Il y a peu d'écrivains que leurs lecteurs puissent suivre au jour le jour, dans leurs travaux, leurs lectures ou leurs promenades.
André Gide était de ceux-là. Ernst Jünger l'est sans aucun doute. Les lecteurs de Jardins et Routes et du Journal le savent.
On pouvait croire pourtant qu'il fallait à Jünger des événements, un climat extraordinaire : la guerre. Tous ceux qui le suivront dans Voyage atlantique verront qu'il n'en n'est rien et que le regard de Jünger fait jaillir l'intérêt des moindres choses, des objets les plus pacifiques. Une tendresse et une attention du monde exceptionnelles.

Voyage atlantique

Ernst Jünger nous livre ici une nouvelle facette de son immense talent : le symbolisme de Sur les falaises de marbre, d'Héliopolis et des Abeilles de verre a cédé la place à un récit empreint d'une prenante nostalgie. Dans Le lance-pierres, l'auteur a recréé l'Allemagne d'avant la guerre de 1914 dans une petite ville de garnison où le XIXe siècle n'en finit plus de mourir. Dans ce monde à la veille de s'écrouler, un enfant cherche le visage de celui qu'il sera demain. 

Dès les premières pages, le lecteur se sent transporté dans le monde de l'enfance, d'une enfance mélancolique et inquiète. Pour le jeune Clamor Ebling, l'école, la pension, la ville elle-même, avec ses venelles et les secrets de ses jardins, deviendront les lieux de perpétuels combats contre la brutalité et l'absurdité d'un univers dont les clés lui échappent encore.

Le lance-pierres

Forse Ernst Jünger ha stretto un patto segreto con il tempo. E forse questo patto è stato tanto efficace – in una vita che ha raggiunto la soglia dei cento anni, dopo aver attraversato tutte le bufere del secolo e aver assistito per due volte al passaggio della cometa di Halley – perché Jünger, anziché fuggire il tempo, lo ha sempre indagato con amorosa pazienza. Per catturare l'essere imprendibile per eccellenza egli ha avuto anche l'accortezza, con questo libro, di scegliere non già la via della pura speculazione ma quella della divagazione, alla maniera dei grandi eruditi seicenteschi. Così al centro ha posto un oggetto, l'orologio a polvere, che si offre a noi come un «geroglifico del tempo». E intorno a esso, con giri sempre più larghi, ha spinto la sua analisi a investire i diversi modi di vivere il tempo che hanno scandito il corso della civiltà. Dalla polvere che scorre insensibilmente all'interno di quell'oggetto pieno d'incanti che è la clessidra alla ruota dentata dell'orologio meccanico, dal tempo che viene lasciato essere al tempo che viene prodotto: attraverso la storia di questi oggetti, attraverso il succedersi di queste concezioni, una lunga vicenda ci conduce fino a oggi – e ci fa capire alcuni presupposti taciuti della nostra esistenza. Jünger ci guida in questi meandri con sapienza e delicatezza, senza precipitarsi alle conclusioni, ma anzi soffermandosi come un antico artigiano su una miriade di oggetti e di immagini – che costellano le pagine di un libro sicuramente fra i più felici e accattivanti della sua opera imponente.Il libro dell'orologio a polvere è apparso per la prima volta nel 1954.

Le traité du sablier

" C'est en 1950, à l'occasion d'un hommage rendu à Heidegger pour son soixantième anniversaire, qu'Ernst Jünger écrivit Passage de la ligne.
Ses premiers échanges épistolaires avec le philosophe dataient de 1931 et, bien avant la Seconde Guerre mondiale, il parlait souvent de lui avec son frère Friedrich Georg. Cet hommage donna lieu cinq ans plus tard à une réponse de Heidegger, De la ligne, pour les soixante ans, de Jünger. Ces deux essais offrent ainsi le témoignage d'un grand débat entre deux esprits à la fois proches et opposés sur une question majeure de notre temps : comment, après l'écroulement des anciens systèmes de valeur, résister au nihilisme qui semble avoir trouvé dans la technique son plus solide appui ? " Julien Hervier

Passage de la ligne

Toute la question est de savoir par quels moyens l'homme peut ouvrir les portes qui lui donneront accès au royaume de l'esprit. Baudelaire avait suggéré, en son temps, la prière, le travail et l'inspiration poétique. Mais la première est devenue de plus en plus superficielle et la voix des Muses se fait de plus en plus rarement entendre. Seul demeure le travail. Aussi est-il normal que l'homme contemporain se tourne vers d'autres possibilités et qu'il cherche, dans le recours aux «paradis artificiels», le chemin d'une antique sagesse depuis longtemps oubliée. Avec cet essai, Ernst Jünger ne fait que poursuivre une longue tradition européenne qui va de De Quincey jusqu'à Aldous Huxley en passant par Hoffmann et Baudelaire et qui débouche sur l'une des interrogations fondamentales de l'époque moderne.

Approches, drogues et ivresse

«S'il existait une école du regard, Ernst Jünger en serait le maître. Mais c'est déjà trop dire, car rien n'est plus étranger à sa nature que de légiférer ou de se poser en modèle littéraire. La seule société d'initiés dont il se réclame est celle, limitée et subtile, des entomologistes. Pour le reste, ce qui domine chez lui en cette oeuvre tardive, c'est l'ouverture au monde, aux cultures, aux êtres et aux livres. La richesse de sa méditation n'est pas moins grande que lorsqu'elle était portée par l'expérience de la guerre et des grandes catastrophes historiques. L'explosion de la nature printanière, une promenade à Venise, la lettre d'un ami suffisent à la nourrir. Éros et Thanatos sont toujours présents ; mais à travers l'écriture transparente du grand âge, la mort s'est comme apprivoisée. Défiant le temps qui s'écoule de plus en plus vite, le journal affirme jour après jour la permanence créatrice du geste de l'écrivain.»Julien Hervier.

Soixante-dix s'efface Tome 3 ; journal 1981-1985

1939. Mobilisé par un régime qu'il déteste, Jünger est à nouveau sous l'uniforme. Ce n'est plus le même homme, ni la même armée. L'expérience, elle aussi, sera différente. Après une campagne au cours de laquelle il n'est jamais en première ligne, et à part une mission dans le Caucase comme observateur, il est un occupant à Paris, puis le chroniqueur d'un coin d'Allemagne occupée. Les journaux de la Première Guerre s'organisaient en grands chapitres  ; ceux de la Seconde sont datés au jour le jour. Dans un décousu apparent et très concerté, ils font place à des notations sur les opérations militaires, à des rencontres avec écrivains et intellectuels, à l'examen de soi, des hommes et de la nature, aux amours, aux rêves, aux lectures. Jünger lit notamment la Bible  ; le christianisme devient pour lui un allié contre le nihilisme triomphant. Sans dissimuler son hostilité aux nazis et à l'antisémitisme officiel (il lui arrive de saluer militairement les porteurs de l'étoile jaune), il reste à son poste et n'attaque pas le régime de front. On parle d'émigration intérieure pour qualifier cette position complexe, que les contempteurs habituels de Jünger simplifient à l'envi. Hannah Arendt était plus nuancée. Tout en constatant les limites de cette attitude, elle voyait dans les journaux de l'occupant Jünger « le témoignage le plus probant et le plus honnête de l'extrême difficulté que rencontre un individu pour conserver son intégrité et ses critères de vérité et de moralité dans un monde où vérité et moralité n'ont plus aucune expression visible ».

Journaux de guerre Tome 2 ; 1939-1945

Jünger complète ses recherches sur l'homme et le temps : il tente de saisir intuitivement la mutation soudaine de l'humanité, mutation qu'il imagine imminente et qui verrait s'interrompre la lutte entre les États de l'Ouest et ceux de l'Est : l'étoile rouge et l'étoile blanche se fondraient en un astre unique, l'Éat universel. Notre temps, dit Jünger, est en train d'élaborer une grande image de la Mère. Il s'agit donc de dégager un nouvel ordre cosmique pour l'homme : comme Novalis, Jünger estime que l'âge d'or est devant nous et non pas à l'origine. L'État universel est l'esquisse de cette humanité à venir.

L'Etat universel ; la mobilisation totale

Une dangereuse rencontre est aussi le récit d'une fin de siècle. Les passants sont des foules, les visages sont anonymes, les vapeurs ont remplacé les voiliers, la mode est au visage glabre, importée d'Angleterre: un peu partout la société se disloque, et même les policiers respirent avec délices les parfums lourds de la décadence.Ce livre est étrange, Jünger brouille les pistes. Et l'enquête se clôt sans réelle certitude. Mais la clef de cette énigmatique intrigue est peut-être ailleurs. En forme de morale, dans un autre livre, écrit à la même époque que celui-ci: Mantrana : "Un viol meurtrier, une maison de tolérance, une beuverie effrénée: certains degrés de la jouissance ressemblent aux tourments des damnés." Daniel Rondeau Libération

Voyage atlantique

Résumé

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