Mohammed Dib
@mohammedDib
Manger À table tout Ce qu'on mangeait, Il n'en voulait pas. Tout cela vivait. Détestait les gens. Le détestait, lui. Il n'en mangerait pas. Mange, dit la mère. Il dévora ses larmes.Mohammed Dib
Mohammed Dib (en arabe : محمّد ديب) né le 21 juillet 1920 à Tlemcen et mort le 2 mai 2003 à La Celle-Saint-Cloud, est un écrivain algérien d'expression française, auteur de romans, de nouvelles, de poésie, de théâtre et de contes pour enfants.
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@mohammedDib
Manger À table tout Ce qu'on mangeait, Il n'en voulait pas. Tout cela vivait. Détestait les gens. Le détestait, lui. Il n'en mangerait pas. Mange, dit la mère. Il dévora ses larmes.@mohammedDib
A un voyageur 1. lieu de mémoire entre les maisons du jour et les feux de dernière main ressac de splendeurs sur les collines dont la cendre colporte le souvenir la saison a flambé derrière toi le soleil s’écaille à te chercher c’est le temps opaque de la terre c’est le temps de la suie étalée un archipel noir et perdu de doutes se hâte de souffler la dernière lampe allumée qui délire dans les dunes du nord 2. pour vivre l’or de la fatigue peut-être l’arme candide muette plus loin l’entre-temps d’une neige annoncée à cris dévorants ce songe de vérité peut-être son aurore aux mains de louve tu vas avec d’autres gestes recevoir ton exil d’une blancheur habitée par quelques oiseaux@mohammedDib
Belle d'ailleurs Sur les quais d'un ancien fleuve envahi d'ennui, Dans un entassement de pierre et de silence (Fort, pesant très fort, l'heure est sans équivalence) Je poursuis celle qui s'enrobe dans la nuit. Je m'arrête parfois et l'aperçois au loin Qui m'attend sous l'éclat d'un globe nostalgique ; Follement captivés par le cercle magique Mes yeux ne la voient pas jouer aux quatre coins. Je la suis sans pouvoir rassasier ma détresse ; Nous sommes seuls, partant elle est seule maîtresse ; Sur une place encore elle apparaît couchée. Puis vite devant moi la voici qui repasse : Dans une Rolls l'emporte un funèbre cocher. Triste et gardée alors par des anges rapaces.@mohammedDib
La Mère C'était la mère là. Il n'y avait rien à dire. Mais la sœur où ? Il n'y avait rien à faire. Il n'y avait qu'une blessure Qui séparait l'air en deux. C'était chaud d'un côté. Pas de l'autre. La lampe Éclairait tout ça. De la neige tombait sur lui. Sur la mère, rien. Le garçon Lécha la neige sur ses lèvres.@mohammedDib
Le rire Ces murmures perdus. Cette lumière, cet or. De trop dans le vent. L'enfant dit : peut-être En sortirait-il un monstre. Mais pourquoi le dire ? Un monstre très beau. Peut-être serait-on heureux. Si beau, dit-il. Il y eut juste un rire. Mais si beau et ça une fois Et ne se reproduisit plus. Si on sait tout, dit-il Que resterait-il à savoir ? Il entendit pleurer.@mohammedDib
Le sourire Un dieu est mon frère. Dit l'enfant. Je m'assieds. Il me caresse les cheveux. Je me lève. Il n'y est plus. Où parti ? Sait-on, faire tout. Ce qu'un dieu peut faire. Des mots restent entre nous. Il reviendra. Je ne sais quand. Je le saurai quand il reviendra. Si l'air a un sourire muet, C'est lui. Et moi pas loin J'écoute avec mes yeux.