anglais. Et les Allemands, conformément à leur histoire plutôt à carreaux, avaient au moins très peu de capacité d'absorber les minorités.

Je vous souhaite toute l'excitation agréable que l'on peut avoir sans blesser les autres et sa propre dignité.

Je pense que non seulement il faut faire des demandes sur le groupe établi, mais il faut également faire des demandes sur le groupe Outsider. Il faut préciser: si vous voulez partir, veuillez le faire. Mais si vous voulez rester ici, un degré d'hébergement aux perspectives néerlandais, les manières néerlandaises et un degré d'identification aux Pays-Bas seront attendues de vous. Il n'y a aucune raison pour qu'il ne puisse pas y avoir de Turcs néerlandais ou de marocains néerlandais. Mais on peut attendre d'eux un certain degré d'identification, un certain changement de leur propre identité sociale.

On pourrait peut-être nommer trois ou quatre professionnels spécialement concernés par la tâche de construire des ponts entre la majorité et la minorité. La construction de pont de ce type nécessite un effort des deux côtés. Ce n'est pas bon si la majorité seule le fait. La question est de savoir s'il y a une réponse, si les personnes de l'autre côté de la rivière souhaitent également essayer de construire un pont.

Lorsque Benjamin Disraeli a parlé des «deux nations» en Grande-Bretagne, il avait parfaitement raison, seules les classes ouvrières n'étaient pas exactement une nation. Mais l'écart dans les normes comportementales et dans les perspectives, et bien sûr dans les niveaux de vie, étaient énormes. Et au fil du temps, du moins dans des pays comme la Grande-Bretagne, les classes ouvrières sont plus ou moins adoptées et se sont assimilées aux normes des classes dites «douces». C'est une assimilation. La classe ouvrière n'a guère pu gouverner, mais ce ne sont plus des étrangers par rapport à l'État comme ils l'étaient auparavant.

Le nombre de ceux qui doivent être assimilés à la majorité n'est pas trop élevé. Il reste petit par rapport au nombre de la majorité. Mais il y a une chose - et c'est la principale raison de cette digression - que les Français et les Britanniques ont en commun: à ce jour, ils ont une immense fierté d'être français, d'être britannique. Le fait que, en attendant, les deux sont descendus un peu sur terre, n'a pas encore affecté leur fierté dans leur propre nationalité et le fait que, si je peux l'exprimer de cette façon, ce sont des sociétés d'admiration mutuelles: à quel point les Britanniques sont bien, comment bien les Français sont.

L'assimilation, une certaine uniformité de conduite, est nécessaire dans un état multipartite. Ce n'est pas seulement une exigence pour la majorité établie; C'est également une exigence pour les minorités elles-mêmes. Parce que, je me répète, une existence du ghetto n'est pas très agréable.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Norbert_Elias

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