Ecris assez petit que tu caches le monde. Les lèvres s'ouvrent ; furtifs, s'avancent des bruits, la maison - fantôme est sale et dévastée. Le lit des vieux rêves s'asphyxie dans le noir. Un cri, trois syllabes tirent sur eux la couverture, restent là face au visage obstiné silencieux de la nuit.

L'obscur soudain

Au silence anxieux et blanc du lever a succédé ce que pressent le bon moment, un simple abandon, aller, avoir quitté sans idée, un peu à la manière espiègle dont part le propre à rien. La route est ouverte. "Bon, très bien. Si je suis un propre à rien, je pars dans le monde et j'y vais chercher ma chance." (Joseph von Eichendorff.) Entrer, être dans l'immense fêlure émettant les bruits blancs, les harmonies du cosmos dans les craquelures du ciel bleu et les veinules argentées de la prairie (de l'assiette-monde-prairie). Sans chemin au tournant: juste le visible s'émancipant de toute attente pour être là. Ici. Et alors uni chêne s'élève sur les prés.

Entendements et autres poèmes

Ce dont on ne peut parler, il faut l'écrire, nous dit le livre que signe Roger Dextre. Aussi, ne t'étonne pas, lectrice, lecteur, que l'on te narre une blague belge ou que l'auteur évoque une église et des vieillards, l'ébriété, une salade de pissenlits, Masaccio, des couilles ; tout est là, dans une liberté contemporaine, insensée, vécue, pensée, révélée et incarnée ; tout est là et les " motifs de l'âme incarcérés " palpitent, s'agitent dans une phrase précipitée, d'un éclat qui semble surgir de rien, dans une phrase ouverte au plus proche des choses, des événements et des êtres, dans une phrase qui s'adresse à nous comme à un ami, comme à une amie, d'un(e) ami(e) à un(e) ami(e). " Qui sont les hommes ? ", s'interroge Roger Dextre ; sa réponse, toute la réponse, tient dans ce livre... Mathieu Bénézet

Oeuvres poétiques - Tome 2

Le titre de ce recueil est emprunté à Rimbaud : " ça dit ce que ça veut dire, littéralement et dans tous les sens ". Roger Dextre et Malika Bey Durif, tous deux écrivains, en ont accompagné la réalisation au sein des ateliers d'écriture qu'ils dirigent. Le Lézard Dramatique, compagnie de théâtre en résidence à Vaulx-en-Velin, a offert le cadre et les moyens d'existence de ces ateliers. L'inspiration des écrits présentés dans ce volume est aussi multiple que singulière. Et les seize auteurs, publiés pour la première fois, donnent à lire de la poésie, des récits, du théâtre... Une expérience unique, parfois ultime, pour un ouvrage qui fera date.

Dans Tous Les Sens

Pourquoi voudrais-tu que j'écrive ? Les chemins de la vie s'ouvrent au quotidien dans l'ennui sincère. Nul travail nécessaire aujourd'hui, me semble-t-il, sauf celui des heures vides de la fenêtre et un livre. Au silence rythmé par les pages se croisent les histoires, engendrées dans le coeur par lui-même imagier à son insu, incapable de finir un récit, même celui qui est là.

Des écarts de langage

Entre le temps et le simple dans ce livre, une énigme peut-être la plus pure, la plus dépouillée celle de l'impensable fragilité de penser, d'écrire. Celle où les chemins de la pensée et les chemins du deuil s'endurent car jamais portés par personne. « Libre lien de naissance infinie. » Le poème (paysage et pensée, hyperbole du reste) questionne au défaut du temps, au défaut des langues un tourment plus profond encore. L'inhumaine mesure, le fond mutique, les liens esclaves. Confus mortellement. Monde quasi fermé. Fond dès lors sur l'homme levé ce temps inhumain du flux, « esprit de la sans cesse vivante sauvageté non écrite ». Le rien, le temps, (songe intact de la durée) rythment alors la perte. Ce dur second savoir. « A l'orée, à la naissance faillible des paroles. » « O malheur. Comme en un lieu de pur hasard. » Livre déchiré d'humanité. Patience infinie en laquelle s'accordent le jour et la mesure de l'éveil. Délivre une force d'aimer. Appelle. « Viens plus près de moi, viens. » « Où es-tu, délaissé ? » Patrick Laupin

La Terre n'est à personne

Le texte proustien, "Albertine disparue", ne rencontre jamais le sentiment de nostalgie qui devrait l'accompagner ; il bouleverse le rapport entre le passé et l'image, et il touche au fondement même de la mémoire et de la culture. Le texte d'Albertine, malgré sa proximité avec la philosophie, pense ailleurs et plus profond, pour ne laisser place qu'à l'expérience temporelle.

Albertine. Le Nom Precede De Proust Avant L'Image Ou Les Traits Se Derobaient A Son Souvenir

La voix de ces pages appartient à l'insu de chacun, comme l'air que l'on respire elle est un lieu de pur hasard où se recrée le lien de présence infinie. Le balancement qui l'anime porte le son sur ses épaules jusqu'aux berges de la nuit, jusqu'à cette limite où la langue actualise le monde qui se répand dans le coeur du vivant un / éclat qui fut / tous les langages. La passion obstinée de la lecture dans les reflets de la berge et dans la boue des torrents enthousiastes du silence, nous livre en partage l'amour de cette folie / qui vibre de durer, l'incertitude de la voix dans la grisaille et le chantonnement insensé de la solitude des pauvres. Nous suivons le balancement de la voix contre les pierres et l'herbe tavelée avant de s'emparer du paysage, dans l'intime complicité d'une lettre éprouvée, nous marchons avec la scansion amoureuse de sa pensée qui tisse inlassablement les fils ténus de nos existences. Sa chute nous réconcilie avec l'imprévisible épiphanie du désir qui se répand malgré nous dans l'étoffe du jour le passage / sur la terre, un chant / que devine la tristesse, / certaines fois dans un poème / issu des silences de l'instinct.

L'obscur soudain

Résumé

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