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Romantique

26 poésies en cours de vérification
Romantique

Poésies de la collection romantique

    A

    Albert Mérat

    @albertMerat

    Les parfums La moisson sent le pain : la terre boulangère Se trahit dans ses lourds épis aux grains roussis, Et caresse au parfum de ses chaumes durcis L'odorat du poète et de la ménagère. La tête dans l'air bleu, les pieds dans la fougère, Les bois sont embaumés d'un arôme indécis. La mer souffle, en mourant sur les rochers noircis, Son haleine salubre et sa vapeur légère. L'Océan, la moisson jaune, les arbres verts, Voilà les bons et grands parfums de l'univers ; Et l'on doute lequel est le parfum suprême. J'oubliais les cheveux, tissu fragile et blond, Qu'on déroule et qu'on fait ruisseler tout du long, Tout du long des reins blancs de la femme qu'on aime.

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    Albert Samain

    Albert Samain

    @albertSamain

    Ton souvenir est comme un livre Ton Souvenir est comme un livre bien aimé, Qu'on lit sans cesse, et qui jamais n'est refermé, Un livre où l'on vit mieux sa vie, et qui vous hante D'un rêve nostalgique, où l'âme se tourmente. Je voudrais, convoitant l'impossible en mes vœux, Enfermer dans un vers l'odeur de tes cheveux ; Ciseler avec l'art patient des orfèvres Une phrase infléchie au contour de tes lèvres ; Emprisonner ce trouble et ces ondes d'émoi Qu'en tombant de ton âme, un mot propage en moi ; Dire quelle mer chante en vagues d'élégie Au golfe de tes seins où je me réfugie ; Dire, oh surtout ! tes yeux doux et tièdes parfois Comme une après-midi d'automne dans les bois ; De l'heure la plus chère enchâsser la relique, Et, sur le piano, tel soir mélancolique, Ressusciter l'écho presque religieux D'un ancien baiser attardé sur tes yeux.

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    Alphonse de Lamartine

    Alphonse de Lamartine

    @alphonseDeLamartine

    Jocelyn, le 16 Décembre 1793 La nuit, quand par hasard je m'éveille, et je pense Que dehors et dedans tout est calme et silence, Et qu'oubliant Laurence, auprès de moi dormant, Mon cœur mal éveillé se croit seul un moment; Si j'entends tout à coup son souffle qui s'exhale, Régulier, de son sein sortir à brise égale, Ce souffle harmonieux d'un enfant endormi! Sur un coude appuyé je me lève à demi, Comme au chevet d'un fils, une mère qui veille ; Cette haleine de paix rassure mon oreille; Je bénis Dieu tout bas de m'avoir accordé Cet ange que je garde et dont je suis gardé; Je sens, aux voluptés dont ces heures sont pleines, Que mon âme respire et vit dans deux haleines; Quelle musique aurait pour moi de tels accords? Je l'écoute longtemps dormir, et me rendors ! De la Grotte, 16 décembre 1793.

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    A

    Amable Tastu

    @amableTastu

    Que je voudrais te voir Que je voudrais te voir, quand la tardive aurore Annonce le réveil de nos derniers beaux jours! Ces derniers jours si doux, bien que déjà si courts, A tes côtés, pour moi, seraient plus doux encore! Que je voudrais te voir! Que je voudrais te voir! Ici le tiède automne Déjà de pourpre et d'or teint les ombrages verts; Quelque feuille séchée en tombe au gré des airs, Et j'écoute en rêvant sa chute monotone... Que je voudrais te voir! Que je voudrais te voir, te voir sourire encore A ces chants imparfaits où se comptait ma voix, Que la tienne si douce embellit quelquefois... Tout nouveau sur ma bouche un autre vient d'éclore: Que je voudrais te voir! Que je voudrais te voir, et, tant que le jour dure, Errer muets tous deux, et, la main dans la main, Le soir sans nous quitter nous redire : A demain! Mais seule je m'endors, et tout bas je murmure: Que je voudrais te voir!

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    A

    Amédée Pommier

    @amedeePommier

    Aux Coquettes Derrière le miroir, ce démon aux aguets, Dans ce discret asile où l'élégance règne, Ces roses, ces bijoux, tout ici vous enseigne A ne pas trop vous plaire aux ornements coquins. Apprenez le danger des colliers, des bouquets. Démêlant vos cheveux, quand, au matin, le peigne Dans leurs longs flots dorés avec amour se baigne, Que, dans l'écrin ouvert, brillent vos affiquets; Que, vous applaudissant du bonheur d'être belles, Vous venez contempler, dans vos glaces fidèles, Les contours serpentins que votre corps décrit; Que, comme un souple jonc, votre taille se cambre, Cherchez bien : vous verrez, dans un coin de la chambre, Quelque diable embusqué qui regarde et qui rit.

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    A

    Amédée Pommier

    @amedeePommier

    Le bonheur de l'obscurité Faux éclat des grandeurs pour lequel on soupire, Opulentes cités, ambitieux palais, Princes, et toi, Fortune, au perfide sourire, J'ai trouvé loin de vous l'innocence et la paix. Exilé de la cour, oublié de l'envie, Dans le sein du silence et de l'oisiveté, Sans désirs, sans douleurs, je vais couler ma vie, Et mon plus cher trésor sera ma pauvreté. Lieux qui m'avez vu naître, aimable solitude, Au moment du retour que vos charmes sont doux! Je pourrai donc enfin, libre d'inquiétude, Goûter des plaisirs purs et simples comme vous. Je reconnais les champs, le clocher, la colline, Tous les premiers objets qui frappèrent mes yeux, Et le chêne isolé dont la tête s'incline Sur le modeste toit qu'habitaient mes aïeux. Séjour du vrai bonheur, retraites pacifiques, Accueillez aujourd'hui le nouveau villageois: C'en est fait, je renonce aux lambris magnifiques Pour le gazon des prés et l'ombrage des bois. Qu'on vante les héros dont le fatal courage S'ouvre un chemin sanglant vers l'immortalité; Refrains des vendangeurs, travaux du labourage, Combien je vous préfère à leur célébrité ! Le vain bruit de la gloire et le faste des villes N'ont pas encore trouble le calme de ces lieux; Les jours y sont sereins, les cœurs y sont tranquilles; En fuyant les pervers, j'ai trouvé les heureux. Toi pour qui je respire, ô maîtresse adorée, Le bocage t'appelle et s'embellit pour toi; Viens partager mes biens, ma chaumière ignorée; Viens vivre loin d'un monde où l'amour est sans foi. Souvent, parmi les fleurs des riantes prairies, Nous irons contempler le déclin d'un beau jour; Souvent, le cœur bercé de douces rêveries, Nous irons parcourir les forêts d'alentour. Ces berceaux odorants, ces dômes de feuillage, Ennemis du soleil et versant la fraîcheur, Les timides désirs que leur ombre encourage, Tout ici nous promet un facile bonheur. Nous pourrons savourer l'aspect de la nature, Dans les bras l'un de l'autre et d'amour consumés; Ces lieux nous prêteront leurs rideaux de verdure, Et leurs sièges de mousse, et leurs lits parfumés. Promenant leur cristal en gracieux méandres, Les limpides ruisseaux couleront près de nous ; Je chanterai pour toi : mes vers, seront plus tendres, Dictés par tes regards, écrits sur tes genoux! Hélas ! Bientôt peut-être, abrégeant ma carrière, L'inexorable mort viendra nous séparer; Les pavots du cercueil couvriront ma paupière ; Je sentirai ma vie et ma flamme expirer. A cette heure suprême, ô ma chère Zélie! Tu seras près de moi pour calmer mes douleurs; Je presserai ta main de ma main affaiblie, Et mon dernier regard verra couler tes pleurs. Mes vœux seront remplis, si ton cœur me regrette, Si celle que les dieux firent pour tout charmer Vient rêver quelquefois sur la cendre muette D'un mortel inconnu qui vécut pour t'aimer!

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    A

    Amédée Pommier

    @amedeePommier

    À une jolie femme Savez-vous bien, Madame, à quel risque on s'expose En acceptant des vers d'indiscrets tels que moi? C'est une occasion de parler, et, ma foi, Je dis ce que je pense et permets qu'on en glose. Un poète ose tout. — Si j'allais (je suppose) Vous proclamer déesse et préciser pourquoi; Dire que votre taille et tout ce que je vois Me font imaginer mainte autre belle chose; Que l'épaule si pure et le bras et le sein, Dont mon regard furtif a surpris le dessin, Sont dignes de Vénus par leur délicatesse; Que vous m'avez fait croire à la réalité De ce qu'en marbre blanc sculpta l'antiquité; Si je disais cela, qu'en d'iriez-vous, comtesse?

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    C

    Charles Guérin

    @charlesGuerin

    Au bout du chemin Au bout du chemin Le soleil se couche ; Donne-moi ta main, Donne-moi ta bouche. Comme un cœur sans foi Cette source est noire ; J'ai soif, donne-moi Tes larmes à boire. Ô chute du jour ! Des angélus sonnent ; Donne-moi l'amour Dont tes seins frissonnent. La route descend, Blanc ruban de lieues, Le dernier versant Des collines bleues. Arrêtons-nous ; vois, Là-bas, ce feuillage Où fument des toits, Où rêve un village : C'est là que je veux Dormir sous les portes, Parmi tes cheveux Pleins de feuilles mortes.

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    E.E. Cummings

    E.E. Cummings

    @eeCummings

    J’ai toujours ton cœur avec moi J’ai toujours ton cœur avec moi Je le garde dans mon cœur Sans lui, jamais je ne suis Là où je vais, tu vas ma chère Et tout ce que je fais par moi-même, Est ton fait, ma chérie. Je ne crains pas le destin Car tu es à jamais le mien, ma douce. Je ne veux pas d’autre monde Car, ma magnifique, Tu es mon monde, en vrai. C’est le secret profond que nul ne connaît. C’est la racine de la racine, Le bourgeon du bourgeon Et le ciel du ciel d’un arbre appelé Vie Qui croît plus haut que l’âme ne saurait l’espérer Ou l’esprit le cacher. C’est la merveille qui maintient les étoiles éparses. Je garde ton cœur, je l’ai dans mon cœur.

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    Fernando Pessoa

    Fernando Pessoa

    @fernandoPessoa

    L’amour est une compagnie L’amour est une compagnie. Je ne peux plus aller seul par les chemins, parce que je ne peux plus aller seul nulle part. Une pensée visible fait que je vais plus vite. et que je vois bien moins, tout en me donnant envie de tout voir. Il n’est jusqu’à son absence qui ne me tienne compagnie. Et je l’aime tant que je ne sais comment la désirer. Si je ne la vois pas, je l’imagine et je suis fort comme les arbres hauts. Mais si je la vois je tremble, et je ne sais de quoi se compose ce que j’éprouve en son absence. Je suis tout entier une force qui m’abandonne. Toute la réalité me regarde ainsi qu’un tournesol dont le coeur serait son visage.

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    François Coppée

    François Coppée

    @francoisCoppee

    Marie-Bleue En vain je cherche un mot charmant qui vous désigne, Un mot qui réunisse en sa simplicité Votre blanche jeunesse et votre pureté ; Aucun ne me contente et ne m'en semble digne. Il en est de bien doux pourtant qui me font signe, Des mots resplendissants de candide beauté ; C'est la neige d'hiver, c'est le Paros vanté, Et l'hostie, et l'ivoire, et le lys, et le cygne. Mais j'exprimerais mal, en un mot comme en cent, Cette grâce ingénue et ce charme innocent Qui vous font à mes yeux si touchante et si belle, Et ne trouverais rien de plus essentiel Que ce nom qui vous sied si bien et qui rappelle L'image de la Vierge et la couleur du ciel.

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    F

    François-Marie Robert Dutertre

    @francoisMarieRobertDutertre

    L'âme rêvée Il est une âme enfin que comprend et devine Mon âme ranimée, échappant aux ennuis ; Car mes regards ont vu cette femme divine Que j'avais tant rêvée en mes plus belles nuits. Petits oiseaux, venez près d'elle Et par vos chants et vos baisers, Par vos doux frémissements d'aile Et vos désirs inapaisés, Petits oiseaux, couple fidèle, Portez le trouble en ses pensers. Ses yeux purs et charmants ont un éclat si tendre Et sa voix pénétrante a des accents si doux, Que les anges du ciel, pour la voir et l'entendre, Descendent empressés et remontent jaloux. Étoile qui fuis dans l'espace, Si tu la surprends quelque soir, Plus rêveuse suivant ta trace De son œil langoureux et noir, Dis-lui que je l'aime, et de grâce Pour moi demande un peu d'espoir. Pour avoir contemplé sa pâleur éclatante Mon front en gardera le reflet désormais ; Et pourtant je sais bien, languissant dans l'attente, Que son cœur tout à Dieu ne m'aimera jamais. Ô cher objet de mon envie, Au nom si doux à révéler Qu'il est sur ma bouche ravie Sans cesse prêt à s'envoler, Je me tairai toute ma vie, Mais laisse mes yeux te parler.

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    F

    François-Marie Robert Dutertre

    @francoisMarieRobertDutertre

    Sarah la marinière A Venise, un grand seigneur A Sarah la marinière Offrit, pour toucher son cœur, Une fortune princière ; Mais en vain il soupira... J'aime mieux, lui dit la belle, Mes filets et ma nacelle ; Non, vous n'aurez pas Sarah. D'Égypte, le vice roi En passant dans sa tartane Lui dit un jour : Sois à moi ! Je te ferai ma sultane ; Mais en vain il soupira... Non, dit Sarah, je préfère Rester simple marinière ; Non, vous n'aurez pas Sarah. Un jeune prélat romain Allant en pèlerinage, La trouva sur son chemin Et la prit par le corsage ; Mais en vain il soupira... Non, Monseigneur, je suis sage, Portez ailleurs votre hommage ; Non, vous n'aurez pas Sarah. Mais un jour, un gondolier Prit une fleur printannière, Puis en galant cavalier L'offrit à la marinière ; Elle à son tour soupira... Et l'on vit au clair de lune S'embarquer sur la lagune Le gondolier et Sarah.

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    A

    Alexis-Félix Arvers

    @alexisFelixArvers

    Un secret Mon âme a son secret, ma vie a son mystère, Un amour éternel en un moment conçu : Le mal est sans espoir, aussi j'ai dû le taire, Et celle qui l'a fait n'en a jamais rien su. Hélas ! j'aurai passé près d'elle inaperçu, Toujours à ses côtés, et pourtant solitaire. Et j'aurai jusqu'au bout fait mon temps sur la terre, N'osant rien demander et n'ayant rien reçu. Pour elle, quoique Dieu l'ait faite douce et tendre, Elle suit son chemin, distraite et sans entendre Ce murmure d'amour élevé sur ses pas. À l'austère devoir, pieusement fidèle, Elle dira, lisant ces vers tout remplis d'elle 'Quelle est donc cette femme?' et ne comprendra pas.

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    G

    Gaspard Hons

    @gaspardHons

    Celui qui aime Celui qui aime volets clos pierre du pays ce langage que ceux-là ne parlent pas – ne parlent jamais ils disent volets pierres pays, en murmurant mais se comprennent – comprennent abeille cendre gel vol d’oiseaux cloche du soir du labeur cloche brisée le petit garçon est mort, le vieux s’en va la vie : continue le champ attend celui qui aime parle à voix basse : ciel gris nuit de veille fuite grive lièvre et fougère cachent celui et forêt et rivière. Ils se comprennent celui est roi en terre royaume étrange étranger ne cherche pas : derrière chaque crête une vie de broussailles un rythme de vie pour celui qui aime (celui qui aime)

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    J

    Joseph Autran

    @josephAutran

    Nuit de Mai Au couchant lumineux quand le jour se replie, Qu'une planète au ciel déjà peut s'entrevoir, Il fait bon, couple errant sur une onde assouplie, De respirer à deux l'air embaumé du soir, De saluer là-haut ces premières étoiles Dont le rayon lointain nous invite à rêver: Matelot ! Matelot ! Laisse tomber tes voiles; Notre rêve est si doux que je veux l'achever! Extase où, sans effort, tout chagrin se dissipe! Du ciel et de la mer contempler les couleurs, Aspirer dans le vent, qui vient du Pausilippe, Le parfum des citrons et des lauriers en fleurs; Sentir si près de soi la femme qu'on adore, Voir son sein par moment d'amour se soulever! Matelot, matelot, ne rentrons pas encore; Notre rêve est si doux que je veux l'achever! Ses cheveux dénoués que l'ivoire abandonne, Mêlés à mes cheveux, flottent au même vent; Son front penche ; ses doigts, de fée ou de Madone, Frémissent dans ma main sous mon baiser fervent. Loin des jaloux déçus, loin des perfides trames, Le bonheur est ici pour qui sait le trouver: Matelot, matelot, laisse pendre tes rames; Notre rêve est si doux que je veux l'achever!

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    K

    Khalil Gibran

    @khalilGibran

    De l'amour Alors al-Mitra dit : Parle-nous de l'Amour. Il leva la tête et regarda la foule sur laquelle un grand silence s'était abattu. D'une voix assurée, il dit: Quand l'amour vous fait signe, suivez-le, Bien que ses chemins soient raides et ardus. Et quand il vous enveloppe de ses ailes, cédez-lui, Même si l'épée cachée dans ses pennes vous blesse, Et quand il vous parle, croyez en lui, Même si sa voix brise vos rêves comme le vent du nord dévastant un jardin. Car si l'amour vous couronne, il vous crucifie aussi. Et s'il est pour votre croissance, il est aussi pour votre élagage. De même qu'il s'élève à votre hauteur pour caresser vos plus tendres branches frémissant dans le soleil, Il descend jusqu'à vos racines et les secoue de leur adhérence à la terre. Telles des gerbes de blé, il vous ramasse et vous serre contre lui. Il vous vanne pour vous dénuder. Il vous tamise pour vous libérer de votre enveloppe. Il vous pile jusqu'à la blancheur. Il vous pétrit jusqu'à vous rendre malléables; Puis il vous assigne à son feu sacré afin que vous deveniez pain sacré au festin sacré de Dieu. Tout cela, l'amour vous le fait subir afin que vous connaissiez les secrets de votre coeur et, au travers de cette connaissance, deveniez fragment du coeur de la Vie. Mais si, pusillanimes, vous ne recherchiez que la paix de l'amour et sa volupté, Mieux vaudrait pour vous couvrir votre nudité et sortir de l'aire de l'amour, Pour pénétrer dans le monde sans saisons en lequel vous rirez, mais pas de tout votre rire, et pleurerez, mais pas de toutes vos larmes. L'amour ne donne que de lui même et ne prend que de lui-même. L'amour ne possède pas et ne saurait être possédé. Car l'amour suffit à l'amour. Lorsque vous aimez, vous ne devriez pas dire : "Dieu est dans mon coeur", mais plutôt: "Je suis dans le coeur de Dieu." Et ne croyez pas qu'il vous appartienne de diriger le cours de l'amour, car c'est l'amour, s'il vous en juge dignes, qui dirigera le vôtre. L'amour n'a d'autre désir que de s'accomplir. Mais si vous aimez et ne pouvez échapper aux désirs, qu'ils soient ceux-ci: Vous dissoudre et être comme l'eau vive d'un ruisseau chantant sa melopée à la nuit, Connaître la douleur d'une tendresse excessive, Recevoir la blessure de votre conception de l'amour, Perdre votre sang volontiers et avec joie, Vous réveiller aux aurores, le coeur ailé, et rendre grâces pour une nouvelle journée d'amour, Vous reposer à l'heure du méridien et méditer l'extase de l'amour, Revenir à votre foyer le soir, avec gratitude, Puis vous endormir avec au coeur une prière pour l'être aimé et sur vos lèvres un chant de louange.

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    Paul Verlaine

    Paul Verlaine

    @paulVerlaine

    Compagne savoureuse et bonne Compagne savoureuse et bonne À qui j'ai confié le soin Définitif de ma personne, Toi mon dernier, mon seul témoin, Viens çà, chère, que je te baise, Que je t'embrasse long et fort, Mon coeur près de ton coeur bat d'aise Et d'amour pour jusqu'à la mort : Aime-moi, Car, sans toi, Rien ne puis, Rien ne suis. Je vais gueux comme un rat d'église Et toi tu n'as que tes dix doigts ; La table n'est pas souvent mise Dans nos sous-sols et sous nos toits ; Mais jamais notre lit ne chôme, Toujours joyeux, toujours fêté Et j'y suis le roi du royaume De ta gaîté, de ta santé ! Aime-moi, Car, sans toi, Rien ne puis, Rien ne suis. Après nos nuits d'amour robuste Je sors de tes bras mieux trempé, Ta riche caresse est la juste, Sans rien de ma chair de trompé, Ton amour répand la vaillance Dans tout mon être, comme un vin, Et, seule, tu sais la science De me gonfler un coeur divin. Aime-moi, Car, sans toi, Rien ne puis, Rien ne suis. Qu'importe ton passé, ma belle, Et qu'importe, parbleu ! le mien : Je t'aime d'un amour fidèle Et tu ne m'as fait que du bien. Unissons dans nos deux misères Le pardon qu'on nous refusait Et je t'étreins et tu me serres Et zut au monde qui jasait ! Aime-moi, Car, sans toi, Rien ne puis, Rien ne suis.

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    Philippe Soupault

    Philippe Soupault

    @philippeSoupault

    Est-ce le soleil qui se couche… ? Est-ce le soleil qui se couche Est-ce le sommeil Est-ce moi Je ferme les yeux simplement pour mieux voir mon pays mon royaume Il n'y a plus rien autour de moi mon pays du sommeil que je découvre à tâtons la reine a les yeux d'un vert spécial presque tendre il y a toujours de belles forêts qui bercent le silence Je vois de grands chemins très blancs comme les lignes de la main Rien ne sert de pleurer les larmes éternelles sont des étincelles qui brillent et qui creusent les yeux d'un vert spécial presque tendre Toutes les fumées du ciel Et tous les grains de sable se ressemblent et je dors tout près du soleil ma bouche repose près d'un fleuve qui va chantant les louanges des femmes de ma race celles qui le soir oublient leurs cheveux blancs et qui laissent mourir leurs amants en s'endormant Le rire comme un paquebot s'éloigne du royaume où naissent les étoiles où les arbres hautains sont des prières Le rire qui fait mal et qui fait mal et qui console le rire de Dieu Le sommeil est couché à mes pieds Et je me lève pour le regarder les yeux d'une reine qui sont verts simplement comme la mer où elle est née et son royaume s'étend sur toute la terre et sur toutes les années.

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    Sully Prudhomme

    Sully Prudhomme

    @sullyPrudhomme

    Au bord de l'eau S'asseoir tous deux au bord d'un flot qui passe, Le voir passer ; Tous deux, s'il glisse un nuage en l'espace, Le voir glisser ; À l'horizon, s'il fume un toit de chaume, Le voir fumer ; Aux alentours, si quelque fleur embaume, S'en embaumer ; Si quelque fruit, où les abeilles goûtent, Tente, y goûter ; Si quelque oiseau, dans les bois qui l'écoutent, Chante, écouter... Entendre au pied du saule où l'eau murmure L'eau murmurer ; Ne pas sentir, tant que ce rêve dure, Le temps durer ; Mais n'apportant de passion profonde Qu'à s'adorer ; Sans nul souci des querelles du monde, Les ignorer ; Et seuls, heureux devant tout ce qui lasse, Sans se lasser, Sentir l'amour, devant tout ce qui passe, Ne point passer !

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    Rosemonde Gerard

    Rosemonde Gerard

    @rosemondeGerard

    Pourquoi je t’aime Pourquoi je t’aime? Hélas! mon cœur Voudrait comprendre son délire: C’est peut-être à cause d’un pleur? Peut-être à cause d’un sourire? C’est peut-être pour un espoir Ou peut-être pour une lettre? Ou peut-être parce qu’un soir Nous avions ouvert la fenêtre?… Pourquoi je t’aime? Hélas! il faut Voir un peu clair dans ce qu’on pense: C’est peut-être à cause d’un mot? Peut-être à cause d’un silence? C’est peut-être par désespoir Ou par lassitude morose? Ou peut-être parce qu’un soir Tu m’avais apporté des roses?… Pourquoi je t’aime? Hélas! sans fin Je redis cette phrase brève: C’est peut-être à cause d’un rien? Peut-être à cause d’un rêve? C’est peut-être pour ton amour Qui sent l’étoile et la verveine? Ou peut-être parce qu’un jour Tu me feras beaucoup de peine?…

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    Sylvia Plath

    Sylvia Plath

    @sylviaPlath

    Lettre d’amour Pas facile de formuler ce que tu as changé pour moi Si je suis en vie maintenant, j’étais morte alors, Bien que, comme une pierre, sans que cela ne m’inquiète, Et je restais là sans bouger selon mon habitude. Tu ne m’as pas simplement un peu poussée du pied, non – Ni même laissée régler mon petit œil nu A nouveau vers le ciel, sans espoir, évidemment, De pouvoir appréhender le bleu, ou les étoiles. Ce n’était pas cà. Je dormais, disons : un serpent Masqué parmi les roches noires telle une roche noire Se trouvant au milieu du hiatus blanc de l’hiver – Tout comme mes voisines, ne prenant aucun plaisir A ce million de joues parfaitement ciselées Qui se posaient à tout moment afin d’attendrir Ma joue de basalte. Et elles se transformaient en larmes, Anges versant des pleurs sur des natures sans relief, Mais je n’étais pas convaincue. Ces larmes gelaient. Chaque tête morte avait une visière de glace. Et je continuais de dormir, repliée sur moi-même. La première chose que j’ai vue n’était que de l’air Et ces gouttes prisonnières qui montaient en rosée, Limpides comme des esprits. Il y avait alentour Beaucoup de pierres compactes et sans aucune expression. Je ne savais pas du tout quoi penser de cela. Je brillais, recouverte d’écailles de mica, Me déroulais pour me déverser tel un fluide Parmi les pattes d’oiseau et les tiges des plantes. Je ne me suis pas trompée. Je t’ai reconnue aussitôt. L’arbre et la pierre scintillaient, ils n’avaient plus d’ombres. Je me suis déployée, étincelant comme du verre. J’ai commencé de bourgeonner tel un rameau de mars : Un bras et puis une jambe, un bras et encore une jambe. De la pierre au nuage, ainsi je me suis élevée. Maintenant je ressemble à une sorte de dieu Je flotte à travers l’air, mon âme pour vêtement, Aussi pure qu’un pain de glace. C’est un don.

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    T

    Ted Hughes

    @tedHughes

    Chanson d'amour Il l’aimait elle l’aimait Il suçait de ses baisers tout son passé son futur du moins l’essayait-il Il n’avait d’appétit que pour elle Elle le mordait le rongeait le suçait Elle le voulait intégralement en elle Bien à l’abri au chaud à jamais pour toujours Leurs cris voltigeaient petits oiseaux dans les rideaux Ses yeux à elle n’avaient besoin d’aucune distraction Elle lui clouait mains poignets coudes avec ses regards Lui l’agrippait très fort pour que la vie Ne la sépare pas de l’instant Il voulait que le futur cesse Il voulait basculer, bras lui entourant la taille, Depuis le bord même de l’instant, tomber avec elle au néant, Dans l’infini ou autre chose qui existât Elle avait l’étreinte pareille à une immense presse A l’imprimer en elle Lui, sourires pareils aux mansardes d’un château de fée Où le monde réel n’entrait jamais Elle, sourires comme morsures d’araignée Qui le paralysaient jusqu’à ce qu’elle ait faim Ses mots à lui étaient armés d’occupation Ses rires à elle, tentatives d’assassinat Lui ses regards, balles et dagues de vengeance Elle ses regards, fantômes dans les coins avec d’horribles secrets Lui ses murmures, fouets et bottes militaires, Elle ses baisers, juristes écrivant sans interruption, Lui ses caresses, hameçons ultimes du naufragé Elle ses ruses d’amour, grincements de serrures Leurs cris à tous les deux se traînaient sur les parquets Comme animal tirant derrière lui un grand piège Ses promesses à lui étaient bâillons de chirurgien Ses promesses à elle lui décalottaient le crâne Elle en faisait une broche De ses serments il lui arrachait tous ses muscles à elle Il lui montrait comment faire un noeud d’amour De ses serments elle plongeait ses yeux dans le formol Tout au fond d’un tiroir secret Leurs hurlements collaient aux murs Leurs têtes tombaient séparément dans le sommeil comme deux moitiés D’un melon tranché, mais l’amour ne s’arrête pas facilement Dans le pêle-mêle de leur sommeil ils s’échangeaient bras et jambes Leurs cerveaux se prenaient l’un l’autre en otage dans leurs rêves Au matin chacun arborait le visage de l’autre.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Au bois Nous étions, elle et moi, dans cet avril charmant De l'amour qui commence en éblouissement. Ô souvenirs ! ô temps ! heures évanouies ! Nous allions, le coeur plein d'extases inouïes, Ensemble dans les bois, et la main dans la main. Pour prendre le sentier nous quittions le chemin, Nous quittions le sentier pour marcher dans les herbes. Le ciel resplendissait dans ses regards superbes ; Elle disait : Je t'aime ! et je me sentais dieu. Parfois, près d'une source, on s'asseyait un peu. Que de fois j'ai montré sa gorge aux branches d'arbre ! Rougissante et pareille aux naïades de marbre, Tu baignais tes pieds nus et blancs comme le lait. Puis nous nous en allions rêveurs. Il me semblait, En regardant autour de nous les pâquerettes, Les boutons-d'or joyeux, les pervenches secrètes Et les frais liserons d'une eau pure arrosés, Que ces petites fleurs étaient tous les baisers Tombés dans le trajet de ma bouche à ta bouche Pendant que nous marchions ; et la grotte farouche Et la ronce sauvage et le roc chauve et noir, Envieux, murmuraient : Que va dire ce soir Diane aux chastes yeux, la déesse étoilée, En voyant toute l'herbe au fond du bois foulée ?

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    À Jeanne Ces lieux sont purs; tu les complètes. Ce bois, loin des sentiers battus, Semble avoir fait des violettes, Jeanne, avec toutes tes vertus. L'aurore ressemble à ton âge; Jeanne, il existe sous les cieux On ne sait quel doux voisinage Des bons coeurs avec les beaux lieux. Tout ce vallon est une fête Qui t'offre son humble bonheur; C'est un nimbe autour de ta tête; C'est un éden en ton honneur. Tout ce qui t'approche désire Se faire regarder par toi, Sachant que ta chanson, ton rire, Et ton front, sont de bonne foi. Ô Jeanne, ta douceur est telle Qu'en errant dans ces bois bénis, Elle fait dresser devant elle Les petites têtes des nids.

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    William Blake

    William Blake

    @williamBlake

    Le jardin de l’amour Je suis allé au jardin de l’amour Et j’y ai vu ce que je n’avais jamais vu: Une chapelle était construite au milieu, Là où je jouais autrefois sur l’herbe. Les portes de la chapelle étaient fermées Et « tu ne dois pas » était écrit sur la porte. Alors, je me tournai vers le jardin de l’amour D’où naissaient tant de jolies fleurs. Et je vis qu’il était envahi de sépultures Et de tombeaux là où il devrait y avoir des fleurs. Et que des prêtres en soutane noire y faisaient leur ronde, Enchaînant avec des ronces mes joies et mes désirs.

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