L'Abbé C
La structure psychologique du fascisme
Publié par , le 25 septembre 2009
64 pages
Résumé
Intention généraleLes Éditions Lignes ont décidé de donner à lire séparément, sous forme de livres constitués comme tels, avec introduction, appareil critique et commentaires, plusieurs grands et courts textes de Bataille ; entre autres : « La structure psychologique du fascisme », « La Notion de dépense », « La conférence sur le péché », etc. D’en faire de petits livres à parts entières. Ce n’étaient pas des livres, en effet, et pourtant ils ont l’importance des plus importants des livres de Georges Bataille. Ce n’étaient pas des livres, tout au plus des articles, que leur auteur lui-même n’a jamais repris dans aucun de ceux qu’il constituera plus tard ; que les Œuvres Complètes (12 volumes aux Éditions Gallimard) seules ont repris, après sa mort, lesquelles, il faut bien l’avouer, en réduisent considérablement la portée, quand elles ne l’étouffent pas ; au moins : où ne les retrouvent pas nécessairement ceux qui auraient pourtant le plus grand besoin de les lire (de là qu’ils soient souvent cités de seconde main et que ce qu’ils ont d’essentiel échappe à ces citations désinvoltes). « La structure psychologique du fascisme » compte parmi ceux-là, au plus haut point« La Structure psychologique du fascisme »L’époque, le contexte : nous sommes début 1933 ; Boris Souvarine a réuni autour de lui les premiers des « communistes oppositionnels » (antistaliniens), auxquels se joignent des « surréalistes dissidents » : ce sera la revue La Critique sociale, où paraît « La structure psychologique du fascisme » en 1933. Les analyses de Souvarine joueront un rôle considérable : elles seront les premières à faire la lumière sur le totalitarisme soviétique naissant ; Bataille y souscrit pleinement ; mais il faut, aux uns et aux autres, faire la part de l’analyse qui revient à l’autre totalitarisme, au totalitarisme concurrent, le totalitarisme fasciste. Bataille n’est pas le seul à s’y employer, mais il le fait d’une façon qui ne ressemble à aucune autre. Qui, non seulement inaugure la possibilité d’une théorisation qui fera date (il n’y a guère que Wilhem Reich à entreprendre la même chose au même moment, mais sans que l’un ni l’autre n’en sache rien) ; mais qui, en outre, demeure d’une vitalité et d’une validité exemplaires aujourd’hui.De cet article, un livre devait naître, auquel Bataille a beaucoup travaillé ; son titre : « Le Fascisme en France ». Des problèmes personnels (une « grave crise », comme il le dit lui-même), s’ajoutant à l’accélération de l’histoire, ne permettront pas qu’il le mène à bien. De ce livre, qui eût sans doute aucun été essentiel, ne restent que cet article fondateur, qui l’est lui-même ; et, d’une certaine façon, si insolite que cela paraisse, ou peu courant (comment un « roman » pourrait-il résulter de plein droit d’un « essai » ?), Le Bleu du ciel, achevé en 1935 (et publié en 1957 seulement), le roman des années trente où se lit le mieux ce qu’a dès lors la guerre d’inéluctable.L’analyseEn quoi l’analyse de Bataille se distingue-t-elle ? En ceci essentiellement, que Bataille use de tous les moyens disponibles pour « penser » (et non pas plaindre, reprocher, « moraliser ») le fascisme. Tous les moyens : ceux de la sociologie durkheimienne (touchant au « sacré », que Bataille appelle pour sa part l’hétérogène) ; ceux de la phénoménologie allemande ; ceux de la psychanalyse freudienne, enfin. C’est nouveau. Il ne faut pas moins qu’eux, selon lui, pour comprendre et interpréter comment se forme une superstructure, qu’elle soit sociale, religieuse ou politique. Son analyse se distingue en cela déjà qu’elle pose qu’une superstructure peut être de constitution psychologique (ce que le marxisme n’a pas su voir). « Lire » le fascisme comme un phénomène politique supplémentaire, c’est ne pas voir de quoi il naît, de l’hétérogène (ainsi que Bataille l’appelle ; en quelque sorte, le « sacré » ainsi que Durkheim l’appelait) et de l’inconscient (au sens strictement freudien) ; et comment il s’alimente de cette provenance violente. Violence que le fascisme n’a plus, dès lors, qu’à concentrer au profit de sa toute-puissance fatidique.
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