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Esotérisme

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Esotérisme

Poésies de la collection esotérisme

    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Bénédiction Lorsque, par un décret des puissances suprêmes, Le Poète apparaît en ce monde ennuyé, Sa mère épouvantée et pleine de blasphèmes Crispe ses poings vers Dieu, qui la prend en pitié : –  » Ah ! Que n’ai-je mis bas tout un nœud de vipères, Plutôt que de nourrir cette dérision ! Maudite soit la nuit aux plaisirs éphémères Où mon ventre a conçu mon expiation ! Puisque tu m’as choisie entre toutes les femmes Pour être le dégoût de mon triste mari, Et que je ne puis pas rejeter dans les flammes, Comme un billet d’amour, ce monstre rabougri, Je ferai rejaillir ta haine qui m’accable Sur l’instrument maudit de tes méchancetés, Et je tordrai si bien cet arbre misérable, Qu’il ne pourra pousser ses boutons empestés !  » Elle ravale ainsi l’écume de sa haine, Et, ne comprenant pas les dessins éternels, Elle-même prépare au fond de la Géhenne Les buchers consacrés aux crimes maternels. Pourtant, sous la tutelle invisible d’un Ange, L’Enfant déshérité s’enivre de soleil, Et dans tout ce qu’il boit et dans tout ce qu’il mange Retrouve l’ambroisie et le nectar vermeil. Il joue avec le vent, cause avec le nuage, Et s’enivre en chantant du chemin de la croix; Et l’esprit qui le suit dans son pèlerinage Pleure de le voir gai comme un oiseau des bois. Tous ceux qu’il veut aimer l’observent avec crainte, Ou bien, s’enhardissant de sa tranquillité, Cherchent à qui saura lui tirer une plainte, Et font sur lui l’essai de leur férocité. Dans le pain et le vin destinés à sa bouche Ils mêlent de la cendre avec d’impurs crachats; Avec hypocrisie ils jettent ce qu’il touche, Et s’accusent d’avoir mis leurs pieds dans ses pas. Sa femme va criant sur les places publiques :  » Puisqu’il me trouve assez belle pour m’adorer, Je ferai le métier des idoles antiques, Et comme elles je veux me faire redorer; Et je me soûlerai de nard, d’encens, de myrrhe, De génuflexions, de viandes et de vins, Pour savoir si je puis dans un cœur qui m’admire Usurper en riant les hommages divins ! Et, quand je m’ennuierai de ces farces impies, Je poserai sur lui ma frêle et forte main; Et mes ongles, pareils aux ongles des harpies, Sauront jusqu’à son cœur se frayer un chemin. Comme un tout jeune oiseau qui tremble et qui palpite, J’arracherai ce cœur tout rouge de son sein, Et, pour rassasier ma bête favorite, Je le lui jetterai par terre avec dédain !  » Vers le Ciel, où son œil voit un trône splendide, Le Poète serein lève ses bras pieux, Et les vaste éclairs de son esprit lucide Lui dérobent l’aspect des peuples furieux :  » Soyez béni, mon Dieu, qui donnez la souffrance Comme un divin remède à nos impuretés Et comme la meilleure et la plus pure essence Qui prépare les forts aux saintes voluptés ! Je sais que vous gardez une place au Poète Dans les rangs bienheureux des saintes Légions, Et que vous l’invitez à l’éternelle fête Des Trônes, des vertus, des Dominations. Je sais que la douleur est la noblesse unique Où ne mordront jamais la terre et les enfers, Et qu’il faut pour tresser ma couronne mystique Imposer tous les temps et tous les univers. Mais les bijoux perdus de l’antique Palmyre, Les métaux inconnus, les perles de la mer, Par votre main montés, ne pourraient pas suffire A ce beau diadème éblouissant et clair; Car il ne sera fait que de pure lumière, Puisée au foyer saint des rayons primitifs, Et dont les yeux mortels, dans leur splendeur entière, ne sont que des miroirs obscurcis et plaintifs !  »

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    Tristesse J'ai perdu ma force et ma vie, Et mes amis et ma gaieté ; J'ai perdu jusqu'à la fierté Qui faisait croire à mon génie. Quand j'ai connu la Vérité, J'ai cru que c'était une amie ; Quand je l'ai comprise et sentie, J'en étais déjà dégoûté. Et pourtant elle est éternelle, Et ceux qui se sont passés d'elle Ici-bas ont tout ignoré. Dieu parle, il faut qu'on lui réponde. Le seul bien qui me reste au monde Est d'avoir quelquefois pleuré.

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    Alfred de Vigny

    Alfred de Vigny

    @alfredDeVigny

    La colère de samson Le désert est muet, la tente est solitaire. Quel pasteur courageux la dressa sur la terre Du sable et des lions ? — La nuit n’a pas calmé La fournaise du jour dont l’air est enflammé. Un vent léger s’élève à l’horizon et ride Les flots de la poussière ainsi qu’un lac limpide. Le lin blanc de la tente est bercé mollement ; L’œuf d’autruche, allumé, veille paisiblement, Des voyageurs voilés intérieure étoile, Et jette longuement deux ombres sur la toile. L’une est grande et superbe, et l’autre est à ses pieds : C’est Dalila, l’esclave, et ses bras sont liés Aux genoux réunis du maître jeune et grave Dont la force divine obéit à l’esclave. Comme un doux léopard elle est souple et répand Ses cheveux dénoués aux pieds de son amant. Ses grands yeux, entr’ouverts comme s’ouvre l’amande, Sont brûlants du plaisir que son regard demande, Et jettent, par éclats, leurs mobiles lueurs. Ses bras fins tout mouillés de tièdes sueurs, Ses pieds voluptueux qui sont croisés sous elle, Ses flancs, plus élancés que ceux de la gazelle, Pressés de bracelets, d’anneaux, de boucles d’or, Sont bruns, et, comme il sied aux filles de Hatsor, Ses deux seins, tout chargés d’amulettes anciennes, Sont chastement pressés d’étoffes syriennes. Les genoux de Samson fortement sont unis Comme les deux genoux du colosse Anubis. Elle s’endort sans force et riante et bercée Par la puissante main sous sa tête placée. Lui, murmure le chant funèbre et douloureux Prononcé dans la gorge avec des mots hébreux. Elle ne comprend pas la parole étrangère, Mais le chant verse un somme en sa tête légère. « Une lutte éternelle en tout temps, en tout lieu, Se livre sur la terre, en présence de Dieu, Entre la bonté d’Homme et la ruse de Femme. Car la Femme est un être impur de corps et d’âme. L’Homme a toujours besoin de caresse et d’amour, Sa mère l’en abreuve alors qu’il vient au jour, Et ce bras le premier l’engourdit, le balance Et lui donne un désir d’amour et d’indolence. Troublé dans l’action, troublé dans le dessein, Il rêvera partout à la chaleur du sein, Aux chansons de la nuit, aux baisers de l’aurore, À la lèvre de feu que sa lèvre dévore, Aux cheveux dénoués qui roulent sur son front, Et les regrets du lit, en marchant, le suivront. Il ira dans la ville, et, là, les vierges folles Le prendront dans leurs lacs aux premières paroles. Plus fort il sera né, mieux il sera vaincu, Car plus le fleuve est grand et plus il est ému. Quand le combat que Dieu fit pour la créature Et contre son semblable et contre la nature Force l’Homme à chercher un sein où reposer, Quand ses yeux sont en pleurs, il lui faut un baiser. Mais il n’a pas encor fini toute sa tâche. Vient un autre combat plus secret, traître et lâche ; Sous son bras, sous son cœur se livre celui-là, Et, plus ou moins, la Femme est toujours Dalila. Elle rit et triomphe, en sa froideur savante, Au milieu de ses sœurs elle attend et se vante De ne rien éprouver des atteintes du feu. À sa plus belle amie elle en a fait l’aveu : « Elle se fait aimer sans aimer elle-même ; « Un Maître lui fait peur. C’est le plaisir qu’elle aime, « L’Homme est rude et le prend sans savoir le donner. « Un sacrifice illustre et fait pour étonner « Rehausse mieux que l’or, aux yeux de ses pareilles, « La beauté qui produit tant d’étranges merveilles « Et d’un sang précieux sait arroser ses pas. » — Donc ce que j’ai voulu, Seigneur, n’existe pas ! — Celle à qui va l’amour et de qui vient la vie, Celle-là, par orgueil, se fait notre ennemie. La Femme est, à présent, pire que dans ces temps Où, voyant les humains, Dieu dit : « Je me repens ! » Bientôt, se retirant dans un hideux royaume, La Femme aura Gomorrhe et l’Homme aura Sodome ; Et se jetant, de loin, un regard irrité, Les deux sexes mourront chacun de son côté. Éternel ! Dieu des forts ! vous savez que mon âme N’avait pour aliment que l’amour d’une femme, Puisant dans l’amour seul plus de sainte vigueur Que mes cheveux divins n’en donnaient à mon cœur. — Jugez-nous. — La voilà sur mes pieds endormie. Trois fois elle a vendu mes secrets et ma vie, Et trois fois a versé des pleurs fallacieux Qui n’ont pu me cacher la rage de ses yeux ; Honteuse qu’elle était, plus encor qu’étonnée, De se voir découverte ensemble et pardonnée ; Car la bonté de l’Homme est forte, et sa douceur Écrase, en l’absolvant, l’être faible et menteur. Mais enfin je suis las. J’ai l’âme si pesante, Que mon corps gigantesque et ma tête puissante Qui soutiennent le poids des colonnes d’airain Ne la peuvent porter avec tout son chagrin. Toujours voir serpenter la vipère dorée Qui se traîne en sa fange et s’y croit ignorée ; Toujours ce compagnon dont le cœur n’est pas sûr, La Femme, enfant malade et douze fois impur ! Toujours mettre sa force à garder sa colère Dans son cœur offensé, comme en un sanctuaire D’où le feu s’échappant irait tout dévorer. Interdire à ses yeux de voir ou de pleurer, C’est trop ! Dieu, s’il le veut, peut balayer ma cendre. J’ai donné mon secret, Dalila va le vendre. Qu’ils seront beaux, les pieds de celui qui viendra Pour m’annoncer la mort ! — Ce qui sera, sera ! » Il dit et s’endormit près d’elle jusqu’à l’heure Où les guerriers tremblants d’être dans sa demeure, Payant au poids de l’or chacun de ses cheveux, Attachèrent ses mains et brûlèrent ses yeux, Le traînèrent sanglant et chargé d’une chaîne Que douze grands taureaux ne tiraient qu’avec peine, La placèrent debout, silencieusement, Devant Dagon, leur Dieu, qui gémit sourdement Et deux fois, en tournant, recula sur sa base Et fit pâlir deux fois ses prêtres en extase ; Allumèrent l’encens ; dressèrent un festin Dont le bruit s’entendait du mont le plus lointain ; Et près de la génisse aux pieds du Dieu tuée Placèrent Dalila, pâle prostituée, Couronnée, adorée et reine du repas, Mais tremblante et disant : Il ne me verra pas ! – Terre et ciel ! avez-vous tressailli d’allégresse Lorsque vous avez vu la menteuse maîtresse Suivie d’un œil hagard les yeux tachés de sang Qui cherchaient le soleil d’un regard impuissant ? Et quand enfin Samson, secouant les colonnes Qui faisaient le soutien des immenses Pylônes, Écrasa d’un seul coup, sous les débris mortels, Ses trois mille ennemis, leurs dieux et leurs autels ? Terre et Ciel ! punissez par de telles justices La trahison ourdie en des amours factices, Et la délation du secret de nos cœurs Arraché dans nos bras par des baisers menteurs ! Écrit à Shavington (Angleterre), 7 avril 1839.

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    Alfred de Vigny

    Alfred de Vigny

    @alfredDeVigny

    La maison du berger I Si ton cœur, gémissant du poids de notre vie, Se traîne et se débat comme un aigle blessé, Portant comme le mien, sur son aile asservie, Tout un monde fatal, écrasant et glacé ; S'il ne bat qu'en saignant par sa plaie immortelle, S'il ne voit plus l'amour, son étoile fidèle, Éclairer pour lui seul l'horizon effacé ;

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    Alfred de Vigny

    Alfred de Vigny

    @alfredDeVigny

    Le mont des oliviers I Alors il était nuit et Jésus marchait seul, Vêtu de blanc ainsi qu’un mort de son linceul ; Les disciples dormaient au pied de la colline. Parmi les oliviers qu’un vent sinistre incline Jésus marche à grands pas en frissonnant comme eux ; Triste jusqu’à la mort; l’oeil sombre et ténébreux, Le front baissé, croisant les deux bras sur sa robe Comme un voleur de nuit cachant ce qu’il dérobe ; Connaissant les rochers mieux qu’un sentier uni, Il s’arrête en un lieu nommé Gethsémani : Il se courbe, à genoux, le front contre la terre, Puis regarde le ciel en appelant : Mon Père ! – Mais le ciel reste noir, et Dieu ne répond pas. Il se lève étonné, marche encore à grands pas, Froissant les oliviers qui tremblent. Froide et lente Découle de sa tête une sueur sanglante. Il recule, il descend, il crie avec effroi : Ne pouviez-vous prier et veiller avec moi ! Mais un sommeil de mort accable les apôtres, Pierre à la voix du maître est sourd comme les autres. Le fils de l’homme alors remonte lentement. Comme un pasteur d’Egypte il cherche au firmament Si l’Ange ne luit pas au fond de quelque étoile. Mais un nuage en deuil s’étend comme le voile D’une veuve et ses plis entourent le désert. Jésus, se rappelant ce qu’il avait souffert Depuis trente-trois ans, devint homme, et la crainte Serra son coeur mortel d’une invincible étreinte. Il eut froid. Vainement il appela trois fois : MON PÈRE ! – Le vent seul répondit à sa voix.. Il tomba sur le sable assis et, dans sa peine, Eut sur le monde et l’homme une pensée humaine. – Et la Terre trembla, sentant la pesanteur Du Sauveur qui tombait aux pieds du créateur. II Jésus disait :  » Ô Père, encor laisse-moi vivre ! Avant le dernier mot ne ferme pas mon livre ! Ne sens-tu pas le monde et tout le genre humain Qui souffre avec ma chair et frémit dans ta main ? C’est que la Terre a peur de rester seule et veuve, Quand meurt celui qui dit une parole neuve ; Et que tu n’as laissé dans son sein desséché Tomber qu’un mot du ciel par ma bouche épanché. Mais ce mot est si pur, et sa douceur est telle, Qu’il a comme enivré la famille mortelle D’une goutte de vie et de Divinité, Lorsqu’en ouvrant les bras j’ai dit : FRATERNITE ! – Père, oh ! si j’ai rempli mon douloureux message, Si j’ai caché le Dieu sous la face du Sage, Du Sacrifice humain si j’ai changé le prix, Pour l’offrande des corps recevant les esprits, Substituant partout aux choses le Symbole, La parole au combat, comme au trésor l’obole, Aux flots rouges du Sang les flots vermeils du vin, Aux membres de la chair le pain blanc sans levain ; Si j’ai coupé les temps en deux parts, l’une esclave Et l’autre libre ; – au nom du Passé que je lave Par le sang de mon corps qui souffre et va finir : Versons-en la moitié pour laver l’avenir ! Père Libérateur ! jette aujourd’hui, d’avance, La moitié de ce Sang d’amour et d’innocence Sur la tête de ceux qui viendront en disant : « Il est permis pour tous de tuer l’innocent. » Nous savons qu’il naîtra, dans le lointain des âges, Des dominateurs durs escortés de faux Sages Qui troubleront l’esprit de chaque nation En donnant un faux sens à ma rédemption. – Hélas ! je parle encor que déjà ma parole Est tournée en poison dans chaque parabole ; Eloigne ce calice impur et plus amer Que le fiel, ou l’absinthe, ou les eaux de la mer. Les verges qui viendront, la couronne d’épine, Les clous des mains, la lance au fond de ma poitrine, Enfin toute la croix qui se dresse et m’attend, N’ont rien, mon Père, oh ! rien qui m’épouvante autant ! – Quand les Dieux veulent bien s’abattre sur les mondes, Es n’y doivent laisser que des traces profondes, Et si j’ai mis le pied sur ce globe incomplet Dont le gémissement sans repos m’appelait, C’était pour y laisser deux anges à ma place De qui la race humaine aurait baisé la trace, La Certitude heureuse et l’Espoir confiant Qui dans le Paradis marchent en souriant. Mais je vais la quitter, cette indigente terre, N’ayant que soulevé ce manteau de misère Qui l’entoure à grands plis, drap lugubre et fatal, Que d’un bout tient le Doute et de l’autre le Mal. Mal et Doute ! En un mot je puis les mettre en poudre ; Vous les aviez prévus, laissez-moi vous absoudre De les avoir permis. – C’est l’accusation Qui pèse de partout sur la Création ! – Sur son tombeau désert faisons monter Lazare. Du grand secret des morts qu’il ne soit plus avare Et de ce qu’il a vu donnons-lui souvenir, Qu’il parle. – Ce qui dure et ce qui doit finir ; Ce qu’a mis le Seigneur au coeur de la Nature, Ce qu’elle prend et donne à toute créature ; Quels sont, avec le Ciel, ses muets entretiens, Son amour ineffable et ses chastes liens ; Comment tout s’y détruit et tout s’y renouvelle Pourquoi ce qui s’y cache et ce qui s’y révèle ; Si les astres des cieux tour à tour éprouvés Sont comme celui-ci coupables et sauvés ; Si la Terre est pour eux ou s’ils sont pour la Terre ; Ce qu’a de vrai la fable et de clair le mystère, D’ignorant le savoir et de faux la raison ; Pourquoi l’âme est liée en sa faible prison ; Et pourquoi nul sentier entre deux larges voies, Entre l’ennui du calme et des paisibles joies Et la rage sans fin des vagues passions, Entre la Léthargie et les Convulsions ; Et pourquoi pend la Mort comme une sombre épée Attristant la Nature à tout moment frappée ; – Si le Juste et le Bien, si l’Injuste et le Mal Sont de vils accidents en un cercle fatal Ou si de l’univers ils sont les deux grands pôles, Soutenant Terre et Cieux sur leurs vastes épaules ; Et pourquoi les Esprits du Mal sont triomphants Des maux immérités, de la mort des enfants ; – Et si les Nations sont des femmes guidées Par les étoiles d’or des divines idées Ou de folles enfants sans lampes dans la nuit, Se heurtant et pleurant et que rien ne conduit ; – Et si, lorsque des temps l’horloge périssable Aura jusqu’au dernier versé ses grains de sable, Un regard de vos yeux, un cri de votre voix, Un soupir de mon coeur, un signe de ma croix, Pourra faire ouvrir l’ongle aux Peines Eternelles, Lâcher leur proie humaine et reployer leurs ailes ; – Tout sera révélé dés que l’homme saura De quels lieux il arrive et dans quels il ira.  » III Ainsi le divin fils parlait au divin Père. Il se prosterne encore, il attend, il espère, Mais il renonce et dit : Que votre Volonté Soit faite et non la mienne et pour l’Eternité. Une terreur profonde, une angoisse infinie Redoublent sa torture et sa lente agonie. Il regarde longtemps, longtemps cherche sans voir. Comme un marbre de deuil tout le ciel était noir. La Terre sans clartés, sans astre et sans aurore, Et sans clartés de l’âme ainsi qu’elle est encore, Frémissait. – Dans le bois il entendit des pas, Et puis il vit rôder la torche de Judas. Le silence S’il est vrai qu’au Jardin sacré des Ecritures, Le Fils de l’Homme ait dit ce qu’on voit rapporté ; Muet, aveugle et sourd au cri des créatures, Si le Ciel nous laissa comme un monde avorté, Le juste opposera le dédain à l’absence Et ne répondra plus que par un froid silence Au silence éternel de la Divinité.

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    Alfred de Vigny

    Alfred de Vigny

    @alfredDeVigny

    Moïse Le soleil prolongeait sur la cime des tentes Ces obliques rayons, ces flammes éclatantes, Ces larges traces d’or qu’il laisse dans les airs, Lorsqu’en un lit de sable il se couche aux déserts. La pourpre et l’or semblaient revêtir la campagne. Du stérile Nébo gravissant la montagne, Moïse, homme de Dieu, s’arrête, et, sans orgueil, Sur le vaste horizon promène un long coup d’œil. Il voit d’abord Phasga, que des figuiers entourent, Puis, au-delà des monts que ses regards parcourent, S’étend tout Galaad, Éphraïm, Manassé, Dont le pays fertile à sa droite est placé ; Vers le Midi, Juda, grand et stérile, étale Ses sables où s’endort la mer occidentale ; Plus loin, dans un vallon que le soir a pâli, Couronné d’oliviers, se montre Nephtali ; Dans des plaines de fleurs magnifiques et calmes, Jéricho s’aperçoit, c’est la ville des palmes ; Et, prolongeant ses bois, des plaines de Phogor Le lentisque touffu s’étend jusqu’à Ségor. Il voit tout Chanaan, et la terre promise, Où sa tombe, il le sait, ne sera point admise. Il voit ; sur les Hébreux étend sa grande main, Puis vers le haut du mont il reprend son chemin. Or, des champs de Moab couvrant la vaste enceinte, Pressés au large pied de la montagne sainte, Les enfants d’Israël s’agitaient au vallon Comme les blés épais qu’agite l’aquilon. Dès l’heure où la rosée humecte l’or des sables Et balance sa perle au sommet des érables, Prophète centenaire, environné d’honneur, Moïse était parti pour trouver le Seigneur. On le suivait des yeux aux flammes de sa tête, Et, lorsque du grand mont il atteignit le faîte, Lorsque son front perça le nuage de Dieu Qui couronnait d’éclairs la cime du haut lieu, L’encens brûla partout sur les autels de pierre, Et six cent mille Hébreux, courbés dans la poussière, À l’ombre du parfum par le soleil doré, Chantèrent d’une voix le cantique sacré ; Et les fils de Lévi, s’élevant sur la foule, Tels qu’un bois de cyprès sur le sable qui roule, Du peuple avec la harpe accompagnant les voix, Dirigeaient vers le ciel l’hymne du Roi des Rois. Et, debout devant Dieu, Moïse ayant pris place, Dans le nuage obscur lui parlait face à face. Il disait au Seigneur : « Ne finirai-je pas ? Où voulez-vous encor que je porte mes pas ? Je vivrai donc toujours puissant et solitaire ? Laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre. — Que vous ai-je donc fait pour être votre élu ? J’ai conduit votre peuple où vous avez voulu. Voilà que son pied touche à la terre promise, De vous à lui qu’un autre accepte l’entremise, Au coursier d’Israël qu’il attache le frein ; Je lui lègue mon livre et la verge d’airain. « Pourquoi vous fallut-il tarir mes espérances, Ne pas me laisser homme avec mes ignorances, Puisque du mont Horeb jusques au mont Nébo Je n’ai pas pu trouver le lieu de mon tombeau ? Hélas ! vous m’avez fait sage parmi les sages ! Mon doigt du peuple errant a guidé les passages. J’ai fait pleuvoir le feu sur la tête des rois ; L’avenir à genoux adorera mes lois ; Des tombes des humains j’ouvre la plus antique, La mort trouve à ma voix une voix prophétique, Je suis très grand, mes pieds sont sur les nations, Ma main fait et défait les générations. — Hélas ! je suis, Seigneur, puissant et solitaire, Laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre ! « Hélas ! je sais aussi tous les secrets des cieux, Et vous m’avez prêté la force de vos yeux. Je commande à la nuit de déchirer ses voiles ; Ma bouche par leur nom a compté les étoiles, Et, dès qu’au firmament mon geste l’appela, Chacune s’est hâtée en disant : Me voilà. J’impose mes deux mains sur le front des nuages Pour tarir dans leurs flancs la source des orages ; J’engloutis les cités sous les sables mouvants ; Je renverse les monts sous les ailes des vents ; Mon pied infatigable est plus fort que l’espace ; Le fleuve aux grandes eaux se range quand je passe, Et la voix de la mer se tait devant ma voix. Lorsque mon peuple souffre, ou qu’il lui faut des lois, J’élève mes regards, votre esprit me visite ; La terre alors chancelle et le soleil hésite, Vos anges sont jaloux et m’admirent entre eux. Et cependant, Seigneur, je ne suis pas heureux ; Vous m’avez fait vieillir puissant et solitaire, Laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre. « Sitôt que votre souffle a rempli le berger, Les hommes se sont dit : Il nous est étranger ; Et les yeux se baissaient devant mes yeux de flamme, Car ils venaient, hélas ! d’y voir plus que mon âme. J’ai vu l’amour s’éteindre et l’amitié tarir, Les vierges se voilaient et craignaient de mourir. M’enveloppant alors de la colonne noire, J’ai marché devant tous, triste et seul dans ma gloire, Et j’ai dit dans mon cœur : Que vouloir à présent ? Pour dormir sur un sein mon front est trop pesant, Ma main laisse l’effroi sur la main qu’elle touche, L’orage est dans ma voix, l’éclair est sur ma bouche ; Aussi, loin de m’aimer, voilà qu’ils tremblent tous, Et, quand j’ouvre les bras, on tombe à mes genoux. Ô Seigneur ! j’ai vécu puissant et solitaire, Laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre ! » Or, le peuple attendait, et, craignant son courroux, Priait sans regarder le mont du Dieu jaloux ; Car s’il levait les yeux, les flancs noirs du nuage Roulaient et redoublaient les foudres de l’orage, Et le feu des éclairs, aveuglant les regards, Enchaînait tous les fronts courbés de toutes parts. Bientôt le haut du mont reparut sans Moïse. — Il fut pleuré. — Marchant vers la terre promise, Josué s’avançait pensif et pâlissant, Car il était déjà l’élu du Tout-Puissant. Écrit en 1822

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    Alphonse de Lamartine

    Alphonse de Lamartine

    @alphonseDeLamartine

    Pensée des morts Voilà les feuilles sans sève Qui tombent sur le gazon, Voilà le vent qui s’élève Et gémit dans le vallon, Voilà l’errante hirondelle . Qui rase du bout de l’aile : L’eau dormante des marais, Voilà l’enfant des chaumières Qui glane sur les bruyères Le bois tombé des forêts. L’onde n’a plus le murmure , Dont elle enchantait les bois ; Sous des rameaux sans verdure. Les oiseaux n’ont plus de voix ; Le soir est près de l’aurore, L’astre à peine vient d’éclore Qu’il va terminer son tour, Il jette par intervalle Une heure de clarté pâle Qu’on appelle encore un jour. L’aube n’a plus de zéphire Sous ses nuages dorés, La pourpre du soir expire Sur les flots décolorés, La mer solitaire et vide N’est plus qu’un désert aride Où l’oeil cherche en vain l’esquif, Et sur la grève plus sourde La vague orageuse et lourde N’a qu’un murmure plaintif. La brebis sur les collines Ne trouve plus le gazon, Son agneau laisse aux épines Les débris de sa toison, La flûte aux accords champêtres Ne réjouit plus les hêtres Des airs de joie ou d’amour, Toute herbe aux champs est glanée : Ainsi finit une année, Ainsi finissent nos jours ! C’est la saison où tout tombe Aux coups redoublés des vents ; Un vent qui vient de la tombe Moissonne aussi les vivants : Ils tombent alors par mille, Comme la plume inutile Que l’aigle abandonne aux airs, Lorsque des plumes nouvelles Viennent réchauffer ses ailes A l’approche des hivers. C’est alors que ma paupière Vous vit pâlir et mourir, Tendres fruits qu’à la lumière Dieu n’a pas laissé mûrir ! Quoique jeune sur la terre, Je suis déjà solitaire Parmi ceux de ma saison, Et quand je dis en moi-même : Où sont ceux que ton coeur aime ? Je regarde le gazon. Leur tombe est sur la colline, Mon pied la sait ; la voilà ! Mais leur essence divine, Mais eux, Seigneur, sont-ils là ? Jusqu’à l’indien rivage Le ramier porte un message Qu’il rapporte à nos climats ; La voile passe et repasse, Mais de son étroit espace Leur âme ne revient pas. Ah ! quand les vents de l’automne Sifflent dans les rameaux morts, Quand le brin d’herbe frissonne, Quand le pin rend ses accords, Quand la cloche des ténèbres Balance ses glas funèbres, La nuit, à travers les bois, A chaque vent qui s’élève, A chaque flot sur la grève, Je dis : N’es-tu pas leur voix? Du moins si leur voix si pure Est trop vague pour nos sens, Leur âme en secret murmure De plus intimes accents ; Au fond des coeurs qui sommeillent, Leurs souvenirs qui s’éveillent Se pressent de tous côtés, Comme d’arides feuillages Que rapportent les orages Au tronc qui les a portés ! C’est une mère ravie A ses enfants dispersés, Qui leur tend de l’autre vie Ces bras qui les ont bercés ; Des baisers sont sur sa bouche, Sur ce sein qui fut leur couche Son coeur les rappelle à soi ; Des pleurs voilent son sourire, Et son regard semble dire : Vous aime-t-on comme moi ? C’est une jeune fiancée Qui, le front ceint du bandeau, N’emporta qu’une pensée De sa jeunesse au tombeau ; Triste, hélas ! dans le ciel même, Pour revoir celui qu’elle aime Elle revient sur ses pas, Et lui dit : Ma tombe est verte ! Sur cette terre déserte Qu’attends-tu ? Je n’y suis pas ! C’est un ami de l’enfance, Qu’aux jours sombres du malheur Nous prêta la Providence Pour appuyer notre cœur ; Il n’est plus ; notre âme est veuve, Il nous suit dans notre épreuve Et nous dit avec pitié : Ami, si ton âme est pleine, De ta joie ou de ta peine Qui portera la moitié ? C’est l’ombre pâle d’un père Qui mourut en nous nommant ; C’est une soeur, c’est un frère, Qui nous devance un moment ; Sous notre heureuse demeure, Avec celui qui les pleure, Hélas ! ils dormaient hier ! Et notre coeur doute encore, Que le ver déjà dévore Cette chair de notre chair ! L’enfant dont la mort cruelle Vient de vider le berceau, Qui tomba de la mamelle Au lit glacé du tombeau ; Tous ceux enfin dont la vie Un jour ou l’autre ravie, Emporte une part de nous, Murmurent sous la poussière : Vous qui voyez la lumière, Vous souvenez-vous de nous ? Ah ! vous pleurer est le bonheur suprême Mânes chéris de quiconque a des pleurs ! Vous oublier c’est s’oublier soi-même : N’êtes-vous pas un débris de nos coeurs ? En avançant dans notre obscur voyage, Du doux passé l’horizon est plus beau, En deux moitiés notre âme se partage, Et la meilleure appartient au tombeau ! Dieu du pardon ! leur Dieu ! Dieu de leurs pères ! Toi que leur bouche a si souvent nommé ! Entends pour eux les larmes de leurs frères ! Prions pour eux, nous qu’ils ont tant aimé ! Ils t’ont prié pendant leur courte vie, Ils ont souri quand tu les as frappés ! Ils ont crié : Que ta main soit bénie ! Dieu, tout espoir ! les aurais-tu trompés ? Et cependant pourquoi ce long silence ? Nous auraient-ils oubliés sans retour ? N’aiment-ils plus ? Ah ! ce doute t’offense ! Et toi, mon Dieu, n’es-tu pas tout amour ? Mais, s’ils parlaient à l’ami qui les pleure, S’ils nous disaient comment ils sont heureux, De tes desseins nous devancerions l’heure, Avant ton jour nous volerions vers eux. Où vivent-ils ? Quel astre, à leur paupière Répand un jour plus durable et plus doux ? Vont-ils peupler ces îles de lumière ? Ou planent-ils entre le ciel et nous ? Sont-ils noyés dans l’éternelle flamme ? Ont-ils perdu ces doux noms d’ici-bas, Ces noms de soeur et d’amante et de femme ? A ces appels ne répondront-ils pas ? Non, non, mon Dieu, si la céleste gloire Leur eût ravi tout souvenir humain, Tu nous aurais enlevé leur mémoire ; Nos pleurs sur eux couleraient-ils en vain ? Ah ! dans ton sein que leur âme se noie ! Mais garde-nous nos places dans leur cœur ; Eux qui jadis ont goûté notre joie, Pouvons-nous être heureux sans leur bonheur ? Etends sur eux la main de ta clémence, Ils ont péché; mais le ciel est un don ! Ils ont souffert; c’est une autre innocence ! Ils ont aimé; c’est le sceau du pardon ! Ils furent ce que nous sommes, Poussière, jouet du vent ! Fragiles comme des hommes, Faibles comme le néant ! Si leurs pieds souvent glissèrent, Si leurs lèvres transgressèrent Quelque lettre de ta loi, Ô Père! ô juge suprême ! Ah ! ne les vois pas eux-mêmes, Ne regarde en eux que toi ! Si tu scrutes la poussière, Elle s’enfuit à ta voix ! Si tu touches la lumière, Elle ternira tes doigts ! Si ton oeil divin les sonde, Les colonnes de ce monde Et des cieux chancelleront : Si tu dis à l’innocence : Monte et plaide en ma présence ! Tes vertus se voileront. Mais toi, Seigneur, tu possèdes Ta propre immortalité ! Tout le bonheur que tu cèdes Accroît ta félicité ! Tu dis au soleil d’éclore, Et le jour ruisselle encore ! Tu dis au temps d’enfanter, Et l’éternité docile, Jetant les siècles par mille, Les répand sans les compter ! Les mondes que tu répares Devant toi vont rajeunir, Et jamais tu ne sépares Le passé de l’avenir ; Tu vis ! et tu vis ! les âges, Inégaux pour tes ouvrages, Sont tous égaux sous ta main ; Et jamais ta voix ne nomme, Hélas ! ces trois mots de l’homme : Hier, aujourd’hui, demain ! Ô Père de la nature, Source, abîme de tout bien, Rien à toi ne se mesure, Ah ! ne te mesure à rien ! Mets, à divine clémence, Mets ton poids dans la balance, Si tu pèses le néant ! Triomphe, à vertu suprême ! En te contemplant toi-même, Triomphe en nous pardonnant !

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    André Chénier

    André Chénier

    @andreChenier

    Salut, ô belle nuit, étincelante et sombre Salut, ô belle nuit, étincelante et sombre, Consacrée au repos. Ô silence de l’ombre, Qui n’entends que la voix de mes vers, et les cris De la rive aréneuse où se brise Téthys. Muse, muse nocturne, apporte-moi ma lyre. Comme un fier météore, en ton brûlant délire, Lance-toi dans l’espace ; et, pour franchir les airs, Prends les ailes des vents, les ailes des éclairs, Les bonds de la comète aux longs cheveux de flamme. Mes vers impatients, élancés de mon âme, Veulent parler aux dieux, et volent où reluit L’enthousiasme errant, fils de la belle nuit. Accours, grande nature, ô mère du génie ; Accours, reine du monde, éternelle Uranie. Soit que tes pas divins sur l’astre du Lion Ou sur les triples feux du superbe Orion Marchent, ou soit qu’au loin, fugitive, emportée, Tu suives les détours de la voie argentée, Soleils amoncelés dans le céleste azur. Où le peuple a cru voir les traces d’un lait pur, Descends ; non, porte-moi sur ta route brûlante, Que je m’élève au ciel comme une flamme ardente. Déjà ce corps pesant se détache de moi. Adieu, tombeau de chair, je ne suis plus à toi. Terre, fuis sous mes pas. L’éther où le ciel nage M’aspire. Je parcours l’océan sans rivage. Plus de nuit. Je n’ai plus d’un globe opaque et dur Entre le jour et moi l’impénétrable mur. Plus de nuit, et mon œil et se perd et se mêle Dans les torrents profonds de lumière éternelle. Me voici sur les feux que le langage humain Nomme Cassiopée et l’Ourse et le Dauphin. Maintenant la Couronne autour de moi s’embrase. Ici l’Aigle et le Cygne et la Lyre et Pégase. Et voici que plus loin le Serpent tortueux Noue autour de mes pas ses anneaux lumineux. Féconde immensité, les esprits magnanimes Aiment à se plonger dans tes vivants abîmes, Abîmes de clartés, où, libre de ses fers. L’homme siège au conseil qui créa l’univers ; Où l’âme, remontant à sa grande origine, Sent qu’elle est une part de l’essence divine…

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    André Suarès

    André Suarès

    @andreSuares

    Âme de la nuit Mol et sans voix, le couperet de l’ombre descend du ciel et le jour tombe, la face contre terre, dans le fatal étang ; et les yeux s’enfoncent dans la fosse. Long crépuscule.

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    B

    Baptiste Rousseau

    @baptisteRousseau

    Jean ode tirée du cantique d'Ézéchias J'ai vu mes tristes journées Décliner vers leur penchant ; Au midi de mes années Je touchais à mon couchant : La Mort, déployant ses ailes, Couvrait d'ombres éternelles La clarté dont je jouis ; Et, dans cette nuit funeste, Je cherchais en vain le reste De mes jours évanouis.

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Au lecteur Au lecteur est le poème qui ouvre toutes les éditions des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire. Composé de 10 quatrains en alexandrins, c’est un tableau de la condition humaine qui introduit des thèmes importants du recueil : beau et mal, mort, péché, faiblesse de l’homme, ennui, religion et spleen. La sottise, l'erreur, le péché, la lésine, Occupent nos esprits et travaillent nos corps, Et nous alimentons nos aimables remords, Comme les mendiants nourrissent leur vermine. Nos péchés sont têtus, nos repentirs sont lâches ; Nous nous faisons payer grassement nos aveux, Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux, Croyant par de vils pleurs laver toutes nos taches. Sur l'oreiller du mal c'est Satan Trismégiste Qui berce longuement notre esprit enchanté, Et le riche métal de notre volonté Est tout vaporisé par ce savant chimiste.

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    L'examen de minuit La pendule, sonnant minuit, Ironiquement nous engage A nous rappeler quel usage Nous fîmes du jour qui s'enfuit : - Aujourd'hui, date fatidique, Vendredi, treize, nous avons, Malgré tout ce que nous savons, Mené le train d'un hérétique ; Nous avons blasphémé Jésus, Des Dieux le plus incontestable ! Comme un parasite à la table De quelque monstrueux Crésus, Nous avons, pour plaire à la brute, Digne vassale des Démons, Insulté ce que nous aimons Et flatté ce qui nous rebute ;

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    L'imprévu Harpagon, qui veillait son père agonisant, Se dit, rêveur, devant ces lèvres déjà blanches: «Nous avons au grenier un nombre suffisant, Ce me semble, de vieilles planches?» Célimène roucoule et dit: «Mon coeur est bon, Et naturellement, Dieu m'a faite très belle.» — Son coeur! coeur racorni, fumé comme un jambon, Recuit à la flamme éternelle! Un gazetier fumeux, qui se croit un flambeau, Dit au pauvre, qu'il a noyé dans les ténèbres: «Où donc l'aperçois-tu, ce créateur du Beau, Ce Redresseur que tu célèbres?»

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    C

    Charles d'Orléans

    @charlesDorleans

    En faites-vous doute En faites-vous doute Que vôtre ne soie? Ce Dieu me doint joie Au cœur, si suis toute. Rien ne m'en déboute Pour chose que j'oye : En faites-vous doute Que vôtre ne soie? Danger et sa route S'en voisent leur voie, Sans que plus les voie; Toujours il m'écoute, En faites-vous doute?

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    C

    Charles d'Orléans

    @charlesDorleans

    En la forêt de longue attente En la forêt de Longue Attente Chevauchant par divers sentiers M'en vais, cette année présente, Au voyage de Desiriers. Devant sont allés mes fourriers Pour appareiller mon logis En la cité de Destinée ; Et pour mon cœur et moi ont pris L'hôtellerie de Pensée. Je mène des chevaux quarante Et autant pour mes officiers, Voire, par Dieu, plus de soixante, Sans les bagages et sommiers. Loger nous faudra par quartiers, Si les hôtels sont trop petits ; Toutefois, pour une vêprée, En gré prendrai, soit mieux ou pis, L'hôtellerie de Pensée.

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    C

    Charles Marie René Leconte de Lisle

    @charlesMarieReneLeconteDeLisle

    Qaïn En la trentième année, au siècle de l'épreuve, Étant captif parmi les cavaliers d'Assur, Thogorma, le Voyant, fils d'Elam, fils de Thur, Eut ce rêve, couché dans les roseaux du fleuve, A l'heure où le soleil blanchit l'herbe et le mur. Depuis que le Chasseur Iahvèh, qui terrasse Les forts et de leur chair nourrit l'aigle et le chien, Avait lié son peuple au joug assyrien, Tous, se rasant les poils du crâne et de la face, Stupides, s'étaient tus et n'entendaient plus rien. Ployés sous le fardeau des misères accrues, Dans la faim, dans la soif, dans l'épouvante assis, Ils revoyaient leurs murs écroulés et noircis, Et, comme aux crocs publics pendent les viandes crues, Leurs princes aux gibets des Rois incirconcis Le pied de l'infidèle appuyé sur la nuque Des vaillants, le saint temple où priaient les aïeux Souillé, vide, fumant, effondré par les pieux, Et les vierges en pleurs sous le fouet de l'eunuque Et le sombre Iahvèh muet au fond des cieux. Or, laissant, ce jour-là, près des mornes aïeules Et des enfants couchés dans les nattes de cuir, Les femmes aux yeux noirs de sa tribu gémir, Le fils d'Elam, meurtri par la sangle des meules, Le long du grand Khobar se coucha pour dormir. Les bandes d'étalons, par la plaine inondée De lumière, gisaient sous le dattier roussi, Et les taureaux, et les dromadaires aussi, Avec les chameliers d'Iran et de Khaldée. Thogorma, le Voyant, eut ce rêve. Voici :

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    Francis Jammes

    Francis Jammes

    @francisJammes

    Prière pour aller au paradis avec les ânes Lorsqu'il faudra aller vers vous, ô mon Dieu, faites que ce soit par un jour où la campagne en fête poudroiera. Je désire, ainsi que je fis ici-bas, choisir un chemin pour aller, comme il me plaira, au Paradis, où sont en plein jour les étoiles. Je prendrai mon bâton et sur la grande route j'irai, et je dirai aux ânes, mes amis : Je suis Francis Jammes et je vais au Paradis, car il n'y a pas d'enfer au pays du Bon Dieu. Je leur dirai : " Venez, doux amis du ciel bleu, pauvres bêtes chéries qui, d'un brusque mouvement d'oreille, chassez les mouches plates, les coups et les abeilles." Que je Vous apparaisse au milieu de ces bêtes que j'aime tant parce qu'elles baissent la tête doucement, et s'arrêtent en joignant leurs petits pieds d'une façon bien douce et qui vous fait pitié. J'arriverai suivi de leurs milliers d'oreilles, suivi de ceux qui portent au flanc des corbeilles, de ceux traînant des voitures de saltimbanques ou des voitures de plumeaux et de fer-blanc, de ceux qui ont au dos des bidons bossués, des ânesses pleines comme des outres, aux pas cassés, de ceux à qui l'on met de petits pantalons à cause des plaies bleues et suintantes que font les mouches entêtées qui s'y groupent en ronds. Mon Dieu, faites qu'avec ces ânes je Vous vienne. Faites que, dans la paix, des anges nous conduisent vers des ruisseaux touffus où tremblent des cerises lisses comme la chair qui rit des jeunes filles, et faites que, penché dans ce séjour des âmes, sur vos divines eaux, je sois pareil aux ânes qui mireront leur humble et douce pauvreté à la limpidité de l'amour éternel.

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    François de Malherbe

    François de Malherbe

    @francoisDeMalherbe

    Consolation à M. Du Périer Stances sur la mort de sa fille Ta douleur, Du Perrier, sera donc éternelle ? Et les tristes discours Que te met en l'esprit l'amitié paternelle L'augmenteront toujours ? Le malheur de ta fille au tombeau descendue Par un commun trépas, Est-ce quelque dédale où ta raison perdue Ne se retrouve pas ? Je sais de quels appas son enfance était pleine, Et n'ai pas entrepris, Injurieux ami, de soulager ta peine Avecque son mépris. Mais elle était du monde, où les plus belles choses Ont le pire destin ; Et rose elle a vécu ce que vivent les roses, L'espace d'un matin. Puis quand ainsi serait que, selon ta prière, Elle aurait obtenu D'avoir en cheveux blancs terminé sa carrière, Qu'en fût-il avenu ? Penses-tu que plus vieille en la maison céleste Elle eût eu plus d'accueil, Ou qu'elle eût moins senti la poussière funeste Et les vers du cercueil ? Non, non, mon Du Perrier ; aussitôt que la Parque Ôte l'âme du corps, L'âge s'évanouit au-deçà de la barque, Et ne suit point les morts. Tithon n'a plus les ans qui le firent cigale ; Et Pluton aujourd'hui, Sans égard du passé, les mérites égale D'Archemore et de lui. Ne te lasse donc plus d'inutiles complaintes : Mais, sage à l'avenir, Aime une ombre comme ombre, et des cendres éteintes Eteins le souvenir. C'est bien, je le confesse, une juste coutume Que le cœur affligé, Par le canal des yeux vidant son amertume, Cherche d'être allégé. Même quand il advient que la tombe sépare Ce que nature a joint, Celui qui ne s'émeut a l'âme d'un barbare, Ou n'en a du tout point. Mais d'être inconsolable et dedans sa mémoire Enfermer un ennui, N'est-ce pas se haïr pour acquérir la gloire De bien aimer autrui ? Priam, qui vit ses fils abattus par Achille, Dénué de support Et hors de tout espoir du salut de sa ville, Reçut du réconfort. François, quand la Castille, inégale à ses armes, Lui vola son Dauphin, Sembla d'un si grand coup devoir jeter des larmes Qui n'eussent point de fin. Il les sécha pourtant, et, comme un autre Alcide, Contre fortune instruit, Fit qu'à ses ennemis d'un acte si perfide La honte fut le fruit. Leur camp, qui la Durance avait presque tarie De bataillons épais, Entendant sa constance, eut peur de sa furie, Et demanda la paix. De moi déjà deux fois d'une pareille foudre Je me suis vu perclus ; Et deux fois la raison m'a si bien fait résoudre, Qu'il ne m'en souvient plus. Non qu'il ne me soit grief que la terre possède Ce qui me fut si cher ; Mais en un accident qui n'a point de remède Il n'en faut point chercher. La Mort a des rigueurs à nulle autre pareilles : On a beau la prier ; La cruelle qu'elle est se bouche les oreilles, Et nous laisse crier. Le pauvre en sa cabane, où le chaume le couvre, Est sujet à ses lois ; Et la garde qui veille aux barrières du Louvre N'en défend point nos rois. De murmurer contre elle et perdre patience Il est mal à propos ; Vouloir ce que Dieu veut est la seule science Qui nous met en repos.

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    François de Malherbe

    François de Malherbe

    @francoisDeMalherbe

    Les larmes de Saint-Pierre Ce n'est pas en mes vers qu'une amante abusée Des appas enchanteurs d'un parjure Thésée, Après l'honneur ravi de sa pudicité, Laissée ingratement en un bord solitaire, Fait de tous les assauts que la rage peut faire Une fidèle preuve à l'infidélité. Les ondes que j'épands d'une éternelle veine Dans un courage saint ont leur sainte fontaine ; Où l'amour de la terre et le soin de la chair Aux fragiles pensers ayant ouvert la porte, Une plus belle amour se rendit la plus forte, Et le fit repentir aussitôt que pécher.

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    François de Malherbe

    François de Malherbe

    @francoisDeMalherbe

    Paraphrase du psaume CXLV N'espérons plus, mon âme, aux promesses du monde ; Sa lumière est un verre, et sa faveur une onde Que toujours quelque vent empêche de calmer. Quittons ces vanités, lassons-nous de les suivre : C'est Dieu qui nous fait vivre, C'est Dieu qu'il faut aimer.

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    François de Malherbe

    François de Malherbe

    @francoisDeMalherbe

    Prière pour le roi Henri le Grand Pour le roi allant en Limousin. Ô Dieu, dont les bontés, de nos larmes touchées, Ont aux vaines fureurs les armes arrachées, Et rangé l'insolence aux pieds de la raison ; Puisqu'à rien d'imparfait ta louange n'aspire, Achève ton ouvrage au bien de cet empire, Et nous rends l'embonpoint comme la guérison ! Nous sommes sous un roi si vaillant et si sage, Et qui si dignement a fait l'apprentissage De toutes les vertus propres à commander, Qu'il semble que cet heur nous impose silence, Et qu'assurés par lui de toute violence Nous n'avons plus sujet de te rien demander. Certes quiconque a vu pleuvoir dessus nos têtes Les funestes éclats des plus grandes tempêtes Qu'excitèrent jamais deux contraires partis, Et n'en voit aujourd'hui nulle marque paraître, En ce miracle seul il peut assez connaître Quelle force a la main qui nous a garantis.

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    François de Malherbe

    François de Malherbe

    @francoisDeMalherbe

    Sonnet sur la mort de son fils Que mon fils ait perdu sa dépouille mortelle, Ce fils qui fut si brave et que j'aimai si fort, Je ne l'impute point à l'injure du sort, Puisque finir à l'homme est chose naturelle. Mais que de deux marauds la surprise infidèle Ait terminé ses jours d'une tragique mort, En cela ma douleur n'a point de réconfort, Et tous mes sentiments sont d'accord avec elle.

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    F

    François Maynard

    @francoisMaynard

    Mon âme, il faut partir Mon âme, il faut partir. Ma vigueur est passée, Mon dernier jour est dessus l'horizon. Tu crains ta liberté. Quoi ! n'es-tu pas lassée D'avoir souffert soixante ans de prison ? Tes désordres sont grands ; tes vertus sont petites ; Parmi tes maux on trouve peu de bien ; Mais si le bon Jésus te donne ses mérites, Espère tout et n'appréhende rien. Mon âme, repens-toi d'avoir aimé le monde, Et de mes yeux fais la source d'une onde Qui touche de pitié le monarque des rois. Que tu serais courageuse et ravie Si j'avais soupiré, durant toute ma vie, Dans le désert, sous l'ombre de la Croix !

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    François Villon

    François Villon

    @francoisVillon

    Ballade des pendus Frères humains, qui après nous vivez, N’ayez les cœurs contre nous endurcis, Car, si pitié de nous pauvres avez, Dieu en aura plus tôt de vous mercis. Vous nous voyez ci attachés, cinq, six : Quant à la chair, que trop avons nourrie, Elle est piéça dévorée et pourrie, Et nous, les os, devenons cendre et poudre. De notre mal personne ne s’en rie ; Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre ! Se frères vous clamons, pas n’en devez Avoir dédain, quoique fûmes occis Par justice. Toutefois, vous savez Que tous hommes n’ont pas bon sens rassis. Excusez-nous, puisque sommes transis, Envers le fils de la Vierge Marie, Que sa grâce ne soit pour nous tarie, Nous préservant de l’infernale foudre. Nous sommes morts, âme ne nous harie, Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre ! La pluie nous a bués et lavés, Et le soleil desséchés et noircis. Pies, corbeaux nous ont les yeux cavés, Et arraché la barbe et les sourcils. Jamais nul temps nous ne sommes assis Puis çà, puis là, comme le vent varie, A son plaisir sans cesser nous charrie, Plus becquetés d’oiseaux que dés à coudre. Ne soyez donc de notre confrérie ; Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre ! Prince Jésus, qui sur tous a maistrie, Garde qu’Enfer n’ait de nous seigneurie : A lui n’ayons que faire ne que soudre. Hommes, ici n’a point de moquerie ; Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

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    François Villon

    François Villon

    @francoisVillon

    Ballade pour prier Notre Dame Dame du ciel, régente terrienne, Emperière des infernaux palus, Recevez-moi, votre humble chrétienne, Que comprise soie entre vos élus, Ce nonobstant qu'oncques rien ne valus. Les biens de vous, ma Dame et ma Maîtresse Sont bien plus grands que ne suis pécheresse, Sans lesquels biens âme ne peut mérir N'avoir les cieux. Je n'en suis jangleresse : En cette foi je veuil vivre et mourir.

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Antéros Tu demandes pourquoi j'ai tant de rage au cœur Et sur un col flexible une tête indomptée ; C'est que je suis issu de la race d'Antée, Je retourne les dards contre le dieu vainqueur.

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Les cydalises Où sont nos amoureuses ? Elles sont au tombeau. Elles sont plus heureuses, Dans un séjour plus beau ! Elles sont près des anges, Dans le fond du ciel bleu, Et chantent les louanges De la mère de Dieu !

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Myrtho Je pense à toi, Myrtho, divine enchanteresse, Au Pausilippe altier, de mille feux brillant, À ton front inondé des clartés de l'Orient, Aux raisins noirs mêlés avec l'or de ta tresse. C'est dans ta coupe aussi que j'avais bu l'ivresse, Et dans l'éclair furtif de ton œil souriant, Quand aux pieds d'lacchus on me voyait priant, Car la Muse m'a fait l'un des fils de la Grèce. Je sais pourquoi là-bas le volcan s'est rouvert... C'est qu'hier tu l'avais touché d'un pied agile, Et de cendres soudain l'horizon s'est couvert. Depuis qu'un duc normand brisa tes dieux d'argile, Toujours, sous les rameaux du laurier de Virgile, Le pâle hortensia s'unit au myrte vert !

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Vers dorés Homme ! libre penseur - te crois-tu seul pensant Dans ce monde où la vie éclate en toute chose : Des forces que tu tiens ta liberté dispose, Mais de tous tes conseils l'univers est absent. Respecte dans la bête un esprit agissant : ... Chaque fleur est une âme à la Nature éclose ; Un mystère d'amour dans le métal repose : "Tout est sensible ! " - Et tout sur ton être est puissant !

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    J

    Jean de Sponde

    @jeanDeSponde

    Qui sont, qui sont ceux-là, dont le cœur idolâtre Qui sont, qui sont ceux-là, dont le cœur idolâtre Se jette aux pieds du Monde, et flatte ses honneurs, Et qui sont ces valets, et qui sont ces Seigneurs, Et ces âmes d'Ebène, et ces faces d'Albâtre ? Ces masques déguisés, dont la troupe folâtre S'amuse à caresser je ne sais quels donneurs De fumées de Cour, et ces entrepreneurs De vaincre encor le Ciel qu'ils ne peuvent combattre ?

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