Reporter de guerres
BKK
Publié par Noeve, le 02 septembre 2020
176 pages
Résumé
Femme, homme ou serpent, qui que tu sois, raconte-toi. Je recueille les mots, les gens, les endroits. Fin de l'angoisse à Bangkok, no man's land, aire de repos, de transit, de trafic. Par charters tout le monde déferle : Blancs, Rouges, Jaunes, Noirs, pour une nuit, une semaine ou la vie. Le trou du cul du monde où s'enfoncent cent mille verges. Vive la Thaïlande et la nouvelle économie sexuelle ! (...) Yan Morvan Yan Morvan propose avec « BKK » une immersion dans le Bangkok des années 80 ou il a passé cinq mois. L'ambiance et la substance de cette ville nous sont restituées par les photographies et le texte écrit in situ par le photographe. Il y révèle l'atmosphère de la ville à ce moment bien précis. Nous assistons dans « BKK » à la construction d'un regard, celui d'un jeune photographe plongé en apnée dans un monde qui peut rapidement vous asphyxier et vous perdre. Pas de misérabilisme, de voyeurisme, ou de sensationnalisme, ce livre est un témoignage unique, sous hypnose, une fresque sociale et politique, une sorte de radiographie de l'Asie du Sud-Est et des dessous de la société industrielle. Ville du plaisir où tout est permis, où les clients venus du monde entier peuvent assouvir pour quelques bahts leurs phantasmes sans limite aucune, Yan Morvan nous entraine dans les bas-fonds du hard discount sexuel, ou l'alcool et autres substances psychotropes font partie du décor. Il montre des corps abîmés par la prostitution, l'alcool, la drogue et les grossesses à répétition, la nécessité de ce commerce du sexe pour la survie d'une famille restée à la campagne, les moments de repos essentiels pour échapper à un quotidien quasi exclusivement nocturne. Chaque image est dotée d'une force et d'une douceur, l'effet produit est tout à fait fascinant : nous sommes aspirés par le tumulte des lumières, la frénésie des clubs ou tout est mis en oeuvre pour aguicher les clients puis soudain nous plongeons dans le calme d'une chambre en face à face avec une prostituée. Yan Morvan décrit la dureté des maquereaux, la turpitude des clients mais aussi leur naïveté parfois, l'illusion des prostituées qui espèrent se trouver un mari occidental. Pas de jugement dans le regard du photographe, mais de l'observation avec respect et probité. À BKK, il gagne la confiance de certaines d'entre elles, ce qui lui permet de pénétrer dans leur intimité familiale et d'entre apercevoir l'envers du décor : qui sont ces filles, d'où viennent-elles, pourquoi se prostituentelles, ou vivent-elles, ou et qui sont leur famille, y-a-t-il une vie après la prostitution ? Le passage d'un lieu à l'autre (bars, karaokés, saunas, restaurants, appartements...) permet à Yan Morvan de disséquer un monde à double visage qui affiche les stigmates de la colonisation occidentale et l'isolement par la société de ces communautés indispensables à l'économie du pays mais incompatibles avec l'image de progrès industriel. BKK se veut le reflet de ce que vivent encore aujourd'hui ces milliers de femmes, les débuts de la marchandisation de la chair humaine à l'échelle industrielle, le regard n'est ni sévère, ni complaisant, simplement réaliste.
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