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Mythologie

21 poésies en cours de vérification
Mythologie

Poésies de la collection mythologie

    André Chénier

    André Chénier

    @andreChenier

    Salut, ô belle nuit, étincelante et sombre Salut, ô belle nuit, étincelante et sombre, Consacrée au repos. Ô silence de l’ombre, Qui n’entends que la voix de mes vers, et les cris De la rive aréneuse où se brise Téthys. Muse, muse nocturne, apporte-moi ma lyre. Comme un fier météore, en ton brûlant délire, Lance-toi dans l’espace ; et, pour franchir les airs, Prends les ailes des vents, les ailes des éclairs, Les bonds de la comète aux longs cheveux de flamme. Mes vers impatients, élancés de mon âme, Veulent parler aux dieux, et volent où reluit L’enthousiasme errant, fils de la belle nuit. Accours, grande nature, ô mère du génie ; Accours, reine du monde, éternelle Uranie. Soit que tes pas divins sur l’astre du Lion Ou sur les triples feux du superbe Orion Marchent, ou soit qu’au loin, fugitive, emportée, Tu suives les détours de la voie argentée, Soleils amoncelés dans le céleste azur. Où le peuple a cru voir les traces d’un lait pur, Descends ; non, porte-moi sur ta route brûlante, Que je m’élève au ciel comme une flamme ardente. Déjà ce corps pesant se détache de moi. Adieu, tombeau de chair, je ne suis plus à toi. Terre, fuis sous mes pas. L’éther où le ciel nage M’aspire. Je parcours l’océan sans rivage. Plus de nuit. Je n’ai plus d’un globe opaque et dur Entre le jour et moi l’impénétrable mur. Plus de nuit, et mon œil et se perd et se mêle Dans les torrents profonds de lumière éternelle. Me voici sur les feux que le langage humain Nomme Cassiopée et l’Ourse et le Dauphin. Maintenant la Couronne autour de moi s’embrase. Ici l’Aigle et le Cygne et la Lyre et Pégase. Et voici que plus loin le Serpent tortueux Noue autour de mes pas ses anneaux lumineux. Féconde immensité, les esprits magnanimes Aiment à se plonger dans tes vivants abîmes, Abîmes de clartés, où, libre de ses fers. L’homme siège au conseil qui créa l’univers ; Où l’âme, remontant à sa grande origine, Sent qu’elle est une part de l’essence divine…

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Au lecteur Au lecteur est le poème qui ouvre toutes les éditions des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire. Composé de 10 quatrains en alexandrins, c’est un tableau de la condition humaine qui introduit des thèmes importants du recueil : beau et mal, mort, péché, faiblesse de l’homme, ennui, religion et spleen. La sottise, l'erreur, le péché, la lésine, Occupent nos esprits et travaillent nos corps, Et nous alimentons nos aimables remords, Comme les mendiants nourrissent leur vermine. Nos péchés sont têtus, nos repentirs sont lâches ; Nous nous faisons payer grassement nos aveux, Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux, Croyant par de vils pleurs laver toutes nos taches. Sur l'oreiller du mal c'est Satan Trismégiste Qui berce longuement notre esprit enchanté, Et le riche métal de notre volonté Est tout vaporisé par ce savant chimiste.

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    La chanson du mal-aimé Et je chantais cette romance En 1903 sans savoir Que mon amour à la semblance Du beau Phénix s’il meurt un soir Le matin voit sa renaissance. Un soir de demi-brume à Londres Un voyou qui ressemblait à Mon amour vint à ma rencontre Et le regard qu’il me jeta Me fit baisser les yeux de honte Je suivis ce mauvais garçon Qui sifflotait mains dans les poches Nous semblions entre les maisons Onde ouverte de la Mer Rouge Lui les Hébreux moi Pharaon Oue tombent ces vagues de briques Si tu ne fus pas bien aimée Je suis le souverain d’Égypte Sa soeur-épouse son armée Si tu n’es pas l’amour unique Au tournant d’une rue brûlant De tous les feux de ses façades Plaies du brouillard sanguinolent Où se lamentaient les façades Une femme lui ressemblant C’était son regard d’inhumaine La cicatrice à son cou nu Sortit saoule d’une taverne Au moment où je reconnus La fausseté de l’amour même Lorsqu’il fut de retour enfin Dans sa patrie le sage Ulysse Son vieux chien de lui se souvint Près d’un tapis de haute lisse Sa femme attendait qu’il revînt L’époux royal de Sacontale Las de vaincre se réjouit Quand il la retrouva plus pâle D’attente et d’amour yeux pâlis Caressant sa gazelle mâle J’ai pensé à ces rois heureux Lorsque le faux amour et celle Dont je suis encore amoureux Heurtant leurs ombres infidèles Me rendirent si malheureux Regrets sur quoi l’enfer se fonde Qu’un ciel d’oubli s’ouvre à mes voeux Pour son baiser les rois du monde Seraient morts les pauvres fameux Pour elle eussent vendu leur ombre J’ai hiverné dans mon passé Revienne le soleil de Pâques Pour chauffer un coeur plus glacé Que les quarante de Sébaste Moins que ma vie martyrisés Mon beau navire ô ma mémoire Avons-nous assez navigué Dans une onde mauvaise à boire Avons-nous assez divagué De la belle aube au triste soir Adieu faux amour confondu Avec la femme qui s’éloigne Avec celle que j’ai perdue L’année dernière en Allemagne Et que je ne reverrai plus Voie lactée ô soeur lumineuse Des blancs ruisseaux de Chanaan Et des corps blancs des amoureuses Nageurs morts suivrons-nous d’ahan Ton cours vers d’autres nébuleuses Je me souviens d’une autre année C’était l’aube d’un jour d’avril J’ai chanté ma joie bien-aimée Chanté l’amour à voix virile Au moment d’amour de l’année

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Antéros Tu demandes pourquoi j'ai tant de rage au cœur Et sur un col flexible une tête indomptée ; C'est que je suis issu de la race d'Antée, Je retourne les dards contre le dieu vainqueur.

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Artémis La Treizième revient... C'est encor la première ; Et c'est toujours la Seule, - ou c'est le seul moment : Car es-tu Reine, ô Toi ! la première ou dernière ? Es-tu Roi, toi le seul ou le dernier amant ? ...

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Delfica La connais-tu, Dafné, cette ancienne romance, Au pied du sycomore, ou sous les lauriers blancs, Sous l’olivier, le myrthe ou les saules tremblants, Cette chanson d’amour… qui toujours recommence ! Reconnais-tu le Temple, au péristyle immense, Et les citrons amers où s’imprimaient tes dents ? Et la grotte, fatale aux hôtes imprudents, Où du dragon vaincu dort l’antique semence. Ils reviendront, ces dieux que tu pleures toujours ! Le temps va ramener l’ordre des anciens jours ; La terre a tressailli d’un souffle prophétique… Cependant la sibylle au visage latin Est endormie encor sous l’arc de Constantin : – Et rien n’a dérangé le sévère portique.

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Horus Le dieu Kneph en tremblant ébranlait l'univers : Isis, la mère, alors se leva sur sa couche, Fit un geste de haine à son époux farouche, Et l'ardeur d'autrefois brilla dans ses yeux verts. « Le voyez-vous, dit-elle, il meurt, ce vieux pervers, Tous les frimas du monde ont passé par sa bouche, Attachez son pied tors, éteignez son œil louche, C'est le dieu des volcans et le roi des hivers ! L'aigle a déjà passé, l'esprit nouveau m'appelle, J'ai revêtu pour lui la robe de Cybèle... C'est l'enfant bien-aimé d'Hermès et d'Osiris ! » La déesse avait fui sur sa conque dorée, La mer nous renvoyait son image adorée, Et les cieux rayonnaient sous l'écharpe d'Iris.

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Myrtho Je pense à toi, Myrtho, divine enchanteresse, Au Pausilippe altier, de mille feux brillant, À ton front inondé des clartés de l'Orient, Aux raisins noirs mêlés avec l'or de ta tresse. C'est dans ta coupe aussi que j'avais bu l'ivresse, Et dans l'éclair furtif de ton œil souriant, Quand aux pieds d'lacchus on me voyait priant, Car la Muse m'a fait l'un des fils de la Grèce. Je sais pourquoi là-bas le volcan s'est rouvert... C'est qu'hier tu l'avais touché d'un pied agile, Et de cendres soudain l'horizon s'est couvert. Depuis qu'un duc normand brisa tes dieux d'argile, Toujours, sous les rameaux du laurier de Virgile, Le pâle hortensia s'unit au myrte vert !

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    Jean de La Fontaine

    Jean de La Fontaine

    @jeanDeLaFontaine

    Les amours de psyché Ô douce Volupté, sans qui, dès notre enfance, Le vivre et le mourir nous deviendraient égaux ; Aimant universel de tous les animaux, Que tu sais attirer avecque violence ! Par toi tout se meut ici-bas. C'est pour toi, c'est pour tes appâts, Que nous courons après la peine : Il n'est soldat, ni capitaine, Ni ministre d'État, ni prince, ni sujet, Qui ne t'ait pour unique objet. Nous autres nourrissons, si pour fruit de nos veilles Un bruit délicieux ne charmait nos oreilles, Si nous ne nous sentions chatouillés de ce son, Ferions-nous un mot de chanson ? Ce qu'on appelle gloire en termes magnifiques, Ce qui servait de prix dans les jeux olympiques, N'est que toi proprement, divine Volupté. Et le plaisir des sens n'est-il de rien compté ? Pour quoi sont faits les dons de Flore, Le Soleil couchant et l'Aurore, Pomone et ses mets délicats, Bacchus, l'âme des bons repas, Les forêts, les eaux, les prairies, Mères des douces rêveries ? Pour quoi tant de beaux arts, qui tous sont tes enfants ? Mais pour quoi les Chloris aux appâts triomphants, Que pour maintenir ton commerce ? J'entends innocemment : sur son propre désir Quelque rigueur que l'on exerce, Encore y prend-on du plaisir. Volupté, Volupté, qui fus jadis maîtresse Du plus bel esprit de la Grèce, Ne me dédaigne pas, viens-t'en loger chez moi ; Tu n'y seras pas sans emploi. J'aime le jeu, l'amour, les livres, la musique, La ville et la campagne, enfin tout ; il n'est rien Qui ne me soit souverain bien, Jusqu'au sombre plaisir d'un cœur mélancolique. Viens donc ; et de ce bien, ô douce Volupté, Veux-tu savoir au vrai la mesure certaine ? Il m'en faut tout au moins un siècle bien compté ; Car trente ans, ce n'est pas la peine.

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    Jean de La Fontaine

    Jean de La Fontaine

    @jeanDeLaFontaine

    Épilogue Bornons ici cette carrière. Les longs ouvrages me font peur. Loin d’épuiser une matière, On n’en doit prendre que la fleur. Il s’en va temps que je reprenne Un peu de forces et d’haleine, Pour fournir à d’autres projets. Amour, ce tyran de ma vie, Veut que je change de sujets ; Il faut contenter son envie. Retournons à Psyché ; Damon, vous m’exhortez À peindre ses malheurs et ses félicités. J’y consens ; peut-être ma veine En sa faveur s’échauffera. Heureux si ce travail est la dernière peine Que son époux me causera !

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    Jean Racine

    Jean Racine

    @jeanRacine

    Le récit théramène A peine nous sortions des portes de Trézène, Il était sur son char. Ses gardes affligés Imitaient son silence, autour de lui rangés ; Il suivait tout pensif le chemin de Mycènes ; Sa main sur ses chevaux laissait flotter les rênes. Ses superbes coursiers, qu'on voyait autrefois Pleins d'une ardeur si noble obéir à sa voix, L'œil morne maintenant et la tête baissée, Semblaient se conformer à sa triste pensée. Un effroyable cri, sorti du fond des flots, Des airs en ce moment a troublé le repos ; Et du sein de la terre une voix formidable Répond en gémissant à ce cri redoutable. Jusqu'au fond de nos cœurs notre sang s'est glacé ; Des coursiers attentifs le crin s'est hérissé. Cependant sur le dos de la plaine liquide S'élève à gros bouillons une montagne humide ; L'onde approche, se brise, et vomit à nos yeux, Parmi des flots d'écume, un monstre furieux. Son front large est armé de cornes menaçantes, Tout son corps est couvert d'écailles jaunissantes, Indomptable taureau, dragon impétueux, Sa croupe se recourbe en replis tortueux. Ses longs mugissements font trembler le rivage. Le ciel avec horreur voit ce monstre sauvage, La terre s'en émeut, l'air en est infecté, Le flot qui l'apporta recule épouvanté. Tout fuit, et sans s'armer d'un courage inutile, Dans le temple voisin chacun cherche un asile. Hippolyte lui seul, digne fils d'un héros, Arrête ses coursiers, saisit ses javelots, Pousse au monstre, et d'un dard lancé d'une main sûre, Il lui fait dans le flanc une large blessure. De rage et de douleur le monstre bondissant Vient aux pieds des chevaux tomber en mugissant, Se roule, et leur présente une gueule enflammée, Qui les couvre de feu, de sang et de fumée. La frayeur les emporte, et sourds à cette fois, Ils ne connaissent plus ni le frein ni la voix. En efforts impuissants leur maître se consume, Ils rougissent le mors d'une sanglante écume. On dit qu'on a vu même, en ce désordre affreux, Un dieu qui d'aiguillons pressait leur flanc poudreux. À travers des rochers la peur les précipite. L'essieu crie et se rompt. L'intrépide Hippolyte Voit voler en éclats tout son char fracassé. Dans les rênes lui-même il tombe embarrassé. Excusez ma douleur. Cette image cruelle Sera pour moi de pleurs une source éternelle. J'ai vu, Seigneur, j'ai vu votre malheureux fils Traîné par les chevaux que sa main a nourris. Il veut les rappeler, et sa voix les effraie ; Ils courent. Tout son corps n'est bientôt qu'une plaie. De nos cris douloureux la plaine retentit. Leur fougue impétueuse enfin se ralentit. Ils s'arrêtent non loin de ces tombeaux antiques Où des Rois nos aïeux sont les froides reliques. J'y cours en soupirant, et sa garde me suit. De son généreux sang la trace nous conduit. Les rochers en sont teints ; les ronces dégoutantes Portent de ses cheveux les dépouilles sanglantes. J'arrive, je l'appelle, et me tendant la main, Il ouvre un œil mourant qu'il referme soudain. « Le ciel, dit-il, m'arrache une innocente vie. Prends soin après ma mort de la triste Aricie. Cher ami, si mon père un jour désabusé Plaint le malheur d'un fils faussement accusé, Pour apaiser mon sang et mon ombre plaintive, Dis-lui qu'avec douceur il traite sa captive, Qu'il lui rende… » À ce mot ce héros expiré N'a laissé dans mes bras qu'un corps défiguré, Triste objet, où des Dieux triomphe la colère, Et que méconnaîtrait l'œil même de son père.

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    Jean Racine

    Jean Racine

    @jeanRacine

    Monologue d’Hermione Où suis-je ? Qu'ai-je fait ? Que dois-je faire encore ? Quel transport me saisit ? Quel chagrin me dévore ? Errante, et sans dessein, je cours dans ce palais. Ah ! Ne puis-je savoir si j'aime ou si je hais ? Le cruel ! De quel œil il m'a congédiée ! Sans pitié, sans douleur au moins étudiée. L'ai-je vu se troubler et me plaindre un moment ? En ai-je pu tirer un seul gémissement ? Muet à mes soupirs, tranquille à mes alarmes, Semblait-il seulement qu'il eût part à mes larmes ? Et je le plains encore ! Et, pour comble d'ennui, Mon cœur, mon lâche cœur s'intéresse pour lui Je tremble au seul penser du coup qui le menace, Et, prête à me venger, je lui fais déjà grâce. Non, ne révoquons point l'arrêt de mon courroux : Qu'il périsse ! Aussi bien il ne vit plus pour nous. Le perfide triomphe et se rit de ma rage Il pense voir en pleurs dissiper cet orage ; Il croit que, toujours faible et d'un cœur incertain, Je parerai d'un bras les coups de l'autre main. Il juge encor de moi par mes bontés passées. Mais plutôt le perfide a bien d'autres pensées. Triomphant dans le temple, il ne s'informe pas Si l'on souhaite ailleurs sa vie ou son trépas. Il me laisse, l'ingrat ! Cet embarras funeste. Non, non, encore un coup : laissons agir Oreste. Qu'il meure, puisqu'enfin il a dû le prévoir, Et puisqu'il m'a forcée enfin à le vouloir. A le vouloir ? Hé quoi ! C'est donc moi qui l'ordonne ? Sa mort sera l'effet de l'amour d'Hermione ? Ce prince, dont mon cœur se faisait autrefois Avec tant de plaisir redire les exploits, A qui même en secret je m'étais destinée Avant qu'on eût conclu ce fatal hyménée, Je n'ai donc traversé tant de mers, tant d'États, Que pour venir si loin préparer son trépas, L'assassiner, le perdre ? Ah ! Devant qu'il expire…

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    Joachim du Bellay

    Joachim du Bellay

    @joachimDuBellay

    Au fleuve de Loire Ô de qui la vive course Prend sa bienheureuse source, D'une argentine fontaine, Qui d'une fuite lointaine, Te rends au sein fluctueux De l'Océan monstrueux, Loire, hausse ton chef ores Bien haut, et bien haut encores, Et jette ton œil divin Sur ce pays Angevin, Le plus heureux et fertile, Qu'autre où ton onde distille. Bien d'autres Dieux que toi, Père, Daignent aimer ce repaire, A qui le Ciel fut donneur De toute grâce et bonheur. Cérès, lorsque vagabonde Allait quérant par le monde Sa fille, dont possesseur Fut l'infernal ravisseur, De ses pas sacrés toucha Cette terre, et se coucha Lasse sur ton vert rivage, Qui lui donna doux breuvage. Et celui-là, qui pour mère Eut la cuisse de son père, Le Dieu des Indes vainqueur Arrosa de sa liqueur Les monts, les vaux et campaignes De ce terroir que tu baignes. Regarde, mon Fleuve, aussi Dedans ces forêts ici, Qui leurs chevelures vives Haussent autour de tes rives, Les faunes aux pieds soudains, Qui après biches et daims, Et cerfs aux têtes ramées Ont leurs forces animées. Regarde tes Nymphes belles A ces Demi-dieux rebelles, Qui à grand'course les suivent, Et si près d'elles arrivent, Qu'elles sentent bien souvent De leurs haleines le vent. Je vois déjà hors d'haleine Les pauvrettes, qui à peine Pourront atteindre ton cours, Si tu ne leur fais secours. Combien (pour les secourir) De fois t'a-t-on vu courir Tout furieux en la plaine ? Trompant l'espoir et la peine De l'avare laboureur, Hélas ! qui n'eut point d'horreur Blesser du soc sacrilège De tes Nymphes le collège, Collège qui se récrée Dessus ta rive sacrée. Qui voudra donc loue et chante Tout ce dont l'Inde se vante, Sicile la fabuleuse, Ou bien l'Arabie Heureuse. Quant à moi, tant que ma Lyre Voudra les chansons élire Que je lui commanderai, Mon Anjou je chanterai. Ô mon Fleuve paternel, Quand le dormir éternel Fera tomber à l'envers Celui qui chante ces vers, Et que par les bras amis Mon corps bien près sera mis De quelque fontaine vive, Non guère loin de ta rive, Au moins sur ma froide cendre Fais quelques larmes descendre, Et sonne mon bruit fameux A ton rivage écumeux. N'oublie le nom de celle Qui toutes beautés excelle, Et ce qu'ai pour elle aussi Chanté sur ce bord ici.

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    Joachim du Bellay

    Joachim du Bellay

    @joachimDuBellay

    Bérécynthienne Telle que dans son char la Bérécynthienne Couronnée de tours, et joyeuse d'avoir Enfanté tant de dieux, telle se faisait voir En ses jours plus heureux cette ville ancienne : Cette ville, qui fut plus que la Phrygienne Foisonnante en enfants, et de qui le pouvoir Fut le pouvoir du monde, et ne se peut revoir Pareille à sa grandeur, grandeur sinon la sienne.

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    Joachim du Bellay

    Joachim du Bellay

    @joachimDuBellay

    Comme on passe en été le torrent sans danger Comme on passe en été le torrent sans danger, Qui soulait en hiver être roi de la plaine, Et ravir par les champs d'une fuite hautaine L'espoir du laboureur et l'espoir du berger : Comme on voit les couards animaux outrager Le courageux lion gisant dessus l'arène, Ensanglanter leurs dents, et d'une audace vaine Provoquer l'ennemi qui ne se peut venger : Et comme devant Troie on vit des Grecs encor Braver les moins vaillants autour du corps d'Hector : Ainsi ceux qui jadis soulaient, à tête basse, Du triomphe romain la gloire accompagner, Sur ces poudreux tombeaux exercent leur audace, Et osent les vaincus les vainqueurs dédaigner.

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    Joachim du Bellay

    Joachim du Bellay

    @joachimDuBellay

    Je vis l’oiseau qui le soleil contemple Je vis l’oiseau qui le soleil contemple D’un faible vol au ciel s’aventurer, Et peu à peu ses ailes assurer, Suivant encor le maternel exemple. Je le vis croître, et d’un voler plus ample Des plus hauts monts la hauteur mesurer, Percer la nue, et ses ailes tirer Jusqu’au lieu où des dieux est le temple. Là se perdit : puis soudain je l’ai vu Rouant par l’air en tourbillon de feu, Tout enflammé sur la plaine descendre. Je vis son corps en poudre tout réduit, Et vis l’oiseau, qui la lumière fuit, Comme un vermet renaître de sa cendre.

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    Philippe Desportes

    Philippe Desportes

    @philippeDesportes

    Icare est chu ici, le jeune audacieux Icare est chu ici, le jeune audacieux, Qui pour voler au Ciel eut assez de courage : Ici tomba son corps degarni de plumage, Laissant tous braves cœurs de sa chute envieux. Ô bienheureux travail d'un esprit glorieux, Qui tire un si grand gain d'un si petit dommage ! Ô bienheureux malheur, plein de tant d'avantage Qu'il rende le vaincu des ans victorieux ! Un chemin si nouveau n'étonna sa jeunesse, Le pouvoir lui faillit, mais non la hardiesse ; Il eut, pour le brûler, des astres le plus beau. Il mourut poursuivant une haute aventure, Le ciel fut son désir, la mer sa sépulture : Est-il plus beau dessein, ou plus riche tombeau ?

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Hymne de la mort Masures, désormais on ne peut inventer Nul argument nouveau qui soit bon à chanter, Ou haut sur la trompette, ou bas dessus la lyre : Aux anciens la Muse a tout permis de dire, Tellement qu'il ne reste à nous autres derniers Sinon le désespoir d'ensuivre les premiers Et, béant après eux, reconnaître leur trace Faite au chemin frayé qui conduit sur Parnasse ; Lesquels jadis, guidés de leur mère Vertu, Ont tellement du pied ce grand chemin battu Qu'on ne voit aujourd'hui, sur la docte poussière D'Hélicon, que les pas d'Hésiode et d'Homère, D'Arate, de Nicandre, et de mille autres Grecs Des vieux siècles passés, qui burent à longs traits Toute l'eau jusqu'au fond des filles de Mémoire, N'en laissant une goutte aux derniers pour en boire, Qui maintenant confus, à foule à foule, vont Chercher encor de l'eau dessus le double Mont ; Mais ils montent en vain, car plus ils y séjournent, Et plus mourant de soif au logis s'en retournent. Moi donc qui, de longtemps, par épreuve sais bien Qu'au sommet de Parnasse on ne trouve plus rien Pour étancher la soif d'une gorge altérée, Je veux aller chercher quelque source sacrée D'un ruisseau non touché, qui murmurant s'enfuit Dedans un beau verger, loin de gens et de bruit, Source que le soleil n'aura jamais connue, Que les oiseaux du ciel de leur bouche cornue N'auront jamais souillée, et où les pastoureaux N'auront jamais conduit les pieds de leurs taureaux. Je boirai tout mon saoul de cette onde pucelle Et puis je chanterai quelque chanson nouvelle, Dont les accords seront peut-être si très doux Que les siècles voudront les redire après nous... Si les hommes pensaient à part eux quelquefois Qu'il nous faut tous mourir, et que même les Rois Ne peuvent éviter de la Mort la puissance, Ils prendraient en leurs coeurs un peu de patience. Sommes-nous plus divins qu'Achille ni qu'Ajax, Qu'Alexandre ou César, qui ne se surent pas Défendre du trépas, bien qu'ils eussent en guerre Réduite sous leurs mains presque toute la terre ? Beaucoup, ne sachant point qu'ils sont enfants de Dieu, Pleurent avant partir et s'attristent, au lieu De chanter hautement le péan de victoire, Et pensent que la Mort soit quelque bête noire Qui les viendra manger, et que dix mille vers Rongeront de leurs corps les os tout découverts, Et leur têt qui doit être, en un coin solitaire, L'effroyable ornement d'un ombreux cimetière... C'est le tout que de l'âme, il faut avoir soin d'elle : D'autant que Dieu l'a faite à jamais immortelle, Il faut trembler de peur que par faits vicieux Nous ne la bannissions de sa maison, les Cieux, Pour endurer, après un exil très moleste, Absente du regard de son Père céleste ; Et ne faut de ce corps avoir si grand ennui Qui n'est que son valet et son mortel étui, Brutal, impatient, de nature maline, Et qui toujours répugne à la raison divine... Il ne faut pas humer de Circé les vaisseaux, De peur que, transformés en tigres ou pourceaux, Nous ne puissions revoir d'Ithaque la fumée, Du Ciel notre demeure à l'âme accoutumée, Où tous nous faut aller, non chargés du fardeau D'orgueil, qui nous ferait périr notre bateau Ains que venir au port, mais chargés d'espérance, Pauvreté, nudité, tourment et patience, Comme étant vrais enfants et disciples de Christ, Qui vivant nous bailla ce chemin par écrit Et marqua de son sang cette voie très sainte, Mourant tout le premier, pour nous ôter la crainte. Oh! que d'être jà morts nous serait un grand bien, Si nous considérions que nous ne sommes rien Qu'une terre animée et qu'une vivante ombre, Le sujet de douleur, de misère et d'encombre, Voire, et que nous passons en misérables maux Le reste (ô crève-coeur!) de tous les animaux. Non pour autre raison Homère nous égale A la feuille d'hiver qui des arbres dévale, Tant nous sommes chétifs et pauvres journaliers Recevant sans repos maux sur maux à milliers... Masures, on dira que toute chose humaine Se peut bien recouvrer, terres, rentes, domaine, Maisons, femmes, honneurs, mais que par nul effort On ne peut recouvrer l'âme quand elle sort, Et qu'il n'est rien si beau que de voir la lumière. De ce commun Soleil, qui n'est seulement chère Aux hommes sains et forts, mais aux vieux chargés d'ans, Perclus, estropiés, catarrheux, impotents. Tu diras que toujours tu vois ces platoniques, Ces philosophes pleins de propos magnifiques, Dire bien de la Mort; mais quand ils sont jà vieux Et que le flot mortel leur noue dans les yeux, Et que leur pied tremblant est déjà sur la tombe, Que la parole grave et sévère leur tombe, Et commencent en vain à gémir et pleurer, Et voudraient, s'ils pouvaient, leur trépas différer. Tu me diras encore que tu trembles de crainte D'un batelier Charon, qui passe par contrainte Les âmes outre l'eau d'un torrent effrayant, Et que tu crains le Chien à trois voix aboyant, Et les eaux de Tantale et le roc de Sisyphe, Et des cruelles Soeurs l'abominable griffe, Et tout cela qu'ont feint les poètes là-bas Nous attendre aux Enfers après notre trépas. Quiconque dis ceci, pour Dieu, qu'il te souvienne Que ton âme n'est pas païenne, mais chrétienne, Et que notre grand Maître en la Croix étendu, Et mourant, de la Mort l'aiguillon a perdu, Et d'elle maintenant n'a fait qu'un beau passage A retourner au Ciel, pour nous donner courage De porter notre croix, fardeau léger et doux, Et de mourir pour lui comme il est mort pour nous, Sans craindre comme enfants la nacelle infernale, Le rocher d'Ixion, et les eaux de Tantale, Et Charon, et le chien Cerbère à trois abois, Desquels le sang de Christ t'affranchit en la Croix, Pourvu qu'en ton vivant tu lui veuilles complaire, Faisant ses mandements qui sont aisés à faire ; Car son joug est plaisant, gracieux et léger, Qui le dos nous soulage en lieu de le charger... S'il y avait au monde un état de durée, Si quelque chose était en la terre assurée, Ce serait un plaisir de vivre longuement ; Mais, puisqu'on n'y voit rien qui ordinairement Ne se change et rechange, et d'inconstance abonde, Ce n'est pas grand plaisir que de vivre en ce monde ; Nous le connaissons bien, qui toujours lamentons Et pleurons aussitôt que du ventre sortons, Comme présagiant, par naturel augure, De ce logis mondain la misère future... Que ta puissance, ô Mort, est grande et admirable ! Rien au monde par toi ne se dit perdurable ; Mais, tout ainsi que l'onde à val des ruisseaux fuit Le pressant coulement de l'autre qui la suit, Ainsi le temps se coule, et le présent fait place Au futur importun qui les talons lui trace. Ce qui fut, se refait ; tout coule comme une eau, Et rien dessous le Ciel ne se voit de nouveau ; Mais la forme se change en une autre nouvelle, Et ce changement là Vivre au monde s'appelle, Et Mourir, quand la forme en une autre s'en va... Mais notre âme immortelle est toujours en un lieu Au change non sujette, assise auprès de Dieu, Citoyenne à jamais de la ville éthérée, Qu'elle avait si longtemps en ce corps désirée. Je te salue, heureuse et profitable Mort, Des extrêmes douleurs médecin et confort ! Quand mon heure viendra, Déesse, je te prie, Ne me laisse longtemps languir en maladie, Tourmenté dans un lit ; mais, puisqu'il faut mourir, Donne-moi que soudain je te puisse encourir, Ou pour l'honneur de Dieu, ou pour servir mon Prince, Navré d'une grande plaie au bord de ma province.

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    Stéphane Mallarmé

    Stéphane Mallarmé

    @stephaneMallarme

    Mes bouquins refermés sur le nom de Paphos Mes bouquins refermés sur le nom de Paphos, Il m’amuse d’élire avec le seul génie Une ruine, par mille écumes bénie Sous l’hyacinthe, au loin, de ses jours triomphaux.

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    Théophile Gautier

    Théophile Gautier

    @theophileGautier

    Fantaisie d'hiver Dans le bassin des Tuileries, Le cygne s'est pris en nageant, Et les arbres, comme aux féeries, Sont en filigrane d'argent. Les vases ont des fleurs de givre, Sous la charmille aux blancs réseaux; Et sur la neige on voit se suivre Les pas étoiles des oiseaux. Au piédestal où, court-vêtue, Vénus coudoyait Phocion, L'Hiver a posé pour statue La Frileuse de Clodion.

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    Vincent Voiture

    Vincent Voiture

    @vincentVoiture

    Des portes du matin l'Amante de Céphale Des portes du matin l'Amante de Céphale, Ses roses épandait dans le milieu des airs, Et jetait sur les cieux nouvellement ouverts Ces traits d'or et d'azur qu'en naissant elle étale,

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