Dans sa poésie, L. -E. Martin s'attache à décrire la réalité de tous les jours et invite à méditer sur l'ordre des choses.

Arrimages

"Cent quarante proses poétiques pour rythmer pas à pas un itinéraire, explorer des domaines, des lieux essentiels où s'enracinent des méditations sur l'être de la poésie et de la création.

L'oeil aux aguets, l'oreille tendue vers des accords du monde, Lionel-Édouard Martin approche, transforme et façonne les éléments, les rencontres et les aléas du quotidien dans une parole charnelle où s'incorporent la voix des origines et celle des mythes fondateurs de l'Humanité. 

« Il n'est d'écriture que dans un ressenti particulier de l'univers, où les mots appellent, au-delà des êtres et des choses, un monde épuré de substance, où les corps sont de gloire et tiède la pierre - abolies frondes et catapultes. »"

Brueghel en mes domaines, petites proses sur fond de lieux

De même qu'Alban Berg treize ans plus tard dédiera son concerto pour violon « à la mémoire d'un ange », Rilke compose en 1922 - et comme d'un seul souffle en trois semaines - les 55 sonnets constitutifs des Sonnets à Orphée à la mémoire (comme « tombeau », écrit-il en sous-titre du cycle) de Véra Ouckama Knoop (1900-1919), jeune danseuse qu'il avait prise en affection et qu'il incarne dans la figure d'Eurydice, pour dire que, face à la mort, il n'est d'espoir que de re-vie. Cette dernière, seul le chant du poète archétypal - le chant d'Orphée -, permet de l'envisager, au sens premier du verbe : ainsi voit-on la rose refleurir chaque année ; ainsi la fleur coupée, languissante, recouvre-t-elle sa vigueur pour peu qu'on la dispose dans un vase et l'humecte ; ainsi le printemps se révèle-t-il riche de promesses au sortir de l'hiver ; ainsi l'eau des aqueducs longe-t-elle, vive et perpétuelle, les tombeaux pour alimenter la bouche volubile des fontaines. Une strophe parmi d'autres dans le recueil résume peut-être cet espoir et cette sérénité :

Seul qui mangea avec les morts
du pavot, leur pitance,
saura des plus légers accords
garder la souvenance.

Comme si la mort seule nous unissait au chant. Comme si la mort seule en était l'origine.

Les Sonnets à Orphée

Il a dit, le docteur, le sucre... Il peut bien dire diabète : je sais ce qui me coule dans les veines, et qui me vient de ma pauvre mère : du miel, même que ça nous met des ruches partout dans le corps... Paul a sa part du " fabuleux héritage ". Il sait ce qui l'attend : cette lourdeur du corps, l'épaississement du sang accentué par ce vin que l'on boit de plus en plus, à grandes rasades oublieuses, parce qu'il fait chaud, que le travail est dur, et les mots rares. Vie simple des gens simples. Murmures discrets et nostalgiques. Polyphonie de petites gens de province, ballottés entre le monde ancien et celui qui se profile à l'horizon. Paul vit dans sa chair un lent processus de dégradation et, face à l'inéluctable, il choisit presque malgré lui l'isolement, le grand enfermement dans cet ove parfait qui protège de tout. Homme hermétique, retiré en lui-même pour de bon et que seule la force magnifique de l'écriture pourra atteindre, et pour toujours : l'essentiel venant des mots, " de ce rythme des syllabes où les hommes ainsi que le temps déchiffrent leur mesure ". Après Deuil à Chailly, unanimement salué par la critique, Lionel-Édouard Martin nous livre avec L'Homme hermétique un roman dense d'humanisme et de poésie sobre.

L'homme hermétique - Occasion

Qu'est-il arrivé à Monsieur Charles, surnommé Popotame, que l'on retrouve un matin gisant dans un champ d'avoine du domaine familial, "tout un nuage de grolles attablées dans les entrailles"? La voix de la vieille Marceline raconte, modelée dans son accent de la campagne poitevine, enregistrée par le narrateur le temps d'un été, alors qu'il n'est encore qu'un jeune homme. Elle relate l'histoire attachante de Charles du Puy du Pin de la Chambue, jeune peintre d'humeur un peu fantasque dans l'avant-garde du XXe siècle, disparu dans de troubles circonstances.

Tout était devenu trop blanc

Lionel-Édouard Martin est très précis: c'est le 25 mai 2012, à 8 heures, dans un café, que lui vient cette phrase. "Touts les villes se ressemblent, oui, de plaine ou de montagne, construites à l'aplomb du magma qui palpite, profond, dans le coeur de la terre." 

Alors c'est un martèlement de question. Et celui qu'on connaît principalement comme poète ouvre (mais c'est oeuvre encore de poète) un charroi violent et dur, qui va les questionner toutes, les villes parcourues, et la langue qui les dit, et les mots qu'on y a mis. Alors c'est la langue qu'on creuse, et soi-même - ses tentatives d'écriture, et le travail même d'écrire. Et les visages qui vinrent auprès, et sa langue, la langue d'elle.

Un texte foisonnant aussi, où on traverse les heures, où on ramasse ce qui traîne, les livres, les verres vides et l'Aspirine. Et l'enquête, à mesure qu'elle cherche l'épreuve - ou la chaleur, la secousse et ce qui tremble - du "magma" tout au fond va elle-même devenir comme liquide et proche de l'explosion, croiser les morts, avant de retrouver d'autres villes et maisons, et enfances - juste une beauté plus nue de la langue que, nous lecteurs, traverserons comme un roman, un monde d'histoires qui pourraient aussi bien être les nôtres. 

Ajouter que le poète latin Catulle fait partie du voyage, et que la mer sera toujours là vers où ici on va.

FB

Lionel-Édouard Martin est né en 1956 dans la Vienne. Nombreux et longs séjours hors de France. Son site lionel-edouard-martin.net (Lien -> http://www.lionel-edouard-martin.net).

Magma

Cela parle de boustifaille et de trompes de chasse, au bord d'une rivière embrumée par l'automne : la vie à la campagne dans ses usages du sud de la Vienne, atavique, intangible. Dès lors, qui donc est ce jeune homme venu d'ailleurs, ce "zig", comme ils l'appellent, qui paraît vouloir s'y implanter, déposer son caillou dans les rouages si parfaitement huilés d'une bourgade poitevine ? Le "petit cénacle", trois retraités soucieux de calme et d'entre-soi, s'emploient non sans panache à l'en dissuader, quelles qu'en puissent être les conséquences. Tout cela se raconte dans une prose où l'ironie le dispute à la poésie, pour délivrer une vision du monde aussi mélancolique qu'amusée.

Vert Nuit 16 - Occasion

Un soir de Noël, dans les années 50 : Maît'Louis, un vieux rebouteux usé par les maux de tous ceux qu'il a guéris, guette au crépuscule, au seuil de sa vieille demeure, d'importants visiteurs. Grâce à son éolienne, savamment installée par Jean Dieu, le boulanger, il enguirlande de lumière le grand marronnier, seul repère visible par les passagers de l'Ariane partis, bravant la tempête de neige, en quête d'un médecin pour soigner leur nourrisson et leur imposante tante matriarche. Happés par la nuit, ils s'égarent sur les routes de cette âpre campagne...

Arrimages

Résumé

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