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Esther Granek

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Poésies

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    Esther Granek

    @estherGranek

    Face à face Vu que d’longtemps on se côtoie, on s’est r’gardés mes rêves et moi. Z’yeux dans les yeux on s’est r’gardés. À n’en finir. Faut l’faire une fois. Faut l’faire une fois et puis qu’en dire ? M’en faut-il rire ? Ou en pleurer ? Rions. Je ris. Non : je me marre ! Et je m’esclaffe ! Et je me tords ! Et je piaffe ! Assez, de grâce ! Ou je meurs là ! Z’yeux dans les yeux est s’est r’gardés mes rêves et moi. À n’en finir.

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    Esther Granek

    @estherGranek

    Grand homme Pour ses proches, on le sait bien, de grand homme il n’y a point. Pour ceux-là en vérité, n’y a place à se leurrer. Or… pour le commun des mortels c’est l’être surnaturel. Le frôler est grand honneur qui vous transcende sur l’heure. Pour ses gens, sa maisonnée, de petitesses il est fait jusqu’à devenir odieux. Que d’aigreurs en ce milieu ! Or… pour chacun, pour le vulgaire, il est de noble matière et vit dans une autre sphère. Hommage au génie divin ! Pour son clan, ô impudeur ! il est surtout grand péteur et qui ne se gêne en rien car sa gloire le vaut bien ! Or… pour ceux qui de loin le voient, l’approcher est privilège et l’on fait souvent le siège des lieux où il se rendra. Pour ses familiers pourtant, il est crétin trop souvent et se mêle de matières où vraiment il n’a que faire. Or… pour le toucher du regard, que d’efforts et de passion ! Et c’est tremblant d’émotion qu’on s’en vantera plus tard. Pour façonner sa stature (mais il dit qu’il n’en a cure) autour de lui papillonne une cour qu’il affectionne. Or… pour de nombreux envoûtés, inspirer l’air qu’il respire est leur plus fervent désir et sorte de volupté… Pour clore : en son sanctuaire, croyant qu’on ne le voit guère, c’est en se curant le nez que s’élèvent ses pensées. De grand homme il n’y a point pour ses proches. On le sait bien. Pour ceux-là en vérité, n’y a place à se leurrer.

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    Esther Granek

    @estherGranek

    Ha ! Ha ! De nature quelque peu rosse, je me voudrais par instants le pouvoir d’une Carabosse. J’aurais délicieux moments. Cette image vous plaît sans doute : A cheval sur un balai, je distribue goutte à goutte doucereuses félicités. De cadeaux mon sac est plein. Petits présents. Petits riens. D’un seul je veux vous parler, l’ayant longtemps mijoté. Pour le bonheur des esthètes, je ferais ressusciter ces artistes affamés dont l’oeuvre est pour eux une dette… et qu’ils ont plaints de tout coeur. Tels qu’ils furent, pouilleux, minables, je les mettrais à la table de ces mêmes connaisseurs. Comment seraient-ils reçus, dégueulasses, gueulards, goulus ? Je me voudrais Carabosse. De rire me viendrait une bosse. HA ! HA !

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    Esther Granek

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    Histoire d’une audience J’avais à peine pénétré dans le grand couloir de l’entrée, quand à mes côtés le valet encore une fois s’est incliné. Il m’a fait tchi tchi à l’oreille. Je ne savais ce qu’il voulait. Son habit était une merveille. Le tissu j’en aurais tâté. Mais étant une fille éduquée et qui connaît les bonnes manières, je sais ce qu’il ne faut pas faire. Et déjà filant comme une flèche, j’atteignis le troisième salon, le domestique sur mes talons. Est-ce qu’il est tout l’temps sur la brèche ? À l’oreille me refit tchi tchi. C’est qu’il voulait mon parapluie. Je dois dire que dans ma maison n’y a point de ces confusions et quand s’en viennent des copains je crie entre les effusions : Donnez vos frusques et vos pépins ! Me voilà dans les ornements, les guéridons et les divans, les portraits de têtes couronnées, une peinture de Monsieur, en pied. Quand soudain arrive la maîtresse. On voit qu’elle me voudrait à l’aise. Elle a une bouille qui me revient. Elle a des yeux qui parlent bien. Et son parfum… quel enchantement ! Je la renifle tout le temps… Et sans détailler ses atours ni trop regarder à l’entour (car comme je vous disais plus haut et que je me tiens à carreau j’ai moi aussi quelque manière et sais ce qu’il ne faut pas faire) je lui sortis mon boniment qu’elle écouta très patiemment. Mais j’avais la langue enchaînée et comme une boule dans le gosier. Puis son baratin elle m’a fait. Moi j’aimais bien et j’écoutais. Soudain se ramène le valet, sans bruit et droit comme un piquet. Il a plié son corps un rien et il m’a rempli les deux mains de vaisselle et de petits riens. J’ai failli manger la serviette en même temps qu’un petit pâté. Et qu’est-ce qu’on doit faire de l’assiette et du verre de cristal taillé ? Ah ! que n’est-elle femme de labeur ! On se ferait tout plein d’honneurs : Elle m’inviterait dans sa cuisine. Elle me ferait son baratin. J’écouterais, j’aimerais bien. Et pour applaudir ses propos, je lui donnerais en bonne copine de grandes tapes dans le dos.. Et mangeant les coudes sur la table la soupe qu’elle aurait préparé, on lamperait pour mieux goûter on roterait quand on voudrait, on penserait : c’est agréable. Et quand on aurait pris son temps sur tout le travail qui attend, elle dirait au bout du menu : ça va, tu m’barbes, j’t’ai assez vue. Tandis qu’ici, un vrai casse-tête. Faut-il ou non mettre les voiles ? Car j’ai oublié le signal… Déjà je crois que je l’embête… Ah ! que n’est-elle femme de labeur ! Que n’en connaît-elle les sueurs ! Elle m’inviterait dans sa cuisine… Elle me ferait son baratin… J’écouterais… j’aimerais bien…

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    Humeur N’assassinez pas la page, vous les assembleurs de mots ! Quel sens a votre langage ? Ou bien serions-nous des sots ? Votre art devient si profond qu’on n’en perçoit plus le fond et qu’il faut pour qu’on l’explique, décoder votre lexique. N’assassinez pas l’public ! *** N’abêtissez pas la toile, vous les créateurs de traits ! Que signifie ce rond pâle s’inscrivant dans un carré ? Votre art devient si fermé Qu’on en a perdu la clef et pour mieux se le cacher, en soi on cherche le hic. N’abêtissez pas l’public ! *** Ne mortifiez pas la glaise, vous les inventeurs de formes ! Chacun vous demande : « Qu’est-ce… ? » en un désarroi énorme. Votre art devient si subtil qu’on se sent un peu débile et conscient d’être imbécile, on n’en est que plus comique. Ne mortifiez pas l’public ! *** Ne bernez donc pas… Baste ! Ne tuez pas l’auditoire ! car fatigué d’être poire, un jour il en aura marre, alors « merde » il vous dira, voyant que nu est le roi !

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    Il a vécu Il a vécu… Il a vécu et il n’est plus. Larmes fausses… vraies…pensées émues… Chapitre clos. Testament lu. Il a vécu. Une vie durant… Une vie durant, fortune aidant, il amassa amoureusement choses, objets choisis longuement, une vie durant. En sa demeure… En sa demeure moult valeurs s’harmonisaient avec bonheur. Y pénétrer était honneur, en sa demeure Devint féroce… Devint féroce et pire qu’un gosse. Et comme chien défendant son os, il soupçonna le temps, les gens. Devint féroce. Son coeur saignait… Son coeur saignait comme bafoué. En chaque objet. Pour chaque trace. Pour chaque griffe. Pour chaque casse… Son coeur saignait. Chapitre clos… Chapitre clos, chapitre ouvert, ce fut un tremblement de terre car dès qu’il reposa sous terre : chapitre ouvert. Révolution… Révolution dans la maison. Les choses perdent et place et nom. Et l’inutile va au pilon. Révolution. Durs traitements… Durs traitements sont infligés aux objets qu’il a vénérés. Orphelins qu’on s’arrache pourtant. Durs traitements. Il a vécu… Il a vécu et il n’est plus. Dans ses cauchemars a-t-il prévu ? A-t-il tremblé ? Et qu’a-t-il su ? Ou deviné ? Aux quatre vents… Aux quatre vents sont dispersées tant de valeurs accumulées pour être à nouveau adorées, aux quatre vents.

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    Incantation Que tes yeux faits d’azur et d’ombre, d’ombre ne trouvent en ton destin. Que tes ans jamais ne soient sombres. Qu’y sombrent les esprits malins. Que tes pas soient comme une danse où danseront joyeux matins. Et que ta vie qui commence, commence ton bonheur et le mien.

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    Incertitude T’absentant, tu m’habites. Tendrement. Comme présent. Dis-moi vite… et ne mens : M’absentant, je t’habite mêmement ? Ne sachant, je m’irrite. Questionnant bassement. Etouffant mes élans. Bâillonnant mes redites. T’assommant. M’assommant. Qu’il est fort mon tourment ! Et pourtant… Mais encore… Dis-moi vite : M’absentant, je t’habite ?

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    La soupe familiale Respirant un même fumet et humant les mêmes vapeurs, ils se retrouvent aux mêmes heures, estomacs vides qu’on vient combler. Heureux symbole d’une famille entourant à nouveau la table où chacun se remplit le râble sans regarder son vis-à-vis. Unis par une même chaleur qui coule de bouche en estomac, leurs pensées se promènent ailleurs quand ils se penchent sur les plats. Si proches, et pourtant étrangers… si proches et pourtant si lointains… chacun son monde, chacun le sien quand ils sont là à mastiquer… plongeant le nez dans un bouquin… ou méditant dans le rata… ou triturant la mie de pain… ou souriant… rien que pour soi… Puis, dans une même digestion qui fait encore le trait d’union, ils garderont haleines semblables quand ils auront quitté la table. Mêmes composants, même chimie rythmant leurs tubes digestifs, ils se retrouvent pif à pif, de repas en repas, unis.

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    Jeunesse Défais tes doigts nouant tes mains. Défais ton air un peu chagrin. Défais ce front buté, têtu. Défais tes réflexions pointues. Vingt ans c’est bien dur à porter ! Défais, défais. Sois la rosée. Sois gai matin au ciel de mai ! Défais… Te torturant d’ombres subtiles qu’en toi tu multiplies par mille, tu es ton centre, ton débat, mal dans ta peau. Ah ! pauvre état ! Vingt ans c’est bien dur à porter ! Défais, défais. Sois la rosée. Sois gai matin au ciel de mai ! Défais… Car au supplice en toi tout vire. Tu n’es zéro !… Ni point de mire !… Et pourtant, t’inventant ces pôles, tu te détestes en chaque rôle. Vingt ans c’est bien dur à porter ! Défais, défais. Sois la rosée. Sois gai matin au ciel de mai ! Défais… Qu’au fond de toi rien ne se brise ! Tes heures claires sont pages grises. Printemps morts ne renaissent pas. Défais ta barrière à la joie. Vingt ans c’est bien dur à porter… Défais… Défais… Sois la rosée…

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    J’ai attrapé un chant d’oiseau J’ai attrapé un chant d’oiseau Et je l’ai mis dans ma guitare. Il en sort un refrain de paix Qui fait trêve de mes regrets. J’ai rapporté des verts coteaux Un peu de leurs parfums sauvages. J’ai rapporté couleurs de mai Et les ai mises en un bouquet. J’ai emporté dans mes voyages Et ta présence et ton visage. Et c’est comme un cadeau des cieux Car étant seul je suis à deux.

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    J’ai connu tant de ciels J’ai connu tant de ciels Et de terres de hasard Pour gens de toutes parts Venus on ne sait d’où Et ne t’ai point trouvée J’ai suivi les chemins Des chiens et des gamins Sortis de nulle part Et qui vont n’importe où Et ne t’ai point trouvée Et j’ai chanté le vin Les chagrins les refrains Qui sont nés autre part Et qu’on entend partout Et ne t’ai point trouvée J’ai connu tant de filles Les douces et les aigries Les rondes les aplaties Les vives et les bornées Et ne t’ai point trouvée Et j’ai bu le nectar Et j’ai usé l’espoir Des partout des nulle part Qui se moquent de vous Et ne t’ai point trouvée

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    La fenêtre Alors le thé a refroidi. Elle attendait à sa fenêtre. Viendra-t-il encore aujourd’hui ? La chambre de vide s’est remplie. Alors les heures se sont enfuies. Elle ne bougeait de sa fenêtre. Il ne viendra plus aujourd’hui. La chambre de noir s’est remplie. Alors les jours se sont enfuis. Elle ne quittait la fenêtre. S’il venait pourtant aujourd’hui ? Tous les lendemains sont promis… Alors les mois se sont enfuis. Elle restait là… À la fenêtre. Demain sera comme aujourd’hui… La chambre de froid s’est remplie. Alors les ans se sont enfuis. Elle attendait. À sa fenêtre.

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    La lettre Et mon temps devient fête Et j’attends… et je guette… Et entre deux facteurs Je ronronne en mon coeur Ecris-moi… ou je crève… Et mon temps devient lent Chaque jour est un an… Et entre deux questions Je m’instille un poison Ecris-moi. Ou je crève… Et mon temps devient laid Triste, lourd et inquiet… Et en dedans de moi Je gueule à pleine voix Ecris-moi ! ou je crève ! Et mon temps devient gris Et je m’y perds d’ennui… Et entre deux sanglots Je supplie sans un mot Ecris-moi…! ou je crève Et mon temps devient fiel S’y meurtrit mon appel Et d’espoir en dépit Bouche cousue je dis Ecris-moi… (ou je crève…) Et mon temps devient sec Je ne suis qu’ongles, bec… Et mon temps devient fou Comme un rêve debout… Et mon temps devient… rien Et mon temps devient leurre… Et entre deux facteurs… Ecris-moi ou je crève… Ecris-moi ou je crève… Ecris-moi ou je crève…!

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    La vache dans tous ses états Un jour ou l’autre qui n’a dit, pris de colère ou de dépit ou pour toute raison qui fâche : « la sale vache ! » ou « peau de vache ! » ou « vieille vache ! » ou « grosse vache ! ». Et tant et plus, tutti quanti. Des attributs à l’infini… Or, un matin, v’là que surgit « la vache folle ». Bel inédit ! Sitôt les continents s’affolent et dans le monde il n’est qu’un cri : « La vache folle ! » Avouons-le discrètement : Même assortis d’un tremblement, que joliment ces mots s’accolent ! « La vache folle ! ». Pourrait-il en être autrement ? De folie tout boeuf est exempt. Taureau châtré ? mâle pourtant ! Ainsi jamais n’entendrez dire : « Rôti de vache ». Ça fait trop rire ! Quel menu pourrait le souffrir ? Le « boeuf bourguignon », c’est certain, ne peut se mettre au féminin… Dès lors que la fierté virile est bien ancrée dans nos assiettes, la vache, ici, n’est point en fête… Mais tant de « vaches », en nous, défilent…

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    La vedette Admirez la vedette ! Sous les feux de la rampe, avec maîtrise elle campe le personnage. C’est fête ! Oui, c’est fête de l’entendre, et c’est plaisir des yeux. Et l’on peut bien comprendre qu’elle ait tant d’amoureux. Amoureux de sa voix. ravis de sa présence, hommes et femmes à la fois éprouvent la même transe. Mais plaignez la vedette car au coeur de la fête elle tremble et elle craint de n’être un jour… plus rien ! A ces idées, qu’elle chasse, tout son être frémit et, mauvaise, elle se dit : Je n’donnerai pas ma place ! Je n’donnerai pas ma place ! Je m’y accrocherai. Si mon talent s’efface, en place je resterai ! Pour l’heure, faiseurs d’affaires et poètes, et pauvres hères se disputent son talent. C’est très réconfortant. Derrière son visage d’ange, elle rumine comme sans fin et entre-temps se venge car dur fut son chemin. Chère sera ma rançon. Je n’oublie pas, oh non, qu’on me fit paillasson de tant de mecs, de cons ! Qu’on me fit quémander et mordre la poussière et qu’on me fit suer lorsqu’il ne fallait guère ! Eux viendront quémander dans les couloirs d’artistes. Attendre, les ferai, de longues heures tristes. Les mauvais et les bons mettrai dans le même sac et ferai un micmac de leurs propositions. (Car dur fut mon chemin…) Faites place ! Qu’on se range ! Et qu’on ne me dérange ! Revenez voir demain ? Admirez la vedette ! Sous les feux de la rampe…

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    Le berger Qui me dit que tu n’es loup qui se fait berger et se veut d’icelui l’allure et le portrait ? Qui me dira le temps que tu passes à l’étang, te mirant, composant trait pour trait ton reflet ? Qui me dit que ta voix parlant si bien au coeur n’est point fruit de labeur et oeuvre de ton choix ? Qui me dit que ton ciel n’est point là pour dicter le seul ton sur lequel ton troupeau doit bêler ? Qui me dit que ton verbe, envoûtement de mots, n’offrira point sur l’herbe tes moutons aux corbeaux ?… Qui me dit que tu n’es loup qui se fait berger et se veut d’icelui l’allure et le portrait ?

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    Le bonheur Dans le château de mon enfance Fait de nuages et d’espérance Dans ce taudis où je suis né Où j’ai eu faim sans murmurer Où s’engouffraient les vents mauvais Et s’étirait l’aube glacée Où les jours étaient des années Je possédais sans le savoir Encore l’immense don de croire Que le bonheur est quelque part Dans la chambre de ma jeunesse Remplie d’amour et de promesses De mes idées de mes projets De mes vieux disques ébréchés Et de poèmes inachevés Et de mes phrases grandiloquentes Et de mon génie en attente Dans le printemps de mon ardeur Je chérissais au fond du cœur L’espoir d’un immense bonheur Dans ma maison d’homme de bien Dans l’acajou et le satin Qu’on peut caresser de la main Et se dire tout cela est mien Dans mes trésors accumulés Dans ma fonction parachevée Dans mes revenus bien placés Et dans le temps qui s’est enfui Je cherche encore jusqu’aujourd’hui Un bonheur qui s’est rétréci Dans la maison de ma vieillesse Dans ma demeure aux nombreuses pièces Seul un petit coin me suffit Alors errant dans mes lambris Je voudrais jeter aux cochons Les perles de ma distinction Les fers forgés les bois taillés Les peintures sur toile étalées Et faire fleurir encore une fois Ce bonheur qui n’est plus déjà Qu’un blanc fossile comme moi.

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    Le défilé Ils vont et viennent à n’en finir. Le revoilà le défilé de souvenirs, bons et mauvais, ou mornes ou tristes, ou qui font rire. On est seul avec son passé. Tous ces souvenirs sont en fête. Ils tiennent le haut du pavé. Et toujours prêts à grimacer, ils font de vous ce que vous êtes. On est seul avec son passé. Il en est qu’on enfouirait dans la pénombre des années. Il en est qu’on ne sortirait que pour leur faire un pied de nez. On est seul avec son passé. Il en est qui se chanteraient. Ils sont écrins pleins de lumière. Ils sont bouées, ils sont repères. Qu’il est doux de s’y accrocher ! On est seul avec son passé.

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    Le jeu Seize sont blancs. Seize sont noirs. Alignement d’un face-à-face. Selon son rang, chacun se place. En symétrie, de part en part. Les plus petits sur le devant. Seize sont noirs. Seize sont blancs. Huit fois huit cases. Un jeu démarre. Joutes, et coups bas, et corps à corps, et durs combats. Ultime effort pour asséner à ceux d’en face : « Échec et mat ! le roi est mort ! » Complimenté est le gagnant. Mais la revanche est dans le sang. Déjà tout se remet en place. Et du combat ne reste trace. Tout aussitôt le jeu reprend. Seize sont noirs. Seize sont blancs… N’ayant soixante-quatre cases ni trente-deux participants, mais autres nombres et autres temps, la vie, pourtant, a mêmes bases.

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    Le peintre du dimanche Sur le motif, un jour sur sept il va. Le chevalet et la palette aux bras. Un jour sur sept, six jours véniels s’estompent. Du quotidien, les rituels se rompent. Heureux, le peintre du dimanche ! Par tous ses pores, l’instant béni il gobe. Et d’un segment de paradis s’enrobe. Sans souci de postérité il crée. En grands élans d’inspiration il pond. Heureux, le peintre du dimanche ! Sur le motif, six jours sur sept ne va. Besoin d’écouler ses oeuvrettes il n’a. Tourments des artistes à plein temps ne sait. Et de ses dons, aucun bilan ne fait. Heureux, le peintre du dimanche !

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    Le succès J’cours après le succès avec mes p’tits papiers. On m’claque les portes au nez. Faut s’y habituer… Je n’cesse de cavaler avec mes grands pannards. Ça viendra tôt ou tard. Faut se le répéter… J’cours avec mes chansons que personne n’a chantées, qu’on ne chantera pas et c’est tant pis pour moi… Et je garde l’illusion d’un p’tit talent caché qu’on me découvrira quand je n’serai plus là… Quelqu’un de bien coté a dit que ça lui plaît et toute la société en choeur l’a répété… On me voit d’un oeil neuf. C’est plus parfait que l’oeuf ce succès qui me vient quand j’m’y attends le moins… Me tombe une avalanche de fleurs et de louanges qu’en habits du dimanche je ne refuse point… Simple étant de manières, à l’aise dans les hautes sphères, je me laisse approcher. Modeste resterai… Car je suis à la Une. On récite mes pensées. Et chacun et chacune s’arrache mes papiers… Au milieu du festin s’en viennent des coquins qui ont l’esprit chagrin et veulent faire les malins… Ce sont méchants hiboux et autres loups-garous jurant de me détruire alors que l’on m’admire… Ils disent à tout-venant que des gens bien en vue m’auraient traité de cul. Je répète comme j’entends… On me voit d’un oeil neuf, une espèce d’oeil-de-boeuf On m’fait une drôle de trogne. Et dedans moi… ça cogne… C’est à recommencer. Les moutons sont au pré qui ne peuvent décider si j’suis bon ou mauvais… Alors qui le dira ? Moi-même ne le sais pas… J’cours après le succès… Et faut s’habituer…

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    Les courtisans Ça se faufile à pas glissants, Les courtisans. Ça vous parle si humblement. Ça s’interpose à tout moment. À tout moment, les courtisans, Ça se faufile à pas glissants. Ça sourit d’un air compassé, Les courtisans. Tête penchée, le cou rentré Et la bouche en cul-de-poulet. Cul-de-poulet, les courtisans. Ça rit d’un ton acidulé. Ils ont la face du moment, Les courtisans. Quand face est noire, pile sera blanc Ou le contraire, commodément. Commodément, les courtisans, Ils ont la face du moment. C’est si pur et c’est si décent, Les courtisans. C’est bien parfois un peu changeant. Côté jardin, ça fait manant. Ça fait manant, les courtisans. Mais côté cour, c’est l’adjudant. Car ça sait aussi péter sec, Les courtisans. Ça change de manières en cinq sec. De cette façon, y’a pas d’échec. Y’a pas d’échec, les courtisans. Car ça sait aussi péter sec. Ça se faufile à pas glissants…

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    Les guérisons parfois Elan qui s’anémie et en catimini usure d’un ressort… L’enthousiasme est mort… En moi soudain le drame… Car quand s’éteint la flamme et que sombre un trésor et s’achève la fête et qu’ainsi place nette… dedans le coeur et l’âme les guérisons parfois, les guérisons sont tristes… Le sable coule entre mes doigts. Pourquoi cette heure qui persiste ? Est mort l’enthousiasme. S’étire un dernier spasme. Tout désarroi en cage. Inchangée mon image. Trépas d’un feu sacré (Il fut chapitre, pages) Et cendres dispersées… Je demeure… temps défait… Mais sans air de douleur, en mon âme, en mon coeur, les guérisons parfois, les guérisons sont tristes… Le sable coule entre mes doigts. Pourquoi cette heure qui persiste ?

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    Les ménagères Au début de leur destin c’était pourtant des filles bien. Elles sont entrées en fonction comme on entre en religion. Les ménagères. Autour d’elles elles font briller le parquet le bois le verre et secouent leur derrière en mouvements bien cadencés. Les ménagères. Mais dans le lit conjugal elles sont catins c’est normal. Leur programme est bien fourni pour le jour et pour la nuit. Les ménagères. Leurs proportions corporelles s’avachissent avec les ans. Et de leurs pauvres cervelles on sourit depuis longtemps. Les ménagères. De la carne qu’elles cuisinent elles ont bientôt pris la mine. De la poussière qui les ceint elles ont déjà pris le teint. Les ménagères. Rêvassant dans leurs torchons elles voyagent à leur façon et se disent qu’avec le temps tout ira plus facilement. Les ménagères. Les v’là au bout du rouleau. Elles sont usées jusqu’aux os. Point d’statue pour les héros. Et pour leurs droits c’est zéro. Les ménagères. Et c’est là leur Univers. Mais il y a une récompense : Grand cordon d’la Serpillière et un coup d’pied où je pense. Les ménagères. Au début de leur destin c’était pourtant des filles bien…

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    Les ronds-de-cuir Les ronds de jambe des ronds-de-cuir, C’est pour les galons. Les poignées de mains, les sourires, C’est la promotion. Les flatteries faites sans rougir, C’est bénédiction. Existe-t-il rien d’aussi bon Qu’un chemin tracé au Cordon ! C’est cordeau qu’il fallait leur dire Et j’ai dit Cordon. Dans une vie sans coup férir, C’est décoration. Il est prédit leur avenir, Et du meilleur ton. Existe-t-il rien de plus beau Qu’un chemin tracé au cordeau ! D’un cordeau ils savent se munir Sans trop de chichis. Et ce courage fera pâlir Tous leurs ennemis. La dignité saura grandir Ce qui les unit. Ah, qu’il est beau ! ah, qu’il est bon Le chemin tracé au Cordon ! Ils tournent en rond, les ronds-de-cuir. Ils font des ron-ron. C’est pas méchant, ça n’veut rien dire. Ça fait les dos ronds. Ils portent les problèmes d’avenir Dans leurs réflexions. Et-ron-et-ron-et-ron-et-ron C’est le poids d’la méditation…

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    L’accolade Ne s’aimant pas, pourtant voyez : Par-devant toute l’assemblée attentive et si éduquée, l’accolade ils vont se donner, en chaleureux gestes de bras, en face-à-face de coeurs glacés, en relents de hargnes rentrées. Applaudissez !

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    Esther Granek

    @estherGranek

    L’emballage-cadeau Ne m’fais pas l’emballage-cadeau toi qui arrondis tes manières, m’ouvrant, me fermant les portières et roucoulant, faisant le beau… Au fond de toi, l’avoueras-tu ? galant, tu n’en veux qu’à mon cul. Et tes façons, que seraient-elles si je n’étais ni jeune ni belle ? Ne m’faites pas l’emballage-cadeau, vous qui savez la force des mots et usez d’une dialectique prête à de souples gymnastiques. Ces mots, ils furent symboles d’idées. Et pour elles, que n’a-t-on lutté ! Pouah ! il n’en reste que surfaces. Vous mîtes choses affreuses à la place ! Ne m’faites pas l’emballage-cadeau… Voyez, je saute du coq à l’âne, mais mêmes façons partout je glane. Arrêtons-nous. Suffit ! Rideau ! (ne m’faites-pas l’emballage-cadeau…) Et malgré tout je me laisse prendre… Les gens ne sont-ils que des veaux ? Peut-on ou ne peut-on apprendre ?

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    Esther Granek

    @estherGranek

    L’humoriste Qui a pitié de l’humoriste ? Que voilà étrange question ! Y a-t-il place à compassion quand brille le jeu de l’artiste ? Pourtant, libre à nous d’aller voir de l’autre côté du miroir… Car, de son mal, lourd est le poids, pauvre humoriste que voilà ! Pour tout vous dire : Ne s’aimant pas, se dénigrant, (rien n’y résiste !) et se traitant de tous les noms, (impressionnante en est la liste !) et se noyant dans son mal-être, mentalement s’envoyant paître, se voyant en tout ridicule et s’inventant mille raisons pour se classer parmi les nuls, il va, traînant son désarroi, pauvre humoriste que voilà ! car, de son mal, lourd est le poids… Puis, transformant ce qui l’accable en propos débordants d’esprit, il apparaît inénarrable, soupape qui n’a pas de prix ! Dès lors, créateur de gaieté truquant pour mieux se supporter, il se raconte à sa façon, l’exutoire étant tout trouvé. Et, l’écoutant, nous nous tordons !… Qui a pitié de l’humoriste ? Que voilà étrange question ! Y a-t-il place à compassion quand brille le jeu de l’artiste ?

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    Esther Granek

    @estherGranek

    L’inspiration Qu’il lui soit fait ou non honneur, l’enthousiasme créateur se fera ange ou bien démon. En bref, telle est l’inspiration. Car, sachez-le, cette infidèle par trop souvent se fait la belle en vous laissant sur le pavé. Dès lors, qui voudrait la chanter ? L’inspiration est une garce qui vous embobine à son gré. On ne sait sur quel pied danser quand l’émotion tourne à la farce !… L’inspiration fait l’imbécile lorsqu’elle arrive à contretemps. L’effet en est fort déroutant et l’on vous juge un peu débile !… L’inspiration parfois sorcière, vous fait goûter au nirvana en vous piégeant dans l’éphémère. Vous en sortez en piètre état !… L’inspiration tant vous régale qu’il vous en vient bonheur extrême… quand la voilà prise de flemme… Et vous en perdez les pédales !… L’inspiration est une ordure qui, par ses accents les plus purs vous soufflera maintes bêtises… Déjà vos ennemis s’en grisent !… L’inspiration souvent rigole et vous dit : « Ailleurs on m’attend », et puis aussitôt fout le camp. Et voilà qu’en vous tout s’affole !…

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