À 19h30, aujourd'hui, un astéroïde percutera la planète. Il n'en restera que des morceaux de vie épars - des moments et des histoires. Celle de Chantal, du 3e, qui fait du bruit dans l'escalier. Celle de Lia, la reine de la dictée, qui aimait trop les voitures. D'un père vitrier. D'une mère en prison. D'enfants pas sages, de monstres quotidiens. De petits crimes et de grands ennuis. La vie, quoi, telle qu'aujourd'hui, à 19h29...

Encore une belle journee

S'il arrive qu'en terminant un livre, on en ait oublié le titre, cela ne peut se produire avec le dernier recueil de nouvelles d'Annie Saumont, C'est rien ça va passer. À chaque fin de texte, en effet, on doit se répéter le titre doux amer si l'on veut sourire de la dureté tranquille qui mène les personnages, ce sens de la fatalité qui transforme l'horreur en banalité. "Les gens qui meurent c'est nul c'est toujours la même chose" dira un enfant dans "À mains nues". Le thème de l'amour ou de la rencontre impossible semble également faire le lien entre ces dix-neuf nouvelles. Qu'il s'agisse d'enfants et de leurs parents, d'hommes et de femmes, un événement les a séparés qui empêche les retrouvailles. Une nouvelle, située au centre du recueil, porte d'ailleurs ce titre. Y est évoquée toute la difficulté qu'il y a à être ensemble lorsque chacun garde sa vérité. On mourrait de ne pas suffisamment dire ou de ne pas avoir dit assez tôt. Mais ce qui fait la qualité de ces nouvelles, c'est leur écriture. Annie Saumont a le talent de ceux qui savent écouter : elle sait écrire comme Fatima, comme un adolescent de banlieue, un enfant, un vieillard et tant d'autres...

C'est rien ça va passer

Les voilà quel bonheur - Occasion

Disparue en janvier 2017, Annie Saumont nous a laissé une oeuvre singulière, d'une modernité absolue. Dès ses débuts, elle poursuit l'obsession d'écrire des nouvelles, rien que des nouvelles. Au gré d'anecdotes glanées ici et là, chacun de ses récits dresse un tableau de la société d'une humanité poignante. Avec sa concision extrême, sa parfaite maîtrise de l'ellipse et son art de la chute, elle sait en quelques pages créer un suspense. Ses personnages, antihéros solitaires, racontent leur infortune avec une franchise désarmante. Son univers s'attache à des détails, à des objets du quotidien, aux situations qui dérapent. Mais c'est plus encore à son style inimitable qu'on reconnaît l'écriture d'Annie Saumont. Une langue minimaliste qui bouscule la grammaire, tord la syntaxe, bannit les virgules, se réapproprie les mots de la rue.Pour Josyane Savigneau, journaliste au Monde des livres et préfacière de ce Florilège, Annie Saumont était « certainement la plus grande nouvelliste française ».

Florilège

Encore une belle journée

" Je vous coupe les queues a dit la marchande de fruits et légumes serrée à déborder dans son corsage.
J'ai été tenté de répondre que j'en avais qu'une et ne tenais pas à ce qu'on me la coupe je n'ai pas osé. Enfonçant dans mon sac Franprix mes poireaux équeutés j'ai dit merci. Pas facile de se comporter en mer vulgaire et marrant quand on a pas l'habitude. Quand on est considéré comme un homme sérieux et bien élevé. "

C'est rien ca va passer

" Quand je suis seule je déblatère, je me rappelle le bonheur qu'on avait au lit tous les deux, les riches ont sûrement pas mieux. Disons donc, monsieur le Brigadier - excusez, je vous retarde, la gendarmerie ça doit être comme l'armée l'heure c'est l'heure, moi mon lapin à demi dépiauté ça attendra, je serai longue aussi pour le bouffer, la petite n'a jamais faim - disons que l'après-midi je m'embête, ici y a pas de distractions pas de radio ni télé, personne qui passe devant la fenêtre, ce serait pour moi le grand silence du désert sans mon bruit pour me distraire. C'était comme ça. Mais depuis quelques jours vers les quatre heures, pendant que je chauffe le lait de la petite avec le souci de le bien bouillir par crainte de la fièvre des vaches donc vers quatre heures quatre heures et quart comme je tiens la casserole sur le fourneau en agitant la mouvette voilà que j'entends des pas. " A. S.

Après

Annie Saumont poursuit depuis plus de trente ans la même obsession : écrire des nouvelles, et seulement des nouvelles. Une entreprise qui lui a valu les honneurs de la critique, de nombreux prix littéraires, et un lectorat aussi passionné que fidèle. Sa méthode ne varie jamais. Au gré de faits divers ou d'anecdotes glanés ici et là, elle construit de brefs récits envoûtants dont les personnages ? enfants mal aimés, délinquants en puissance, criminels involontaires, couples adultères ou rongés par l'ennui, solitaires en quête de l'âme soeur ? forment un tableau sombre et poignant de l'humanité. Par-delà le choix de sujets graves traités sur un ton désinvolte, l'originalité du travail d'Annie Saumont réside dans l'invention d'un style unique, à la fois minimaliste, oralisé, et d'une minutie extrême, grâce auquel les thèmes les plus difficiles deviennent soudain accessibles.

Grand'Ma raconte la Genèse à son petit-fils avec patience et malice. Un jeune collégien, suite à la séparation de ses parents, est envoyé par sa mère dans une triste colonie de vacances. En bon fils de militaire il revit, pour apprivoiser l'angoisse, une très ancienne bataille. Enfin Charles, Julien et Claire, depuis toujours unis par un profond amour, évoquent ici leurs souvenirs communs.
Annie Saumont rappelle comment certains faits de l'enfance façonnent le cours de l'existence, comment tout se joue, alors même que nous n'en avons pas conscience, en ces petits événements qui semblent anodins et marquent notre vie.

Encore une belle journee

Résumé

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Critiques

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