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Religion

176 poésies en cours de vérification
Religion

Poésies de la collection religion

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    Sabine Sicaud

    @sabineSicaud

    Cloches de Pâques Les cloches sont parties… Les grosses cloches les premières. Ou les petites, que sait-on ? si diverties, Si pimpantes de s’en aller toutes légères ! – Leur jupe bouffait autour d’elles ; Et le battant ne disait rien, Comme un oiseau blotti dans une cage. Elles volaient sans ailes, Par des chemins à elles, très anciens, Des chemins bleus au-dessus des nuages. – Les gros bourdons, parfois devant, parfois derrière, S’essoufflaient à vouloir montrer qu’ils allaient vite. Et les petites cloches des couvents Ou des églises de campagne, si petites Qu’elles semblaient des gobelets d’enfants, si fières D’aller quand même à Rome – étaient devant, Derrière, et partout à la fois, toutes légères… – Les enfants regardaient en l’air, criant : Bonjour ! Les gens d’âge levaient aussi la tête, Mais ne les voyaient plus de leurs yeux clignotants. – Et les enfants attendent leur retour, Comme une grande fête. Les gens d’âge attendent aussi, comme on attend Quand on n’est plus bien sûr de croire aux œufs de Pâques… – Cependant, il faut croire aux miracles, toujours. Resonnez les Matines, frère Jacques ! Je vois les cloches reparaître, se hâtant… – De leur jupe, sur les jardins, glisse autour d’elles Tout le printemps de Rome, et de chaque battant S’échappent, aux alléluias, deux hirondelles.

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    Sabine Sicaud

    @sabineSicaud

    Le chemin de Dieu Il est plusieurs chemins dans le Royaume de mon père… S’ils se côtoient, se croisent ou s’ignorent, ont leurs pentes de joies, leurs gouffres, leurs clairières et leur faune et leur flore, n’importe. Il est plusieurs chemins. Il est plusieurs montagnes de hauteur différente avec plusieurs versants… et bien des taupières où grimpent des fourmis. Si nul ne t’accompagne que l’ombre de ton corps sur le cadran solaire, mettras-tu plus de temps à gravir la montagne ? Si tu dors sous la tente des riches caravanes, mettras-tu moins de temps à sortir des savanes? Si tu n’as pas d’amis dont la barque et les rames aient bravé la tempête aux quatre coins du monde, mettras-tu plus de temps pour atteindre le port que vous n’en auriez mis ramant ensemble ? Quels chemins se ressemblent ! Tant de lames profondes et de côtes sans fjords, tant de vagues de sable autour de minarets, tant de neige et de vent sur le mon Everest… Et le chemin de Dieu peut être si modeste.

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    Stéphane Mallarmé

    Stéphane Mallarmé

    @stephaneMallarme

    Aumône Prends ce sac, Mendiant ! tu ne le cajolas Sénile nourrisson d'une tétine avare Afin de pièce à pièce en égoutter ton glas. Tire du métal cher quelque péché bizarre Et vaste comme nous, les poings pleins, le baisons Souffles-y qu'il se torde ! une ardente fanfare. Église avec l'encens que toutes ces maisons Sur les murs quand berceur d'une bleue éclaircie Le tabac sans parler roule les oraisons, Et l'opium puissant brise la pharmacie ! Robes et peau, veux-tu lacérer le satin Et boire en la salive heureuse l'inertie, Par les cafés princiers attendre le matin ? Les plafonds enrichis de nymphes et de voiles, On jette, au mendiant de la vitre, un festin. Et quand tu sors, vieux dieu, grelottant sous tes toiles D'emballage, l'aurore est un lac de vin d'or Et tu jures avoir au gosier les étoiles ! Faute de supputer l'éclat de ton trésor, Tu peux du moins t'orner d'une plume, à complies Servir un cierge au saint en qui tu crois encore. Ne t'imagine pas que je dis des folies. La terre s'ouvre vieille à qui crève la faim. Je hais une autre aumône et veux que tu m'oublies Et surtout ne va pas, frère, acheter du pain.

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    Stéphane Mallarmé

    Stéphane Mallarmé

    @stephaneMallarme

    Hérodiade Le soleil que sa halte Surnaturelle exalte Aussitôt redescend Incandescent Je sens comme aux vertèbres S'éployer des ténèbres Toutes dans un frisson A l'unisson Et ma tête surgie Solitaire vigie Dans les vols triomphaux De cette faux Comme rupture franche Plutôt refoule ou tranche Les anciens désaccords Avec le corps Qu'elle de jeûnes ivre S'opiniâtre à suivre En quelque bond hagard Son pur regard

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    Stéphane Mallarmé

    Stéphane Mallarmé

    @stephaneMallarme

    Les fleurs Des avalanches d’or du vieil azur, au jour Premier et de la neige éternelle des astres Jadis tu détachas les grands calices pour La terre jeune encore et vierge de désastres, Le glaïeul fauve, avec les cygnes au col fin, Et ce divin laurier des âmes exilées Vermeil comme le pur orteil du séraphin Que rougit la pudeur des aurores foulées, L’hyacinthe, le myrte à l’adorable éclair Et, pareille à la chair de la femme, la rose Cruelle, Hérodiade en fleur du jardin clair, Celle qu’un sang farouche et radieux arrose ! Et tu fis la blancheur sanglotante des lys Qui roulant sur des mers de soupirs qu’elle effleure A travers l’encens bleu des horizons pâlis Monte rêveusement vers la lune qui pleure ! Hosannah sur le cistre et dans les encensoirs, Notre Dame, hosannah du jardin de nos limbes ! Et finisse l’écho par les célestes soirs, Extase des regards, scintillement des nimbes ! Ô Mère qui créas en ton sein juste et fort, Calices balançant la future fiole, De grandes fleurs avec la balsamique Mort Pour le poète las que la vie étiole.

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    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    Baptême de soupirs Je suis telle une feuille bouleversée Un pétale suspendu Sur un lit de marguerites L’aube s’infiltre sagement par la fenêtre J’oublie la banalité du passé Tes mains me caressent, transies Je suis enveloppée dans un Saint-Suaire Lasse de tout Prête à rejoindre mon Géniteur Là où il ne peut plus chanter L’esprit transformé Calciné par la beauté de notre amour Enseveli dans un sarcophage de joie

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    S

    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    Maladie des peuples Pourquoi contraindre vos vies et vos rêves aux idées d’un autre ? Pensée figée, glaciale Reine rigide Marbre de l’esprit Lobotomisation d’un futur déjà écrit Impossible ascension vers un demain qui n’existe pas, Et n’existera jamais ! Fin des rêves, fin des espoirs, fin des désirs Fins décidées par les autres. Liberté revient dans notre Eden Laisse l’homme éclore Dans la beauté de son âme. Naissance inaltérée. Solitude

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    Thomas Chaline

    @thomasChaline

    Dans le poulailler urbain Dans le poulailler urbain Le français râle et hurle pour rien Il insulte et frappe son prochain Le français ne comprend rien Il est nerveux et a perdu Les valeurs humaines répandues Jadis par les religions et les bons saints Le français a perdu la main Alors il s’étouffe et il s’enserre Dans sa routine, il désespère Il ne prend plus le temps pour lui Le français, peu à peu, se détruit

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Contre la présence réelle N’est-ce point sans raison que ces champis désirent Etre sur les humains respectés en tous lieux, Car ils sont demi-dieux, puisque leurs pères tirent Leur louable excrément de substance des Dieux. Et si vous adorez un ciboire pour être Logis de votre Dieu, vous devez, sans mentir, Adorer ou le ventre ou bien le cul d’un Prêtre, Quand ce Dieu même y loge et est prêt d’en sortir. Tout ce que tient le Prêtre en sa poche, en sa manche, En sa braguette est saint et de plus je vous dis Qu’en ayant déjeuné de son Dieu le dimanche, Vous devez adorer son étron du lundi. Trouvez-vous cette phrase et dure et messéante ? Le prophète Esaïe en traitant de ce point En usait, appelant vos Dieux Dieux de fiente, Or digérez le tout et ne m’en laissez point.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Extase Ainsi l’amour du Ciel ravit en ces hauts lieux Mon âme sans la mort, et le corps en ce monde Va soupirant çà bas à liberté seconde De soupirs poursuivant l’âme jusques aux Cieux. Vous courtisez le Ciel, faibles et tristes yeux, Quand votre âme n’est plus en cette terre ronde : Dévale, corps lassé, dans la fosse profonde, Vole en ton paradis, esprit victorieux. Ô la faible espérance, inutile souci, Aussi loin de raison que du Ciel jusqu’ici, Sur les ailes de foi délivre tout le reste. Céleste amour, qui as mon esprit emporté, Je me vois dans le sein de la Divinité, Il ne faut que mourir pour être tout céleste.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Inscription pour une fontaine Vois-tu, passant, couler cette onde Et s’écouler incontinent ? Ainsi fuit la gloire du monde, Et rien que Dieu n’est permanent.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Prière du matin Le Soleil couronné de rayons et de flammes Redore nostre aube à son tour : Ô sainct Soleil des Saincts, Soleil du sainct amour, Perce de flesches d’or les tenebres des ames En y rallumant le beau jour. Le Soleil radieux jamais ne se courrouce, Quelque fois il cache ses yeux : C’est quand la terre exhalle en amas odieux Un voile de vapeurs qu’au devant elle pousse, En se troublant, et non les Cieux. Jesus est toujours clair, mais lors son beau visage Nous cache ses rayons si doux, Quand nos pechez fumans entre le Ciel et nous, De vices redoublez enlevent un nuage Qui noircit le Ciel de courroux. Enfin ce noir rempart se dissout et s’esgare Par la force du grand flambeau. Fuyez, pechez, fuyez : le Soleil clair et beau Vostre amas vicieux et dissipe et separe, Pour nous oster nostre bandeau. Nous ressusciterons des sepulchres funebres, Comme le jour de la nuict sort Si la premiere mort de la vie est le port, Le beau jour est la fin des espaisses tenebres, Et la vie est fin de la mort.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Les tragiques Je veux peindre la France une mère affligée, Qui est, entre ses bras, de deux enfants chargée. Le plus fort, orgueilleux, empoigne les deux bouts Des tétins nourriciers ; puis, à force de coups D'ongles, de poings, de pieds, il brise le partage Dont nature donnait à son besson l'usage ; Ce voleur acharné, cet Esaü malheureux, Fait dégât du doux lait qui doit nourrir les deux, Si que, pour arracher à son frère la vie, Il méprise la sienne et n'en a plus d'envie. Mais son Jacob, pressé d'avoir jeûné meshui, Ayant dompté longtemps en son cœur son ennui, À la fin se défend, et sa juste colère Rend à l'autre un combat dont le champ et la mère. Ni les soupirs ardents, les pitoyables cris, Ni les pleurs réchauffés ne calment leurs esprits ; Mais leur rage les guide et leur poison les trouble, Si bien que leur courroux par leurs coups se redouble. Leur conflit se rallume et fait si furieux Que d'un gauche malheur ils se crèvent les yeux. Cette femme éplorée, en sa douleur plus forte, Succombe à la douleur, mi-vivante, mi-morte ; Elle voit les mutins tout déchirés, sanglants, Qui, ainsi que du cœur, des mains se vont cherchant. Quand, pressant à son sein d'une amour maternelle Celui qui a le droit et la juste querelle, Elle veut le sauver, l'autre qui n'est pas las Viole en poursuivant l'asile de ses bras. Adonc se perd le lait, le suc de sa poitrine ; Puis, aux derniers abois de sa proche ruine, Elle dit : « Vous avez, félons, ensanglanté Le sein qui vous nourrit et qui vous a porté ; Or vivez de venin, sanglante géniture, Je n'ai plus que du sang pour votre nourriture !

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Mais quoi ! c'est trop chanté Mais quoi ! c'est trop chanté, il faut tourner les yeux Éblouis de rayons dans le chemin des cieux. C'est fait, Dieu vient régner, de toute prophétie Se voit la période à ce point accomplie. La terre ouvre son sein, du ventre des tombeaux Naissent des enterrés les visages nouveaux : Du pré, du bois, du champ, presque de toutes places Sortent les corps nouveaux et les nouvelles faces. Ici les fondements des châteaux rehaussés Par les ressuscitants promptement sont percés ; Ici un arbre sent des bras de sa racine Grouiller un chef vivant, sortir une poitrine ; Là l'eau trouble bouillonne, et puis s'éparpillant Sent en soi des cheveux et un chef s'éveillant. Comme un nageur venant du profond de son plonge, Tous sortent de la mort comme l'on sort d'un songe. Les corps par les tyrans autrefois déchirés Se sont en un moment en leurs corps asserrés, Bien qu'un bras ait vogué par la mer écumeuse De l'Afrique brûlée en Tylé froiduleuse. Les cendres des brûlés volent de toutes parts ; Les brins plus tôt unis qu'ils ne furent épars Viennent à leur poteau, en cette heureuse place Riants au ciel riant d'une agréable audace...

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    Théophile Gautier

    Théophile Gautier

    @theophileGautier

    Notre-dame I Las de ce calme plat où d’avance fanées, Comme une eau qui s’endort, croupissent nos années ; Las d’étouffer ma vie en un salon étroit, Avec de jeunes fats et des femmes frivoles, Echangeant sans profit de banales paroles ; Las de toucher toujours mon horizon du doigt. Pour me refaire au grand et me rélargir l’âme, Ton livre dans ma poche, aux tours de Notre-Dame ; Je suis allé souvent, Victor, A huit heures, l’été, quand le soleil se couche, Et que son disque fauve, au bord des toits qu’il touche, Flotte comme un gros ballon d’or. Tout chatoie et reluit ; le peintre et le poète Trouvent là des couleurs pour charger leur palette, Et des tableaux ardents à vous brûler les yeux ; Ce ne sont que saphirs, cornalines, opales, Tons à faire trouver Rubens et Titien pâles ; Ithuriel répand son écrin dans les cieux. Cathédrales de brume aux arches fantastiques ; Montagnes de vapeurs, colonnades, portiques, Par la glace de l’eau doublés, La brise qui s’en joue et déchire leurs franges, Imprime, en les roulant, mille formes étranges Aux nuages échevelés. Comme, pour son bonsoir, d’une plus riche teinte, Le jour qui fuit revêt la cathédrale sainte, Ébauchée à grands traits à l’horizon de feu ; Et les jumelles tours, ces cantiques de pierre, Semblent les deux grands bras que la ville en prière, Avant de s’endormir, élève vers son Dieu. Ainsi que sa patronne, à sa tête gothique, La vieille église attache une gloire mystique Faite avec les splendeurs du soir ; Les roses des vitraux, en rouges étincelles, S’écaillent brusquement, et comme des prunelles, S’ouvrent toutes rondes pour voir. La nef épanouie, entre ses côtes minces, Semble un crabe géant faisant mouvoir ses pinces, Une araignée énorme, ainsi que des réseaux, Jetant au front des tours, au flanc noir des murailles, En fils aériens, en délicates mailles, Ses tulles de granit, ses dentelles d’arceaux. Aux losanges de plomb du vitrail diaphane, Plus frais que les jardins d’Alcine ou de Morgane, Sous un chaud baiser de soleil, Bizarrement peuplés de monstres héraldiques, Éclosent tout d’un coup cent parterres magiques Aux fleurs d’azur et de vermeil. Légendes d’autrefois, merveilleuses histoires Écrites dans la pierre, enfers et purgatoires, Dévotement taillés par de naïfs ciseaux ; Piédestaux du portail, qui pleurent leurs statues, Par les hommes et non par le temps abattues, Licornes, loups-garous, chimériques oiseaux, Dogues hurlant au bout des gouttières ; tarasques, Guivres et basilics, dragons et nains fantasques, Chevaliers vainqueurs de géants, Faisceaux de piliers lourds, gerbes de colonnettes, Myriades de saints roulés en collerettes, Autour des trois porches béants. Lancettes, pendentifs, ogives, trèfles grêles Où l’arabesque folle accroche ses dentelles Et son orfèvrerie, ouvrée à grand travail ; Pignons troués à jour, flèches déchiquetées, Aiguilles de corbeaux et d’anges surmontées, La cathédrale luit comme un bijou d’émail ! II Mais qu’est-ce que cela ? Lorsque l’on a dans l’ombre Suivi l’escalier svelte aux spirales sans nombre Et qu’on revoit enfin le bleu, Le vide par-dessus et par-dessous l’abîme, Une crainte vous prend, un vertige sublime A se sentir si près de Dieu ! Ainsi que sous l’oiseau qui s’y perche, une branche Sous vos pieds qu’elle fuit, la tour frissonne et penche, Le ciel ivre chancelle et valse autour de vous ; L’abîme ouvre sa gueule, et l’esprit du vertige, Vous fouettant de son aile en ricanant voltige Et fait au front des tours trembler les garde-fous, Les combles anguleux, avec leurs girouettes, Découpent, en passant, d’étranges silhouettes Au fond de votre œil ébloui, Et dans le gouffre immense où le corbeau tournoie, Bête apocalyptique, en se tordant aboie, Paris éclatant, inouï ! Oh ! le cœur vous en bat, dominer de ce faîte, Soi, chétif et petit, une ville ainsi faite ; Pouvoir, d’un seul regard, embrasser ce grand tout, Debout, là-haut, plus près du ciel que de la terre, Comme l’aigle planant, voir au sein du cratère, Loin, bien loin, la fumée et la lave qui bout ! De la rampe, où le vent, par les trèfles arabes, En se jouant, redit les dernières syllabes De l’hosanna du séraphin ; Voir s’agiter là-bas, parmi les brumes vagues, Cette mer de maisons dont les toits sont les vagues ; L’entendre murmurer sans fin ; Que c’est grand ! Que c’est beau ! Les frêles cheminées, De leurs turbans fumeux en tout temps couronnées, Sur le ciel de safran tracent leurs profils noirs, Et la lumière oblique, aux arêtes hardies, Jetant de tous côtés de riches incendies Dans la moire du fleuve enchâsse cent miroirs. Comme en un bal joyeux, un sein de jeune fille, Aux lueurs des flambeaux s’illumine et scintille Sous les bijoux et les atours ; Aux lueurs du couchant, l’eau s’allume, et la Seine Berce plus de joyaux, certes, que jamais reine N’en porte à son col les grands jours. Des aiguilles, des tours, des coupoles, des dômes Dont les fronts ardoisés luisent comme des heaumes, Des murs écartelés d’ombre et de clair, des toits De toutes les couleurs, des résilles de rues, Des palais étouffés, où, comme des verrues, S’accrochent des étaux et des bouges étroits ! Ici, là, devant vous, derrière, à droite, à gauche, Des maisons ! Des maisons ! Le soir vous en ébauche Cent mille avec un trait de feu ! Sous le même horizon, Tyr, Babylone et Rome, Prodigieux amas, chaos fait de main d’homme, Qu’on pourrait croire fait par Dieu ! III Et cependant, si beau que soit, ô Notre-Dame, Paris ainsi vêtu de sa robe de flamme, Il ne l’est seulement que du haut de tes tours. Quand on est descendu tout se métamorphose, Tout s’affaisse et s’éteint, plus rien de grandiose, Plus rien, excepté toi, qu’on admire toujours. Car les anges du ciel, du reflet de leurs ailes, Dorent de tes murs noirs les ombres solennelles, Et le Seigneur habite en toi. Monde de poésie, en ce monde de prose, A ta vue, on se sent battre au cœur quelque chose ; L’on est pieux et plein de foi ! Aux caresses du soir, dont l’or te damasquine, Quand tu brilles au fond de ta place mesquine, Comme sous un dais pourpre un immense ostensoir ; A regarder d’en bas ce sublime spectacle, On croit qu’entre tes tours, par un soudain miracle, Dans le triangle saint Dieu se va faire voir. Comme nos monuments à tournure bourgeoise Se font petits devant ta majesté gauloise, Gigantesque sœur de Babel, Près de toi, tout là-haut, nul dôme, nulle aiguille, Les faîtes les plus fiers ne vont qu’à ta cheville, Et, ton vieux chef heurte le ciel. Qui pourrait préférer, dans son goût pédantesque, Aux plis graves et droits de ta robe Dantesque, Ces pauvres ordres grecs qui se meurent de froid, Ces panthéons bâtards, décalqués dans l’école, Antique friperie empruntée à Vignole, Et, dont aucun dehors ne sait se tenir droit. Ô vous ! Maçons du siècle, architectes athées, Cervelles, dans un moule uniforme jetées, Gens de la règle et du compas ; Bâtissez des boudoirs pour des agents de change, Et des huttes de plâtre à des hommes de fange ; Mais des maisons pour Dieu, non pas ! Parmi les palais neufs, les portiques profanes, Les parthénons coquets, églises courtisanes, Avec leurs frontons grecs sur leurs piliers latins, Les maisons sans pudeur de la ville païenne ; On dirait, à te voir, Notre-Dame chrétienne, Une matrone chaste au milieu de catins !

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    Théophile Gautier

    Théophile Gautier

    @theophileGautier

    Noël Le ciel est noir, la terre est blanche; – Cloches, carillonnez gaîment! – Jésus est né; – la Vierge penche Sur lui son visage charmant. Pas de courtines festonnées Pour préserver l’enfant du froid; Rien que les toiles d’araignées Qui pendent des poutres du toit. Il tremble sur la paille fraîche, Ce cher petit enfant Jésus, Et pour l’échauffer dans sa crèche L’âne et le boeuf soufflent dessus. La neige au chaume coud ses franges, Mais sur le toit s’ouvre le ciel Et, tout en blanc, le choeur des anges Chante aux bergers: "Noël! Noël!"

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    Tristan Corbière

    Tristan Corbière

    @tristanCorbiere

    La rapsode foraine Bénite est l'infertile plage Où, comme la mer, tout est nud. Sainte est la chapelle sauvage De Sainte-Anne-de-la-Palud... De la Bonne Femme Sainte Anne Grand'tante du petit Jésus, En bois pourri dans sa soutane Riche... plus riche que Crésus !

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Abîme - La Voie Lactée Millions, millions, et millions d'étoiles ! Je suis, dans l'ombre affreuse et sous les sacrés voiles, La splendide forêt des constellations. C'est moi qui suis l'amas des yeux et des rayons, L'épaisseur inouïe et morne des lumières, Encor tout débordant des effluves premières, Mon éclatant abîme est votre source à tous. O les astres d'en bas, je suis si loin de vous Que mon vaste archipel de splendeurs immobiles, Que mon tas de soleils n'est, pour vos yeux débiles, Au fond du ciel, désert lugubre où meurt le bruit, Qu'un peu de cendre rouge éparse dans la nuit ! Mais, ô globes rampants et lourds, quelle épouvante Pour qui pénétrerait dans ma lueur vivante, Pour qui verrait de près mon nuage vermeil ! Chaque point est un astre et chaque astre un soleil. Autant d'astres, autant d'immensités étranges, Diverses, s'approchant des démons ou des anges, Dont les planètes font autant de nations ; Un groupe d'univers, en proie aux passions, Tourne autour de chacun de mes soleils de flammes ; Dans chaque humanité sont des cœurs et des âmes, Miroirs profonds ouverts à l'œil universel, Dans chaque cœur l'amour, dans chaque âme le ciel ! Tout cela naît, meurt, croît, décroît, se multiplie. La lumière en regorge et l'ombre en est remplie. Dans le gouffre sous moi, de mon aube éblouis, Globes, grains de lumière au loin épanouis, Toi, zodiaque, vous, comètes éperdues, Tremblants, vous traversez les blêmes étendues, Et vos bruits sont pareils à de vagues clairons, Et j'ai plus de soleils que vous de moucherons. Mon immensité vit, radieuse et féconde. J'ignore par moments si le reste du monde, Errant dans quelque coin du morne firmament, Ne s'évanouit pas dans mon rayonnement.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Aux champs Je me penche attendri sur les bois et les eaux, Rêveur, grand-père aussi des fleurs et des oiseaux ; J’ai la pitié sacrée et profonde des choses ; J’empêche les enfants de maltraiter les roses ; Je dis : N’effarez point la plante et l’animal ; Riez sans faire peur, jouez sans faire mal. Jeanne et Georges, fronts purs, prunelles éblouies, Rayonnent au milieu des fleurs épanouies ; J’erre, sans le troubler, dans tout ce paradis ; Je les entends chanter, je songe, et je me dis Qu’ils sont inattentifs, dans leurs charmants tapages, Au bruit sombre que font en se tournant les pages Du mystérieux livre où le sort est écrit, Et qu’ils sont loin du prêtre et près de Jésus-Christ.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Booz endormi Booz s'était couché de fatigue accablé ; Il avait tout le jour travaillé dans son aire ; Puis avait fait son lit à sa place ordinaire ; Booz dormait auprès des boisseaux pleins de blé. Ce vieillard possédait des champs de blés et d'orge ; Il était, quoique riche, à la justice enclin ; Il n'avait pas de fange en l'eau de son moulin ; Il n'avait pas d'enfer dans le feu de sa forge. Sa barbe était d'argent comme un ruisseau d'avril. Sa gerbe n'était point avare ni haineuse ; Quand il voyait passer quelque pauvre glaneuse : – Laissez tomber exprès des épis, disait-il.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Crépuscule L’étang mystérieux, suaire aux blanches moires, Frisonne; au fond du bois la clairière apparaît ; Les arbres sont profonds et les branches sont noires ; Avez-vous vu Vénus à travers la forêt ? Avez-vous vu Vénus au sommet des collines ? Vous qui passez dans l’ombre, êtes-vous des amants ? Les sentiers bruns sont pleins de blanches mousselines; L’herbe s’éveille et parle aux sépulcres dormants. Que dit-il, le brin d’herbe ? et que répond la tombe ? Aimez, vous qui vivez ! on a froid sous les ifs. Lèvre, cherche la bouche ! aimez-vous ! la nuit tombe; Soyez heureux pendant que nous sommes pensifs. Dieu veut qu’on ait aimé. Vivez ! faites envie, O couples qui passez sous le vert coudrier. Tout ce que dans la tombe, en sortant de la vie, On emporta d’amour, on l’emploie à prier. Les mortes d’aujourd’hui furent jadis les belles. Le ver luisant dans l’ombre erre avec son flambeau. Le vent fait tressaillir, au milieu des javelles, Le brin d’herbe, et Dieu fait tressaillir le tombeau. La forme d’un toit noir dessine une chaumière; On entend dans les prés le pas lourd du faucheur; L’étoile aux cieux, ainsi qu’une fleur de lumière, Ouvre et fait rayonner sa splendide fraîcheur. Aimez-vous ! c’est le mois où les fraises sont mûres. L’ange du soir rêveur, qui flotte dans les vents, Mêle, en les emportant sur ses ailes obscures, Les prières des morts aux baisers des vivants.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    La conscience Lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes, Échevelé, livide au milieu des tempêtes, Caïn se fut enfui de devant Jéhovah, Comme le soir tombait, l'homme sombre arriva Au bas d'une montagne en une grande plaine ; Sa femme fatiguée et ses fils hors d'haleine Lui dirent : « Couchons-nous sur la terre, et dormons. » Caïn, ne dormant pas, songeait au pied des monts. Ayant levé la tête, au fond des cieux funèbres, Il vit un œil, tout grand ouvert dans les ténèbres, Et qui le regardait dans l'ombre fixement. « Je suis trop près », dit-il avec un tremblement. Il réveilla ses fils dormant, sa femme lasse, Et se remit à fuir sinistre dans l'espace. Il marcha trente jours, il marcha trente nuits. Il allait, muet, pâle et frémissant aux bruits, Furtif, sans regarder derrière lui, sans trêve, Sans repos, sans sommeil; il atteignit la grève Des mers dans le pays qui fut depuis Assur. « Arrêtons-nous, dit-il, car cet asile est sûr. Restons-y. Nous avons du monde atteint les bornes. » Et, comme il s'asseyait, il vit dans les cieux mornes L'œil à la même place au fond de l'horizon. Alors il tressaillit en proie au noir frisson. « Cachez-moi ! » cria-t-il; et, le doigt sur la bouche, Tous ses fils regardaient trembler l'aïeul farouche. Caïn dit à Jabel, père de ceux qui vont Sous des tentes de poil dans le désert profond : « Étends de ce côté la toile de la tente. » Et l'on développa la muraille flottante ; Et, quand on l'eut fixée avec des poids de plomb : « Vous ne voyez plus rien ? » dit Tsilla, l'enfant blond, La fille de ses Fils, douce comme l'aurore ; Et Caïn répondit : « je vois cet œil encore ! » Jubal, père de ceux qui passent dans les bourgs Soufflant dans des clairons et frappant des tambours, Cria : « je saurai bien construire une barrière. » Il fit un mur de bronze et mit Caïn derrière. Et Caïn dit « Cet œil me regarde toujours! » Hénoch dit : « Il faut faire une enceinte de tours Si terrible, que rien ne puisse approcher d'elle. Bâtissons une ville avec sa citadelle, Bâtissons une ville, et nous la fermerons. » Alors Tubalcaïn, père des forgerons, Construisit une ville énorme et surhumaine. Pendant qu'il travaillait, ses frères, dans la plaine, Chassaient les fils d'Enos et les enfants de Seth ; Et l'on crevait les yeux à quiconque passait ; Et, le soir, on lançait des flèches aux étoiles. Le granit remplaça la tente aux murs de toiles, On lia chaque bloc avec des nœuds de fer, Et la ville semblait une ville d'enfer ; L'ombre des tours faisait la nuit dans les campagnes ; Ils donnèrent aux murs l'épaisseur des montagnes ; Sur la porte on grava : « Défense à Dieu d'entrer. » Quand ils eurent fini de clore et de murer, On mit l'aïeul au centre en une tour de pierre ; Et lui restait lugubre et hagard. « Ô mon père ! L'œil a-t-il disparu ? » dit en tremblant Tsilla. Et Caïn répondit : « Non, il est toujours là. » Alors il dit: « je veux habiter sous la terre Comme dans son sépulcre un homme solitaire ; Rien ne me verra plus, je ne verrai plus rien. » On fit donc une fosse, et Caïn dit « C'est bien ! » Puis il descendit seul sous cette voûte sombre. Quand il se fut assis sur sa chaise dans l'ombre Et qu'on eut sur son front fermé le souterrain, L'œil était dans la tombe et regardait Caïn.

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    Le soleil était là qui mourait dans l'abîme Le soleil était là qui mourait dans l'abîme. L'astre, au fond du brouillard, sans air qui le ranime, Se refroidissait, morne et lentement détruit. On voyait sa rondeur sinistre dans la nuit ; Et l'on voyait décroître, en ce silence sombre, Ses ulcères de feu sous une lèpre d'ombre. Charbon d'un monde éteint ! flambeau soufflé par Dieu ! Ses crevasses montraient encore un peu de feu. Comme si par les trous du crâne on eût vu l'âme. Au centre palpitait et rampait une flamme Qui par instants léchait les bords extérieurs, Et de chaque cratère il sortait des lueurs Qui frissonnaient ainsi que de flamboyants glaives, Et s'évanouissaient sans bruit comme des rêves. L'astre était presque noir. L'archange était si las Qu'il n'avait plus de voix et plus de souffle, hélas ! Et l'astre agonisait sous ses regards farouches. Il mourait, il luttait. Avec ses sombres bouches Dans l'obscurité froide il lançait par moments Des flots ardents, des blocs rougis, des monts fumants, Des rocs tout écumants de sa clarté première ; Comme si ce géant de vie et de lumière, Englouti par la brume où tout s'évanouit, N'eût pas voulu mourir sans insulter la nuit Et sans cracher sa lave à la face de l'ombre. Autour de lui le temps et l'espace et le nombre Et la forme et le bruit expiraient, en créant L'unité formidable et noire du néant. Le spectre Rien levait sa tête hors du gouffre.

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    Victor Hugo

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    Les bonzes Que je prenne un moment de repos ? Impossible. Koran, Zend-Avesta, livres sibyllins, Bible, Talmud, Toldos Jeschut, Védas, lois de Manou, Brahmes sanglants, santons fléchissant le genou, Les contes, les romans, les terreurs, les croyances, Les superstitions fouillant les consciences, Puis-je ne pas sentir ces creusements profonds ? J'en ai ma part. Veaux d'or, sphinx, chimères, griffons, Les princes des démons et les princes des prêtres, Synodes, sanhédrins, vils muphtis, scribes traîtres, Ceux qui des empereurs bénissaient les soldats, Ceux que payait Tibère et qui payaient Judas, Ceux qui tendraient encore à Socrate le verre, Ceux qui redonneraient à Jésus le calvaire, Tous ces sadducéens, tous ces pharisiens, Ces anges, que Satan reconnaît pour les siens, Tout cela, c'est partout. C'est la puissance obscure. Plaie énorme que fait une abjecte piqûre ! Ce contre-sens : Dieu vrai, les dogmes faux ; cuisson Du mensonge qui s'est glissé dans la raison ! Démangeaison saignante, incurable, éternelle, Que sent l'homme en son âme et l'oiseau sous son aile ! Oh ! L'infâme travail ! Ici Mahomet ; là Cette tête, Wesley, sur ce corps, Loyola ; Cisneros et Calvin, dont on sent les brûlures. Ô faux révélateurs ! Ô jongleurs ! Vos allures Sont louches, et vos pas sont tortueux ; l'effroi, Et non l'amour, tel est le fond de votre loi ; Vous faites grimacer l'éternelle figure ; Vous naissez du sépulcre, et l'on sent que l'augure Et le devin son pleins de l'ombre du tombeau, Et que tous ces rêveurs, compagnons du corbeau, Tous ces fakirs d'Ombos, de Stamboul et de Rome, N'ont pu faire tomber tant de fables sur l'homme Qu'en secouant les plis sinistres des linceuls. Dieu n'étant aperçu que par les astres seuls, Les penseurs, sachant bien qu'il est là sous ses voiles, Ont toujours conseillé d'en croire les étoiles ; Dieu, c'est un lieu fermé dont l'aurore a la clé, Et la religion, c'est le ciel contemplé. Mais vous ne voulez pas, prêtres, de cette église. Vous voulez que la terre en votre livre lise Tous vos songes, moloch, Vénus, Ève, Astarté, Au lieu de lire au front des cieux la vérité. De là la foi changée en crédulité ; l'âme Éclipsant la raison dans une sombre flamme ; De là tant d'êtres noirs serpentant dans la nuit. L'imposture, par qui le vrai temple est détruit, Est un colosse fait d'un amas de pygmées ; Les sauterelles sont d'effrayantes armées ; Ô mages grecs, romains, payens, indous, hébreux, Le genre humain, couvert de rongeurs ténébreux, Sent s'élargir sur lui vos hordes invisibles ; Vous lui faites rêver tous les enfers possibles ; Le peuple infortuné voit dans son cauchemar Surgir Torquemada quand disparaît Omar. Nul répit. Vous aimez les ténèbres utiles, Et vous y rôdez, vils et vainqueurs, ô reptiles ! Sur toute cette terre, en tous lieux, dans les bois, Dans le lit nuptial, dans l'alcôve des rois, Dans les champs, sous l'autel sacré, dans la cellule, Ce qui se traîne, couve, éclôt, va, vient, pullule, C'est vous. Vous voulez tout, vous savez tout ; damner, Bénir, prendre, jurer, tromper, servir, régner, Briller même ; ramper n'empêche pas de luire. Chuchotement hideux ! Je vous entends bruire. Vous mangez votre proie énorme avec bonheur, Et vous vous appelez entre vous monseigneur. L'acarus au ciron doit donner de l'altesse. Quelles que soient votre ombre et votre petitesse, Je devine, malgré vos soins pour vous cacher, Que vous êtes sur nous, et je vous sens marcher Comme on sent remuer les mineurs dans la mine, Et je ne puis dormir, tant je hais la vermine ! Vous êtes ce qui hait, ce qui mord, ce qui ment. Vous êtes l'implacable et noir fourmillement. Vous êtes ce prodige affreux, l'insaisissable. Qu'on suppose vivants tous les vils grains de sable, Ce sera vous. Rien, tout. Zéro, des millions. L'horreur. Moins que des vers et plus que des lions. L'insecte formidable. Ô monstrueux contraste ! Pas de nains plus chétifs, pas de pouvoir plus vaste. L'univers est à vous, puisque vous l'emplissez. Vous possédez les jours futurs, les jours passés, Le temps, l'éternité, le sommeil, l'insomnie. Vous êtes l'innombrable, et, dans l'ombre infinie, Fétides, sur nos peaux mêlant vos petits pas, Vous vous multipliez ; et je ne comprends pas Dans quel but Dieu livra les empires, le monde, Les âmes, les enfants dressant leur tête blonde, Les temples, les foyers, les vierges, les époux, L'homme, à l'épouvantable immensité des poux. Le 26 juillet 1874.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

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    À villequier Maintenant que Paris, ses pavés et ses marbres, Et sa brume et ses toits sont bien loin de mes yeux ; Maintenant que je suis sous les branches des arbres, Et que je puis songer à la beauté des cieux ; Maintenant que du deuil qui m'a fait l'âme obscure Je sors, pâle et vainqueur, Et que je sens la paix de la grande nature Qui m'entre dans le cœur ;

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    Victor Segalen

    Victor Segalen

    @victorSegalen

    Religion lumineuse L'Empereur, -- père de toutes les croyances, et estimant en chacune d'entre elles la Raison qui est une, -- veut que ceci, prêt à s'effacer par négligence, soit reporté sur une table neuve et marqué du sceau de son règne : L'Être admirable, n'est-ce pas l'Unité-Trine, le Seigneur sans origine, Oloho ? Il a divisé en croix les parties du monde ; décomposé l'air primordial ; suscité le Ciel et la terre ; lancé le soleil et la lune ; créé le premier homme dans une parfaite harmonie. Mais Sa-Than répandit le mensonge, proclama l'égalité des grandeurs et mit la créature dans le lieu de l'Éternel. L'homme perdit la voie et ne put la retrouver. Viennent ensuite des promesses : une incarnation ; un supplice ; une mort ; une résurrection. Or cela n'est pas bon à faire trop savoir aux hommes. Que nul n'ose donc ajouter de commentaires ici. Que nul ne cherche un enseignement ici. Afin que sans fruits ni disciples la Croyance Lumineuse meure en paix, obscurément.

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