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Charles Cros

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Charles Cros (prononcé /kʁɔs/), né le 1er octobre 1842 à Fabrezan (Aude) et mort le 9 août 1888 dans le 6e arrondissement de Paris, est un poète et inventeur français.

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Poésies

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    Jeune homme Oh ! me coucher tranquillement Pendant des heures infinies ! Et j'étais pourtant ton amant Lors des abandons que tu nies. Tu mens trop ! Toute femme ment. Jouer avec les ironies, Avec l'oubli froid, c'est charmant. Moi, je baise tes mains bénies. Je me tais. Je vais dans la nuit Du cimetière calme où luit La lune sur la terre brune. Six balles de mon revolver M'enverront sous le gazon vert Oublier tes yeux et la lune.

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    L'heure verte Comme bercée en un hamac La pensée oscille et tournoie, À cette heure où tout estomac Dans un flot d'absinthe se noie. Et l'absinthe pénètre l'air, Car cette heure est toute émeraude. L'appétit aiguise le flair De plus d'un nez rose qui rôde. Promenant le regard savant De ses grands yeux d'aigues-marines, Circé cherche d'où vient le vent Qui lui caresse les narines. Et, vers des dîners inconnus, Elle court à travers l'opale De la brume du soir. Vénus S'allume dans le ciel vert-pâle.

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    La blessée À ma mère. La blessée est contre un coussin Trempé du sang de la blessure Qu’elle porte au-dessous du sein. Qu’elle est blanche ! Le médecin N’a pas un seul mot qui rassure. Ceux qui l’aiment, disent : « Ce soir, Sera-t-elle vivante ou morte ? » Les pauvres dont elle est l’espoir Regardent au trou de la porte. Ô France, ainsi tes jours joyeux Avaient fui dans la nuit profonde. Ainsi nous avons cru tes yeux À jamais fermés pour le monde. La blessée est sauvée et dort Dans son lit blanc, tout amaigrie. Elle a frôlé de près la mort ; On lui défend de parler fort, On craint même qu’elle ne rie. Mais dehors un vent attiédi Verdit déjà les noires cimes. Comme elle s’ennuie, à midi, Des tisanes et des régimes ! Ô France, ainsi tes jours joyeux Avaient fui dans la nuit profonde ; Mais l’aube renaît et tes yeux Se sont entrouverts sur le monde. La blessée enfin ce matin A trompé sa garde-malade. Elle part d’un pas incertain. Elle a voulu sentir le thym Dans ce sentier qu’elle escalade. Ses bras ne sont plus si fluets. Elle est plus forte. « Oh ! la prairie ! » Elle cueille et met des bleuets Dans ses cheveux. Elle est guérie ! Ô France, ainsi tes jours joyeux Avaient fui dans la nuit profonde. Mais, voici le soleil ! Tes yeux Restent grands ouverts sur le monde.

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    La dame en pierre Sur ce couvercle de tombeau Elle dort. L'obscur artiste Qui l'a sculptée a vu le beau Sans rien de triste. Joignant les mains, les yeux heureux Sous le voile des paupières, Elle a des rêves amoureux Dans ses prières. Sous les plis lourds du vêtement, La chair apparaît rebelle, N'oubliant pas complètement Qu'elle était belle. Ramenés sur le sein glacé Les bras, en d'étroites manches, Rêvent l'amant qu'ont enlacé Leurs chaînes blanches. Le lévrier, comme autrefois Attendant une caresse, Dort blotti contre les pieds froids De sa maîtresse. * Tout le passé revit. Je vois Les splendeurs seigneuriales. Les écussons et les pavois Des grandes salles. Les hauts plafonds de bois, bordés D'emblématiques sculptures, Les chasses, les tournois brodés Sur les tentures. Dans son fauteuil, sans nul souci Des gens dont la chambre est pleine, À quoi peut donc rêver ainsi, La châtelaine ? Ses yeux où brillent par moment Les fiertés intérieures, Lisent mélancoliquement Un livre d'heures. * Quand une femme rêve ainsi Fière de sa beauté rare, C'est quelque drame sans merci Qui se prépare. Peut-être à temps, en pleine fleur, Celle-ci fut mise en terre. Bien qu'implacable, la douleur En fut austère. L'amant n'a pas vu se ternir, Au souffle de l'infidèle, La pureté du souvenir Qu'il avait d'elle. La mort n'a pas atteint le beau. La chair perverse est tuée, Mais la forme est, sur un tombeau, Perpétuée.

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    La robe de laine La robe de laine a des tons d’ivoire Encadrant le buste, et puis, les guipures Ornent le teint clair et les lignes pures, Le rire à qui tout sceptique doit croire. Oh! je ne veux pas fouiller dans l’histoire Pour trouver les criminelles obscures Ou les délicieuses créatures Comme vous, plus tard, couvertes de gloire Cléopâtre, Hélène et Laure. Ça prouve Que, perpétuel, un orage couve Sous votre aspect clair, fatal, plein de charmes. Vous riez pour vous moquer de mes rimes; Vous croyez que j’ai commis tous les crimes ! Je suis votre esclave et vous rends les armes.

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    La vie idéale Une salle avec du feu, des bougies, Des soupers toujours servis, des guitares, Des fleurets, des fleurs, tous les tabacs rares, Où l'on causerait pourtant sans orgies. Au printemps lilas, roses et muguets, En été jasmins, oeillets et tilleuls Rempliraient la nuit du grand parc où, seuls Parfois, les rêveurs fuiraient les bruits gais. Les hommes seraient tous de bonne race, Dompteurs familiers des Muses hautaines, Et les femmes, sans cancans et sans haines, Illumineraient les soirs de leur grâce. Et l'on songerait, parmi ces parfums De bras, d'éventails, de fleurs, de peignoirs, De fins cheveux blonds, de lourds cheveux noirs, Aux pays lointains, aux siècles défunts.

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    Lassitude Pendant de longues périodes dans la vie courte, je m'efforce à rassembler mes pensées qui s'enfuient, je cherche les visions des bonnes heures. Mais je trouve que mon âme est comme une maison désertée par les serviteurs. Le maître parcourt inquiet les corridors froids, n'ayant pas les clefs des pièces hospitalières où sont les merveilles qu'il a rapportées de tant de voyages. Les ravissements, les instants où je savais tenir l'univers en ma main royale, ont été bien courts et bien rares. Presque aussi rares sont pour moi les périodes de pensée normale. Le plus souvent je suis impuissant, je suis fou; ce dont je me cache au dehors, sous les richesses conquises aux bonnes heures. Quelle drogue me rendra plus fréquente la pensée normale? Quand je l'ai, quand elle se prolonge, ma poitrine puissante me permet de monter là où nulle senleur terrestre n'arrive plus, là où, dans le ravissement, j'exerce ma royauté. Après de mauvais sommeils (d'où viennent-ils?) voici que je ne suis plus là-haut. Je n'ai plus que le regret de ce que j'y ai senti. A peine me reste-t-il assez de lucidité et de courage pour rendre compte aux hommes de ce que j'y ai fait et me justifier auprès d'eux. J'ai eu toutes les fiertés; j'ai dédaigné les comptes à rendre et les justifications. Mais quand la fièvre pesante m'a égaré et fait redescendre, puis-je vivre seul et sans soleil entre des murs de haine? Pourtant, les efforts que je consens à faire, malgré ma lassitude, loin de m'ètre comptés, ne me désignent-ils pas plutôt à la fureur des empressés qui s'agitent en bas?

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    Le fleuve À Monsieur Ernest Legouvé Ravi des souvenirs clairs de l’eau dont s’abreuve La terre, j’ai conçu cette chanson du Fleuve. Derrière l’horizon sans fin, plus loin, plus loin Les montagnes, sur leurs sommets que nul témoin N’a vus, condensent l’eau que le vent leur envoie. D’où le glacier, sans cesse accru, mais qui se broie Par la base et qui fond en rongeant le roc dur. Plus bas, non loin des verts sapins, le rire pur Des sources court parmi les mousses irisées Et sur le sable fin pris aux roches usées. Du ravin de là-bas sort un autre courant, Et mille encore. Ainsi se grossit le torrent Qui descend vers la plaine et commence le Fleuve. Mais l’eau court trop brutale et d’une ardeur trop neuve Pour féconder le sol. Sur ces bords déchirés, Aubépines, lavande et thym, genêts dorés Trouvent seuls un abri dans les fentes des pierres. Voici que le torrent heurte en bas les barrières De sable et de rochers par lui-même traînés. C’est la plaine. Il s’y perd en chemins détournés Qui calment sa fureur. Et quelques petits arbres Suivent l’eau qui bruit sur les grès et les marbres. Ces collines, derniers remous des monts géants, Flots figés du granit coulant en océans, Ces coteaux, maintenant verts, se jaspent de taches Blanches et rousses qui marchent. Ce sont les vaches Ou, plus près, le petit bétail. Le tintement Des clochettes se mêle au murmure endormant De l’eau. Les peupliers pointus aiment les rives Plates. Voici déjà que leurs files passives Escortent çà et là le Fleuve calme et fort. Les champs sont possédés par les puissants. Au bord Ceux qui n’ont pas l’espoir des moissons vont en foule Attendre l’imprévu qu’apporte l’eau qui coule : Paillettes d’or, saphirs, diamants et rubis, Que les roches, après tant d’orages subis, Abandonnent du fond de leur masse minée, Sous l’influx caressant de l’eau froide, obstinée. Que de sable lavé, que de rêves promis, Pour qu’un peu d’or, enfin, reste au fond du tamis ! Prends ton bâton, chercheur ! La ville n’est pas proche, Et d’obliques regards ont pesé ta sacoche. D’autres, durs au travail sèment en rond les plombs Des grands filets ; l’argent frétillant des poissons Gonfle la trame grise, apportant l’odeur fraîche Et fade qui s’attache aux engins de la pêche. Mais le gain est précaire, et plus d’un écumeur Descend, cadavre enflé, dans le flot endormeur. Le fleuve emporte tout, d’ailleurs. Car de sa hache Le bûcheron, tondeur des montagnes, arrache Les sapins des hauteurs, qu’il confie au courant ; Et, plus bas, la scierie industrieuse prend Ces arbres, et, le Fleuve étant complice encore, Les dépèce, malgré leur révolte sonore. Puis la plaine avec ses moissons, puis les hameaux D’où viennent s’abreuver, au bord, les animaux : Bœufs, chevaux ; tandis qu’en amont, les lavandières Font claquer leurs battoirs sur le linge et les pierres. Ou bien plongent leurs bras nacrés dans l’eau qui court, Et, montrant leurs pieds nus, le jupon troussé court, Chantent une chanson où le roi les épouse. Chanson, pieds nus, bras blancs, font que ce gars en blouse Distrait, laisse aller seul son cheval fatigué, Fumant, poitrail dans l’eau, par les courbes du gué. Ces feuillages, en plein courant, couvrent quelqu’île Qu’on voudrait posséder, pour y rêver tranquille. Puis des collines à carreaux irréguliers, Des petits bois ; plus près de l’eau, les peupliers Et les saules. Le Fleuve élargi, moins rapide, S’emplit de nénuphars, de joncs. Dans l’or fluide Du soir, les moucherons valsent. Mais, rapprochés, Maintenant les coteaux s’élèvent. Des rochers Interrompent souvent les cultures en pente. Tout le pays pierreux, où le Fleuve serpente Nourrit, pauvre et moussu, la ronce et le bandit. Le courant étranglé dans les ravins, bondit Sur les roches, ou bien dort dans les trous qu’il creuse. Mais l’eau n’interrompt pas sa course aventureuse Malgré tant de travaux et de sommeils. Voici La brèche ouverte sur l’horizon obscurci Par la poussière d’eau. Le lit de pierre plate Finit brusque, et le flot, pesante nappe, éclate En un rugissement perpétuel. En bas, Les rocs éparpillés comme après des combats De titans, brisent l’eau sur leurs arêtes dures. Au loin, tout est mouillé. L’audace des verdures Plantureuses encadre et rompt souvent l’éclat De la chute écumeuse. Ici le pays plat Étale encor ses prés, ses moissons. Des rivières, Venant on ne sait d’où, capricieuses, fières Courent les champs, croyant qu’elles vivront toujours Dans la parure en fleur de leur jeune parcours. Mais le Fleuve vainqueur les arrête au passage, Et fait taire ce rire en son cours vaste et sage. Aux rives les hameaux se succèdent pareils. Puis, voici l’industrie aux discordants réveils. Les rossignols, troublés par le bruit et la suie Des usines, s’en vont vers les bois frais qu’essuie La pluie et qu’au matin parfume le muguet. Le soleil luit toujours ; mais l’homme fait le guet. Voilà qu’il a bâti des quais et des écluses ; Et les saules cendrés, méfiants de ces ruses, Et les peupliers fiers ne vont pas jusque-là. Ces coteaux profanés, d’où le loup s’en alla, S’incrustent de maisons blanches et de fabriques Qui dressent gravement leurs hauts tuyaux de briques. Sur le Fleuve tranquille, égayant le tableau, Les jeunes hommes, forts et beaux, qui domptent l’eau, Oublieux, en ramant, de l’intrigue servile, S’en vont, joyeux, avec des femmes. C’est la ville, La ville immense avec ses cris hospitaliers, L’eau coule entre les quais corrects. Des escaliers Mènent aux profondeurs glauques du suicide. À la paroi moussue un gros anneau s’oxide, Pour celui qui se noie inaccessible espoir. Ligne capricieuse et noire sur le soir Verdâtre, les maisons, les palais en étages Se constellent. Au port, les ventes, les courtages Sont finis. Le jour baisse, et les chauves-souris Voltigent lourdement, poussant des petits cris. Ces vieux quais oubliés sur leurs pierres disjointes Supportent des maisons grises aux toits en pointes. Là, sèchent des chiffons que de leurs maigres bras Les femmes pauvres ont rincés. En bas, des rats. Le flot profond, serré par les piles massives Du pont, court plus féroce, et les pierres passives Se laissent émietter par l’eau, tranquillement. On voit s’allumer moins d’astres au firmament Que de lumières sur les quais et dans les rues Pleines du bruit des voix, des bals gais, parcourues Par les voitures. Seul, le Fleuve ne rit pas Sous les chalands ventrus et lourds. D’ailleurs, en bas, L’égout vomit l’eau noire aux affreuses écumes, Roulant des vieux souliers, des débris de légumes, Des chiens, des chats pourris qu’emmène le courant, Souillure sans effet dans le Fleuve si grand Dont la lune, œil d’argent, paillette la surface. Mais, qu’importe la vie humaine à l’eau qui passe, Les ordures, la foule immense et les bals gais ? L’eau ne s’attarde pas à ces choses. Les gués Sont rompus, maintenant, en aval de la ville. L’homme a dragué le lit du Fleuve, plus docile Depuis qu’il est si large et si profond. La mer Aux bateaux goudronnés laisse un parfum amer Qui parle des pays lointains où le vent mène. Le Fleuve, insoucieux de l’industrie humaine, Continue à travers la campagne. La nuit S’avance triomphante et constellée, au bruit Des feuilles que l’air frais emperle de rosée. Puis, au matin, encore une ville posée Dans la plaine, bijou de perle sur velours Vert, dont tous ces coteaux imitent les plis lourds ; Des fermes aux grands toits, bas et moussus, tapies Au bord des prés sans fin où voltigent les pies, Richesses qu’à mi-voix ce paysan pensif Évalue en fouettant son vieux mulet poussif. Le Fleuve s’élargit toujours, tant, que les rives Perdent vers l’horizon leurs lignes fugitives. Les coteaux abaissés, le ciel agité, l’air Murmurant et salé, proclament que la mer Est là, terme implacable à la folle équipée De l’eau, qui vers le ciel chaud s’était échappée. La mer demande tout fantasque, et puis, parfois Refuse les tributs du Fleuve, limon, bois, Cadavres, rocs brisés, qu’aux montagnes lointaines, Aux terres grasses, aux hameaux, aux vastes plaines, Il a volé, voulant rassasier la mer. Et tout s’entasse, obstacle au Fleuve. L’homme fier Trouve ici les débris distincts de chaque année, Aux temps obscurs où sa race n’était pas née. Tout le pays est gai. De loin le chant des coqs Fend la brume. Voici les bassins et les docks, Les cris des cabestans, les barques amarrées D’où mille portefaix enlèvent les denrées, Ballots, tonneaux, métaux en barres, tas de blés. Aux cabarets fumeux, les marins attablés Se menacent, avec des jurons exotiques. On trouve tous les fruits lointains dans les boutiques. L’eau du Fleuve s’arrête, un peu troublée, avant De se perdre, innommée, en l’infini mouvant. C’est comme une bataille en ligne régulière : Escadrons au galop, soulevant la poussière, Les vagues de la mer arrivent à grands bruits, Blanches d’écume, ayant des airs vainqueurs, et puis S’en retournent, efforts que le Fleuve repousse Avec ses petits flots audacieux d’eau douce. La mer fuit, mais emporte et disperse à jamais, Rang par rang, tous ces flots, fils des lointains sommets. * Muse hautaine. Muse aux yeux clairs, sois bénie ! Malgré tes longs dédains, ma chanson est finie ; Car tu m’as consolé de tous les bruits railleurs ; Tu m’as montré, parmi mes souvenirs meilleurs, Des lueurs pour teinter l’eau qui court et gazouille, L’eau fraîche où, vers le soir, l’hirondelle se mouille. Et j’ai suivi ses flots jusqu’à la grande mer. Qu’on se lise entre amis ce chant tranquille et fier, Dans les moments de fièvre et dans les jours d’épreuve, Qu’on endorme son cœur aux murmures du Fleuve.

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    Charles Cros

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    Les femmes sont fleurs Il y a des moments où les femmes sont fleurs ; On n'a pas de respect pour ces fraîches corolles... Je suis un papillon qui fuit des choses folles, Et c'est dans un baiser suprême que je meurs. Mais il y a parfois de mauvaises rumeurs ; Je t'ai baisé le bec, oiseau bleu qui t'envoles, J'ai bouché mon oreille aux funèbres paroles ; Mais, Muse, j'ai fléchi sous tes regards charmeurs. Je paie avec mon sang véritable, je paie Et ne recevrai pas, je le sais, de monnaie, Et l'on me laissera mourir au pied du mur. Ayant traversé tout, inondation, flamme, Je ne me plaindrai pas, délicieuse femme, Ni du passé, ni du présent, ni du futur !

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    Les langues Le russe est froid, presque cruel, L’allemand chuinte ses consonnes ; Italie, en vain tu résonnes De ton baiser perpétuel. Dans l’anglais il y a du miel, Des miaulements de personnes Qui se disent douces et bonnes ; Ça sert, pour le temps actuel. Les langues d’orient ? regret Ou gloussement sans intérêt. Chère, quand tu m’appelles Charles, Avec cet accent sang pareil Le langage que tu me parles, C’est le français, clair de soleil.

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    Les quatre saisons - l'automne L'automne fait les bruits froissés De nos tumultueux baisers. Dans l'eau tombent les feuilles sèches Et sur ses yeux, les folles mèches. Voici les pèches, les raisins, J'aime mieux sa joue et ses seins. Que me fait le soir triste et rouge, Quand sa lèvre boudeuse bouge ? Le vin qui coule des pressoirs Est moins traître que ses yeux noirs.

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    Charles Cros

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    Liberté Le vent impur des étables Vient d’ouest, d’est, du sud, du nord. On ne s’assied plus aux tables Des heureux, puisqu’on est mort. Les princesses aux beaux râbles Offrent leurs plus doux trésors. Mais on s’en va dans les sables Oublié, méprisé, fort. On peut regarder la lune Tranquille dans le ciel noir. Et quelle morale ?… aucune. Je me console à vous voir, A vous étreindre ce soir Amie éclatante et brune.

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    Charles Cros

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    L’archet À Mademoiselle Hjardemaal. Elle avait de beaux cheveux, blonds Comme une moisson d’août, si longs Qu’ils lui tombaient jusqu’aux talons. Elle avait une voix étrange, Musicale, de fée ou d’ange, Des yeux verts sous leur noire frange. * Lui, ne craignait pas de rival, Quand il traversait mont ou val, En l’emportant sur son cheval. Car, pour tous ceux de la contrée, Altière elle s’était montrée, Jusqu’au jour qu’il l’eut rencontrée. * L’amour la prit si fort au cœur, Que pour un sourire moqueur, Il lui vint un mal de langueur. Et dans ses dernières caresses : « Fais un archet avec mes tresses, Pour charmer tes autres maîtresses. » Puis, dans un long baiser nerveux, Elle mourut. Suivant ses vœux, Il fit l’archet de ses cheveux. * Comme un aveugle qui marmonne, Sur un violon de Crémone Il jouait, demandant l’aumône. Tous avaient d’enivrants frissons À l’écouter. Car dans ces sons Vivaient la morte et ses chansons. * Le roi, charmé, fit sa fortune. Lui, sut plaire à la reine brune Et l’enlever au clair de lune. Mais, chaque fois qu’il y touchait Pour plaire à la reine, l’archet Tristement le lui reprochait. * Au son du funèbre langage, Ils moururent à mi-voyage. Et la morte reprit son gage. Elle reprit ses cheveux, blonds Comme une moisson d’août, si longs Qu’ils lui tombaient jusqu’aux talons.

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    L’orgue A André Gill Sous un roi d’Allemagne, ancien, Est mort Gottlieb le musicien. Un l’a cloué sous les planches. Hou ! hou ! hou ! Le vent souffle dans les branches. Il est mort pour avoir aimé La petite Rose-de-Mai. Les filles ne sont pas franches. Hou ! hou ! hou ! Le vent souffle dans les branches. Elle s’est mariée, un jour, Avec un autre, sans amour.  » Repassez les robes blanches! «  Hou ! hou ! hou ! Le vent souffle dans les branches. Quand à l’église ils sont venus, Gottlieb à l’orgue n’était plus, Comme les autres dimanches. Hou ! hou ! hou! Le vent souffle dans les branches. Car depuis lors, à minuit noir, Dans la forêt on peut le voir A l’époque des pervenches. Hou ! hou ! hou ! Le vent souffle dans les branches. Son orgue a les pins pour tuyaux. Il fait peur aux petits oiseaux. orts d’amour ont leurs revanches. Hou ! hou ! hou ! Le vent souffle dans les branches.

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    Charles Cros

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    L’été A Laure Bernard C’est l’été. Le soleil darde Ses rayons intarissables Sur l’étranger qui s’attarde Au milieu des vastes sables. Comme une liqueur subtile Baignant l’horizon sans borne, L’air qui du sol chaud distille Fait trembloter le roc morne. Le bois des arbres éclate. Le tigre rayé, l’hyène, Tirant leur langue écarlate, Cherchent de l’eau dans la plaine. Les éléphants vont en troupe, Broyant sous leurs pieds les haies Et soulevant de leur croupe Les branchages des futaies. Il n’est pas de grotte creuse Où la chaleur ne pénètre. Aucune vallée ombreuse Où de l’herbe puisse naître. Au jardin, sous un toit lisse De bambou, Sitâ sommeille : Une moue effleure et plisse Parfois sa lèvre vermeille. Sous la gaze, d’or rayée, Où son beau corps s’enveloppe, En s’étirant, l’ennuyée Ouvre ses yeux d’antilope. Mais elle attend, sous ce voile Qui trahit sa beauté nue, Qu’au ciel la première étoile Annonce la nuit venue. Déjà le soleil s’incline Et dans la mer murmurante Va, derrière la colline, Mirer sa splendeur mourante. Et la nature brûlée Respire enfin. La nuit brune Revêt sa robe étoilée, Et, calme, apparaît la lune.

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    Malgré tout Je sens la bonne odeur des vaches dans le pré ; Bétail, moissons, vraiment la richesse étincelle Dans la plaine sans fin, sans fin, où de son aile La pie a des tracés noirs sur le ciel doré. Et puis, voici venir, belle toute à mon gré, La fille qui ne sait rien de ce qu'on veut d'elle Mais qui est la plus belle en la saison nouvelle Sonnet. Je sens la bonne odeur des vaches dans le pré ; Bétail, moissons, vraiment la richesse étincelle Dans la plaine sans fin, sans fin, où de son aile La pie a des tracés noirs sur le ciel doré. Et puis, voici venir, belle toute à mon gré, La fille qui ne sait rien de ce qu'on veut d'elle Mais qui est la plus belle en la saison nouvelle Et dont le regard clair est le plus adoré. Malgré tous les travaux, odeurs vagues, serviles, Loin de la mer, et loin des champs, et loin des villes Je veux l'avoir, je veux, parmi ses cheveux lourds, Oublier le regard absurde, absurde, infâme, Enfin, enfin je veux me noyer dans toi, femme, Et mourir criminel pour toujours, pour toujours !

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    Charles Cros

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    Matin Voici le matin bleu. Ma rose et blonde amie Lasse d’amour, sous mes baisers, s’est endormie. Voici le matin bleu qui vient sur l’oreiller Éteindre les lueurs oranges du foyer. L’insoucieuse dort. La fatigue a fait taire Le babil de cristal, les soupirs de panthère. Les voraces baisers et les rires perlés. Et l’or capricieux des cheveux déroulés Fait un cadre ondoyant à la tête qui penche. Nue et fière de ses contours, la gorge blanche Où, sur les deux sommets, fleurit le sang vermeil, Se soulève et s’abaisse au rhythme du sommeil. La robe, nid de soie, à terre est affaissée. Hier, sous des blancheurs de batiste froissée La forme en a jailli libre, papillon blanc. Qui sort de son cocon, l’aile collée au flanc. A côté, sur leurs hauts talons, sont les bottines Qui font aux petits pieds ces allures mutines, Et les bas, faits de fils de la vierge croisés, Qui prennent sur la peau des chatoiements rosés. Epars dans tous les coins de la chambre muette Je revois les débris de la fière toilette Qu’elle portait, quand elle est arrivée hier Tout imprégnée encor des senteurs de l’hiver.

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    Charles Cros

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    Maussaderie À Albert Tinchant. À notre époque froide, on ne fait plus l'amour. Loin des bois endormeurs et loin des femmes nues Les pauvres vont, cherchant ces sommes inconnues Que cachent les banquiers, inquiets nuit et jour. C'était bien bon l'odeur des pains sortant du four, C'était bien beau, dans l'ouest, l'éclat doré des nues, Quand les brumes d'automne étaient déjà venues, Alors qu'on ramenait les boeufs las du labour ! Les aspirations n'étaient pas étouffées, Et dans la ville heureuse on voyait des trophées, On entendait sonner la victoire au tambour. On rêvait d'or, d'azur, de fêtes à la cour, Et du prince Charmant, filleul des belles fées. À notre époque froide, on ne fait plus l'amour !

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    Charles Cros

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    Novembre Je te rencontre un soir d'automne, Un soir frais, rose et monotone. Dans le parc oublié, personne. Toutes les chansons se sont tues : J'ai vu grelotter les statues, Sous tant de feuilles abattues. Tu es perverse. Mais qu'importe La complainte pauvre qu'apporte Le vent froid par-dessous la porte. Fille d'automne tu t'étonnes De mes paroles monotones... Il nous reste à vider les tonnes.

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    Charles Cros

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    Phantasma J'ai rêvé l'archipel parfumé, montagneux, Perdu dans une mer inconnue et profonde Où le naufrage nous a jetés tous les deux Oubliés loin des lois qui régissent le monde. Sur le sable étendue en l'or de tes cheveux, Des cheveux qui te font comme une tombe blonde, Je te ranime au son nouveau de mes aveux Que ne répéteront ni la plage ni l'onde. C'est un rêve. Ton âme est un oiseau qui fuit Vers les horizons clairs de rubis, d'émeraudes, Et mon âme abattue est un oiseau de nuit. Pour te soumettre, proie exquise, à mon ennui Et pour te dompter, blanche, en mes étreintes chaudes, Tous les pays sont trop habités aujourd'hui.

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    Charles Cros

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    Plainte Vrai sauvage égaré dans la ville de pierre, À la clarté du gaz je végète et je meurs. Mais vous vous y plaisez, et vos regards charmeurs M'attirent à la mort, parisienne fière. Je rêve de passer ma vie en quelque coin Sous les bois verts ou sur les monts aromatiques, En Orient, ou bien près du pôle, très loin, Loin des journaux, de la cohue et des boutiques. Mais vous aimez la foule et les éclats de voix, Le bal de l'Opéra, le gaz et la réclame. Moi, j'oublie, à vous voir, les rochers et les bois, Je me tue à vouloir me civiliser l'âme. Je m'ennuie à vous le dire si souvent : Je mourrai, papillon brûlé, si cela dure... Vous feriez bien pourtant, vos cheveux noirs au vent, En clair peignoir ruché, sur un fond de verdure !

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    Charles Cros

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    Pluriel féminin Je suis encombré des amours perdues, Je suis effaré des amours offertes. Vous voici pointer, jeunes feuilles vertes. Il faut vous payer, noces qui sont dues. La neige descend, plumes assidues. Hiver en retard, tu me déconcertes. Froideur des amis, tu m'étonnes, certes. Et mes routes sont désertes, ardues. Amours neuves, et vous amours passées, Vous vous emmêlez trop dans mes pensées En des discordances éoliennes. Printemps, viens donc vite et de tes poussées D'un balai d'églantines insensées Chasse de mon cœur les amours anciennes !

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    Charles Cros

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    Possession Puisque ma bouche a rencontré Sa bouche, il faut me taire. Trêve Aux mots creux. Je ne montrerai Rien qui puisse trahir mon rêve. * Il faut que je ne dise rien De l'odeur de sa chevelure, De son sourire aérien, Des bravoures de son allure, Rien des yeux aux regards troublants, Persuasifs, cabalistiques, Rien des épaules, des bras blancs Aux effluves aromatiques. * Je ne sais plus faire d'ailleurs Une si savante analyse, Possédé de rêves meilleurs Où ma raison se paralyse. Et je me sens comme emporté, Épave en proie au jeu des vagues, Par le vertige où m'ont jeté Ses lèvres tièdes, ses yeux vagues. * On se demandera d'où vient L'influx tout-puissant qui m'oppresse, Mais personne n'en saura rien Que moi seul... et l'Enchanteresse.

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    Quatorze vers à Victor Hugo Ayant tout dit ayant donné toutes les preuves, Ayant tout remué, mers, monts, plaines et fleuves, Dans ses rimes d'airain éternellement neuves Ayant, toutes, subi les mortelles épreuves, Le vieux Poète doit recevoir aujourd'hui, Sans laisser deviner son olympique ennui, Les lauriers, l'olivier qu'on a coupé pour lui Dans notre douce France où son génie a lui. Ne craignons pas, rameaux en mains, musique en tête, De troubler son repos par la bruyante fête, Puisque cet homme est bon, encor plus que poète. Et comme, en souriant, toi seul tendais les bras Aux vaincus poursuivis, traqués comme des rats, Je crois, Victor Hugo, que tu nous souriras.

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    Rendez-vous À J. Keck. Ma belle amie est morte, Et voilà qu'on la porte En terre, ce matin, En souliers de satin. Elle dort toute blanche, En robe de dimanche, Dans son cercueil ouvert Malgré le vent d'hiver. Creuse, fossoyeur, creuse À ma belle amoureuse Un tombeau bien profond, Avec ma place au fond. Avant que la nuit tombe Ne ferme pas la tombe ; Car elle m'avait dit De venir cette nuit, De venir dans sa chambre : « Par ces nuits de décembre, Seule, en mon lit étroit, Sans toi, j'ai toujours froid. » * Mais, par une aube grise, Son frère l'a surprise Nue et sur mes genoux. Il m'a dit : « Battons-nous. Que je te tue. Ensuite Je tuerai la petite. » C'est moi qui, m'en gardant, L'ai tué, cependant. Sa peine fut si forte Qu'hier elle en est morte. Mais, comme elle m'a dit, Elle m'attend au lit. * Au lit que tu sais faire, Fossoyeur, dans la terre. Et, dans ce lit étroit, Seule, elle aurait trop froid. J'irai coucher près d'elle, Comme un amant fidèle, Pendant toute la nuit Qui jamais ne finit.

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    Révolte Absurde et ridicule à force d’être rose, À force d’être blanche, à force de cheveux Blonds, ondés, crêpelés, à force d’avoir bleus Les yeux, saphirs trop vains de leur métempsycose. Absurde, puisqu’on n’en peut pas parler en prose, Ridicule, puisqu’on n’en a jamais vu deux, Sauf, peut-être, dans des keepsakes nuageux… Dépasser le réel ainsi, c’est de la pose. C’en est même obsédant, puisque le vert des bois Prend un ton d’émeraude impossible en peinture S’il sert de fond à ces cheveux contre nature. Et ces blancheurs de peau sont cause quelquefois Qu’on perdrait tout respect des blancheurs que le rite Classique admet : les lys, la neige. Ça m’irrite !

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    Rêve Oh ! la fleur de lys ! La noble fleur blanche, La fleur qui se penche Sur nos fronts pâlis ! Son parfum suave Plus doux que le miel Raconte le ciel, Console l'esclave. Son luxe éclatant Dans la saison douce Pousse, pousse, pousse. Qui nous orne autant ? La rose est coquette ; Le glaïeul sanglant Mais le lys est blanc Pour la grande fête. Oh ! le temps des rois, Des grands capitaines, Des phrases hautaines Aux étrangers froids ! Le printemps s'apprête ; Les lys vont fleurir. Oh ! ne pas mourir Avant cette fête.

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    Scherzo Sourires, fleurs, baisers, essences, Après de si fades ennuis, Après de si ternes absences, Parfumez le vent de mes nuits ! Illuminez ma fantaisie, Jonchez mon chemin idéal, Et versez-moi votre ambroisie, Longs regards, lys, lèvres, santal ! * Car j'ignore l'amour caduque Et le dessillement des yeux, Puisqu'encor sur ta blanche nuque L'or flamboie en flocons soyeux. Et cependant, ma fière amie, Il y a longtemps, n'est-ce pas ? Qu'un matin tu t'es endormie, Lasse d'amour, entre mes bras. * Ce ne sont pas choses charnelles Qui font ton attrait non pareil, Qui conservent à tes prunelles Ces mêmes rayons de soleil. Car les choses charnelles meurent, Ou se fanent à l'air réel, Mais toujours tes beautés demeurent Dans leur nimbe immatériel. * Ce n'est plus l'heure des tendresses Jalouses, ni des faux serments. Ne me dis rien de mes maîtresses, Je ne compte pas tes amants. * À toi, comète vagabonde Souvent attardée en chemin, Laissant ta chevelure blonde Flotter dans l'éther surhumain, Qu'importent quelques astres pâles Au ciel troublé de ma raison, Quand tu viens à longs intervalles Envelopper mon horizon ? * Je ne veux pas savoir quels pôles Ta folle orbite a dépassés, Tends-moi tes seins et tes épaules ; Que je les baise, c'est assez.

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    Soir Je viens de voir ma bien-aimée Et vais au hasard, sans desseins, La bouche encor tout embaumée Du tiède contact de ses seins. Mes yeux voient à travers le voile Qu'y laisse le plaisir récent, Dans chaque lanterne une étoile, Un ami dans chaque passant. Chauves-souris disséminées, Mes tristesses s'en vont en l'air Se cacher par les cheminées. Noires, sur le couchant vert-clair. Le gaz s'allume aux étalages... Moi, je crois, au lieu du trottoir, Fouler sous mes pieds les nuages Ou les tapis de son boudoir. Car elle suit mes courses folles, Et le vent vient me caresser Avec le son de ses paroles Et le parfum de son baiser.

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    Charles Cros

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    Sonnet astronomique Alors que finissait la journée estivale, Nous marchions, toi pendue à mon bras, moi rêvant À ces mondes lointains dont je parle souvent. Aussi regardais-tu chaque étoile en rivale. Au retour, à l'endroit où la côte dévale, Tes genoux ont fléchi sous le charme énervant De la soirée et des senteurs qu'avait le vent. Vénus, dans l'ouest doré, se baignait triomphale. Puis, las d'amour, levant les yeux languissamment, Nous avons eu tous deux un long tressaillement Sous la sérénité du rayon planétaire. Sans doute, à cet instant deux amants, dans Vénus, Arrêtés en des bois aux parfums inconnus, Ont, entre deux baisers, regardé notre terre.

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