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Espérance

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Espérance

Poésies de la collection espérance

    A

    Adélaïde Dufrenoy

    @adelaideDufrenoy

    Le pouvoir d’un amant J’aime tout dans l’objet de ma fidèle ardeur, Le génie et le caractère ; J’aime son regard enchanteur, Son souris malin et flatteur, Et son humeur grave et légère. J’aime son esprit juste et fin ; J’aime encor les jaloux caprices Qui lui font haïr le matin Ce qui le soir fait ses délices ; J’aime son air noble et lutin. J’aime le pouvoir despotique Que son cœur orgueilleux exerce sur le mien ; Ses éloges adroits, son adroite critique, Me font chérir son entretien. Il n’a que plus de grâce alors qu’il est coupable : En vain se défend-on de vivre sous sa loi, On l’adore en dépit de soi ; Nul n’a plus de défaut, et nul n’est plus aimable. S’il est parfois un peu trompeur, Il sait par tant d’amour expier tant d’alarmes Qu’aux pleurs qu’il fait répandre on trouve encor des charmes. Son tendre repentir donne encor le bonheur. Sa flamme maintenant à la mienne est égale ; Mais, s’il pouvait changer un jour, Il me ferait, je crois, lui pardonner l’amour Qu’il sentirait pour ma rivale.

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    A

    Adélaïde Dufrenoy

    @adelaideDufrenoy

    Le répit C’est trop en des vœux superflus Perdre les jours de mon bel âge ; C’est trop par des soins assidus D’un ingrat mendier l’hommage : Dès ce moment ne l’aimons plus ; C’est le seul parti qui soit sage. Mais ce soir en secret il demande à me voir… Son cœur peut-être a su m’entendre ; Peut-être que ce soir l’entretien sera tendre… Aimons l’ingrat jusqu’à ce soir.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    A George Sand (VI) Porte ta vie ailleurs, ô toi qui fus ma vie ; Verse ailleurs ce trésor que j’avais pour tout bien. Va chercher d’autres lieux, toi qui fus ma patrie, Va fleurir, ô soleil, ô ma belle chérie, Fais riche un autre amour et souviens-toi du mien. Laisse mon souvenir te suivre loin de France ; Qu’il parte sur ton coeur, pauvre bouquet fané, Lorsque tu l’as cueilli, j’ai connu l’Espérance, Je croyais au bonheur, et toute ma souffrance Est de l’avoir perdu sans te l’avoir donné.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    A une fleur Que me veux-tu, chère fleurette, Aimable et charmant souvenir ? Demi-morte et demi-coquette, Jusqu’à moi qui te fait venir ? Sous ce cachet enveloppée, Tu viens de faire un long chemin. Qu’as-tu vu ? que t’a dit la main Qui sur le buisson t’a coupée ? N’es-tu qu’une herbe desséchée Qui vient achever de mourir ? Ou ton sein, prêt à refleurir, Renferme-t-il une pensée ? Ta fleur, hélas ! a la blancheur De la désolante innocence ; Mais de la craintive espérance Ta feuille porte la couleur. As-tu pour moi quelque message ? Tu peux parler, je suis discret. Ta verdure est-elle un secret ? Ton parfum est-il un langage ? S’il en est ainsi, parle bas, Mystérieuse messagère ; S’il n’en est rien, ne réponds pas ; Dors sur mon coeur, fraîche et légère. Je connais trop bien cette main, Pleine de grâce et de caprice, Qui d’un brin de fil souple et fin A noué ton pâle calice. Cette main-là, petite fleur, Ni Phidias ni Praxitèle N’en auraient pu trouver la soeur Qu’en prenant Vénus pour modèle. Elle est blanche, elle est douce et belle, Franche, dit-on, et plus encor ; A qui saurait s’emparer d’elle Elle peut ouvrir un trésor. Mais elle est sage, elle est sévère ; Quelque mal pourrait m’arriver. Fleurette, craignons sa colère. Ne dis rien, laisse-moi rêver.

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    Alfred de Vigny

    Alfred de Vigny

    @alfredDeVigny

    L’esprit pur I Si l’orgueil prend ton cœur quand le peuple me nomme, Que de mes livres seuls te vienne ta fierté. J’ai mis sur le cimier doré du gentilhomme Une plume de fer qui n’est pas sans beauté. J’ai fait illustre un nom qu’on m’a transmis sans gloire. Qu’il soit ancien, qu’importe ? — Il n’aura de mémoire Que du jour seulement où mon front l’a porté. II Dans le caveau des miens plongeant mes pas nocturnes, J’ai compté mes aïeux, suivant leur vieille loi. J’ouvris leurs parchemins, je fouillai dans leurs urnes Empreintes sur le flanc des sceaux de chaque roi. À peine une étincelle a relui dans leur cendre. C’est en vain que d’eux tous le sang m’a fait descendre ; Si j’écris leur histoire, ils descendront de moi. III Ils furent opulents, seigneurs de vastes terres, Grands chasseurs devant Dieu, comme Nemrod, jaloux Des beaux cerfs qu’ils lançaient des bois héréditaires Jusqu’où voulait la mort les livrer à leurs coups ; Suivant leur forte meute à travers deux provinces, Coupant les chiens du Roi, déroutant ceux des princes, Forçant les sangliers et détruisant les loups ; IV Galants guerriers sur terre et sur mer, se montrèrent Gens d’honneur en tous temps, comme en tous lieux, cherchant De la Chine au Pérou les Anglais, qu’ils brûlèrent Sur l’eau qu’ils écumaient du levant au couchant ; Puis, sur leur talon rouge, en quittant les batailles, Parfumés et blessés revenaient à Versailles Jaser à l’Œil-de-bœuf avant de voir leur champ. V Mais les champs de la Beauce avaient leurs cœurs, leurs âmes, Leurs soins. Ils les peuplaient d’innombrables garçons, De filles qu’ils donnaient aux chevaliers pour femmes, Dignes de suivre en tout l’exemple et les leçons ; Simples et satisfaits si chacun de leur race Apposait saint Louis en croix sur sa cuirasse, Comme leurs vieux portraits qu’aux murs noirs nous plaçons. VI Mais aucun, au sortir d’une rude campagne, Ne sut se recueillir, quitter le destrier, Dételer pour un jour ses palefrois d’Espagne, Ni des coursiers de chasse enlever l’étrier Pour graver quelque page et dire en quelque livre Comme son temps vivait et comment il sut vivre, Dès qu’ils n’agissaient plus, se hâtant d’oublier. VII Tous sont morts en laissant leur nom sans auréole ; Mais sur le disque d’or voilà qu’il est écrit, Disant : « Ici passaient deux races de la Gaule « Dont le dernier vivant monte au temple et s’inscrit, « Non sur l’obscur amas des vieux noms inutiles, « Des orgueilleux méchants et des riches futiles, « Mais sur le pur tableau des livres de l’esprit. » VIII Ton règne est arrivé, pur esprit, roi du monde ! Quand ton aile d’azur dans la nuit nous surprit, Déesse de nos mœurs, la guerre vagabonde Régnait sur nos aïeux. — Aujourd’hui, c’est l’écrit, L’écrit universel, parfois impérissable, Que tu graves au marbre ou traînes sur le sable, Colombe au bec d’airain ! visible saint-esprit ! IX Seul et dernier anneau de deux chaînes brisées, Je reste. — Et je soutiens encor dans les hauteurs, Parmi les maîtres purs de nos savants musées, L’idéal du poëte et des graves penseurs. J’éprouve sa durée en vingt ans de silence, Et toujours, d’âge en âge encor, je vois la France Contempler mes tableaux et leur jeter des fleurs. X Jeune postérité d’un vivant qui vous aime ! Mes traits dans vos regards ne sont pas effacés ; Je peux en ce miroir me connaître moi-même, Juge toujours nouveau de nos travaux passés ! Flots d’amis renaissants ! Puissent mes destinées Vous amener à moi, de dix en dix années, Attentifs à mon œuvre, et pour moi c’est assez ! 10 mars 1863.

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    André Chénier

    André Chénier

    @andreChenier

    Le mendiant C’était quand le printemps a reverdi les prés. La fille de Lycus, vierge aux cheveux dorés, Sous les monts Achéens, non loin de Crénée, ……………….. ……………….. Errait à l’ombre, aux bords du faible et pur Crathis ; Car les eaux du Crathis, sous des berceaux de frêne, Entouraient de Lycus le fertile domaine. …….. Soudain, à l’autre bord, Du fond d’un bois épais, un noir fantôme sort Tout pâle, demi-nu, la barbe hérissée Il remuait à peine une lèvre glacée ; Des hommes et, des dieux implorait le secours, Et dans la forêt sombre errait depuis deux jours. Il se traîne, il n’attend qu’une mort douloureuse ; Il succombe. L’enfant, interdite et peureuse À ce hideux aspect sorti du fond du bois, Veut fuir ; mais elle entend sa lamentable voix. Il tend les bras, il tombe à genoux ; il lui crie Qu’au nom de tous les dieux il la conjure, il prie, Et qu’il n’est point à craindre, et qu’une ardente faim L’aiguillonne et le tue, et qu’il expire enfin. « Si, comme je le crois, belle dès ton enfance, » C’est le dieu de ces eaux qui t’a donné naissance, » Nymphe, souvent les vœux des malheureux humains » Ouvrent des immortels les bienfaisantes mains. » Ou si c’est quelque front porteur d’une couronne » Qui te nomme sa fille et te destine au trône, » Souviens-toi, jeune enfant, que le ciel quelquefois » Venge les opprimés sur la tête des rois. » Belle vierge, sans doute enfant d’une déesse, » Crains de laisser périr l’étranger en détresse ; » L’étranger qui supplie est envoyé des dieux. » Elle reste. À le voir elle enhardit ses yeux ; ……..et d’une voix encore Tremblante : « Ami, le ciel écoute qui l’implore ; » Mais ce soir, quand la nuit descend sur l’horison, » Passe le pont mobile, entre dans la maison ; » J’aurai soin qu’on te laisse entrer sans méfiance. » Pour la dixième fois célébrant ma naissance, » Mon père doit donner une fête aujourd’hui. » Il m’aime ; il n’a que moi ; viens t’adresser à lui. » C’est le riche Lycus. Viens ce soir ; il est tendre, » Il est humain : il pleure aux pleurs qu’il voit répandre. » Elle dit, et s’arrête, et le cœur palpitant, S’enfuit ; car l’étranger, sur elle en l’écoutant, Fixait de ses yeux creux l’attention avide. Elle rentre, cherchant dans le palais splendide L’esclave près de qui toujours ses jeunes ans Trouvent un doux accueil et des soins complaisans. Cette sage affranchie avait nourri sa mère ; Maintenant sous des lois de vigilance austère, Elle et son vieil époux, au devoir rigoureux, Rangent des serviteurs le cortége nombreux. Elle la voit de loin dans le fond du portique, Court, et posant ses mains sur ce visage antique : « Indulgente nourrice, écoute ; il faut de toi » Que j’obienne un grand bien. Ma mère, écoute-moi : » Un pauvre, un étranger, dans la misère extrême, » Gémit sur l’autre bord, mourant, affamé, blême… » Ne me décèle point. De mon père aujourd’hui » J’ai promis qu’il pourrait solliciter l’appui. » Fais qu’il entre ; et surtout, ô mère de ma mère ! » Garde que nul mortel n’insulte à sa misère. » Oui, ma fille ; chacun fera ce que tu veux, » Dit l’esclave en baisant son front et ses cheveux ; » Oui ; qu’à ton protégé ta fête soit ouverte. » Ta mère, mon élève, (inestimable perte !) » Aimait à soulager les faibles abattus. » Tu lui ressembleras autant par tes vertus » Que par tes yeux si doux, et tes graces naïves. » Mais, cependant la nuit assemble les convives En habits somptueux, d’essences parfumés, Ils entrent. Aux lambris d’ivoire et d’or semés, Pend le lin d’Ionie en brillantes courtines ; Le toit s’égaie et rit de mille odeurs divines. La table au loin circule, et d’apprêts savoureux Se charge. L’encens vole en longs flots vaporeux ; Sur leurs bases d’argent, des formes animées Élèvent dans leurs mains des torches enflammées ; Les figures, l’onyx, le cristal, les métaux En vases hérissés d’hommes ou d’animaux, Partout sur les buffets, sur la table étincèlent ; Plus d’une lyre est prête ; et partout s’amoncèlent Et les rameaux de myrte et les bouquets de fleurs. On s’étend sur les lits teints de mille couleurs ; Près de Lycus, sa fille idole de la fête, Est admise. La rose a couronné sa tête. Mais pour que la décence impose un juste frein, Lui-même est par eux tous élu Roi du festin. ; Et déjà vins, chansons, joie, entretiens sans nombre. Lorsque la double porte ouverte, un spectre sombre Entre ; cherchant des yeux l’autel hospitalier. La jeune enfant rougit. Il court vers le foyer ; Il embrasse l’autel, s’assied parmi la cendre ; Et tous, l’œil étonné, se taisent pour l’entendre. « Lycus, fils d’Evénon, que les dieux et le temps » N’osent jamais troubler tes destins éclatans. » Ta pourpre, tes trésors, ton front noble et tranquille » Semblent d’un roi puissant l’idole de sa ville. » À ton riche banquet un peuple convié, » T’honore comme un dieu de l’Olympe envoyé. » Regarde un étranger qui meurt dans la poussière » Si tu ne tends vers lui ta main hospitalière. » Inconnu, j’ai franchi le seuil de ton palais : » Trop de pudeur peut nuire à qui vit de bienfaits. » Lycus, par Jupiter, par ta fille innocente » Qui m’a seule indiqué ta porte bienfaisante ! » Je fus riche, autrefois : mon banquet opulent » N’a jamais repoussé l’étranger suppliant. » Et pourtant aujourd’hui la faim est mon partage, » La faim qui flétrit l’aine autant que le visage, » Par qui l’homme souvent importun, odieux, » Est contraint de rougir et de baisser les yeux. » — Étranger, tu dis vrai, le hasard téméraire » Des bons ou des méchans fait le destin prospère. » Mais sois mon hôte. Ici l’on hait plus que l’enfer » Le public ennemi, le riche au cœur de fer, » Enfant de Némésis, dont le dédain barbare » Aux besoins des mortels ferme son cœur avare. » Je rends grâce à l’enfant qui t’a conduit ici. » Ma fille, c’est bien fait ; poursuis toujours ainsi. » Respecter l’indigence est un devoir suprême. » Souvent les immortels (et Jupiter lui-même) » Sous des haillons poudreux, de seuil en seuil traînés, » Viennent tenter le cœur des humains fortunés. » D’accueil et de faveur un murmure s’élève. Lycus descend, accourt, tend la main, le relève : « Salut, père étranger ; et que puissent tes vœux » Trouver le ciel propice à tout ce que tu veux. » Mon hôte, lève-toi. Tu parais noble et sage ; » Mais cesse avec ta main de cacher ton visage. » Souvent marchent ensemble indigence et vertu ; » Souvent d’un vil manteau le sage revêtu, » Seul, vit avec les dieux et brave un sort inique. » Couvert de chauds tissus, à l’ombre du portique, » Sur de molles toisons, en un calme sommeil, » Tu peux, ici dans l’ombre, attendre le soleil. » Je te ferai revoir tes foyers, ta patrie, » Tes parens, si les dieux ont épargné leur vie. » Car tout mortel errant nourrit un long amour » D’aller revoir le sol qui lui donna le jour. » Mon hôte, tu franchis le seuil de ma famille » À l’heure qui jadis a vu naître ma fille. » Salut ! Vois, l’on t’apporte et la table et le pain : » Sieds-toi. Tu vas d’abord rassasier ta faim. » Puis, si nulle, raison ne te force au mystère, » Tu nous diras ton nom, ta patrie et ton père. » Il retourne, à sa place après que l’indigent S’est assis. Sur ses mains dans l’aiguière d’argent, Par une jeune esclave une eau pure est versée. Une table de cèdre où l’éponge est passée, S’approche ; et vient offrir à son avide main Et les fumantes chairs sur les disques d’airain, Et l’amphore vineuse et la coupe aux deux anses. « Mange et bois, dit Lycus ; oublions les souffrances. » Ami, leur lendemain est, dit-on, un beau jour. » ……………….. Bientôt Lycus se lève et fait emplir sa coupe, Et veut que l’échanson verse à toute la troupe « Pour boire à Jupiter, qui nous daigne envoyer » L’étranger, devenu l’hôte de mon foyer. » Le vin de, main en main va roulant à la ronde ; Lycus lui-même emplit une coupe profonde, L’envoie à l’étranger : « Salut, mon hôte, bois. » De ta ville bientôt tu reverras les toits, » Fussent-ils par-delà les glaces du Caucase. » Des mains de l’échanson l’étranger prend le vase, Se lève ; sur eux tous il invoque les dieux. On boit ; il se rassied. Et jusques sur les yeux Ses noirs cheveux toujours ombrageant son visage, De sourire et de plainte il mêle son langage. « Mon hôte, maintenant que sous tes nobles toits, » De l’importun besoin j’ai calmé les abois, » Oserai-je à ma langue abandonner les rênes ? » Je n’ai plus ni pays, ni parens, ni domaines. » Mais écoute : le vin, par toi-même versé, M’ouvre la bouche. Ainsi, puisque j’ai commencé, » Entends ce que peut-être il eût mieux valu taire. » Excuse enfin ma langue, excuse ma prière ; » Car du vin, tu le sais, la téméraire ardeur » Souvent à l’excès même enhardit la pudeur. » Meurtri de durs cailloux ou de sables arides, » Déchiré de buissons, ou d’insectes avides, » D’un long jeûne flétri ; d’un long chemin lassé, » Et de plus d’un grand fleuve en nageant traversé, » Je parais énervé, sans vigueur, sans courage ; » Mais je suis né robuste et n’ai point passé l’âgé. » La force et le travail, que je n’ai point perdus, » Par un peu de repos me vont être rendus. » Emploie alors mes bras à quelques soins rustiques. » Je puis dresser au char tes coursiers olympiques, » Ou, sous les feux du jour, courbé vers le sillon, » Presser deux forts taureaux du piquant aiguillon. » Je puis même, tournant la meule nourricière, » Broyer le pur froment en farine légère. » Je puis, la serpe en main, planter et diriger » Et le cep et la treille, espoir de ton verger. » Je tiendrai la faucille ou la faux recourbée, » Et devant mes pas, l’herbe ou la moisson tombée » Viendra remplir ta grange en la belle saison ; » Afin que nul mortel ne dise en ta maison, » Me regardant d’un œil insultant et colère : » Ô vorace étranger ! qu’on nourrit à rien faire. » — Vénérable indigent, va, nul mortel chez moi » N’oserait élever sa langue contre toi. » Tu peux ici rester, même oisif et tranquille, » Sans craindre qu’un affront ne trouble ton asile. » — L’indigent se méfie. — Il n’est plus de danger. » — L’homme est né pour souffrir. — Il est né pour changer. » — Il change d’infortune ! — Ami, reprends courage : » Toujours un vent glacé ne souffle point l’orage. » Le ciel d’un jour à l’autre est humide ou serein, » Et tel pleure aujourd’hui qui sourira demain. » — Mon hôte, en tes discours préside la sagesse. » Mais quoi ! la confiante et paisible richesse » Parle ainsi. L’indigent espère en vain du sort ; » En espérant toujours il arrive à la mort. » Dévoré de besoin, de projets, d’insomnie, » Il vieillit dans l’opprobre et dans l’ignominie. » Rebuté des humains durs, envieux, ingrats, » Il a recours aux dieux qui ne l’entendent pas. » Toutefois ta richesse accueille mes misères ; » Et puisque ton cœur s’ouvre à la voix des prières, » Puisqu’il sait, ménageant le faible humilié, » D’indulgence et d’égards tempérer la pitié, » S’il est des dieux du pauvre, ô Lycus ! que ta vie » Soit un objet pour tous et d’amour et d’envie. » — Je te le dis encore, espérons, étranger. » Que mon exemple au moins serve à t’encourager. » Des changemens du sort j’ai fait l’expérience. » Toujours un même éclat n’a point à l’indigence » Fait du riche Lycus envier le destin » J’ai moi-même été pauvre et j’ai tendu la main. » Cléotas de Larisse, en ses jardins immenses, » Offrit à mon travail de justes récompenses. » Jeune ami, j’ai trouvé quelques vertus en toi ; » Va, sois heureux, dit-il, et te souviens de moi. » Oui, oui, je m’en souviens : Cléotas fut mon père ; » Tu vois le fruit des dons de sa bonté prospère. » À tous les malheureux je rendrai désormais » Ce que dans mon malheur je dus à ses bienfaits. » Dieux, l’homme bienfaisant est votre cher ouvrage, » Vous n’avez point ici d’autre visible image ; » Il porte votre empreinte, il sortit de vos mains » Pour vous représenter aux regards des humains. » Veillez sur Cléotas ! Qu’une fleur éternelle, » Fille d’une ame pure, en ses traits étincelle ; » Que nombre de bienfaits, ce sont là ses amours, » Fassent une couronne à chacun de ses jours ; » Et quand une mort douce et d’amis entourée, » Recevra sans douleur sa vieillesse sacrée, » Qu’il laisse avec ses biens ses vertus pour appui » À des fils s’il se peut encor meilleurs que lui. » — Hôte des malheureux, le sort inexorable » Ne prend point Ies avis de l’homme secourable. » Tous, par sa main de fer en aveugles poussés, » Nous vivons ; et tes vœux ne sont point exaucés. » Cléotas est perdu, son injuste patrie » L’a privé de ses biens ; elle a proscrit sa vie. » De ses concitoyens dès long-temps envié, » De ses nombreux amis en un jour oublié, » Au lieu de ces tapis qu’avait tissus l’Euphrate, » Au lien de ces festins brillans d’or et d’agathe, » Où ses hôtes, parmi les chants, harmonieux, » Savouraient jusqu’au jour les vins délicieux, » Seul maintenant, sa faim visitant les feuillages, » Dépouille les buissons de quelques fruits sauvages ; » Ou chez le riche altier apportant ses douleurs, » Il mange un pain amer tout trempé de ses pleurs. » Errant et fugitif, de ses beaux jours de gloire » Gardant, pour son malheur, la pénible mémoire, » Sous les feux du midi, sous le froid des hivers, » Seul, d’exil en exil, de déserts en déserts, » Pauvre et semblable à moi, languissant et débile, » Sans appui qu’un bâton, sans foyer, sans asile, » Revêtu de ramée ou de quelques lambeaux, » Et sans que nul mortel attendri sur ses maux, » D’un souhait de bonheur le flatte et l’encourage ; » Les torrens et la mer, l’aquilon et l’orage, » Des corbeaux et des loups les tristes hurlemens » Répondant seuls la nuit à ses gémissemens ; » N’ayant d’autres amis que les bois solitaires, » D’autres consolateurs que ses larmes amères, » Il se traîne ; et souvent sur la pierre il s’endort » À la porte d’un temple, en invoquant la mort. » — Que m’as-tu dit ? La foudre a tombé sur ma tête. » Dieux ! ah grands dieux ! partons Plus de jeux plus de fête, » Partons. Il faut vers lui trouver des chemins sûrs ; » Partons. Jamais sans lui je ne revois ces murs. » Ah dieux ! quand dans le vin, les festins, l’abondance, » Enivré des vapeurs d’une folle opulence, » Celui qui lui, doit tout chante et s’oublie et rit, » Lui peut-être il expire, affamé, nu, proscrit, » Maudissant, cornue ingrat, son vieil ami qui l’aime. » Parle : était-ce bien lui ? le connais-tu toi-même ? » En quels lieux était-il ? où portait-il ses pas ? » Il sait où vit Lycus, pourquoi ne vient-il pas ? » Parle : était-ce bien lui ? parle, parle, te dis-je ; » Où l’as-tu vu ? Mon hôte, à regret je t’afflige. » C’était lui, je l’ai vu ………… ……………….. ………. » Les douleurs de son ame » Avaient changé ses traits. Ses deux fils et sa femme, » À Delphes, confiés au ministre du dieu, » Vivaient de quelques dons offerts dans le saint lieu. » Par des sentiers secrets fuyant l’aspect des villes, » On les avait suivis jusques aux Thermopyles. » Il en gardait encore un douloureux effroi. » Je le connais ; je fus son ami comme toi. » D’un même sort jaloux une même injustice » Nous a tous deux plongés au même précipice. » Il me donna jadis (ce bien seul m’est resté) » Sa marque d’alliance et d’hospitalité. » Vois si tu la connais. » Ô surprise ! Immobile, Lycus a reconnu son propre sceau d’argile ; Ce sceau, don mutuel d’immortelle amitié, Jadis à Cléotas par lui-même envoyé. Il ouvre un œil avide, et long-temps envisage L’étranger. Puis enfin sa voix trouve un passage. « Est-ce toi, Cléotas ? toi, qu’ainsi je revoi ? » Tout ici t’appartient. Ô mon père ! est-ce toi ? » Je rougis que mes yeux aient pu te méconnaître. » Ô Cléotas ! mon père ! ô toi, qui fus mon maître » Viens ; je n’ai fait ici que garder ton trésor ; » Et ton ancien Lycus veut te servir encor. » J’ai honte à ma fortune en regardant la tienne. » Et dépouillant soudain la pourpre tyrienne Que tient sur son épaule une agrafe d’argent, Il l’attache lui-même à l’auguste indigent. Les convives levés l’entourent ; l’allégresse Rayonne en tous les yeux. La famille s’empresse ; On cherche des habits, on réchauffe le bain. La jeune enfant approche, il rit ; lui tend la main. « Car c’est toi, lui dit-il, c’est toi qui la première » Ma fille, m’as ouvert la porte hospitalière. »

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    Antoine-Vincent Arnault

    Antoine-Vincent Arnault

    @antoineVincentArnault

    Le riche et le pauvre Penses-y deux fois, je t'en prie ; À jeun, mal chaussé, mal vêtu, Pauvre diable ! comment peux-tu Sur un billet de loterie Mettre ainsi ton dernier écu ? C'est par trop manquer de prudence ; Dans l'eau c'est jeter ton argent ; C'est vouloir... — Non dit l'indigent ; C'est acheter de l'espérance.

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    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Est-elle almée ? Est-elle almée ?... aux premières heures bleues Se détruira-t-elle comme les fleurs feues... Devant la splendide étendue où l'on sente Souffler la ville énormément florissante ! C'est trop beau ! c'est trop beau ! mais c'est nécessaire - Pour la Pêcheuse et la chanson du Corsaire, Et aussi puisque les derniers masques crurent Encore aux fêtes de nuit sur la mer pure !

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    A

    Auguste Lacaussade

    @augusteLacaussade

    Les oiseaux Enfants des airs, heureux oiseaux, lyres ailées, Qui passez si légers, si libres dans les champs ; Hôtes harmonieux des monts et des vallées, Qui dépensez vos jours dans la joie et les chants ; Poètes qui chantez en tous lieux, à toute heure, Ignorant les soucis dont l’homme est agité ; Qui, le soir, dans les bois trouvez une demeure, Et dans l’air, le matin, trouvez la liberté ; Rivaux heureux, rivaux aux chansons éternelles, Que je vous porte envie en vous suivant des yeux ! Quand la terre a blessé vos pieds, ouvrant les ailes, Vous pouvez fuir du moins et monter vers les cieux. Vous prodiguant les biens dont la nature est pleine, Le sort vous livre tout sans lutte et sans combats ; Sans suspendre vos chants vous trouvez dans la plaine L’eau claire et l’épi mûr que nous n’y trouvons pas. Le ciel qui vous sourit est pour nous bien austère ; Il a courbé nos jours sous un bien lourd fardeau : Pour rafraîchir les fronts que la pensée altère, Les rameaux n’ont point d’ombre et les fleurs n’ont point d’eau. Chanteurs favorisés, ô voix pleines de charmes ! Oui ! la terre vous aime, oui ! le sort vous est doux. Bénissez donc le ciel, oiseaux, gosiers sans larmes ! Bénissez-le pour vous et priez-le pour nous ! Priez Dieu qu’il nous fasse, après les jours contraires, Et des cieux plus cléments et des soleils meilleurs ; Priez Dieu pour qu’il donne aux poètes, vos frères, Un épi dans la plaine et de l’eau dans les fleurs. ENVOI AU POÈTE OCTAVE LACROIX De l’oiseau vous avez, ami, la voix et l’aile ; Comme lui vous fuyez la terre pour le ciel. A l’idéal en vous le poète est fidèle : Vous aimez, vous chantez, cœur d’or, esprit sans fiel.

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Chacun sa chimère Sous un grand ciel gris, dans une grande plaine poudreuse, sans chemins, sans gazon, sans un chardon, sans une ortie, je rencontrai plusieurs hommes qui marchaient courbés. Chacun d’eux portait sur son dos une énorme Chimère, aussi lourde qu’un sac de farine ou de charbon, ou le fourniment d’un fantassin romain. Mais la monstrueuse bête n’était pas un poids inerte ; au contraire, elle enveloppait et opprimait l’homme de ses muscles élastiques et puissants ; elle s’agrafait avec ses deux vastes griffes à la poitrine de sa monture ; et sa tête fabuleuse surmontait le front de l’homme, comme un de ces casques horribles par lesquels les anciens guerriers espéraient ajouter à la terreur de l’ennemi. Je questionnai l’un de ces hommes, et je lui demandai où ils allaient ainsi. Il me répondit qu’il n’en savait rien, ni lui, ni les autres ; mais qu’évidemment ils allaient quelque part, puisqu’ils étaient poussés par un invincible besoin de marcher. Chose curieuse à noter : aucun de ces voyageurs n’avait l’air irrité contre la bête féroce suspendue à son cou et collée à son dos ; on eût dit qu’il la considérait comme faisant partie de lui-même. Tous ces visages fatigués et sérieux ne témoignaient d’aucun désespoir ; sous la coupole spleenétique du ciel, les pieds plongés dans la poussière d’un sol aussi désolé que ce ciel, ils cheminaient avec la physionomie résignée de ceux qui sont condamnés à espérer toujours. Et le cortége passa à côté de moi et s’enfonça dans l’atmosphère de l’horizon, à l’endroit où la surface arrondie de la planète se dérobe à la curiosité du regard humain. Et pendant quelques instants je m’obstinai à vouloir comprendre ce mystère ; mais bientôt l’irrésistible Indifférence s’abattit sur moi, et j’en fus plus lourdement accablé qu’ils ne l’étaient eux-mêmes par leurs écrasantes Chimères.

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    La mort des pauvres C’est la Mort qui console, hélas ! et qui fait vivre ; C’est le but de la vie, et c’est le seul espoir Qui, comme un élixir, nous monte et nous enivre, Et nous donne le cœur de marcher jusqu’au soir ; À travers la tempête, et la neige, et le givre, C’est la clarté vibrante à notre horizon noir ; C’est l’auberge fameuse inscrite sur le livre, Où l’on pourra manger, et dormir, et s’asseoir ; C’est un Ange qui tient dans ses doigts magnétiques Le sommeil et le don des rêves extatiques, Et qui refait le lit des gens pauvres et nus ; C’est la gloire des Dieux, c’est le grenier mystique, C’est la bourse du pauvre et sa patrie antique, C’est le portique ouvert sur les Cieux inconnus !

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    C

    Charles Marie René Leconte de Lisle

    @charlesMarieReneLeconteDeLisle

    La mort du soleil Le vent d’automne, aux bruits lointains des mers pareil, Plein d’adieux solennels, de plaintes inconnues, Balance tristement le long des avenues Les lourds massifs rougis de ton sang, ô soleil ! La feuille en tourbillons s’envole par les nues ; Et l’on voit osciller, dans un fleuve vermeil, Aux approches du soir inclinés au sommeil, De grands nids teints de pourpre au bout des branches nues. Tombe, Astre glorieux, source et flambeau du jour ! Ta gloire en nappes d’or coule de ta blessure, Comme d’un sein puissant tombe un suprême amour. Meurs donc, tu renaîtras ! L’espérance en est sûre. Mais qui rendra la vie et la flamme et la voix Au cœur qui s’est brisé pour la dernière fois ?

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    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    @charlesAugustinSainteBeuve

    Quand l'avenir pour moi n'a pas une espérance Quand l'avenir pour moi n'a pas une espérance, Quand pour moi le passé n'a pas un souvenir, Où puisse, dans son vol qu'elle a peine à finir, Un instant se poser mon âme en défaillance ; Quand un jour pur jamais n'a lui sur mon enfance, Et qu'à vingt ans ont fui, pour ne plus revenir, L'Amour aux ailes d'or, que je croyais tenir, Et la Gloire emportant les hymnes de la France ; Quand ma Pauvreté seule, au sortir du berceau, M'a pour toujours marqué de son terrible sceau, Qu'elle a brisé mes voeux, enchaîné ma jeunesse, Pourquoi ne pas mourir ? de ce monde trompeur Pourquoi ne pas sortir sans colère et sans peur, Comme on laisse un ami qui tient mal sa promesse.

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    C

    Chloe Douglas

    @chloeDouglas

    La vérité Seulement la vérité est solide Tout le reste se dissout entre les doigts Comme une lumière Qui perce à travers La forêt de pin à l’aube On ne peut pas empêcher La lumière d’entrer. La vérité charge La couleur des évènements Elle est sans complication de design Elle est fière sans supériorité Parce qu’elle est magnifique Le symbole d’un droit de naissance Naturelle et ouverte Une loi divine. La présence du jour Est changée par la vérité. Un moment, L’ambiance est triste, sombre, dépressive Et le suivant, Joyeuse, pleine d’espoir, inspirée. La vérité est Notre espoir de vivre réveillés !

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    C

    Claire Raphaël

    @claireRaphael

    L’espérance Qu’espérais-je ? Une chaleur venue initier la sagesse une grande lumière capable de patience capable d’imposer sa force à l’inconscience et de me protéger en toute circonstances l’instant inattendu où quelques vérités s’échangent dans l’espace d’un temps plein d’indulgence s’échangent en silence et fondent l’unité garantissant alors toutes nos certitudes… J’espérais la rencontre de nos passions et d’une parole pure ayant échappé à l’amertume. Que la vie reprenne une douce rengaine après tant de querelles et nous emmène au bord des fleuves descendants dont le lit charrie les eaux supérieures qui nous ont fait naître. Imaginons l’espace dont j’entends doucement le tempo des rouages, imaginons l’espace aux couleurs tamisées par de très vieux poèmes tombant comme les lettres d’un alphabet mystique sur la page couchée d’un horizon livide. J’attends sans amertume un discours qui s’impose et enfin me nourrisse dans un instant de paix qui pourra profiter à ceux qui n’ont plus peur.

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    C

    Cécile Carrara

    @cecileCarrara

    Au revoir Puisqu’il n’y aura pas de lendemain commun le ciel qui nous berce ne semblant pas le même puisque le temps qui coule érode nos chemins avec peu d’égards pour les graines que l’on sème. Puisque j’aurais aimé replonger dans tes yeux te parler de mon coeur, écouter tes tirades dormir tout contre toi, se balader à deux et voir le monde ensemble pour le rendre moins fade. Puisque si tu voulais pleinement me revoir tu saurais proposer une clé à ce puzzle faire jour là où tu vois encore trop noir et décider d’aller plus loin que sur le seuil. Puisqu’à toi je me suis peu à peu dévoilée puisque j’ai confronté tes troubles réticences je raye en moi l’envie sourde de te retrouver car je me dois de faire preuve de clairvoyance.

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    C

    Cécile Carrara

    @cecileCarrara

    Education À tous ces rêves que l’on noie au sacrifice d’un monde trop sage. À toutes ces envies que l’on broie sous couvert d’un monde en cage. Quelles graines veut-on faire germer chez ceux qui bâtiront demain? Veut-on être libre de créer un monde qui nous ressemble enfin? Tous ces talents inexplorés que l’on fige artificiellement, à coup de règles répétées pour en justifier les fondements. Aux questions restées sans réponses des esprits un peu trop piquants alors que se perd en ses ronces l’autorité du bien-pensant. Que veut-on voir dans le regard des futurs gens de nos cités? Inspiration ou cauchemar des rêves qu’ils n’auront pas créés? Quel investissement est plus sûr sinon celui de ces enfants, mains qui modèleront les sculptures du monde et de ses transitions?

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    C

    Cécile Sauvage

    @cecileSauvage

    Souvent le coeur qu’on croyait mort Souvent le coeur qu’on croyait mort N’est qu’un animal endormi ; Un air qui souffle un peu plus fort Va le réveiller à demi ; Un rameau tombant de sa branche Le fait bondir sur ses jarrets Et, brillante, il voit sur les prés Lui sourire la lune blanche.

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    D

    Didier Venturini

    @didierVenturini

    Une barque Une barque, une coquille Dans la gueule de l’enfer L’océan l’écarquille La prend dans ses revers Une barque à la dérive Qui fuit d’là où çà flotte L’espoir d’une autre rive L’espoir d’un antidote Une barque sans matelot Sans boussole, sans compas Qui ronge un dernier flot L’Europe est ce bien par là ? Une barque pleine de galères Qui rame comme un forçat Pour un morceau de terre Une manche avec son bras Une barque, une brindille Une bouteille à la mer Du fil pour un exil Qu’il reprise la misère Une barque qui s’fait la baille Qu’a peur d’être un cercueil Ou rien qu’un feu de paille Sur une terre d’écueil Une barque, une coquille Dans la gueule de l’enfer

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    E

    Edouard J. Maunick

    @edouardJMaunick

    Entre alpha et oméga En mémoire de Toussaint L’Ouverture et du Mahatma Gandhi … ce qu’en nous vivait comme en tout autre vivant/ ce qu’en nous pillé/nié/dénié/ Nous pioche/nous faucille/ nous hook/nous sacs de jute/ ce qu’en nous reconquis/ de nous-mêmes/par nous-mêmes/ ce qu’en nous ressuscité/ à jamais biens de nous tous/ nous bouture/nous semence/ nous terre/nous récolte/nous coupe/ nos paroles dans nos bouches/ héritées d’Afrique/ héritées d’Asie/ héritées d’Europe/ nous sans colère/ mais de mémoire têtue/ il nous en a fallu pour ne pas céder/ne pas jeter/ nos vies par-dessus bord/ nous voici main tendue pleine rouge ès liberté/ bleue grand océan/ jaune ensoleillé/ verte d’île-jardin/ nous guetteurs du millénaire avec monnaie de petit peuple mais qui n’est pas monnaie de singe/ nous voulons être demain du monde au nom de nos enfants aux yeux fertiles/ ils apprennent déjà l’alphabet planétaire/ ce qu’en nous persistait en eux perdure/ le refus de l’ombre/la place au soleil….

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    E

    Elie Ayache

    @elieAyache

    La porte… Entrée ou sortie ? Bienvenue ou au revoir ? Ouverte le jour mais fermée le soir Au seuil ou sur le pas, l’œil pour décider… Le sort est scellé d’un tour de poignée Très souvent toutes se ressemblent Celles qui séparent comme celles qui rassemblent Battante ou dérobée, en métal ou bois dur Fermée sur le passé ouverte sur le futur Frappez et on vous ouvrira dit le Prêcheur Sonnez deux fois précisent-on au Facteur NE PAS DERANGER ! Demande le client de la 17 ATTENTION AU CHIEN ! Prévient la petite affichette Parfois l’oreille s’y colle pour percer le secret D’un chuchotement que l’on voulait discret Un petit mot glissé par le dessous Rappelle à l’absent un prochain rendez-vous Peu importe ce que la rumeur colporte Le vent de mon indifférence l’emporte Seuls l’amour et l’amitié m’apportent Le désir irrépressible de leur ouvrir ma porte.

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    E

    Esther Granek

    @estherGranek

    J’ai attrapé un chant d’oiseau J’ai attrapé un chant d’oiseau Et je l’ai mis dans ma guitare. Il en sort un refrain de paix Qui fait trêve de mes regrets. J’ai rapporté des verts coteaux Un peu de leurs parfums sauvages. J’ai rapporté couleurs de mai Et les ai mises en un bouquet. J’ai emporté dans mes voyages Et ta présence et ton visage. Et c’est comme un cadeau des cieux Car étant seul je suis à deux.

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    La Tzigane La tzigane savait d’avance Nos deux vies barrées par les nuits Nous lui dîmes adieu et puis De ce puits sortit l’Espérance L’amour lourd comme un ours privé Dansa debout quand nous voulûmes Et l’oiseau bleu perdit ses plumes Et les mendiants leurs Ave On sait très bien que l’on se damne Mais l’espoir d’aimer en chemin Nous fait penser main dans la main À ce qu’a prédit la tzigane

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    L’amour, le dédain et l’espérance Je t’ai prise contre ma poitrine comme une colombe qu’une petite fille étouffe sans le savoir Je t’ai prise avec toute ta beauté ta beauté plus riche que tous les placers de la Californie ne le furent au temps de la fièvre de l’or J’ai empli mon avidité sensuelle de ton sourire, de tes regards, de tes frémissements (J’ai eu à moi, à ma disposition ton orgueil même quand je te tenais courbée et que tu subissais ma puissance et ma domination) J’ai cru prendre tout cela, ce n’était qu’un prestige (Et je demeure semblable à Ixion après qu’il eut fait l’amour avec le fantôme de nuées fait à la semblance de celle qu’on appelle Héra ou bien Junon l’invisible. Et qui peut prendre, qui peut saisir des nuages ? qui peut mettre la main sur un mirage ? et qu’il se trompe celui-là qui croit emplir ses bras de l’azur céleste ! J’ai bien cru prendre toute ta beauté et je n’ai eu que ton corps Le corps hélas n’a pas l’éternité Le corps a la fonction de jouir mais il n’a pas l’amour Et c’est en vain maintenant que j’essaie d’étreindre ton esprit Il fuit, il me fuit de toutes parts comme un noeud de couleuvres qui se dénoue Et tes beaux bras sur l’horizon lointain sont des serpents couleur d’aurore qui se lovent en signe d’adieu Je reste confus, je demeure confondu Je me sens las de cet amour que tu dédaignes Je suis honteux de cet amour que tu méprises tant Le corps ne va pas sans l’âme Et comment pourrais-je espérer rejoindre ton corps de naguère puisque ton âme était si éloignée de moi Et que le corps a rejoint l’âme Comme font tous les corps vivants Ô toi que je n’ai possédée que morte !) Et malgré tout, cependant que parfois je regarde au loin si vient le vaguemestre Et que j’attends comme un délice ta lettre quotidienne mon cœur bondit comme un chevreuil lorsque je vois venir le messager Et j’imagine alors des choses impossibles puisque ton coeur n’est pas avec moi Et j’imagine alors que nous allons nous embarquer, tous deux, tout seuls peut-être trois, et que jamais personne au monde ne saurait rien de notre cher voyage vers rien, mais vers ailleurs et pour toujours Sur cette mer plus bleue encore, plus bleue que tout le bleu du monde Sur cette mer où jamais l’on ne crierait : « Terre ! » Pour ton attentive beauté mes chants plus purs que toutes les paroles monteraient plus libres encore que les flots Est-il trop tard, mon coeur, pour ce mystérieux voyage ? La barque nous attend, c’est notre imagination Et la réalité nous rejoindra un jour Si les âmes se sont rejointes Pour le trop beau pèlerinage… Allons, mon coeur d’homme la lampe va s’éteindre Verses-y ton sang. Allons, ma vie, alimente cette lampe d’amour Allons, canons, ouvrez la route, Et qu’il arrive enfin le temps victorieux, le cher temps du retour Je donne à mon espoir mes yeux, ces pierreries Je donne à mon espoir mes mains, palmes de victoire Je donne à mon espoir mes pieds, chars de triomphe Je donne à mon espoir ma bouche, ce baiser Je donne à mon espoir mes narines qu’embaument les fleurs de la mi-mai Je donne à mon espoir mon cœur en ex-voto Je donne à mon espoir tout l’avenir qui tremble comme une petite lueur au loin dans la forêt Courmelois, mi-mai 1915

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Sonnet du 8 février Lundi 8 février ma biche Ma biche part Suis inquiet elle s’en fiche Buvons du marc Vrai qu’au service de l’Autriche (Patate et lard) Le militaire est très peu riche Je m’en fous car Il peut bien vivre d’Espérance Même il en meurt Au doux service de la France Un Artilleur Mon âme à ta suite s’élance Adieu mon cœur Nîmes, le 8 février 1915

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    I

    Isabelle Callis-Sabot

    @isabelleCallisSabot

    Février Voici que Février revient, plein de promesses, Çà et là quelques fleurs s’ouvrent hâtivement ; Il peut encor neiger, mais le grand froid régresse Et l’on perçoit déjà des jours l’allongement. Le printemps apparaît, le rude hiver s’achève ; Par les champs, par les prés, dévalent les ruisseaux, Le vieil arbre bourgeonne et se gorge de sève, Bientôt, dans sa ramée, nicheront les moineaux. Un soleil radieux inonde la colline, Au jardin tout prend vie, tout cherche à émouvoir, Et je sens, sous mes pas, tandis que je chemine, La terre qui frémit et palpite d’espoir.

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    J

    Jacques Viallebesset

    @jacquesViallebesset

    Dans la marge 7 J’aurais voulu être celui-là qui vient Porteur d’une joie d’être à partager Avec tous les humains qui saignent De leurs rêves lourds d’espoirs blessés Je porte en moi les sucs de la terre La danse de flamme du sang au cœur Ma poitrine se gonfle du vent des astres J’halète de la sève de tout ce qui vibre Frémit palpite et vit au rythme des saisons

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    J

    Jean-Charles Dorge

    @jeanCharlesDorge

    La lueur Le lointain cache son ennui Sous une auréole sans gloire, Lueur face à la pensée noire Mais qui retombe dans la nuit. Pourtant j’y vois un feu qui luit Issu du fond de ma mémoire, Vibrant espoir divinatoire D’un temps vers où la joie s’enfuit. L’ancien éphèbe s’y libère Laissant son ombre au réverbère Comme pour conjurer la mort… Il part. J’entends la mandoline Lui dire adieu. Point de remords. Le soleil devant lui s’incline.

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    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Les temps nouveaux Amis, j’ai de bonnes nouvelles pour vous : les choses s’améliorent. Les Cubains peuvent enfin se rendre à Miami, et inversement Les relations entre le Capital et le Travail se normalisent. À La Havane, la prostitution, enfin, se réactive. Amis, je suis optimiste pour le futur. Les défilés reprennent entre République et Bastille certes, les vieux PC sont démodés mais en contrepartie à La Havane, les prostituées s’activent. Amis, j’avais un rêve qui s’est révélé une illusion de rêve, une chimère, mais Dieu merci, ils ont tué le Che : à La Havane, la prostitution s’active. Amis, je vous annonce un brillant futur les choses s’améliorent il est enfin possible de concilier le rêve et la réalité le rêve aux poètes, et la réalité aux autres. Et parfois les deux, pour les deux. Même il paraît qu’on peut dans une même vie passer pour un poète, et être un autre. Amis, fêtons les Temps Nouveaux et réjouissons nous : le Monde s’améliore. Les Cubains peuvent enfin aller à Miami. Et la prostitution reprend son cours, à La Havane.

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    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Nouveau monde Elles étaient trois Caravelles quittaient Cadix au couchant droit devant. Ils étaient quatre jeunes gens le portant. Arrivés à l’Océan doucement l’ont mis à terre sans l’éveiller, doucement doucement. Étrange, étrange navire Amiral en route vers le Ponant. Elles étaient trois Caravelles ils étaient quatre jeunes gens sur l’épaule le portant Nouveau Monde droit devant. Pour Vie Nouvelle revivre droit devant. Nouveau Monde droit devant ! A crié le Commandant.

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