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Mère

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Mère

Poésies de la collection mère

    Théodore de Banville

    Théodore de Banville

    @theodoreDeBanville

    À ma mère (1) Madame Élisabeth-Zélie de Banville Ô ma mère, ce sont nos mères Dont les sourires triomphants Bercent nos premières chimères Dans nos premiers berceaux d’enfants. Donc reçois, comme une promesse, Ce livre où coulent de mes vers Tous les espoirs de ma jeunesse, Comme l’eau des lys entr’ouverts ! Reçois ce livre, qui peut-être Sera muet pour l’avenir, Mais où tu verras apparaître Le vague et lointain souvenir De mon enfance dépensée Dans un rêve triste ou moqueur, Fou, car il contient ma pensée, Chaste, car il contient mon cœur. Juillet 1842.

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    A

    Antoine de Latour

    @antoineDeLatour

    A un enfant Laisse en tes yeux si purs et si beaux d'innocence Tristes plonger mes yeux, Car j'ai besoin de voir aux regards de l'enfance Se réfléchir les cieux. L'aspect doux et serein de ta naïve joie Calmera pour un jour Ces orages brûlants qui me livrent en proie Aux tourments de l'amour. Fuis-les ces ouragans, courbe ta blonde tête, Enfant, quand ils viendront ; Car on garde longtemps d'une telle tempête L'empreinte sur le front. Mais si Dieu l'a voulu, jette au cou de ta mère Tes deux bras défaillants ; Une mère a toujours ses bras prêts, quand la terre Manque à nos pas tremblants. Une mère, vois-tu, c'est là l'unique femme Qu'il faille aimer toujours, A qui le ciel ait mis assez d'amour dans l'âme Pour chacun de nos jours. Aux suaves accords de sa voix douce et tendre Endormi mollement, Enfant aimé ta mère, aime-la sans apprendre Que l'on aime autrement. Aimer ! parole triste, insultante ironie Pour qui vit un matin, Mot fatal, et qui n'a d'écho dans cette vie Qu'amertume et dédain ! Oh ! choisir une femme et créer autour d'elle Tout un monde enchanté, Et vouloir seulement pour la faire immortelle Une immortalité ! A ses moindres discours suspendre tout son être, Ému d'un doux espoir, Et mourir tout le jour, hélas ! à se promettre Un sourire, le soir ! Et lorsque ce. regard que le regard mendie On n'a pu l'obtenir, Sentir avec terreur à l'âme anéantie Echapper l'avenir ; A la vie, au bonheur, dans sa douleur farouche, Jeter un morne adieu, Tomber à deux genoux le front contre sa couche Et s'écrier : « Mon Dieu ! « Au lieu de les laisser l'un sur l'autre descendre Si pesants à mon cœur, Mon Dieu ! ne pouvez-vous ensemble les reprendre Tous ces jours de malheur ? » Épuiser ces tourments qu'en ce monde où nous sommes On ne peut exprimer, Lentement en mourir, dans la langue des hommes Cela s'appelle aimer !

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    Théodore de Banville

    Théodore de Banville

    @theodoreDeBanville

    À ma Mère (2) Mère, si peu qu'il soit, l'audacieux rêveur Qui poursuit sa chimère, Toute sa poésie, ô céleste faveur ! Appartient à sa mère. L'artiste, le héros amoureux des dangers Et des luttes fécondes, Et ceux qui, se fiant aux navires légers, S'en vont chercher des mondes, L'apôtre qui parfois peut comme un séraphin Épeler dans la nue, Le savant qui dévoile Isis, et peut enfin L'entrevoir demi-nue, Tous ces hommes sacrés, élus mystérieux Que l'univers écoute, Ont eu dans le passé d'héroïques aïeux Qui leur tracent la route. Mais nous qui pour donner l'impérissable amour Aux âmes étouffées, Devons être ingénus comme à leur premier jour Les antiques Orphées, Nous qui, sans nous lasser, dans nos cœurs même ouvrant Comme une source vive, Devons désaltérer le faible et l'ignorant Pleins d'une foi naïve, Nous qui devons garder sur nos fronts éclatants, Comme de frais dictames, Le sourire immortel et fleuri du printemps Et la douceur des femmes, N'est-ce pas, n'est-ce pas, dis-le, toi qui me vois Rire aux peines amères, Que le souffle attendri qui passe dans nos voix Est celui de nos mères ? Petits, leurs mains calmaient nos plus vives douleurs, Patientes et sûres : Elles nous ont donné des mains comme les leurs Pour toucher aux blessures. Notre mère enchantait notre calme sommeil, Et comme elle, sans trêve, Quand la foule s'endort dans un espoir vermeil, Nous enchantons son rêve. Notre mère berçait d'un refrain triomphant Notre âme alors si belle, Et nous, c'est pour bercer l'homme toujours enfant Que nous chantons comme elle. Tout poète, ébloui par le but solennel Pour lequel il conspire, Est brûlé d'un amour céleste et maternel Pour tout ce qui respire. Et ce martyr, qui porte une blessure au flanc Et qui n'a pas de haines, Doit cette extase immense à celle dont le sang Ruisselle dans ses veines. Ô toi dont les baisers, sublime et pur lien ! À défaut de génie M'ont donné le désir ineffable du bien, Ma mère, sois bénie. Et, puisque celle enfin qui l'a reçu des cieux Et qui n'est jamais lasse, Sait encore se faire un joyau précieux D'un pauvre enfant sans grâce. Va, tu peux te parer de l'objet de tes soins Au gré de ton envie, Car ce peu que je vaux est bien à toi du moins, Ô moitié de ma vie !

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