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Emile Verhaeren

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Émile Verhaeren, né à Saint-Amand dans la province d'Anvers (Belgique) le 21 mai 1855 et mort à Rouen le 27 novembre 1916, est un poète belge flamand, d'expression française. Dans ses poèmes influencés par le symbolisme, où il pratique le vers libre, sa conscience sociale proche de l'anarchisme lui fait évoquer les grandes villes dont il parle avec lyrisme sur un ton d'une grande musicalité. Il a su traduire dans son œuvre la beauté de l'effort humain.

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Poésies

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    Avec mes vieilles mains Avec mes vieilles mains de ton front rapprochées J'écarte tes cheveux et je baise, ce soir, Pendant ton bref sommeil au bord de l'âtre noir La ferveur de tes yeux, sous tes longs cils cachée. Oh ! la bonne tendresse en cette fin de jour ! Mes yeux suivent les ans dont l'existence est faite Et tout à coup ta vie y parait si parfaite Qu'un émouvant respect attendrit mon amour. Et comme au temps où tu m'étais la fiancée L'ardeur me vient encor de tomber à genoux Et de toucher la place où bat ton coeur si doux Avec des doigts aussi chastes que mes pensées.

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    C'était en juin, dans le jardin C'était en juin, dans le jardin, C'était notre heure et notre jour ; Et nos yeux regardaient, avec un tel amour, Les choses, Qu'il nous semblait que doucement s'ouvraient Et nous voyaient et nous aimaient Les roses. Le ciel était plus pur qu'il ne le fut jamais : Les insectes et les oiseaux Volaient dans l'or et dans la joie D'un air frêle comme la soie ; Et nos baisers étalent si beaux Qu'ils exaltaient et la lumière et les oiseaux.

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    Décembre Ouvrez, les gens, ouvrez la porte, je frappe au seuil et à l'auvent, ouvrez, les gens, je suis le vent, qui s'habille de feuilles mortes. - Entrez, monsieur, entrez, le vent, voici pour vous la cheminée et sa niche badigeonnée ; entrez chez nous, monsieur le vent. - Ouvrez, les gens, je suis la pluie, je suis la veuve en robe grise dont la trame s'indéfinise, dans un brouillard couleur de suie.

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    En hiver Le sol trempé se gerce aux froidures premières, La neige blanche essaime au loin ses duvets blancs, Et met, au bord des toits et des chaumes branlants, Des coussinets de laine irisés de lumières. Passent dans les champs nus les plaintes coutumières, A travers le désert des silences dolents, Où de grands corbeaux lourds abattent leurs vols lents Et s'en viennent de faim rôder près des chaumières. Mais depuis que le ciel de gris s'était couvert, Dans la ferme riait une gaieté d'hiver, On s'assemblait en rond autour du foyer rouge, Et l'amour s'éveillait, le soir, de gars à gouge, Au bouillonnement gras et siffleur, du brassin Qui grouillait, comme un ventre, en son chaudron d'airain.

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    Il fait novembre en mon âme Rayures d'eau, longues feuilles couleur de brique, Par mes plaines d'éternité comme il en tombe ! Et de la pluie et de la pluie - et la réplique D'un gros vent boursouflé qui gonfle et qui se bombe Et qui tombe, rayé de pluie en de la pluie.

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    Je dédie a tes pleurs, a ton sourire Je dédie à tes pleurs, à ton sourire, Mes plus douces pensées, Celles que je te dis, celles aussi Qui demeurent imprécisées Et trop profondes pour les dire. Je dédie à tes pleurs, à ton sourire, A toute ton âme, mon âme, Avec ses pleurs et ses sourires Et son baiser. Vois-tu, l'aube blanchit le sol, couleur de lie ; Des liens d'ombre semblent glisser Je dédie à tes pleurs, à ton sourire, Mes plus douces pensées, Celles que je te dis, celles aussi Qui demeurent imprécisées Et trop profondes pour les dire. Je dédie à tes pleurs, à ton sourire, A toute ton âme, mon âme, Avec ses pleurs et ses sourires Et son baiser. Vois-tu, l'aube blanchit le sol, couleur de lie ; Des liens d'ombre semblent glisser Et s'en aller, avec mélancolie ; L'eau des étangs s'éclaire et tamise son bruit, L'herbe rayonne et les corolles se déplient, Et les bois d'or s'affranchissent de toute nuit. Oh ! dis, pouvoir, un jour, Entrer ainsi dans la pleine lumière ; Oh ! dis, pouvoir, un jour, Avec des cris vainqueurs et de hautes prières, Sans plus aucun voile sur nous, Sans plus aucun remords en nous, Oh ! dis, pouvoir un jour Entrer à deux dans le lucide amour !...

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    Je t'apporte ma joie Je t'apporte, ce soir, comme offrande, ma joie D'avoir plongé mon corps dans l'or et dans la soie Du vent joyeux et franc et du soleil superbe ; Mes pieds sont clairs d'avoir marché parmi les herbes, Mes mains douces d'avoir touché le coeur des fleurs, Mes yeux brillants d'avoir soudain senti les pleurs Naître, sourdre et monter, autour de mes prunelles, Devant la terre en fête et sa force éternelle. L'espace entre ses bras de bougeante clarté, Ivre et fervent et sanglotant, m'a emporté, Et j'ai passé je ne sais où, très loin, là-bas, Avec des cris captifs que délivraient mes pas. Je t'apporte la vie et la beauté des plaines ; Respire-les sur moi à franche et bonne haleine, Les origans ont caressé mes doigts, et l'air Et sa lumière et ses parfums sont dans ma chair.

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    L'ancienne gloire Dans le silence et la grandeur des cathédrales, La cité, riche avait jadis, dressé vers Dieu De merveilleux autels,, tordus comme des feux Cuivres, bronzes, argents, cartels, rinceaux, spirales. Les chefs vainqueurs et leurs soldats Y suspendaient les vieux drapeaux de guerre ; Et les autels décorés d'or, Aux yeux de ceux qui sortaient des combats, Apparaissaient alors Comme un arrière immense de galère. D'entre les hauts piliers, jaillissaient les buccins ; Des archanges farouches Y appuyaient leur bouche Et dans un gonflement de la gorge et des seins Sonnaient vers les vents de la Gloire La vie ardente et la victoire. Sur les marbres des escaliers, Les bras géants des chandeliers Dressaient leurs cires enflammées. Les encensoirs volaient dans les fumées ; Les ex-votos luisaient comme un fourmillement D'yeux et de coeurs, dans l'ombre ; L'orgue, ainsi qu'une marée, immensément Grondait ; des rafales de voix sans nombre Sortaient du temple et résonnaient jusqu'au beffroi Et le prêtre vêtu d'orfroi Au milieu des pennons brandis et des bombardes, Levait l'épée et lentement traçait avec la garde Sur le front des héros, le signe de la croix. Oh ! ces autels pareils à des brasiers sculptés, Avec leur flore énorme et leurs feux tourmentés ; Massifs et violents, exorbitants et fous, Ils demeurent encor, parmi les villes mortes. Debout Alors qu'on n'entend plus les chefs et leurs escortes Sabres, clairons, soleils, lances, drapeaux, tambours, Rentrer par les remparts et passer les faubourgs Et revenir, comme autrefois, au coeur des places, Planter leur étendard dont s'exalta l'espace. La gloire est loin et son miracle : Les Archanges qui couronnent le tabernacle, Comme autant d'énormes Renommées, Ne sonnent plus pour les armées. Avec prudence, on a réfugié L'emblématique et colossal lion, Dans le blason de la cité ; Et, vers midi, le carillon, Avec ses notes lasses Ne laisse plus danser Sur la grand'place Et s'épuiser, Qu'un petit air estropié.

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    Les saints, les morts, les arbres et le vent Les grand'routes tracent des croix A l'infini, à travers bois ; Les grand'routes tracent des croix lointaines A l'infini, à travers plaines ; Les grand'routes tracent des croix Dans l'espace livide et froid, Où voyagent les vents déchevelés A l'infini, par les allées. Arbres et vents pareils aux pèlerins ; Arbres tristes et fous où l'orage s'accroche, Arbres pareils au défilé de tous les saints, Au défilé de tous les morts Au son des cloches, Arbres qui combattez au Nord Et vents qui déchirez le monde, Oh ! vos luttes et vos sanglots et vos remords Se débattant et s'engouffrant dans les âmes profondes Voici Novembre assis auprès de l'âtre, Avec ses maigres doigts chauffés au feu ; Oh ! tous ces morts, sans feu ni lieu, Oh ! tous ces vents cognant les murs opiniâtres Et repoussés et rejetés Vers l'inconnu, de tous côtés.

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    Roses de Juin, vous les plus belles Roses de juin, vous les plus belles, Avec vos cœurs de soleil transpercés ; Roses violentes et tranquilles, et telles Qu'un vol léger d'oiseaux sur les branches posés ; Roses de Juin et de Juillet, droites et neuves, Bouches, baisers qui tout à coup s'émeuvent Ou s'apaisent, au va-et-vient du vent, Caresse d'ombre et d'or, sur le jardin mouvant ; Roses d'ardeur muette et de volonté douce, Roses de volupté en vos gaines de mousse, Vous qui passez les jours du plein été A vous aimer, dans la clarté ; Roses vives, fraîches, magnifiques, toutes nos roses Oh ! que pareils à vous nos multiples désirs, Dans la chère fatigue ou le tremblant plaisir S'entr'aiment, s'exaltent et se reposent !

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    À la gloire des cieux L'infini tout entier transparaît sous les voiles Que lui tissent les doigts des hivers radieux Et la forêt obscure et profonde des cieux Laisse tomber vers nous son feuillage d'étoiles. La mer ailée, avec ses flots d'ombre et de moire, Parcourt, sous les feux d'or, sa pâle immensité ; La lune est claire et ses rayons diamantés Baignent tranquillement le front des promontoires. S'en vont, là-bas, faisant et défaisant leurs noeuds, Les grands fleuves d'argent, par la nuit translucide ; Et l'on croit voir briller de merveilleux acides Dans la coupe que tend le lac, vers les monts bleus. La lumière, partout, éclate en floraisons Que le rivage fixe ou que le flot balance ; Les îles sont des nids où s'endort le silence, Et des nimbes ardents flottent aux horizons. Tout s'auréole et luit du zénith au nadir. Jadis, ceux qu'exaltaient la foi et ses mystères Apercevaient, dans la nuée autoritaire, La main de Jéhovah passer et resplendir. Mais aujourd'hui les yeux qui voient, scrutent là-haut, Non plus quelque ancien dieu qui s'exile lui-même, Mais l'embroussaillement des merveilleux problèmes Qui nous voilent la force, en son rouge berceau. Ô ces brassins de vie où bout en feux épars A travers l'infini la matière féconde ! Ces flux et ces reflux de mondes vers des mondes, Dans un balancement de toujours à jamais ! Ces tumultes brûlés de vitesse et de bruit Dont nous n'entendons pas rugir la violence Et d'où tombe pourtant ce colossal silence Qui fait la paix, le calme et la beauté des nuits ! Et ces sphères de flamme et d'or, toujours plus loin, Toujours plus haut, de gouffre en gouffre et D'ombre en ombre, Si haut, si loin, que tout calcul défaille et sombre S'il veut saisir leurs nombres fous, entre ses poings ! L'infini tout entier transparaît sous les voiles Que lui tissent les doigts des hivers radieux Et la forêt obscure et profonde des cieux Laisse tomber vers nous son feuillage d'étoiles.

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    À la gloire du vent - Toi qui t'en vas là-bas, Par toutes les routes de la terre, Homme tenace et solitaire, Vers où vas-tu, toi qui t'en vas ? - J'aime le vent, l'air et l'espace ; Et je m'en vais sans savoir où, Avec mon coeur fervent et fou, Dans l'air qui luit et dans le vent qui passe. - Le vent est clair dans le soleil, Le vent est frais sur les maisons, Le vent incline, avec ses bras vermeils, De l'un à l'autre bout des horizons, Les fleurs rouges et les fauves moissons. - Le Sud, l'Ouest, l'Est, le Nord, Avec leurs paumes d'or, Avec leurs poings de glace, Se rejettent le vent qui passe. - Voici qu'il vient des mers de Naple et de Messine Dont le geste des dieux illuminait les flots ; Il a creusé les vieux déserts où se dessinent Les blancs festons de sable autour des verts îlots. Son souffle est fatigué, son haleine timide, L'herbe se courbe à peine aux pentes du fossé ; Il a touché pourtant le front des pyramides Et le grand sphinx l'a vu passer. - La saison change, et lentement le vent s'exhume Vêtu de pluie immense et de loques de brume. - Voici qu'il vient vers nous des horizons blafards, Angleterre, Jersey, Bretagne, Ecosse, Irlande, Où novembre suspend les torpides guirlandes De ses astres noyés, en de pâles brouillards ; Il est parti, le vent sans joie et sans lumière : Comme un aveugle, il erre au loin sur l'océan Et, dès qu'il touche un cap ou qu'il heurte une pierre, L'abîme érige un cri géant. - Printemps, quand tu parais sur les plaines désertes, Le vent froidit et gerce encor ta beauté verte. - Voici qu'il vient des longs pays où luit Moscou, Où le Kremlin et ses dômes en or qui bouge Mirent et rejettent au ciel les soleils rouges ; Le vent se cabre ardent, rugueux, terrible et fou, Mord la steppe, bondit d'Ukraine en Allemagne, Roule sur la bruyère avec un bruit d'airain Et fait pleurer les légendes, sous les montagnes, De grotte en grotte, au long du Rhin. - Le vent, le vent pendant les nuits d'hiver lucides Pâlit les cieux et les lointains comme un acide. - Voici qu'il vient du Pôle où de hauts glaciers blancs Alignent leurs palais de gel et de silence ; Apre, tranquille et continu dans ses élans, Il aiguise les rocs comme un faisceau de lances ; Son vol gagne les Sunds et les Ourals déserts, S'attarde aux fiords des Suèdes et des Norvèges Et secoue, à travers l'immensité des mers, Toutes les plumes de la neige. - D'où que vienne le vent, Il rapporte de ses voyages, A travers l'infini des champs et des villages, On ne sait quoi de sain, de clair et de fervent. Avec ses lèvres d'or frôlant le sol des plaines, Il a baisé la joie et la douleur humaines Partout ; Les beaux orgueils, les vieux espoirs, les désirs fous, Tout ce qui met dans l'âme une attente immortelle, Il l'attisa de ses quatre ailes ; Il porte en lui comme un grand coeur sacré Qui bat, tressaille, exulte ou pleure Et qu'il disperse, au gré des saisons et des heures, Vers les bonheurs brandis ou les deuils ignorés. - Si j'aime, admire et chante avec folie Le vent, Et si j'en bois le vin fluide et vivant Jusqu'à la lie, C'est qu'il grandit mon être entier et c'est qu'avant De s'infiltrer, par mes poumons et par mes pores, Jusques au sang dont vit mon corps, Avec sa force rude ou sa douceur profonde, Immensément il a étreint le monde.

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